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Que veut-on dire exactement d'une intelligence quand on la déclare « pénétrante » ?

Publié le 10/10/2009

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CONSEILS PRELIMINAIRES    1. Ce sujet demande une réflexion personnelle sur une expression du langage courant qui désigne un type particulier d'intelligence ; partir donc d'un exemple concret et y revenir sans cesse.  2. L'adjectif «pénétrante« signifie «entrer dans«. Une intelligence pénétrante ne se borne pas à l'aspect superficiel des choses; et en même temps elle sait démêler ce qui dans un problème constitue véritablement la donnée essentielle en écartant tout ce qui est inutile.  3. Il importera de ne pas appeler intelligence pénétrante la seule intelligence abstraite ou conceptuelle ; d'autres types d'intelligences*.- par exemple l'intelligence pratique ou l'intelligence symbolique, méritent ce qualificatif.  Il conviendra à partir de l'exemple choisi de dégager les caractéristiques générales de la compréhension.    PLAN    Préambule. — Mot employé par le sens commun tantôt pour caractériser l'intelligence, tantôt un type particulier d'intelligence : exemple d'intelligence pénétrante,  1re partie. — La pénétration comme abstraction :  a) écarter l'inutile ;  b) attention accrue sur les éléments essentiels ;  c) idée de l'ensemble.  2e partie. — La pénétration comme invention :  a) comprendre, c'est restructurer ;  b) exemples.  3e partie. — La pénétration et l'action :  a) limites de l'intelligence pénétrante ;  b) l'intelligence active.

« Dans une autre nouvelle de Poe, le « double assassinat dans la rue Morgue », Dupin met une petite annonce dans lejournal pour aviser qu'il a retrouvé un orang-outang de Bornéo, qu'il n'a pourtant jamais vu, parce que sa réflexion luia appris que seul un animal de cette espèce a pu perpétrer l'horrible crime que la police parisienne essayait en vaind'élucider en l'attribuant à un homme., La petite annonce constitue la ligne auxiliaire, la preuve par neuf que leraisonnement était bon.

Aussi bien le matelot, propriétaire de l'animal, vient le réclamer.

L'intelligence de Dupin nes'est pas bornée à pénétrer, à poser de façon nouvelle un problème insoluble, elle a aussi provoqué, créé de toutespièces la situation qui va confirmer ou non l'hypothèse.

On songe à ces expériences que Claude Bernard appelait les« expériences pour voir ». L'intelligence pénétrante, à partir de la description que nous venons d'en donner, ressemble beaucoup à uneintelligence qui ne serait que conceptuelle et réflexive.

Pour rester dans le cadre du roman policier, on songe à cetype de détective inventé par les émules plus ou moins commercialisés de Poe : par exemple ce détective hollandaisqui passe son temps à fumer et à boire de la bière dans une chambre et qui « pénètre » à distance les plustroublants mystères.En fait, il ne faut pas réserver « la pénétration » à une intelligence de ce genre, qui s'écarte de l'expérience ou quila traite de haut.

La véritable intelligence est action; elle ne saurait être élucidation pure et simple de problèmesplus ou moins artificiels et qui semblent inventés pour déconcerter.Le langage courant, la littérature et d'une façon générale les habitudes intellectuelles que nous devons à notremilieu social, nous ont habitués à appeler intelligent l'homme qui s'écarte du monde extérieur pour réfléchir, dont lapensée est séparée de l'action et de la technique.

Outre que l'investigation policière est malgré tout un sport assezlimité, il faut réserver le mot intelligence à l'activité concrète de l'homme qui se heurte au monde extérieur et quitente de le maîtriser.

Il y a donc différents types d'intelligence qui tous peuvent être « pénétrants », étant entenduque la pénétration signifiera autre chose ici et là.Le moindre travail concret suppose un grand nombre de « restructurations » complexes.

La plupart sont invisiblesparce qu'engagées dans le réel ou parce que devenues habituelles.

La pénétration dans ce cas consistera à vaincrel'habitude, à réinventer une solution plus adaptée et à dépasser la pratique dans le sens de la théorie.

L'artiste, lui,dispose d'un autre type d'intelligence qu'on appelle volontiers symbolique.

Il pense sur des cas concrets quideviennent, par la force de son talent, typiques et prennent une valeur générale.

La pénétration pour lui consisteraà aller jusqu'au fond du cas concret qu'il examine, à éclaircir entièrement ce cas et en même temps à en dégager laportée universelle.Enfin, dans l'intelligence de type conceptuel — ce que nous appelons à proprement parier intelligence — lapénétration sera à la fois le pouvoir de déduire, c'est-à-dire de passer du général au particulier — et d'induire, c'est-à-dire à partir du général de revenir au particulier.

Là encore la pratique ne sera jamais séparée de la théorie et l'onne pourra vraiment parler de pénétration que lorsque l'intelligence abstraite ne se borne pas à des résultatsthéoriques.Que manquait-il donc à Dupin pour avoir une Intelligence vraiment pénétrante ?Notons d'abord que dans la perspective de Poe et dans celle des romans policiers que nous lisons habituellement,Dupin est vraiment intelligent : il démêle, il éclaire, il crée des situations, il découvre.Mais l'on ne peut s'empêcher de remarquer que cette pénétration, pour extraordinaire qu'elle soit, ne tire pas tout leparti qu'elle pourrait tirer d'elle-même.

Elle s'épuise dans des cas particuliers et ne cherche jamais à les dépasser pardes considérations plus générales.

Pourquoi tue-t-on, comment ? On ne trouve dans Poe aucune réflexionsystématique sur le milieu social où tel ou tel crime se trouve perpétré.

Aucune notation qui nous oriente vers leslois dégagées ou du moins entrevues plus tard par la sociologie.

Sans doute est-ce beaucoup exiger d'un espritpénétrant, mais comment parler d'intelligence pénétrante lorsque celle-ci ne s'applique pas à une étude scientifiquede la condition humaine, alors qu'elle en a les moyens.. »

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