Devoir de Philosophie

qu'appelle-t-on erreurs des sens

Publié le 25/06/2004

Extrait du document

Introduction. Nous avons en nos sens une confiance que rien, semble-t-il, ne saurait ébranler. « Je l'ai vu de mes yeux «, disons-nous ; « je l'ai entendu de mes oreilles « ; et nous prétendons bien signifier par là qu'il n'y a rien à objecter à notre affirmation. Il n'en est pas moins vrai qu'on parle des erreurs des sens et qu'il s'en produit en fait. Aussi le psychologue doit-il prendre conscience de ces anomalies de la connaissance sensible et tâcher d'en rendre compte. Pour cela, après avoir précisé en quoi consistent ces erreurs, nous les grouperons en plusieurs grandes catégories ; nous serons ainsi amenés à chercher s'il n'est pas possible de les expliquer toutes par un même mécanisme psychologique. I. — NATURE DES « ERREURS DES SENS « On l'a fait observer depuis longtemps : les erreurs qu'on appelle « erreurs des sens « sont, en fait, une erreur de l'esprit qui perçoit. Les sens eux-mêmes ne se trompent pas. A. Sans doute, il peut arriver qu'un organe sensoriel réagisse d'une façon anormale aux excitations reçues du dehors et, par suite, nous trompe : ainsi, dans certaines maladies, on voit tout en jaune. Mais, dans ce cas, on parlera de « pathologie de la sensibilité «, de maladie de l'organe sensoriel : on ne parlera pas d'erreur des sens. Dans ce qu'on appelle couramment erreur des sens, la réaction des organes aux excitations extérieures est normale les sens ne nous trompent pas en nous fournissant des données fausses.

« C.

Souvent, enfin, les erreurs des sens sont occasionnées par des causes d'ordre psychologique.Tout d'abord, l'intérêt de celui qui regarde se porte vers l'objet lui-même.

Les images intermédiaires par lesquelles ilparvient à la connaissance de l'objet le laissent indifférent.

Ainsi la représentation mentale de la réalité perçuesupplante dans l'esprit la sensation réelle par laquelle elle est perçue : de là certaines illusions classiques.

Voici, parexemple, un tunnel ou un passage souterrain dans lequel s'avancent deux personnages.

Si on nous demande quelleest, non pas la personne, mais l'image la plus grande, nous répondrons : l'image de la personne qui est en avant.

Or,c'est le contraire qui est vrai.

D'où vient cette illusion ? De ce que nous jugeons de l'image, non pas d'aprèsl'impression subjective qu'elle provoque en nous, mais d'après la connaissance que nous donne cette image de lapersonne qu'elle représente : étant donné son éloignement, le premier piéton doit être plus grand que le second ;c'est la même grandeur relative que nous attribuons indûment aux images.

On pourrait faire rentrer dans cettecatégorie les illusions du correcteur d'épreuves qui, ayant compris ce que l'auteur a voulu dire, ne voit pas ce qui aété écrit en fait.Cette substitution de ce qu'on se représente à ce qui est effectivement présenté est fréquemment causée parnotre état affectif.

Déjà, la simple attention expectante nous fait projeter, au-devant de la sensation attendue, dessouvenirs ou des pré-perceptions qui altèrent notablement la sensation réelle qui se produit.

Quand on attend unevoiture, à la campagne, il suffit d'un petit bruissement de feuilles pour se persuader qu'on entend le bruit d'unmoteur. III.

— LEUR CAUSE La cause de toutes les erreurs des sens est, en définitive, psychologique et on peut ramener leur mécanismepsychologique à cette formule : l'erreur sensorielle consiste à se souvenir au lieu de voir.Le monde physique ne nous trompe pas.

C'est nous qui, nous fondant sur des expériences passées et ne tenant pascompte des circonstances particulières de l'expérience actuelle, nous représentons les choses comme nous sommeshabitués à les voir.Nos organes peuvent occasionner des erreurs : ils ne sauraient être considérés comme leur cause.

En effet, ils nousindiquent seulement ce que sont les choses par rapport à nous, non ce qu'elles sont en soi.

Nous le savons bien et,par suite de l'habitude, nous faisons instantanément les corrections nécessaires.

Par exemple, lorsque nous tournonsla tête vers la droite, nous ne croyons pas que le paysage qui est devant nous glisse vers la gauche : nous voyonsle mouvement ennous, et non dans les objets.

Mais lorsque nous imprimons à notre oeil un mouvement inhabituel et anormal, commecelui qu'on provoque en pressant le globe oculaire, les muscles moteurs de la tête et du globe oculaire restantinactifs, nous continuons à percevoir comme si l'oeil était immobile et nous voyons le paysage passer sur le côté.Une expérience répétée nous amènerait, grâce au souvenir, à corriger cette erreur et à situer le mouvement dansnotre oeil, et non dans le paysage. Conclusion. — Les erreurs des sens sont donc la contrepartie des grands avantages que procure une longue expérience et une abondante provision d'habitudes et de souvenirs.L'habitude, jouant automatiquement, peut ne pas s'adapter exactement à une situation nouvelle ; mais que nousserions misérables s'il fallait, pour chaque cas nouveau, réfléchir, calculer, ne travailler que sur mesure ! Le souvenir,appelé par le jeu d'associations le plus souvent illogiques, peut se présenter à contretemps, mais que nous serionslents s'il fallait tout apprendre à chaque instant et tout examiner !D'ailleurs, l'habitude corrige peu à peu les erreurs qu'elles occasionnent : les illusions habituelles, parcequ'habituelles, ne nous trompent plus ; le souvenir d'une erreur due au souvenir rend prudent et critique.

Ainsi, peuà peu, l'exercice de la perception réduit les erreurs de perception qu'on appelle vulgairement erreurs des sens.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles