Quels sont les principaux caractères de la conscience du temps, et cherchez si elle peut revêtir des formes différentes ?

Aussi bien a-t-on pu soutenir que cette continuité, dont BERGSON fait le caractère essentiel de la durée, est beaucoup plus « une oeuvre « qu'une donnée immédiate. G. BACHELARD, s'inspirant des descriptions de G. ROUPNEL (cf. Textes, I, p. 135), a opposé ainsi à la conception bergsonienne celle d'une durée « lacuneuse « qui « a toujours besoin d'une altérité pour paraître continue « et qui est, en réalité, une dialectique de l'intervalle et de l'instant : « L'expérience immédiate du temps, ce n'est pas l'expérience si fugace, si difficile, si savante de la durée, mais bien l'expérience nonchalante de l'instant, saisi toujours comme immobile « (L'intuition de l'instant, p. 43). — La cons­cience du temps implique donc à la fois et indissolublement celle d'un mouve­ment, d'un progrès et celle d'une hétérogénéité et d'une discontinuité ¹.

B. — Le temps ainsi saisi par la conscience n'est pas, comme le temps conceptuel, un cadre abstrait. C'est, ainsi que le dit BERGSON, une durée concrète, réelle, qui ne fait qu'un avec notre vie psychique elle-même. C'est un temps vécu et dont l'expérience se confond avec l'expérience même de ces alternances d'arrêt et de devenir de la conscience.

C. — Enfin un des caractères essentiels de cette expérience immédiate du temps est qu'il présente des fluctuations, des rythmes différents selon l'état du sujet et ses rapports avec le monde extérieur, notamment : a) selon son état physique : dans un état de dépression ou de maladie, le temps paraît plus lent et plus long; — b) selon son âge : le vieillard trouve le temps plus court (Ibid., § 148 fin);— c) selon l'attitude et le contenu de la conscience : pour la conscience active, le temps, bien rempli, semble court; pour la cons­cience relâchée, le temps, presque vide, s'allonge démesurément, comme il arrive dans l'attente, dans l'ennui, etc.