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ROUSSEAU et l'inégalité entre les hommes

Publié le 28/04/2005

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rousseau
il est aisé de voir qu'entre les différences qui distinguent les hommes, plusieurs passent pour naturelles qui sont uniquement l'ouvrage de l'habitude et des divers genres de vie que les hommes adoptent dans la société. Ainsi un tempérament robuste ou délicat, la force ou la faiblesse qui en dépend, viennent souvent plus de la manière dure ou efféminée dont on a été élevé, que de la constitution primitive des corps. Il en est de même des forces de l'esprit, et non seulement l'éducation met de la différence entre les esprits cultivés et ceux qui ne le sont pas, mais elle augmente celle qui se trouve entre les premiers à proportion de la culture ; car qu'un géant et un nain marchent sur la même route, chaque pas qu'ils feront l'un et l'autre donnera un nouvel avantage au géant. Or, si l'on compare la diversité prodigieuse d'éducations et de genres de vie qui règnent dans les différents ordres de l'état civil avec la simplicité et l'uniformité de la vie animale et sauvage, où tous se nourrissent des mêmes aliments, vivent de la même manière et font exactement les mêmes choses, on comprendra combien la différence d'homme à homme doit être moindre dans l'état de nature que dans celui de société, et combien l'inégalité naturelle doit augmenter dans l'espèce humaine par l'inégalité d'institution. ROUSSEAU

DIRECTIONS DE RECHERCHE    • Quel est ici le but de Rousseau ?  — Se demander si les inégalités entre les hommes sont dues uniquement à « la nature « ou à « la culture «.  — Se demander si ses inégalités sont plus à mettre au compte de la culture que de la nature.  — Se demander si l'inégalité s'accroît ou se résorbe par la « culture «.  — Établir que l'inégalité était moindre à l'« état de nature « qu'elle n'est dans l'état de société.  • Que signifie ici « l'état civil « ?  • Quelles réflexions faites-vous à propos de l'argumentation de Rousseau ?  — Établit-il ce qu'il en était lors de l'état de nature à partir d'éléments empiriques datant de « ce temps-là « ?  — Que pensez-vous de ses comparaisons ? (On dit que comparaison n'est pas raison)  — Que pensez -vous de l'articulation entre ce qui est dit à la première phrase et ce qui est dit dans les deux phrases suivantes ? (remarquez notamment « uniquement « et « viennent souvent plus « alors que les deux phrases sont  reliées par « ainsi « ).  • Que pensez-vous de la thèse de Rousseau ?  • En quoi ce texte présente-t-il un intérêt philosophique ?

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« droits civils devait trouver sa justification dans l'inégalité que la nature avait instituée entre les hommes.

Dans ledialogue qu'il a intitulé Gorgias, Platon nous présente même le sophiste Calliclès soutenant, face à Socrate, la thèsesuivante : la véritable justiceest celle qui respecte les inégalités naturelles ; il est donc juste que les plus forts dominent les plus faibles etdeviennent les chefs dans une cité puisqu'ils sont, par nature, les plus forts.Rousseau s'oppose totalement à cette idée et inverse la perspective précédente : l'inégalité civile ne peut être,selon lui, légitimée par une prétendue inégalité naturelle puisque, dans l'état de nature, « l'uniformité de la vieanimale et sauvage, où tous se nourrissent des mêmes aliments, vivent de la même façon et font exactement lesmêmes choses », rend minimes les différences d'homme à homme.L'auteur déduit de cette constatation la loi selon laquelle l'inégalité naturelle augmente, dans l'espèce humaine, enproportion de l'inégalité d'institution, c'est-à-dire à mesure que les différences culturelles augmentent entre leshommes.

Ce que défend ce texte: Ce n'est donc pas la nature qui produit de l'inégalité, mais bien la culture.

