Devoir de Philosophie

Peut-on tout démontrer ?

Publié le 02/02/2004

Extrait du document

Cette double difficulté tient avant tout aux limites de la nature humaine, à l'impuissance naturelle de l'homme. Les exigences de la démonstration traduisent un décalage entre ce que l'homme veut (tout démontrer) et ce que l'homme peut. Ce débordement de son vouloir au-delà des limites strictes de son pouvoir est ce qui pour Pascal caractérise le mieux la condition humaine. La raison est naturellement portée à transgresser ses limites. L'intuition Il reste cependant possible de démontrer correctement une idée, en commençant justement par reconnaître cette limite. Étrangement, la démonstration parfaite est celle qui ne cherche pas à tout définir, ni à tout démontrer. Or, certains principes sont vrais sans que l'on puisse les démontrer et ce serait une erreur de raisonnement que de chercher à le faire. Nous savons que le tout est plus grand que la partie, ou que toute chose est égale à elle-même, sans que nous ressentions le besoin de le démontrer. Ce qui nous assure de la vérité de ces principes, c'est leur clarté. Ils sont immédiatement clairs, c'est-à-dire évidents.

Démontrer, cela revient à établir une proposition, une thèse en s'appuyant sur des preuves ou/et sur une argumentation appropriée. Démontrer, c'est donc s'assurer une certitude et ne rien accepter sans preuve apparaît alors comme une attitude rationnelle, un principe de prudence. Il y a des croyances qui sont indémontrables et à jamais prouvables, comme l'affirmation de l'existence de Dieu ou de l'âme.

« complète et satisfaisante sous cette forme.

Dès lors chercher à tout démontrer est une tâche impossible, même siau XVIIème siècle on a pu penser y parvenir.Pour mettre un terme à cette régression, nous pouvons nous arrêter à une idée que nous accepterons comme vraie,sans pourtant l'avoir démontrée.

Mais alors, comment pouvons-nous être assurés que cette idée est bien vraie ? Sinous savons qu'elle est vraie, sans qu'elle ait été démontrée, c'est qu'il existe une voie autre que la démonstrationpour accéder à la vérité.

Une telle voie existe-t-elle ? Ou bien, devons-nous admettre que toute notre science nerepose que sur des hypothèses ? La raison doit permettre à l'homme de connaître l'univers entier sur unmode démonstratif. Il convient de définir l'opération de la démonstration.

Celle-ci consiste à tirernécessairement, c'est-à-dire selon une règle, une proposition d'une autreproposition connue comme vraie, qu'elle soit ou non démontrée.

«Ces longues chaînes de raison, si simples et faciles, dont les géomètres ontcoutume de se servir pour parvenir à leurs plus difficiles démonstrations,m'avaient donné occasion de m'imaginer que toutes les choses qui peuventtomber sous la connaissance des hommes s'entresuivent en même façon.»Descartes, Discours de la méthode (1637). • Descartes a eu, dès sa jeunesse, l'idée d'une mathesis universalis, ouscience universelle, qui étendrait le caractère démonstratif desmathématiques à l'ensemble des objets de connaissance possible (le mondephysique en particulier:• Ce discours démonstratif est défini par la cohérence de ses raisonnements,et par l'évidence des principes sur lesquels il repose.

Ainsi, si l'on part d'unevérité absolument claire et distincte, et que l'on en déduit de manièrerationnelle les conséquences, on arrive forcément à d'autres vérités, et ainsi de suite.• Rien ne devait pour Descartes, échapper à ce modèle, c'est pourquoi, il propose aussi un traité Les Passions del'âme, dans lequel il traite de l'âme humaine en «physicien» et géomètre (deux termes presque synonymes pour lui). ll y a des limites au modèle géométrique. «D'où il paraît que les hommes sont dans une impuissance naturelle et immuable de traiter quelque science que cesoit dans un ordre absolument accompli.

Mais il ne s'ensuit pas de là qu'on doive abandonner toute sorte d'ordre.Car il y en a un et c'est celui de la géométrie...» Pascal, De l'esprit géométrique (1658). • Pascal fait remarquer que le modèle démonstratif de la géométrie nous amène dans un cercle vicieux: car ilsuppose que les termes que l'on utilise soient toujours définis de manière claire et distincte.

Or, pour définir unterme, il faut d'autres termes: on entre ainsi dans une régression à l'infini dont on ne peut sortir.

Il est donc vain decroire pouvoir tout démontrer.

Seule la géométrie échappe relativement à ce problème.

Non pas parce qu'elleparvient à tout démontrer, mais parce qu'elle «ne suppose que des choses claires et constantes par la lumièrenaturelle».

Mais elle est la seule dans son genre. L'essentiel, dans une démonstration, n'est pas l'évidence de son fondement mais sa cohérence formelle. «Démontrer n'est pas autre chose que résoudre les termes d'une proposition et substituer au terme défini sadéfinition ou une de ses parties pour dégager une sorte d'équation.» Leibniz, De la liberté (1707). • En définissant la démonstration comme une suite de substitutions, Leibniz met de côté la question du fondementde la démonstration.

Une démonstration n'est pas, pour lui, un discours bien fondé, c'est d'abord une suite depropositions non-contradictoires.

Le fait que les définitions puissent être approfondies à l'infini n'est donc plus unproblème pour le caractère démonstratif du discours.• À partir de là, «démontrer» une proposition ne signifie plus «prouver la vérité» de cette proposition, mais montrerqu'elle est cohérente par rapport aux hypothèses sur lesquels elle repose.

L'idée d'une démonstration qui produiraitune «vérité absolue» fait place à la construction d'un modèle «hypothético-déductif».

Celui-ci est un mode deraisonnement dans lequel on examine quelles sont les conséquences des hypothèses que l'on se donne.

Par-delà lesmathématiques, il peut s'appliquer à toutes sortes d'objets. Certaines vérités n'ont pas besoin d'être démontrées " En poussant les recherches de plus en plus, on arrive nécessairement à des mots primitifs qu'on ne peut plusdéfinir, et à des principes si clairs qu'on n'en trouve plus qui le soient davantage pour servir à leur preuve.

D'où ilparaît que les hommes sont dans une impuissance naturelle et immuable de traiter quelque science que ce soit dansun ordre parfaitement accompli.

". »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles