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Platon: De l'opinion vraie et du savoir

Publié le 28/09/2009

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SOCRATE - Qu'on ne puisse bien diriger ses affaires qu'à l'aide de la raison, voilà ce qu'il n'était peut-être pas correct d'admettre ? MENON - Qu'entends-tu par là ? SOCRATE - Voici. Je suppose qu'un homme, connaissant la route de Larisse ou de tout autre lieu, s'y rende et y conduise d'autres voyageurs, ne dirons-nous pas qu'il les a bien et correctement dirigés ? MENON - Sans doute. SOCRATE - Et si un autre, sans y être jamais allé et sans connaître la route, la trouve par une conjecture exacte, ne dirons-nous pas encore qu'il a guidé correctement ? MÉNON - Sans contredit. SOCRATE - Et tant que ses conjectures seront exactes sur ce que l'autre connaît, il sera un aussi bon guide, avec son opinion vraie dénuée de science, que l'autre avec sa science. MENON - Tout aussi bon. SOCRATE - Ainsi donc, l'opinion vraie n'est pas un moins bon guide que la science quant à la justesse de l'action, et c'est là ce que nous avions négligé dans notre examen des qualités de la vertu ; nous disions que seule la raison est capable de diriger l'action correctement; or l'opinion vraie possède le même privilège. MÉNON - C'est en effet vraisemblable. SOCRATE - L'opinion vraie n'est pas moins utile que la science. MENON - Avec cette différence, Socrate, que l'homme qui possède la science réussit toujours et que celui qui n'a qu'une opinion vraie tantôt réussit et tantôt échoue. PlatonLe Ménon est antérieur au Banquet (-385) et au Phédon. Mais il est postérieur au Protagoras. On y ressent une influence orphico-pythagoricienne qui permet de mettre le Ménon en rapport avec le Gorgias. Bien que le but ultime de dialogue soit la question de la réminiscence, il n’en demeure pas moins que l’ouvrage débute par la question de la vertu et le texte qui est nous est proposé traite plus particulièrement de la méthode avec la distinction principale entre la raison (ou science) et l’opinion vraie. Cette question n’est pas seulement d’ordre scientifique, mais prend sens aussi dans la politique et dans la conduite individuelle de ses affaires. Ainsi, la vertu, si elle est utile, doit être une forme de raison. La vertu est la raison, soit toute la raison, soit une partie de la raison (89a). L’extrait proposé semble s’organiser logiquement autour de deux moments : la remise en cause de la distinction pratique entre la raison et l’opinion vraie ( du début à « il sera un aussi bon guide, avec son opinion vraie dénuée de science, que l'autre avec sa science. MENON - Tout aussi bon ».) et sa conséquence qui contrairement à ce que l’on pourrait croire réaffirme et complète cette distinction mais non plus sur le mode de l’utilité et du pragmatisme mais du point de vue de la scientificité et de la sûreté de la connaissance (de « SOCRATE - Ainsi donc, l'opinion vraie n'est pas un moins bon guide » à la fin). C’est suivant ces deux moments que nous entendons rendre compte du texte.
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« correct d'admettre ? MENON - Qu'entends-tu par là ? ». b) On peut voir alors toute la stratégie de la discussion mise en place par Socrate.

L'étonnement fait partie de laphilosophie, de cette quête de sagesse en tant qu'elle permet de questionner et d'interroger les éléments que l'onprend pour acquis sans chercher plus avant.

En effet, la raison n'est pas la seule manière de conduire ses affairesmême si elle est la plus sûr.

Il est également possible de se diriger par conjonctures, c'est-à-dire par l'effet d'unheureux hasard ou plutôt d'une opinion vraie qui manque donc de connaissance et de fondement rationnel.

Lerésultat avec la raison et l'opinion vraie sera équivalent.

Pragmatiquement, on ne pourra faire la différence : « il seraun aussi bon guide, avec son opinion vraie dénuée de science, que l'autre avec sa science ».

Pourtant les deuxméthodes sont radicalement différentes.

Celui qui possède la science est sûr d'arriver à bonne destination ce quin'est pas le cas de celui qui n'a qu'une opinion vraie.

Cependant, si la distinction est essentiel pour Socrate c'estqu'il convient de ne pas juger de la même manière celui qui possède la science et celui qui n'en a que l'opinion etcela d'autant plus que la conduite ou le guidage est aussi celui de la cité.

En effet, on ne peut nier aussi la portéepolitique de ce passage puisqu'il s'agit de conduire un groupe d'hommes sur le bon chemin ; or la politique est l'artde bien conduire la cité, donc les hommes (cf.

