Pourquoi se donne-t-on des chefs ?
Publié le 18/06/2012
Extrait du document
«Il ne serait pas raisonnable de croire que les peuples se sont d'abord jetés. entre les bras d'un maître absolu sans conditions et sans retour, et que le premier moyen de pourvoir à la sûreté commune qu'aient imaginé des hommes fiers et indomptés a été de se précipiter dans l'esclavage. En effet, pourquoi se sont-ils donné des supérieurs, si ce n'est pour les défendre contre l'oppression et protéger leurs biens, leurs libertés et leurs vies, qui sont, pour ainsi dire, les éléments constitutifs de leur être? Or, dans les relations d'homme à homme, le pis qui puisse arriver à l'un étant de se voir à la discrétion de l'autre, n'eût-il pas été contre le bon sens de commencer par se dépouiller entre les mains d'un chef des seules choses pour la conservation desquelles ils avaient besoin de son secours? Quel équivalent eût-il pu leur offrir pour la concession d'un si beau droit? Et s'il eût osé l'exiger sous le prétexte de les défendre, n'eût-il pas aussitôt reçu la réponse ... : "Que nous fera de plus l'ennemi?" Il est donc incontestable, et c'est la maxime fondamentale de tout droit politique, que les peuples se sont donné des chefs pour défendre leur liberté et non pour les asservir. Si nous avons un prince, disait Pline à Trajan (1), c'est afin qu'il nous préserve d'avoir un maître. «
Rousseau.
(1) Trajan : empereur romain.
questions:
1. Quelle est l'idée générale du texte? Précisez, en respectant la structure
logique de ce texte, les étapes de son argumentation.
2. Expliquez : «un maître absolu«; «se voir à la discrétion de l'autre«;
«quel équivalent pour la concession d'un si beau droit«; «la maxime fondamentale
de tout droit politique«.
3. Essai personnel : Comment comprenez-vous la différence que Pline établit
entre un «prince« et un «maître« et qu'est-ce qui permet, selon vous, à un
peuple d'éviter que le prince ne devienne maître?
«
• Par opposition à ces théories, il soutient sa propre
thèse : les hommes n'ont établi des pouvoirs que pour
garantir leur être, leur vie, leurs biens, leur liberté.
• Il justifie alors sa contestation initiale : il serait incom
préhensible et absurde que des hommes choisissent de
se soumettre à un pouvoir qui ne leur apporterait vraiment
SUJET 24
rien, qui ne garantirait pas davantage leur être que
l'absence de pouvoir.
• Enfin, Rousseau reformule sa thèse centrale et lui
reconnaît une valeur de «maxime fondamentale» du droit
politique (cf.
question 2).
Question 2 ______________ _
Expliquez:
«Un maitre absolu»
• Un chef, un être qui exerce un pouvoir sans limite, qui
impose sa volonté sans que rien ni personne ne la borne
ou ne la définisse.
«Se voir à la discrétion de l'autre»
• Dépendre entièrement de, être à la merci de la volonté
ou du caprice d'un maître.
«Quel équivalent pour la concession d'un si beau droit»
• Concéder un droit, c'est s'en défaire, abandonner à un
autre un pouvoir légitime que l'on détenait : ici, le pouvoir
d'user des «éléments constitutifs» de son être (ses biens,
sa liberté, sa vie).
Rousseau fait remarquer qu'un maître
qui recevrait un tel droit d'un homme ne pourrait rien
donner en échange qui puisse avoir une aussi grande
valeur.
L'échange serait donc nécessairement déséquili
bré et injuste.
((La maxime fondamentale de tout droit politique»
• C'est-à-dire la règle essentielle, qui doit être à la base
de toutes les règles ou lois qui organisent une Cité.
Il est
essentiel que ceux qui dirigent l'État protègent les libertés
des citoyens.
Question 3 ______________ _
Essai : Comment comprenez-vous la différence que
Pline établit entre un «prince» et un «maître» ?
• Un maitre, dans la citation de Pline telle que l'éclaire le
texte de Rousseau, est une personne qui exerce le pou
voir dans l'État en imposant sa volonté personnelle.
C'est
le despote qui impose sa loi, auquel tous sont soumis.
• Un prince.
Ici, le mot ne peut avoir le sens qu'on
lui donne aujourd'hui.
Rousseau (à travers la citation)
nomme prince celui qui exerce le pouvoir non en imposant
sa volonté, mais en faisant respecter la loi que le peuple
a choisie et qui est l'expression de sa volonté libre.
Le
prince est alors soumis à la loi commune et chargé de la
faire respecter (pouvoir exécutif).
'A Remarque Cette distinction est au cœur de la phi-
::.; ..
::.-.............
: ..
· .........
: losophie politique de Rousseau.
Pour
lui, un État idéal est celui dans lequel existence sociale
et liberté sont convenablement liées.
Les individus, en
effet, ne peuvent plus vivre indépendamment les uns des
autres, ils doivent s'associer pour se développer.
Mais
cette vie sociale ne doit pas anéantir notre liberté, car
perdre sa liberté serait perdre son humanité.
Le pro
blème politique est donc ainsi défini: ((Trouver une forme
d'association qui défende et protège de toute la force
commune la personne et les biens de chaque associé et
par laquelle chacun s'unissant à tous n'obéisse pourtant
qu'à lui-même et reste aussi libre qu'auparavant» (Contrat
social, 1, 6).
69.
»
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