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Sciences & Techniques: Les atomes : changement d'échelle

Publié le 22/02/2012

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Expliquant les phénomènes macroscopiques par des lois mécaniques appliquées au domaine microscopique, Maxwell et Boltzmann rallient à l'hypothèse moléculaire nombre de physiciens. Leur mécanique statistique n'en triomphe pas pour autant immédiatement... 1906 Alors que la bataille pour la reconnaissance de l'atome connaît ses ultimes soubresauts, le physicien autrichien Ludwig Boltzmann met fin à ses jours. Les causes de son suicide n'ont jamais été élucidées. L'hostilité de certains de ses collègues, leur rejet de son oeuvre scientifique, y furent sans doute pour quelque chose. Par une " ironie tragique de l'histoire des sciences ", selon les mots de Stephen Brush, l'un des meilleurs spécialistes de l'histoire de la mécanique statistique, cette funeste fin s'est produite l'année même où Jean Perrin confirmait de façon éclatante la justesse des idées de Boltzmann : ses expériences sur le mouvement brownien apportaient en effet la première preuve empirique de l'existence des atomes. En s'intéressant aux mouvements incessants des petites particules qui composent les gaz, et tous les corps en général, Boltzmann, sa vie durant, s'était interrogé sur le hiatus qui sépare la perception de la matière et son approche théorique. Alors que la première la donne comme continue et homogène, la seconde la lui faisait apparaître, toujours avec plus de force, comme fondamentalement discontinue.

« fondamentales de la physique des gaz, qui est de la forme : PV = KT.

Cette équation d'état, établie sous cette forme au début dusiècle, lie, à la constante K près, les deux paramètres de pression (P) et de volume (V) d'un gaz enfermé dans une enceinte à sa température (T). Par le calcul, Maxwell aboutit en outre à un résultat qui, sur le moment, semblait étrange : alors qu'habituellement l'on considérait quela " friction interne " des gaz dépendait forcément de la quantité de matière par unité de volume, la théorie faisait apparaître que laviscosité d'un gaz était indépendante de sa densité.

Six ans plus tard, ses expériences viendront confirmer ce résultat. S'il s'intéresse aux propriétés statiques des gaz, c'est-à-dire aux rapports entre leur pression, leur densité et leur température,Maxwell cherche aussi à rendre compte des phénomènes de transport.

Ces phénomènes sont macroscopiques, et nos sens suffisentà nous les rendre accessibles : ainsi, lorsqu'on met en marche un radiateur dans une pièce froide, on peut sentir la chaleur sepropager progressivement à travers la pièce; ou bien, quand on ouvre un flacon de chlore, on peut mesurer le temps que met l' odeur pour atteindre le coin opposé.

Grâce à ses hypothèses sur le comportement des entités microscopiques composant les gaz, Maxwellparvint à donner les raisons pour lesquelles la chaleur, ou les odeurs, mettent un certain temps à se propager dans l'air (le milieu desexpériences évoquées ici). L'explication n'allait pas de soi.

L'hypothèse fondamentale de la théorie était en effet que les molécules des gaz devaient se déplacer àtrès grande vitesse dans des espaces vides, et n'être déviées de leur course rectiligne que par les collisions avec leurs semblables ouavec des objets macroscopiques.

Pourquoi, dans ces conditions, une odeur de chlore mettait-elle si longtemps à traverser une pièce?La réponse de Maxwell fut la suivante : chaque molécule de chlore subit un nombre considérable de collisions avec ses semblables,et surtout avec les molécules de l'air emplissant la pièce; aucune molécule ne voyage donc en ligne droite d'une bouteille de chlore aucoin opposé de la pièce : son trajet s'apparente à une ligne brisée extrêmement complexe, beaucoup plus longue à parcourir qu'uneligne droite. La propagation d'une odeur est un transport de matière : ce sont les molécules de chlore elles-mêmes qui entrent en interaction avecnos cellules olfactives.

La propagation de la chaleur, en revanche, est un transport d'énergie cinétique.

C'est parce que les moléculesd'air situées près d'un radiateur ont une plus grande vitesse que celles du reste de la pièce qu'il y fait plus chaud.