En civilisant les hommes, la société créede l'inégalité et, souvent, des différences qui passent pour naturelles « sont uniquement l'ouvrage de l'habitude etdes divers genres de vie que les hommes adoptent dans la société ».Par cette affirmation, Rousseau accorde à l'éducation toute son importance, en montrant qu'elle n'influence pasuniquement l'épanouissement des esprits, mais aussi des corps.

Un corps robuste ou délicat l'est moins en raison desa constitution naturelle, donnée une fois pour toutes, qu'en fonction de la manière, dure ou délicate, selon laquelleil a été élevé.L'argumentation de Rousseau s'appuie ici sur le caractère le plus manifeste de la culture, à savoir l'extrême variétéde ses manifestations, des comportements et des manières de vivre que les différentes sociétés humaines nousdonnent à voir.Les inégalités qui en découlent se renforcent toujours davantage, au cours de l'existence, comme l'illustre l'image dugéant qui, à chaque pas, augmente l'écart qui le sépare du nain.

Cette image sert à nous faire comprendre quel'inégalité culturelle, qui prend sa source dans les différences d'éducation, non seulement ne peut jamais êtrecomblée, mais s'accroît même au fur et à mesure que les existences individuelles se déroulent.En inversant ainsi la perspective traditionnelle, à propos de l'origine de l'inégalité, ce texte engage par là même uneréflexion d'ordre politique.

Si les inégalités naturelles, certes inévitables, sont minimes, celles qu'institue une sociétépeuvent être supprimées, et avec elles les injustices qu'elles entraînent.Nul pouvoir et nul privilège social ne peuvent donc s'appuyer sur une soi-disant supériorité naturelle pour justifierleur exercice, et ils peuvent être contestés pour le motif qu'ils reposent en réalité sur l'arbitraire de la culture.

ROUSSEAU (Jean-Jacques). Né à Genève en 1712, mort à Ermenonville en 1778. Il n'est pas dans notre propos de résumer la vie de Rousseau, sou séjour aux Charmettes chez Mme de Warens, àMontmorency chez Mme d'Épinay, ses travaux de musique, sa persécution par les catholiques comme par lesprotestants, son voyage en Angleterre après sa fuite de Suisse ou l'hospitalité du marquis de Girardin à Ermenonville.Non plus que la mise à l'Assistance Publique des cinq enfants qu'il eut de Thérèse Levasseur, ou sa brouille avecGrimm et Diderot.

Jean-Jacques Rousseau fut seul, chassé de partout, et c'est en méditant sur son existencemalheureuse, qu'il a pu énoncer sa doctrine de philosophe.

Sa philosophie n'est pas un système, mais une vision dela condition humaine.

— Contrairement aux Encyclopédistes, l'homme, pour Rousseau, est naturellement bon etjuste.

Il fut heureux lorsqu'il vivait sans réfléchir, au milieu de la nature, uniquement préoccupé des soins matérielsde la vie quotidienne.

Puis, il a cherché à paraître, à dominer.

Il a inventé la propriété.

Sont venus l'inquiétuded'esprit, le goût du luxe, l'ambition, l'inégalité, les vices, la philosophie.

La société a corrompu l'homme, en l'élevant àla moralité.

La vie idéale n'est pas le retour à l'état de nature ; mais elle doit se rapprocher le plus possible de la vienaturelle.

C'est le coeur qui fournit à l'homme la preuve des vérités morales et religieuses, qui lui permet de goûteraux plaisirs de la générosité, de la bienfaisance, de l'amitié.

L'enfant, naturellement bon, doit être éduqué de façon«négative».

Il faut laisser libre cours à son propre développement.

Rousseau prône les vertus de l'intuition et del'émotion.

— Le fondement de toute société, c'est le contrat social, par lequel chaque contractant renonce à sapropre liberté au profit de la communauté, et se soumet à la volonté générale.

Rousseau pose ainsi le principe de lasouveraineté populaire.

Tant en littérature qu'en philosophie ou en politique (la Révolution française le revendiqua),l'influence de Rousseau fut considérable.

Il a véritablement transformé la sensibilité humaine.. »

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