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Pour penser librement devons nous rejeter ce que nous apprennent les autres ?

Publié le 27/02/2008

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Au premier abord, notre pensée semble pouvoir faire l'économie de celle des autres. Notre for intérieur ne semble pas avoir besoin du renfort d'autrui. Notre pensée est inviolable, inaliénable. Pourtant, à y regarder de près, on ne peut pas non plus négliger totalement autrui, son existence et sa pensée. Ne risque-t-on pas, sinon, de sombrer dans le solipsisme ou le scepticisme ? Ne pas se soucier de la pensée d'autrui n'est-ce pas courir le risque du relativisme ("A chacun sa vérité") ?

« « Par méthode, j'entends des règles certaines et faciles, grâce auxquelles tousceux qui les observent exactement ne supposeront jamais vrai ce qui est faux, etparviendront sans se fatiguer en efforts inutiles, mais en accroissantprogressivement leur science, à la connaissance vraie de tout ce qu'ils peuventatteindre.

» « Règles pour la direction de l'esprit » (IV). La méthode garantit donc : q La certitude (l'élimination de l'erreur) ; q La facilité et l'économie d'efforts ; q La fécondité et l'augmentation progressive des connaissances ; q La sagesse, en ce sens que l'homme qui s'y soumet atteindra la connaissance de tout ce qu'on peut humainement savoir. Resterait à dire pourquoi Descartes ressent le besoin de créer une méthode, applicable à tous les objets de connaissance, après vingt- trois siècle de science et de philosophie.

La première partie du « Discours » en fournit l'explication, qui se présente comme une biographie intellectuelle.

Descartes y expose ce qui l'a poussé à sortir des sentiers battus, c'est une véritable crise de l'éducation qui est le signe d'une crise de civilisation.

Bon élève dans un excellent collège, Descartes découvre avec consternation que tout ce qu'on lui propose, quelles que soient son utilité et sa richesse, n'est bâti « que sur du sable et de la boue ».

Le doute s'immisce dans son esprit : alors qu'il a été éduqué par les meilleurs maîtres, sa recherche d'une certitude échoue.

Il cherchait, et l'éducation lui promettait « la connaissance claire et assurée de tout ce qui est utile à la vie », mais il se trouve « embarrassé de tant de doutes et d'erreurs, qu'il me semblait n'avoir fait aucun profit, en tâchant de m'instruire, sinon que j'avais découvert de plus en plus mon ignorance ». L'échec de la tradition pousse donc Descartes à trouver par lui-même et une connaissance vraie, et la méthode qui y conduit.

Ce faisant, Descartes réduit à néant les autorités traditionnelles, ce système de pensée qu'on nomme la scolastique et qui est l'héritage d' Aristote repensé par le christianisme.

Le cartésianisme récuse donc une autorité fondée sur le respect de la tradition, pour y substituer les droitsde la raison.

En ce sens, Descartes est le père fondateur de la pensée moderne. B) Il est difficile de penser par soi-même (Kant) [1] "Les Lumières sont la sortie de l'homme de la minorité où il est par sa propre faute.

La minorité estl'incapacité de se servir de son entendement sans la direction d'autrui.

Cette minorité, nous la devons ànotre propre faute lorsqu'elle n'a pas pour cause un manque d'entendement, mais un manque dedécision et de courage pour se servir de son entendement sans la direction d'autrui.

Sapere aude! Aie lecourage de te servir de ton propre entendement ! Telle est donc la devise des Lumières." DÉFINITION DES LUMIÈRES Kant définit les " Lumières " comme un processus par lequel l'homme, progressivement, s'arrache de la "minorité ".

L'état de " minorité " est un état de dépendance, d'hétéronomie.

Dans un tel état l'homme n'obéit point à la loi qu'il s'est lui-même prescrite mais au contraire vit sous la tutelle d'autrui.

Altéritéaliénante empêchant l'individu de se servir de son propre entendement.

Autrement dit, le principed'action subjectif de l'individu n'est plus sa propriété, son oeuvre propre mais l'oeuvre d'un autre.

Quel'on songe ici aux implications politiques d'un tel renoncement à la pensée et à l'action.

Tous lesdespotismes n'ont-ils pas pour soubassement l'abdication des sujets soumis? Et à Kant d'imputer la"faute " (morale) et non l'erreur (épistémologique) que constitue l'état de minorité non point aux oppresseurs (de quelque nature fussent-ils) mais à ceux qui consentent à leur autorité, à ceux qui parlâcheté, par " manque de décision et de courage " laissent leur entendement sous la direction de maîtres, de tuteurs.

