Pourquoi désire-t-on autrui ?
Publié le 27/02/2008
Extrait du document
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Dans cette lutte entre deux consciences, l'une deviendra la conscience maîtresse (celui qui n'a pas eu peur demourir, marquant ainsi et de façon radicale l'opposition du désir humain au besoin purement animal de conserver savie et l'autre la conscience servile (celui qui a eu peur de mourir).
Mais si l'esclave est celui qui sort vaincu de cettelutte, il est aussi celui qui tourne son désire vers le monde, et, par son travail le transforme et se l'approprie.
Lemaître est celui qui parvient à faire en sorte que l'autre le reconnaisse comme maître.
Le désir est un manque mais est aussi une production : production de soi même.
Désir mimétique Girard mobilise le concept de désir mimétique pour expliquer la réalité des relations humaines qui, par ce mécanisme,engendrent inévitablement la convergence des désirs, et la culture (interdits, rituels, sacrifices - le religieux)déterminant l'existence de toutes les communautés.
Le désir mimétique est défini comme une relation triangulaire àtout objet, c'est-à-dire nos désirs ne sont que des copies des désirs d'autrui, qui nous placent toujours en relationde concurrence avec lui.
Cela recouvre l'ensemble des relations humaines : que l'on prenne telle personne en modèleou en ennemi, la source de cette relation est toujours mimétique.
Imiter le désir, les intentions d'appropriationd'autrui, est une tendance humaine ancrée en chacun de nous, et que la culture tente toujours de court-circuiter.On peut désirer parce qu'un autre a désiré avant nous, ce qui signifie que pour désirer quelque chose, nous passonspar un médiateur.
Au plus celui-ci est proche de nous, au plus le risque de le voir s'emparer de l'objet avant nousest grand, et au plus le conflit sera intense et probable.Ce désir désir a pour conséquence de faire varier la valeur des objets désirés par les hommes.
En effet, ce que nousdésirons avant tout, ce n'est pas l'objet que l'autre désire aussi, c'est bien plutôt imiter ce désir et entrer enrelation potentiellement conflictuelle avec l'autre.
D'ailleurs la publicité, cet hymne à la possession d'objets, nousdonne d'abord à désirer, non pas un produit dans ce qu'il a d'objectif, mais des gens, des Autres qui désirent ceproduit ou qui semblent comblés par sa possession.Puis-je désirer de moi-même une chose pour elle-même, sans médiation ? A priori, cela semble difficile à imaginer.Nous sommes des êtres humains, c'est-à-dire des êtres éduqués, à qui l'on apprend des codes sociaux, culturels,qui donnent de la valeur aux choses, aux conduites, aux circonstances.
********** N'est-il pas alors celui qui impose à l'autre son désir ? La reconnaissance n'est-ce pas cet effort pour asservir ledésir de l'autre ? Encore plus que le désir de se faire reconnaitre par autrui, on veut le posséder.
********** Sartre à son tour pense donc le désir depuis la perspective de l'altérité endéfinissant le désir sexuel comme tentative pour soumettre l'autre à monpropre désir, à le réduire au statut d'objet.
Mais ceci est impossible puisquel'autre est sujet, conscience, liberté.
Le mouvement du désir devient doncl'effort désespéré pour réduire la distance pourtant insurmontable de lasubjectivité et de l'objectivité, pour que la liberté de l'autre se réduise à soncorps.
C'est là le sens de la possession qui fait que l'amour est amour-échec.Le désir d'appropriation d'un objet ne peut être confondu avec l'amour.L'aimé, ne se transformera en amant que s'il projette d'être aimé, c'est-à-diresi ce qu'il veut conquérir n'est point un corps mais la subjectivité de l'autre entant que telle.
Le seul moyen, en effet, qu'il puisse concevoir pour réalisercette appropriation, c'est de se faire aimer.
D'où cette nouvelle contradictionet ce conflit: chacun des amants est entièrement captif de l'autre en tantqu'il veut se faire aimer par lui à l'exclusion de tout autre ; mais en mêmetemps, chacun exige de l'autre un amour qui ne se réduit nullement au «projet d'être-aimé ».
Ce qu'il exige, en effet, c'est que l'autre, sans chercheroriginellement à se faire aimer, ait une intuition à la fois contemplative etaffective de son aimé, comme la totalité d'être et la valeur suprême.
Lesrelations avec autrui se présentent donc comme essentiellementconflictuelles.
Soit autrui est l'objet, et moi le sujet; soit il est le sujet et moil'objet.
À la dépossession de ma liberté par le regard d'autrui, la riposte estsimple: je vais retourner mon regard contre lui, et réduire sa liberté au rang d'objet.
Cette tentative s'illustre par exemple dans le désir sexuel: j'essaie dans l'amour physique de posséder autrui,en possédant son corps.
Il s'agit de faire qu'autrui ne soit plus qu'un corps désirant, que sa conscience libredescende dans son corps, s'y englue en quelque sorte.
Devant l'échec d'une parfaite possession, le désir peuttourner au sadisme, qui est la passion comme nous le dit Sartre, qui vise non plus à engluer la conscience d'autruidans la chair, « en engluant Autrui dans sa chair par la violence et par la douleur” mais à la maîtriserfroidement en la contraignant, par la souffrance, à se soumettre.
Le sadique manie le corps de l'autre.
Mais lesadique comprend son échec quand sa victime le regarde.
Il découvre une vérité à laquelle il ne s'attendait pas, eneffet, il éprouve le contraire de ce qu'il croyait trouver.
Le sadique constate l'aliénation absolue de son être dans laliberté de l'autre Donc la condition à laquelle l'autre peut être objet de désir est sa liberté.
La raison en est simple :le désir d'autrui n'a de valeur que dans la mesure où il manifeste ma propre valeur.
Or le désir d'autrui ne manifeste.
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