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Peut-on séparer penser et parler ?

Publié le 27/02/2008

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Peut-on séparer penser et parler ?

« une pensée sans parole ni aptitude au langage ? II.

Une dépendance mutuelle 1.

La dimension intellectuelle de la parole La parole est une forme physique du langage.

Mais ce dernier présuppose nécessairement une faculté intellectuellequi donne à la pensée et à la parole un rapport étroit d'interdépendance.

Tous les noms communs du vocabulairedésignent des genres, des idées abstraites par le simple fait que ce sont des concepts.Or cette abstraction ne peut être opérée par la perception sensorielle, ni même par l'imagination, comme leremarque Rousseau.

On imagine toujours un objet ou une personne en particulier, par contre on conçoit la notiongénérale d'être humain ou d'objet.

C'est donc l'entendement qui officie.

Et il ne peut le faire que par la dispositiondes mots.

Eux seuls correspondent à la dimension purement intellectuelle des éléments produits par l'esprit.

« Il fautdonc parler pour avoir des idées générales », conclut Rousseau.

Et il faut donc parler pour penser, ou penser pourparler.La conclusion est la même si l'on examine la conscience : avoir conscience de quelque chose suppose qu'on puissel'identifier et le distinguer de ce qui n'est pas lui.

Les mots permettent cette précision.Sans les mots pour le dire, le contenu des idées est confus, on n'en possède pas une pensée véritable, juste unvague sentiment ou une intuition diffuse.

Hegel voit ainsi dans l'absence de mot, l'absence de pensée claire et dignede ce nom, c'est-à-dire consciente d'elle-même et identifiée précisément.Cela est également vrai pour la prise de conscience de la pensée d'autrui. 2.

La pensée d'autrui La parole prend place dans un processus de dialogue.

À de rares exceptions près, on s'adresse toujours à quelqu'unlorsque l'on parle.

Or la dépendance entre langage et pensée se voit dans le processus de compréhension de lapensée d'autrui.

Comment en effet accéder à cette dernière, indépendamment des propos qui la matérialisent ?Merleau-Ponty développe cette analyse.

Il n'est pas possible de saisir la pensée de quelqu'un, autrement que par etdans les mots qu'il emploie.

Ces mots sont certes connus, ils sont dans le domaine public, sinon le passage del'esprit du locuteur à un autre serait impossible, mais l'originalité propre de son idée, sa façon particulière de penséene peuvent pas être saisies tant que l'on a pas lu ou entendu tout ce qu'il a dit, tous les termes choisis, toutes lesimages utilisées, les niveaux de langue, tout ce qui fait que ce discours ne ressemble pas à un autre.C'est bien pour cela que les expressions toutes faites, les proverbes ne renvoient pas à une pensée personnelle.

Ilsne sont pas innervés de l'intérieur d'une pensée qu'ils contribueraient à réaliser.

Ils sont morts et vides par eux-mêmes, à moins d'être utilisés à propos et pour signifier quelque chose d'original dans un contexte donné.C'est pour cela aussi que l'on se remémore une pensée par les mots dans lesquels on l'a entendue, car ce sont deuxfaces inséparables.

Les linguistes ont bien montré que le rapport entre signifié et signifiant dans un mot estcontingent ou arbitraire.

Mais ce qui est nécessaire, c'est que tout signifié ait un signifiant et réciproquement.

Lapensée ne se situe pas « derrière » le langage, elle est en lui.

On ne peut donc les séparer.

Mais qu'en est-il dudomaine particulier de la parole ? 3.

La parole physique de la pensée Le fait que la parole engage le corps tout entier, et souvent même un rapport quasi physique avec autrui, n'estpeut-être pas contingent pour la pensée.

Merleau-Ponty se sert de leur lien étroit pour attester que la pensée n'estpas un processus uniquement spirituel ni totalement désincarné.

De la même façon que l'on ne peut pas, parexemple, saisir ce qu'est la Neuvième Symphonie ou telle sonate de Beethoven, indépendamment des notes, durythme, dans lesquels elle se manifeste, de la même façon l'expression choisie par le locuteur est ce qui constituepour nous le sens de sa pensée : on comprend celle-ci par celle-là.

Mais de cette sonate, il y a aussi desinterprétations différentes selon les orchestres, les musiciens.

Des sensibilités différentes lui donnent une dimension,une façon de la vivre et de l'entendre différentes.De même à nouveau pour le locuteur : le ton, les gestes, la posture de son corps quand il parle font partie de sondiscours.

Sa personnalité tout entière s'y exprime.

Il n'est donc pas qu'une simple pensée s'exprimant, mais unindividu et un style d'être singulier présentant à tous cette singularité.

Or la pensée est dépendante de la parolejusque dans cette strate profonde.

Elle n'est pas que conceptuelle, elle est également existentielle, au sens où ellese constitue au sein d'un monde déterminé, dans une manière d'être en rapport avec des gens, des choses et descorps, qui constitue le propre de chaque individu.

Elle n'est pas dissociable du projet ou style de vie que suppose lapersonne et c'est sa liaison étroite avec la parole qui nous le révèle.Néanmoins, il reste possible que parmi ces styles de vie, la parole soit justement utilisée à des fins qui obligent à ladistinguer de la pensée, s'il y a tentative de tromperie ou mensonge.

On ne peut donc abandonner l'idée de séparerces deux éléments, pour des raisons plus éthiques ou morales. III.

Une séparation parole/pensée artificielle et provisoire 1.

Les acquis de la dépendance. »

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