Et c'est parce queces molécules communiquent leur énergie cinétique à leurs voisines, lors d'innombrables collisions, que l'air de la pièce se réchauffeprogressivement.

C'est ainsi que Maxwell expliquait les phénomènes de transport.

Boltzmann allait pousser plus loin ces études. En se lançant dans l'aventure de la mécanique statistique, en 1866, il commença d'abord par généraliser les résultats de Maxwell.

Ildétermina, par exemple, la distribution des vitesses de particules de systèmes soumis à des forces extérieures, et réussit à mettre enéquations les phénomènes de transport d'un gaz dans ces mêmes conditions.

Mais son ambition, dès le début, le poussait plus loin.Il entendait comprendre non seulement les propriétés des gaz à l'équilibre, mais également lors du cheminement vers l'équilibre.

Ilnous arrive dans notre vie quotidienne de rencontrer un tel phénomène : en prenant notre température, par exemple, nous laissons lethermomètre au contact du corps jusqu'à l'établissement de l'équilibre thermique. En suivant la voie tracée par Maxwell, Boltzmann recherchait donc une explication mécanique aux lois rassemblées dans lathermodynamique.

Il en était persuadé, les phénomènes macroscopiques liés à la chaleur devaient pouvoir s'expliquer par des loismécaniques appliquées au domaine microscopique des molécules.

Incidemment, il s'opposait à Fourier pour qui la chaleur était parprincipe irréductible à quelque loi mécanique que ce soit.

Une opposition qui n'allait pas tarder à lui attirer les foudres de certainsphysiciens... En 1872, après des années d'intenses recherches, Boltzmann parvient à donner une descriptionmécanique du deuxième principe de la thermodynamique.

Selon ce principe, tout corps laissé à lui-mêmeévolue spontanément vers l'équilibre thermique.

En effectuant un traitement statistique des collisions entremolécules, Boltzmann explique que dans le cas d'un mélange constitué de deux gaz A et B detempératures différentes, non seulement les molécules des deux gaz se distribuent uniformément, mais latempérature du mélange elle-même atteint finalement une valeur stable et uniforme.

Cela signifie, àl'échelle microscopique, que toutes les molécules constitutives du mélange doivent au bout d'un certain temps avoir la même énergie cinétique moyenne.

Dès lors, si les molécules du gaz A étaient plus lourdes que celles du gaz B, ellesdevaient se déplacer moins vite. Dans le fil de ce qui précède, Boltzmann trouve ensuite un correspondant microscopique à l'une des deux grandeurs fondamentales dela thermodynamique : l'entropie.

Définie d'abord par Lord Kelvin puis par Clausius, en 1854, cette quantité est associée auxtransformations irréversibles susceptibles d'affecter un corps.

Elle ne peut que croître ou rester constante.

Elle croît quand le corpspasse d'un état hors d'équilibre à un état d'équilibre, et reste constante à l'équilibre. Pour l'étudier d'un point de vue microscopique, Boltzmann la fait correspondre au nombre de façons qu'a l'énergie totale du corps de sedistribuer parmi ses composants élémentaires.

Plus précisément, il identifie l'entropie S à la quantité klogW où W est le nombre totalde façons possibles de distribuer une quantité donnée d'énergie parmi les composants du corps.

Le calcul statistique, très compliqué,établit que W, un nombre fini, ne peut qu'augmenter quand le corps n'est pas à l'équilibre. Pour la très jeune mécanique statistique, cette réussite était spectaculaire.

Très vite, cependant, elle allait susciter des débatspassionnés.

Non sans raison.

On pouvait certes constater qu'un comportement typiquement macroscopique, le cheminement versl'équilibre, se trouvait expliqué par les lois de la mécanique appliquées à l'échelle microscopique.

Mais cette explication était-ellefondée? Elle revenait en effet à rendre compte de l'irréversibilité caractéristique du monde macroscopique par les lois réversibles de lamécanique newtonienne.

Où se trouvait l'artifice? Dans la considération de comportements moyens.

En retenant des quantitésmoyennées sur de très grands nombres , les outils théoriques de la mécanique statistique permettaient de traiter par le calcul le changement de comportement d'une échelle à l'autre.

Encore fallait-il le faire admettre, ce qui n'alla pas de soi.. »

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