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Sciences & Techniques: Jean Perrin et les atomes

Publié le 22/02/2012

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Parvenu, par des voies expérimentales différentes, à déterminer des valeurs du nombre d'Avogadro très proches les unes des autres, Jean Perrin ne doute pas que cette concordance ait une cause commune. En parlant de " réalité moléculaire ", il vient mettre un terme à un siècle de controverses. En 1913, presque exactement un siècle après qu'Avogadro ait formulé l'hypothèse qui porte son nom, le physicien français Jean Perrin publie un ouvrage au titre limpide : Les Atomes. Il y présente treize valeurs du nombre d'Avogadro (N), chacune obtenue de façon expérimentale, à partir d'un phénomène différent. Ces valeurs sont comprises entre 6.0 x 1023 et 7.5 x 1023. Pour neuf d'entre elles, la fourchette est encore plus serrée : entre 6.2 et 6.9 x 1023. Perrin ne doute pas que l'obtention, par des voies expérimentales différentes, de valeurs de N aussi proches les unes des autres puisse passer pour incroyable. Nul miracle là-dedans, prend-il soin de préciser. Ce résultat, écrit-il, confère " une probabilité à la réalité moléculaire qui frise la certitude... La théorie atomique a triomphé ". Triomphé de quoi? De décennies de polémiques.

« Ses recherches débutent en 1895, à l'École normale supérieure.

Elles portent d'abord sur le rayonnementcathodique, puis très vite, dès leur découverte fin 1895 par Röntgen, sur les rayons X.

A ses côtés, PaulLangevin, dont il va devenir l'ami inséparable.

En 1897, tandis que Langevin part pour un an à Cambridge,au Cavendish Laboratory, Perrin publie sa thèse et prend en charge un nouveau programmed'enseignement en chimie physique à la faculté des sciences de Paris. Cette même année, de l'autre côté de la Manche, J.

J.

Thomson, le patron de la recherche sur le rayonnement au Cavendish, terminetout juste la rédaction de l'article qui va le rendre célèbre.

Il y parle de la découverte, dans le rayonnement cathodique, d'un "corpuscule " chargé négativement, bientôt appelé électron.

Pour parvenir à démontrer que le rayonnement cathodique est chargénégativement, il a dû profondément remanier la méthode expérimentale exposée par Perrin en 1895.

son dispositif lui a permis decourber la trajectoire des rayons et de dissiper tous les doutes sur le fait que les charges négatives l'empruntaient. A l'École normale supérieure, Perrin et Langevin s'intéressaient aux phénomènes d'ionisation, que celle-ci soit associée à durayonnement - cathodique et X - ou qu'elle se produise dans les gaz, les solutions, ou à la surface des métaux.

Dans sa thèse, Perrinse montre à tout le moins prudent sur l'hypothèse moléculaire : l'ionisation, affirme-t-il, ne l'implique pas.

Elle ne fait qu'indiquer uneséparation des charges opposées.

Une idée cependant lui paraît " intéressante " : que les rayons X génèrent des ions en cassant lesmolécules, dont le comportement obéirait aux principes de la théorie cinétique des gaz. Tout en rédigeant ses nouveaux cours de chimie physique à la Sorbonne, Perrin tente de rapprocher l'"énergétique ", ainsi qu'il nomme les lois de la thermodynamique, et l'" atomistique ", les lois statistiques de la théorie cinétique des molécules.

Deux points l'intéressent particulièrement : les tailles et les vitessesde ces dernières.

A Vienne, un collègue de Boltzmann, Josef Loschmidt a évalué les diamètresmoléculaires entre 10-7 et 10-8 centimètre.

De son côté, John William Strutt, troisième Lord Rayleigh, aestimé l'épaisseur des films d'huile sur l'eau à 0.002 micron au maximum, soit entre deux et vingtmolécules.

A partir de 1903, cet ordre de grandeur n'est plus hors de portée de l'observation.

En inventant l'ultramicroscope, Henry F.W.

Siedentopf et Richard Zsigmondy viennent en effet de faire descendre le pouvoir de résolution dumicroscope de 0,25 micron à 0,005 micron, une dimension proche de celle des plus grosses molécules. Cette année 1903, Perrin se lance dans l'étude du mouvement des particules en suspension dans des solutions colloïdales.

Il analyse la pression qu'elles exercent sur une membrane poreuse, ainsi que leurénergie.

L'idée de se pencher sur les solutions colloïdales lui est venue de la lecture d'un article devulgarisation scientifique publié huit ans plus tôt, à Lyon, par le physicien L.

Georges Gouy.

Dans cetarticle consacré au mouvement brownien dans les colloïdes, l'auteur a soulevé un problème des pluspertinents : le fait que, si la théorie cinétique est fausse, le principe, énoncé par Carnot, de l'impossibilitédu mouvement perpétuel se trouve sérieusement pris en défaut.

La constante agitation des petites particules à la surface des solutions colloïdales va en effet à l'encontre de ce principe selon lequel tout mouvement doit tôt ou tards'arrêter. De fait, une fois éliminée toute source d'énergie externe, seule la théorie cinétique des molécules est capable d'expliquer lephénomène.

Selon cette dernière, le mouvement des grains colloïdaux, visibles au microscope, doit résulter de leurs collisions avecles particules invisibles du liquide dans lequel ils sont en suspension.

A température constante, ce mouvement, concluait l'auteur,reste inchangé. Ayant étudié les vitesses de grains jaune vif de gomme-gutte en suspension, Perrin aboutit à des estimations d'énergie cinétique centmille fois inférieures à celles prédites par la théorie.

Il comprend alors que les mouvements qu'il observe doivent être décrits non pasen termes de vitesse mais de déplacement. Ces derniers ne sont que la manifestation visible d'une multitude de collisions non observables et de changements de direction des mmicroscopiques.

Reste à faire le lien entre ces déplacements observables et le paramètre de vitesse tel qu'il apparaît dans l'équationfondamentale de la théorie cinétique : pV = 1/3nmv 2.

Une équation qui mène à l'équation plus générale PV = NRT (avec, dans les deux équations, P - ou p - la pression sur les parois d'un récipient, V le volume du récipient, n le nombre de particules, m la masse dechaque particule, v 2 le carré de sa vitesse moyenne, N le nombre d'Avogadro, R une constante , T la température). Entre 1908 et 1913, Perrin entreprend un programme de recher-ches expérimentales sur des suspensions colloïdales de différentsmatériaux : latex, mastic, résine.

A l'étude, l'ensemble des phénomènes associés au mouvement brownien. La première recherche porte sur la distribution verticale des particules colloïdales sous l'effet de la gravité .

S'appuyant sur les principes de la théorie cinétique des gaz, Perrin met en parallèle les particules présentes dans l' atmosphère et celles d'une émulsion colloïdale. Les premières se distribuent de telle sorte que la pression décroît avec l'altitude.

Si l'on trouve une loi de distribution semblable dansun système colloïdal, la théorie cinétique des molécules recevra un sérieux appui. L'observation d'une goutte d'émulsion au microscope lui permet de confirmer sa prédiction : le nombre moyen de particules diminue demoitié pour une hauteur de 0,1 mm.

Les mesures lui permettent aussi de calculer le nombre d'Avogadro, pour lequel il trouve unevaleur de l'ordre de 6.8 x 10 23.

Un résultat proche de celui obtenu par J.-D.

Van der Waals par une voie théorique : 6 x 10 23.. »

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