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Peut- on retrouver le temps perdu ?

Publié le 05/06/2009

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Peut- on retrouver le temps perdu ?

            Spinoza dans l’Ethique nous dit « omni determinatio est negatio «, tout choix est négation d’un autre choix. Ainsi, les éléments passent sans nécessairement que nous puissions saisir l’occasion opportune. Or le temps est un flux comme le montre la métaphore d’Héraclite voyant le temps comme un fleuve. Or force est de constater que nous « courons « après le temps. Nous n’avons de cesse d’essayer de rattraper le temps perdu peut-être moins poétiquement que Proust ne réussit à la faire lui-même. Le temps serait donc cet irréversible. Dès lors la question ne nous interroge pas tant si factuellement nous pourrions remonter le temps, question sur laquelle la science a pour l’instant tranchée, mais bien sur le « temps perdu «. Retrouver le temps perdu, ce n’est pas revenir en arrière, mais pouvoir ressaisir une occasion ratée, rattrapé ce qui est cause de regret. La question porte sur notre capacité à pourvoir faire fi de cette irréversibilité. Mais est-ce possible ? Est-ce souhaitable ? A force d’être attaché à son passé, c’est l’avenir qui est raté. Dès lors nous devrions faire face à un cercle vicieux. Nous serions toujours en retard sur le temps. Il faut donc s’interroger radicalement sur la valeur, le sens et le fondement d’une telle recherche, sans négliger non plus le rapport à la mémoire.

            Si le temps est bien cet irréversible (1ère partie), vivre le temps présent ou dépasser le passé est nécessaire à la vie (2nd partie), l’homme étant libre de se réinventer (3ème partie).

 

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« a) La perception du temps perdu comme devant être retrouvé peut venir dans un société fondée sur laconsommation qui développerait, oserait-on dire, pleinement ce que la psychanalyse appelle « thanatos » c'est-à-dire un instinct de destruction dont on pourrait voir une excellente critique et mise en perspective dans 1984 de Georges Orwell .

Plus simplement, comme le remarque Baudrillard dans la Société de consommation , nous vivons dans un monde où règne « l'impossibilité de perdre son temps ».

Cela signifie que même dans les loisirs qui sontpourtant l'apanage d'une conception du temps non-contraint, le temps est limité et contrôlé, c'est-à-dire que letemps est lui-même soumis à un impératif de production et de productivité.

Dès lors il est contraint.

Il s'agit mêmedans ses loisirs de rentabiliser le plus son temps hors travail.

Prendre son temps est alors impossible, le perdre nonplus, nous serions alors toujours à la recherche du temps perdu.

C'est pourquoi l'analogie de la société et d'uneruche est si féconde.

Le temps est comptabilisé, rentabilisé et contrôlé : il faut remplir le temps, ne laisser aucuntemps mort ; peut-être justement pour fuir le repos qui serait synonyme de mort.

Le temps perdu est à la fois unecritique de nos modes de vie et son explication.b) Se réapproprier le temps c'est se conforme à cet impératif que développe Sénèque dans De la brièveté de la vie : « Saisis-toi de toutes tes heures ».

C'est-à-dire qu'il reprend à notre compte ce sentiment de vivre, donc passer de l'inexistence à l'existence en cessant de consommer le temps.

C'est donc profiter de ses efforts, de sesdécouvertes ; autrement dit vivre heureux.

Et c'est là selon Sénèque le secret d'une longue vie dans la mesure oùpar cette réappropriation du temps qui est le signe de la sagesse nous fournit l'occasion de nous retrouver nousmême, donc de mettre fin à cette aliénation du temps et par le temps.

Il s'agit là d'une nécessité puisque « il n'y apeut-être rien d'autre que le temps qui soit vraiment à nous ».

Il faut donc prendre son temps et ne plus le subir ; leperdre devient impossible.c) Or s'il faut dépasser cette recherche du temps passé et perdu c'est que l'oubli n'est pas comme le dit Nietzsche , dans la Généalogie de la morale une simple force d'inertie, mais représente l'accomplissement d'une fonction vitale. De temps en temps, il faut fermer les portes et les fenêtres de la conscience, il faut refouler les contenus mnésiquesqui m'empêchent de jouir du présent.

Sans cette table rase de l'oubli, je demeure prisonnier de représentationspassées qui entravent ma jouissance du moment.