Ici, Kant rejoint Rousseau et sa scandaleuse affirmation au chapitre 2 du " Contrat social ": "Aristote avait raison, mais il prenait l'effet pour la cause.

Tout homme né dans l'esclavage naît pourl'esclavage, rien n'est plus certain.

Les esclaves perdent tout dans leurs fers, jusqu'au désir d'en sortir;ils aiment leur servitude comme les compagnons d'Ulysse aimaient leur abrutissement.

S'il y a donc desesclaves par nature, c'est parce qu'il y a eu des esclaves contre nature.

La force a fait les premiers esclaves, leur lâcheté les a perpétués. " Mais ne nous y trompons point, il ne s'agit , ni pour Rousseau, ni pour Kant, de légitimer le fait de l' " esclavage " ou de la " minorité ", mais, de reveiller les consciences de leur somnambulisme du renoncement, de leur léthargie de l'acceptation de l'inacceptable. On l'aura compris la maxime des Lumières est de susciter cette reprise en mains de soi par soi, et ce, en accomplissant cet acte decourage de penser par soi-même en toutes les circonstances de l'existence: " Sapere aude ! ", "Ose te servir de ton entendement ! ". En effet, qu'est-ce que l'entendement sinon cette faculté de connaissance, capable de juger le vrai du faux, le bien du mal et de sepositionner par rapport à eux.

L'entendement, capable d'activité, de délibération fonde au plus haut point notre humanité etindissociablement notre dignité: " Or je dis : l'homme, et en général tout être raisonnable, existe comme fin en soi, et non pas simplement comme moyen dont telle ou telle volonté puisse user à son gré ; dans toutes ces actions, aussi bien dans celles qui leconcernent lui-même que dans celles qui concernent d'autres êtres raisonnables, il doit toujours être considéré en même temps commeun fin.

Tous les objets des inclinations n'ont qu'une valeur conditionnelle ; car, si les inclinations et les besoins qui en dérivent n'existaientpas, leur objet serait sans valeur.

Mais les inclinations mêmes, comme sources du besoin, ont si peu une valeur absolue qui leur donne ledroit d'être désirées pour elles-mêmes, que, bien plutôt, en être pleinement affranchi doit être le souhait universel de tout êtreraisonnable.

Ainsi la valeur de tous les objets à acquérir par notre action est toujours conditionnelle.

Les êtres dont l'existence dépend, àvrai dire, non pas de notre volonté, mais de la nature, n'ont cependant, quand ce sont des êtres dépourvus de raison, qu'une valeurrelative, celle de moyens, et voilà pourquoi on les nomme des choses ; au contraire, les êtres raisonnables sont appelés des personnes,parce que leur nature les désigne déjà comme des fins en soi, c'est-à-dire comme quelque chose qui ne peut pas être employésimplement comme moyen, quelque chose qui par suite limite d'autant toute faculté d'agir comme bon nous semble (et qui est un objetde respect) ". (" Fondements de la métaphysique des moeurs "). En sommant l'homme de sortir des nimbes d'un sommeil que l'on pourrait qualifier de dogmatique, les " Lumières " affirme le primat de la détermination pratique sur le savoir théorique .

Passage de la contemplation à la responsabilisation. [Il.

Une pensée isolée n'est pas garante de vérité - Le danger du solipsisme et du relativisme] Si chacun refuse de partager une quelconque pensée avec autrui, si chacun préfère son indépendance à l'échange et à la recherchecollective de la vérité, tous ne courent-ils pas vers la tentation de l'arbitraire ? Il est souvent répandu que chacun pourrait détenir sa vérité: l'adage ne dit-il pas : « chacun sa vérité » ? Accepter une telle thèse, c'est reconnaître à chacun le droit de penser ce qu'il veut, sans sesoucier ni des autres ni de ce qu'ils pensent.

Ce serait donc reconnaître à un tyran le droit d'émettre l'idée selon laquelle il y aurait desraces inférieures qu'il faudrait éliminer au point de s'en débarrasser.

L'histoire nous montre qu'une telle indépendance rejointinstantanément le risque de l'intolérable et la tentation de la violence. « L'homme est la mesure de toute choses » formule qu' Anatole France interprétait ainsi : « L'homme ne connaîtra de l'univers que ce qui s'humanisera pour entrer en lui, il ne connaîtra jamais que l'humanité des choses. » Toute affirmation sur l'univers est relative à celui qui affirme.

Socrate résume la thèse de Protagoras : « N'arrive-t-il pas parfois qu'au souffle du même vent l'un de nous frissonne et non l'autre ? Or que dirons-nous alors de ce souffle de vent envisagé tout seul et par rapport à lui-même ? Qu'il est froid ou qu'il n'est pas. »

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