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Sartre: un autre sens de l'humanisme

Publié le 23/03/2015

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Il y a un autre sens de l'humanisme, qui signifie au fond ceci : l'homme est constamment hors de lui-même, c'est en se projetant et en se perdant hors de lui qu'il fait exister l'homme et, d'autre part, c'est en poursuivant des buts transcendants qu'il peut exister ; l'homme étant ce dépassement et ne saisis­sant les objets que par rapport à ce dépassement, est au coeur, au centre de ce dépassement. Il n'y a pas d'autre univers qu'un univers humain, l'univers de la subjectivité humaine. Cette liai­son de la transcendance comme constitutive de l'homme — non pas au sens où Dieu est transcendant, mais au sens de dépassement —, et de la subjectivité, au sens où l'homme n'est pas enfermé en lui-même mais présent toujours dans un uni­vers humain, c'est ce que nous appelons l'humanisme existen­tialiste. Humanisme, parce que nous rappelons à l'homme qu'il n'y a pas d'autre législateur que lui-même, et que c'est dans le délaissement qu'il décidera de lui-même ; et parce que nous montrons que ça n'est pas en se retournant vers lui, mais tou­jours en cherchant hors de lui un but qui est telle libération, telle réalisation particulière, que l'homme se réalisera précisément comme humain.

L'existentialisme est un humanisme, © Éditions Gallimard, p. 76-77.

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« Textes commentés 59 Il y a un sens de l'humanisme qui est conciliable avec l'existentialisme 1 si l'on part de la définition de l'homme comme l'être qui « en se projetant et en se perdant hors de lui fait exister l'homme» (lignes 2-3).

Dans cette 1 définition, qui reprend la définition sartrienne du Pour-soi, l'homme n'est pas défini par ce qu'il est, c'est-à-dire par un ensemble de qualités fixes et immuables, mais par ce qu'il peut être : l'homme est un projet, qui n'est pas fermé sur soi, mais qui se dépasse « hors de soi », vers des possibles qui ne dépendent que de lui.

C'est ainsi qu'il peut exister, en ek-sistant, autrement dit en sortant de soi (en se dépassant) et en ne saisissant le monde que parce qu'il ne peut coïncider ni avec soi ni avec aucun objet du monde : c'est pourquoi le monde de l'homme est toujours un monde humain ; il n'est jamais saisi comme il est en soi, mais toujours en rapport avec les fins que l'homme se fixe, c'est-à-dire comme un monde d'usten­ siles utilisables par l'homme.

Ce que Sartre traduit en disant que l'univers est « l'univers de la subjectivité humaine.

» (ligne 6) Pour l'humanisme, au second sens du terme, l'homme est donc caractérisé non pas par un attribut qui viendrait le limiter, mais par la transcendance, c'est-à-dire la capacité à franchir les limites, à dépasser le donné vers le possible : il ne s'agit ainsi pas de la transcendance au sens de la transcendance divine, qui se situe au-delà de l'humain, mais de la transcendance proprement humaine qui fait que l'homme n'est pas «enfermé en lui-même» mais qu'il est-dans-le-monde et qu'il est pro-jet.

Cette définition de l'homme, comme on l'a déjà signalé, c'est précisé­ ment la définition que l'existentialisme donne de la réalité humaine : c'est la raison pour laquelle on peut parler légitimement d'« humanisme exis­ tentialiste».

L'existentialisme est un humanisme d'une part parce qu'il « n'y a d'autre législateur que [l'homme] lui-même » (ligne 10), bref parce qu'il n'y a pas pour lui de valeurs qui seraient supra-humaines, et d'autre part parce que c'est à l'homme de décider lui-même, étant donné qu'il est seul, dans cet état que Sartre a appelé le« délaissement» (cf.

p.

41-47).

Il ne fait donc confiance à aucun principe transcendant à l'homme pour le guider ou pour lui épargner l'angoisse du choix, mais c'est toujours à l'homme, concrètement (dans telle libération ou telle action), de s'huma­ niser.

L'humanité n'est pas une essence, elle est un avenir, et l'homme est l'avenir de l'homme.. »

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