Celui qui n'oublie jamais est ligoté par son passé, voué par celamême à l'impuissance existentielle.

Tout demeure en lui et tout l'affecte.

Tous les évènements laissent des tracesdans la conscience meurtrie.

L'oubli est donc une condition de la bonne santé mentale, du bonheur et de la vie :« Nul bonheur, nulle sérénité, nulle espérance, nulle fierté, nulle jouissance de l'instant présent ne pourraient existersans la faculté d'oubli.

L'homme chez qui cet appareil d'amortissement est endommagé… n'arrive plus à « en finir »de rien ».

Transition : Ainsi il ne faut pas rester attaché à son passé au risque sinon de rater son bonheur et son existence.

Vouloirretrouver le temps perdu c'est garder les regrets du passé avec soi : être hanté pas le passé.

Or l'homme estjustement cet être qui a la capacité de se développer, de se déployer au cœur d'un projet.

Il est lui-mêmeprojection et n'est retenu pas aucune nécessité au passé.

Il peut se réinventer sans cesse.

Il est libre.

III – Son histoire comme choix a) En effet, pour Sartre dans Situations I , le moment essentiel du temps est le présent, il insiste longuement, dans toute son œuvre, sur le « pro-jet », l'avenir, et les possibles : « Tachez de saisir votre conscience et sondez-la,vous verrez qu'elle est creuse, vous n'y trouverez que l'avenir.

Je ne parle même pas de vos projets, de vosattentes ; mais le geste même que vous attrapez au passage n'a de sens pour vous que si vous en projetezl'achèvement hors de lui, hors de vous, dans le pas-encore ».

En ce sens, même le passé que je chercherait àretrouver comme un temps perdu n'a de sens qu'à l'aune d'une nouvelle action.

Le passé doit prendre sens à traversl'avenir et constitue en cela notre présent.b) C'est pourquoi Sartre dans Etre et le Néant voit le passé comme le fruit de la liberté humaine.

Le temps perdu s'il veut être retrouvé doit prendre sens et avoir une valeur en vu de l'avenir et non valoir simplement comme regret ouremord.

Le temps perdu est un temps révolu.

Sa recherche fait de lui un temps perdu par le passé mais retrouvédans l'avenir, le présent assurant la jonction entre les deux : « C'est le futur qui décide si le passé est vivant oumort.

Le passé, en effet, est originellement projet, comme le surgissement actuel de mon être.

Et, dans la mesuremême où il est projet, il est anticipation ; son sens lui vient de l'avenir qu'il préesquisse.

Lorsque le passé glisse toutentier au passé, sa valeur absolue dépend de la confirmation ou de l'infirmation des anticipations qu'il était.

Maisc'est précisément de ma liberté actuelle qu'il dépend de confirmer le sens de ces anticipations en les reprenant àson compte, c'est-à-dire en anticipant, à leur suite, l'avenir qu'elles anticipaient ou de les infirmer en anticipantsimplement un autre avenir.

[...] Ainsi l'ordre de mes choix d'avenir va déterminer un ordre de mon passé et cetordre n'aura rien de chronologique.

Il y aura d'abord le passé toujours vivant et toujours confirmé : mon engagementd'amour, tels contrats d'affaires, telle image de moi-même à quoi je suis fidèle.

Puis le passé ambigu qui a cessé deme plaire et que je retiens par un biais : par exemple, ce costume que je porte - et que j'achetai à une certaineépoque où j'avais le goût d'être à la mode - me déplait souverainement à présent et, de ce fait, le passé où je l'ai «choisi » est véritablement mort.

Mais d'autre part mon projet actuel d'économie est tel que je dois continuer àporter ce costume plutôt que d'en acquérir un autre.

Dès lors il appartient à un passé mort et vivant à la fois ».

Letemps est perdu et retrouvé.c) Or si cette retrouvaille du passé sous une forme actualisée est possible, c'est bien parce que l'homme estessentiellement liberté.

Il est le seul à pouvoir se déterminer par lui-même.

Rien ne peut lui faire obstacle, sa libertéest absolue, c'est pourquoi il peut traverser le temps.

C'est ainsi que l'on peut comprendre l'existentialisme quedéveloppe Sartre dans l' Existentialisme est-il un humanisme ? : « L'existentialisme athée, que je représente, est plus cohérent.

Il déclare que si Dieu n'existe pas, il y a au moins un être chez qui l'existence précède l'essence, un. »

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