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Sciences & Techniques: La moelle épinière

Publié le 22/02/2012

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Quand la moelle épinière est touchée, c'est la paralysie. Dans l'espoir de sortir un jour les gens de leur fauteuil roulant, les chirurgiens cherchent à rafistoler les fibres nerveuses qui refusent de repousser. Comment ? En greffant des neurones… Le point sur cette opération épineuse. Il y a peu d'avantages à naître grenouille. De nos jours, les marécages se font rares et les roues des voitures menaçantes. A première vue, nous n'avons rien à envier à cette vie précaire de vertébré primitif… sauf, peut-être, un aspect étonnant de leur fragile anatomie : la formidable capacité de régénération de leur système nerveux. Un oeil est crevé au cours d'une bagarre ? Il repousse. La colonne est brisée suite à une galipette mal maîtrisée ? Elle se reconstitue. Du jamais vu chez les mammifères, famille dont nous, modestes êtres humains, faisons partie. Cette aptitude de réparation spontanée, fréquente chez les amphibiens et les poissons, s'est hélas perdue dans les méandres de l'évolution…

« Celles-ci, appelées "oligodendrocytes", sont l'équivalent des cellules de Schwann du système nerveux périphérique.

Mais à l'inverse de ces dernières, quand les fibres nerveuses de la moelle sont tailladées, elles envoient des messages chimiques qui bloquent larepousse.

Même les neurones de grenouille, plutôt vivaces en général, sont stoppés net dans leur élan quand on les baigne dans cetteambiance moléculaire. A quoi sert donc cet interdit qui semble plutôt malvenu? Sans doute est-ce un garde-fou, pensent les neurologues.

Une fois élaborés àla naissance, les principaux branchements vitaux ne doivent plus bouger.

Au risque de voir l'activité nerveuse du cœur affectée à l'estomac, par exemple.

Aussi les oligodendrocytes, tels des gardiens de la paix, seraient chargés de maintenir l'ordre dans lesquartiers généraux de notre organisation nerveuse.

La dislocation accidentelle de la moelle n'est pas prévue au programme puisqu'elleest bien protégée dans son enveloppe vertébrale.

Le système nerveux périphérique, lui, est plus exposé et peut se permettre d'avoirdes mécanismes naturels de rafistolage. Rebrancher les neurones Pour réparer une moelle épinière bousillée, il faudrait donc commencer par supprimer tous les messagesinhibiteurs de la repousse axonale.

L'équipe de Martin Schwab, à Zurich, travaille dans ce sens et a déjàréussi, chez le rat, à trouver l'antidote.

Leur potion injectée dans la moelle débloque un peu la croissancedes neurones.

Mais seuls 10 % d'entre eux s'allongent, et jamais de plus de 20 mm.

Au final, le rat estloin de retrouver sa mobilité, et personne n'a encore pu observer même une légère amélioration de sonétat… Il faudrait pour cela que l'on puisse rebrancher précisément l'axone coupé avec les neurones reliésaux muscles (ou motoneurones) qui étaient avant l'accident sous son commandement.

Recollés au hasard, ils sont rarement fonctionnels. Une autre équipe, à Stockholm, a tenté récemment cette opération de pontage, toujours sur le rat.

Pourrétablir le contact entre les fibres descendantes cassées, c'est-à-dire celles qui partent du cerveau, etleurs motoneurones subordonnés, les Suédois ont utilisé des gaines de cellules de Schwann prélevéesdans le système nerveux périphérique de l'animal.

Cette enveloppe cellulaire, greffée sur l'axone mutilé,favorise sa repousse.

On peut donc guider le câble du neurone, contourner la lésion, et le reconnecter endessous à son point d'attache originel.

Encore faut-il avoir le plan précis de ces circuits à l'échellemicroscopique, et faire le tri dans la masse de milliers de cellules nerveuses qui courent le long de la colonne! Pas facile… Pourtant, si l'on en croit les résultats publiés par ces chercheurs en juillet 1996, les 18 greffes réalisées sur unemême moelle ont redonné vie aux pattes paralysées de l'animal.

Posé sur un tapis roulant, le rat semble retrouver le réflexe de lamarche.

Pas grand-chose, à peine une ébauche de mouvement musculaire, mais c'est déjà énorme! L'expérience a fait beaucoup de bruit et de nombreux laboratoires cherchent aujourd'hui à la reproduire, en la combinant notammentavec la potion des Suisses.

Mais personne n'évoque la possibilité de la transposer à l'homme.

Trop risqué dit-on.

D'abord parce que lerat et l'homme ont une anatomie comparable mais pas semblable : la délicate opération doit d'abord être testée chez le singe.

Et puissurtout parce que les résultats, même chez l'animal, sont encore trop incertains… Un bricolage complexe Il reste d'ailleurs bien d'autres voies à explorer, dont certaines sont testées actuellement.

A Paris, Jean-Claude Horvat propose degreffer, sur le site même de la lésion, de jeunes motoneurones prélevés sur un embryon pour remplacer ceux qui ont été écrasés.

Ce remplissage ne suffit pas à remettre le rat sur pied, mais on constate, au niveau cellulaire, que certaines connexions sont rétablies.Alain Privat, à Montpellier, a essayé encore autre chose en greffant cette fois en dessous de la lésion des cellules embryonnaires defibres descendantes commandant les réflexes urinaires et sexuels.

Ces neurones dont la tête, ou corps cellulaire, se trouve d'ordinairedans le cerveau , reforment une sorte de microcerveau au niveau de la moelle d'où part l'innervation des organes urinaires et génitaux. Et ce bricolage complexe réussit à reconstituer une partie des fonctions concernées.

L'expérience réalisée dans un premier tempschez les rongeurs est actuellement reproduite chez le singe… D'autres pistes, enfin, s'inspirent des observations faites sur les grenouilles.

Les rainettes nous livreront-elles un jour le secret de larepousse neuronale? En Israël, par exemple, Michal Schwartz s'est inspiré des mécanismes qui rendent la guérison de la moellepossible chez les amphibiens.

Certaines cellules du système immunitaire de ces petites bêtes, les macrophages, nettoient le terrainde la plaie et favorisent la régénération nerveuse.

Chez les mammifères, ces mêmes cellules existent mais sont inactives dans lamoelle.

Schwartz suggère de les réactiver grâce à un traitement de son invention.

Résultat : lorsqu'elles sont injectées sur le nerfoptique sectionné d'un rat, les neurones rétablissent des circuits.

Alors pourquoi pas dans la moelle? Comme en témoignent tous cesefforts de recherche, on est encore loin d'une guérison spectaculaire des accidentés de la moelle épinière, mais tous ces petits pasaboutiront sans doute un jour à un grand bond en avant… Remerciements à Steve Easter (ENS), Jacques Hourdry (université d'Orsay), Jean-Claude Horvat et Jean-Claude Mira (université René-Descartes, Paris), Marc Peschanski (Inserm, U.161), Martin Schwab (université de Zurich).. »

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