Devoir de Philosophie

Sciences & Techniques: Contraception : la maîtrise de la fécondité

Publié le 22/02/2012

Extrait du document

1958 : le premier contraceptif oral, baptisé Enovid, est commercialisé. Conspuée par le corps médical, plébiscitée par les femmes, la "pilule" va bouleverser la société. Cette évolution des mentalités prépare à une autre révolution : la procréation médicalement assistée. Io Pedras, banlieue de San Juan, à Porto Rico, 1956. Dans le nouveau lotissement construit pour les familles les plus misérables s'entassent les anciens habitants d'un taudis nommé El Fangito, "le petit trou boueux". Notamment des femmes, jeunes et déjà plusieurs fois mères sans l'avoir voulu. Deux cent soixante-cinq d'entre elles seront les premières à échapper à la fatalité des maternités accablantes, les premières à accomplir le petit geste que plus de 110 millions de femmes effectuent désormais chaque jour dans le monde : avaler un peu d'eau et une pilule. Une pilule ? Non, "la" pilule, le contraceptif oral, jugé au départ indécent, coupable, inutile par le corps médical et les groupes pharmaceutiques, mais plébiscité par les femmes qui le trouvent, elles, salvateur, pratique, formidable. En 1965, cinq ans seulement après son homologation par la Food and Drug Administration, plus du quart des Américaines la prenaient !

« Novum. Des femmes libérées Selon Margaret Sanger et les autres femmes qui poursuivaient l'action du Planning familial, l'accès à une contraception efficace etsimple était indispensable à l'amélioration de la vie les femmes.

Libérées des grossesses répétées non désirées, elles pourraient jouerun rôle dans la société aux côtés des hommes.

Soulagées de la crainte de la grossesse, elles pourraient s'épanouir individuellementgrâce à une sexualité heureuse. Les lois des pays développés interdisaient contraception et avortement – et même l'information à leur sujet.

Cela n'empêchait pas denombreuses sociétés de prospérer en commercialisant des contraceptifs plus ou moins efficaces et plus ou moins dangereux pour lasanté : préservatifs lavables, obturateurs vaginaux, substances spermicides, dispositifs intra-utérins.

Les autres moyens de limiter lesnaissances – le coït interrompu, le retrait, la douche vaginale et l'abstinence – étaient fortement déconseillés par les médecins carjugés néfastes pour la santé.

En conséquence, le nombre d'avortements, de morts dues aux avortements, d'abandons de nourrissonset d'infanticides était très élevé. Mais, pour lever les réticences des politiques et des esprits religieux, il fallait des arguments d'un autre ordre.

Ce sont lespréoccupations de contrôle démographique qui vont donner de la "moralité" à la contraception .

Les conservateurs continuaient d'affirmer qu'une population très nombreuse est le signe de la prospérité d'une nation.

Mais, dans les pays développés au début dusiècle, puis dans le tiers monde autour des années 50, le spectacle de la surpopulation des grandes villes liée à une misère atrocedonnait plutôt raison aux théories néo-malthusiennes, qui présentent l'excès de population comme une entrave au développement.

Lediscours eugéniste était aussi en plein essor à cette époque, notamment aux Etats-Unis.

La légalisation de la contraception auraitdonc l'avantage de maintenir un équilibre social et mondial, et de réduire les dépenses induites par cette immense pauvreté. Le Dr Ogino ou la "roulette du Vatican" Les groupes pharmaceutiques furent convaincus par les énormes profits à réaliser.

Et les médecins, finalement, approuvèrent euxaussi la pilule .

La contraception , sous la forme d'un " médicament " qu'il leur suffisait de prescrire, devenait un acte médical, un acte "propre".

La naissance relevait dorénavant de leur autorité et de leur expertise. Le Vatican, qui prônait depuis 1929 la méthode "naturelle" du médecin japonais Kiusaku Ogino (dont l'efficacité douteuse lui valut lesurnom de "roulette du Vatican"), finit par condamner l'usage de la pilule en 1968 – à la grande consternation des catholiques, quil'utilisaient depuis des années. Cette intervention tardive ne sembla pas avoir beaucoup d'effets.

Le premier véritable frein à l'usage de lapilule fut, en 1962, la tragédie de la thalidomide, un médicament prescrit pour supprimer certains aspectsdésagréables de la grossesse, qui provoqua la naissance de nombreux enfants mal formés.

Cette nociviténon prévue des hormones synthétiques et les effets secondaires (à court et à long terme) de la piluleservirent d'arguments à ses détracteurs.

Et de moteur à la recherche contraceptive… Aucun autremédicament que la pilule n'a bénéficié d'un suivi si complet, d'études si poussées des répercussions surl'organisme, d'une aussi longue recherche du plus juste dosage.

En 1988, la contraception a disparu de la liste des trente-cinq thèmes de recherche prioritaires dans le monde. En Europe, l'ouverture des centres de planning familial précéda la dépénalisation de la contraception et de l'avortement.

En France, lepremier centre fut créé en 1961, alors que l'accès à la contraception ne fut légalisé qu'avec la loi Neuwirth, en 1967, et le recours àl'avortement, avec la loi Veil, en 1975. Des résistances tenaces Mais les résistances à ces aspects de la libération des femmes sont aujourd'hui encore tenaces.

De vives réactions d'hostilité ontainsi accueilli en 1982 la mise au point du RU 486, un composé hormonal qui empêche le développement d'un ovule fécondé, parEtienne-Emile Baulieu (lire plus loin notre entretien avec lui).

Pourtant, ce médicament permet des interruptions volontaires degrossesse moins traumatisantes pour les femmes et moins "encombrantes" pour les services hospitaliers. Parmi les nombreuses conséquences de la généralisation de l'usage de la pilule dans les paysoccidentaux, il en est d'incontestables.

Premièrement, la dissociation possible et institué de l'acte sexuelet de la reproduction ; deuxièmement, l'appropriation par les médecins de tout ce qui touche à lanaissance ; troisièmement, le changement des relations entre la femme, l'homme et l'enfant au sein de lafamille et de la société. Cette évolution des mentalités a facilité le développement et l'accueil favorable d'un autre aspect de la maîtrise des naissances : la procréation médicalement assistée.

Connue de longue date, l'insémination artificielle n'est pratiquée quedepuis le début des années 80.

Cette technique relativement simple a eu beaucoup moins d'impact que la fécondation in vitro.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles