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Sciences & Techniques: Statistiques : erreurs et moyennes

Publié le 22/02/2012

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Au XVIIIe siècle, les savants constatent que, toutes choses égales par ailleurs, aucune mesure ne donne une valeur exactement identique aux autres. Ils travaillent donc à la détermination mathématique de la valeur la plus exacte, dans le cadre d'une théorie, dite théorie des erreurs. Formalisée au début du XIXe siècle, cette théorie permettra à Quetelet de jeter un pont entre sciences physiques et sciences morales. C'est par l'erreur que la science moderne a progressé. Il n'est donc pas étonnant qu'une théorie des erreurs ait joué un rôle considérable dans son développement.

« L'observation à l'œil nu, améliorée tout d'abord par des appareils aussi simples que le triquetrum , l'arbalestrille, le quartier de Davis, l'astrolabe ou le quadrant, permettait des mesures d'angle (auxquelleson peut toujours se ramener par la trigonométrie) de l'ordre du demi-degré près.

Tycho Brahé a fait reculercette limite à quelques minutes d'angle avec des instruments de toute première qualité.

L'instrumentsuivant, la lunette astronomique, empruntée à la foire et adaptée à l'observatoire par Galilée et Kepler , autorise, lui, un bond en deçà de la minute : environ 15'' pour Picard, en 1667. En l'associant à différents dispositifs de visée (le réticule, le vernier), César-François Cassini peut se vanterde pouvoir utiliser, en 1744, un quart de cercle dont la division est de 2''.

Cependant l'erreur de fermeture deses triangles est en moyenne de 10'', alors qu'elle tombe à 1,3'' chez Delambre et Méchain, dansl'établissement de la Méridienne Dunkerque-Perpignan; enfin, l'erreur probable sur un angle est finalementramenée à 0,5'' par Struve, en 1823, en combinant 6 mesures. Est-ce à dire que ces gains irréguliers mais incessants en précision observationnelle suffisent à reportersine die le traitement des erreurs d'observation et de mesure? Pas le moins du monde.

Car cette précision, comme le montre l'histoire de l'astronomie, est aussi l'aune à laquelle se mesure la validité d'unmodèle théorique.

Il faut une précision toujours plus grande pour discriminer des modèles concurrents.C'est parce que la précision des mesures de Tycho Brahé est tombée en dessous des 3 ou 4 minutesd'angle que Kepler peut à coup sûr invalider le modèle des sphères de Ptolémée et Copernic au profit d'orbites elliptiques. C'est aussi parce que la combinaison de multiples observations permettra de forts gains de précision que la théorie pourra s'enrichir demodèles de plus en plus sophistiqués, incorporant toutes les " équations " ou " corrections " apportées au modèle simple dumouvement uniforme moyen.

Ces équations, qui envahissent les tables et éphémérides qu'échangent astronomes et navigateurs, nesont calculées que si la précision des observations permet d'abord de repérer les inégalités qu'elles traduisent.

D'où le programme desgéomètres qu'exprime explicitement Laplace : " Rendre assez précise pour être définitivement convaincante l'adéquation entre les observations astronomiques en progrès constant, et le résultat des déductions possibles dans la théorie newtonienne ". A la clé, les enjeux du traitement des erreurs de mesure sont considérables.

Ils concernent d'abord,comme on vient de le voir, le progrès même des sciences, et tout particulièrement de la philosophienaturelle.

Dans ce domaine, un cas des plus célèbres est celui de la controverse sur la figure de la Terre . Elle a opposé les cartésiens et les newtoniens dans les années 1720 et 1730.

Les premiers affirment, parle moyen de la théorie des tourbillons et avec le soutien de l'Académie royale et de l'Observatoireastronomique (représenté par la dynastie de ses directeurs, les Cassini), que la Terre est allongée auxpôles " comme un melon " (d'Espagne).

Les seconds, eux, s'appuient sur la loi d'attraction universelle et une hypothèse de fluide en mouvement (traduite différemment d'ailleurs par Newton et Huygens ), pour affirmer le contraire : la Terre est aplatie aux pôles. La controverse sera résolue par les deux fameuses expéditions de Maupertuis en Laponie et de La Condamine et Bouguer au Pérou.La mesure précise d'un degré de méridien au pôle et à l'équateur, a fini par trancher en faveur de la thèse newtonienne.

Mais que montre une lecture attentive des rapports de ces expéditions? Que, dans les deux cas, la précision des trois opérationsfondamentales - la mesure des latitudes, la mesure de longueur de la base, et la mesure des angles du système des trianglescouvrant le degré de méridien - a été un enjeu fondamental du travail des académiciens, et - depuis la méthode de mesure jusqu'à lapublication des résultats - une cause essentielle de leur brouille dans le cas du Pérou. Le second enjeu de la question des erreurs ne concerne plus les savoirs des hommes sur le monde.

Elle touche directement à leursactivités sociales, économiques, et commerçantes.

La cartographie est la première technique de représentation à subir les conséquences des erreurs d'évaluation et de mesure.

Le XVe siècle l'a certes considérablement fait avancer en raison desnombreuses expéditions et des progrès de la navigation marchande.

Pourtant au XVIIIe siècle, les cartes sont encore si imprécises etla question de la longitude en mer si mal résolue que les accidents diplomatiques et les naufrages obligent les différentsgouvernements à intervenir.

Ils offrent des prix pharamineux à qui sera capable de la déterminer avec une précision suffisante.

A défautde montres suffisamment précises, il faut en effet recourir à des tables de la Lune pour lesquelles une erreur de 2' conduit à une erreur de 3° (un peu plus de 300 km!) sur la longitude.

Et lorsqu'en 1744, le troisième des Cassini produira une nouvelle carte de la France,réduite en longitude de près de 2 degrés, Louis XV se plaindra d'être ainsi privé d'un cinquième de son territoire.

C'est davantage quece qu'ont rapporté toutes ses victoires militaires. Les travaux mathématiques sur l'erreur de mesure ne commencent guère avant le milieu du XVIIIe siècle.

Ils supposent d'abord quel'idée même d'erreur ait été purgée de toute composante physique, de tout ce qu'on appelle erreur systématique ou erreur constante.Par ces termes, on désigne toute erreur dont la cause peut être identifiée et donc corrigée.

Cette erreur peut être d'origine humaine(défaut de vision, mauvais positionnement, erreur de relevé), d'origine instrumentale (flexion d'une pièce, jeu d'un axe, mauvaisegraduation), ou tenir à la méthode (non prise en compte de certains phénomènes, mauvaises interprétations).

Toutes les possibilitésde correction étant épuisées, reste alors une erreur " inexplicable ", " irréductible ", une grandeur que les géomètres peuvent abstraireen une variable mathématique. C'est d'abord le calcul différentiel qui permet d'évaluer les conséquences sur un certain résultat des erreurs sur les grandeurs qui ledéterminent.

Ce calcul d'erreur de type déterministe a été inauguré par Cotes, un élève de Newton .

Pour un résultat fonction de trois. »

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