Le Politique ). c) Ainsi, il s'agit de ne pas confondre l'homme qui possède la science et celui qui ne la possède pas.

Le résultat nenous permet pas de conclure par inférence ou induction qu'il possède la science.

Il n'est pas certain que l'hommen'ayant à sa disposition que des conjectures puisse retrouver le chemin une autre fois.

La distinction est doncabsolument nécessaire, ce que fera finalement Ménon à la fin du texte ce qui nous renseigne encore sur l'artoratoire de Socrate.

En effet, entre le début et la fin de ce passage argumentatif, Socrate, tel un accoucheurd'esprit (cf.

Théétète ) use de la maïeutique afin de permettre à l'âme de Ménon de se frayer un chemin jusqu'à la connaissance de la bonne distinction entre la science et l'opinion vraie ce qui reprend une distinction fondamentaledu Théétète . Transition : Ainsi malgré une différence intrinsèque entre la raison et l'opinion vraie, il n'en demeure pas moins que du point devue de la méthode ou du guidage de l'action, les résultats peuvent être identiques, mais ne ce n'est pas dire que lascience ou la raison sont l'équivalent de l'opinion vraie. II – Moindre valeur de l'opinion vraie a) Ainsi, le début du texte de cette seconde partie semble faire une équivalence entre la science relativement àl'action (sa bonne conduite) et l'opinion vraie : « Ainsi donc, l'opinion vraie n'est pas un moins bon guide que lascience quant à la justesse de l'action, et c'est là ce que nous avions négligé dans notre examen des qualités de lavertu ; nous disions que seule la raison est capable de diriger l'action correctement; or l'opinion vraie possède lemême privilège ».

Le terme d'action n'est pas à prendre ici au sens strict de l'agir, mais plutôt comme mouvement,que se soit un mouvement vers la connaissance, qui prendra le nom de science, ou le gouvernement des hommes :la conduite vers le souverain bien, qui sera l'art politique ; ou encore celui de diriger ses propres affaires : prudence,ou sagesse pratique.

Néanmoins une distinction essentielle subsiste.

La science est le nom et le principe d'unecompétence, d'une capacité à accomplir une certaine activité.

Elle est la saisie par l'âme de la réalité véritable,c'est-à-dire des intelligibles.

Elle est la seule connaissance vraie est stable.

Son exercice est l'acquisition du devenirphilosophe.

L'opinion vraie quant à elle, est un jugement que l'âme émet en s'appuyant sur le témoignage des sens.Or en tant qu'elle est tributaire des sens, l'opinion est nécessairement errante et ne peut en aucun cas avoir lavaleur de la science.

La référence aux vertus ici fait allusion à ce qui précède c'est-à-dire l'examen de la définitiondes vertus qui structurent l'ensemble du dialogue.

Or si la distinction apparaît entre raison et opinion vraie c'est quela vertu a été définie (cette définition sera réfutée par la suite), comme l'art de commander, donc de guider autrui. b) Toutefois, il est intéressant de voir dans la réponse de Ménon un certain détachement.

Il n'acquiesce pasdirectement à l'argument de Socrate, mais le juge « vraisemblable ».

La vraisemblance n'est pas ce qui est mais cequi pourrait être.

On peut penser alors que Ménon n'est pas tout à fait d'accord avec cette assertion ce que montrepar ailleurs la fin du texte.

Ainsi, Socrate insiste une nouvelle fois sur la valeur d'utilité de l'opinion vraie.

En effet,l'opinion vraie, contrairement à ce qu'une connaissance superficielle de Platon laisserait croire, n'est pas sans valeurpour Socrate, au contraire, elle a son domaine d'application spécifique en science mais aussi dans l'art politique.Ainsi en science, elle a pour but de nous fournir une connaissance vraisemblable sur les choses que nous nepouvons pas connaître de manière sûre et scientifique.

C'est pour cela que Platon fait appel au mythe comme c'est le cas dans le Timée .

L'essentiel est d'user de la bonne méthode, c'est-à-dire de faire correspondre la méthode de recherche avec son objet.

Dans le champ politique, il faut bien voir puisque l'opinion commande les conduites desindividus, le gouvernement de la cité doit s'efforcer d'inculquer aux citoyens par des discours persuasifs des opinionsvraies et droites.

Il ne faut donc pas rejet l'opinion mais bien voir qu'elle a sa sphère spécifique d'application.. »

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