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Sciences & Techniques: Un débat sur la nature de la lumière

Publié le 22/02/2012

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1819. L'Académie attribue un prix à Augustin Fresnel pour un mémoire sur les phénomènes de diffraction : son interprétation ondulatoire de la lumière s'est révélée, sur ce point, supérieure à la théorie corpusculaire prônée par les Laplaciens. Certains d'entre eux ne s'avoueront pourtant pas vaincus. Ondes ou corpuscules… la question de la nature de la lumière fut une des plus permanentes dans l'histoire de la physique. Chaque école présenta des preuves et des arguments valables, de sorte que le consensus suivit un mouvement de balancier, penchant, selon les moments, pour l'une ou l'autre des théories.

« Quelques années plus tard, Christiaan Huygens et d'autres transforment cette théorie en prêtant à l'éther les propriétés d'un fluide élastique au sein duquel des ondes ou des impulsions lumineuses se déplacent àune vitesse élevée mais finie.

Huygens s'appuie partiellement sur les observations et calculs de Römer.Mais ces derniers, qui à l'époque ne sont guère pris au sérieux, ne permettent pas de trancher entre lathéorie ondulatoire de Huygens et la théorie corpusculaire, l'une et l'autre estimant que la lumière sedéplace à vitesse finie. Newton , s'agissant de la nature physique de la lumière, est d'abord prudent dans ses propos.

Il insiste souvent sur le fait que son observation la plus célèbre – le fait que la lumière blanche est un mélange de toutes les couleurs du spectre – est indépendante de laquestion de la nature de la lumière.

Il écrit toutefois dans son Traité d'optique (1704), que l'hypothèse d'un flot de corpuscules lui semble plus vraisemblable.

Des ondes, précise-t-il, ne donneraient pas aux ombres des contours si précis : elles occuperaientl'espace derrière l'objet.

S'il lui arrive, en se référant à ses observations sur les anneaux qui portent son nom, de suggérer que lescorpuscules lumineux subissent l'influence de perturbations dans l'éther, ce signe de tête en faveur des ondes est vite oublié.

Garantiepar l'immense prestige de Newton, une forme simplifiée de la théorie corpusculaire devient ainsi l'orthodoxie dominante au cours depresque tout le XVIIIe siècle. A la fin de ce siècle et au début du suivant, de façon étonnante, les versions des deux théories diffèrent peu vis-à-vis de leursconséquences observables.

En dépit du modèle alternatif sur lequel elles reposent, elles permettent des prédictions à peu prèsidentiques et, avec l'aide de diverses hypothèses auxiliaires, rendent compte à peu près aussi bien des phénomènes optiques les plusconnus. Leurs prédictions sont cependant opposées sur un point : selon la théorie corpusculaire, la lumière se déplace plus rapidement dansun milieu dense (eau ou verre) que dans l'air tandis que selon la théorie ondulatoire, c'est l'inverse.

Différence cruciale! Elle porte sur laréfraction que subit la lumière lorsqu'elle change de milieu.

En entrant dans le verre, dixit la théorie ondulatoire, le front d'onde pivoteautour de son bord d'attaque ralenti, un peu comme une troupe oblique à travers champs quand sa marche est freinée.

Rien de telpour la théorie corpusculaire.

Selon elle, les corpuscules lumineux sont, à mesure qu'ils s'en approchent, attirés par les molécules dela surface du verre, puis accélérés et défléchis à l'intérieur.

La différence de vitesse qui résulte des deux théories est assez importante: par rapport à la valeur dans l'air, 50 % en plus ou en moins selon qu'on se situe dans le cadre corpusculaire ou dans le cadreondulatoire.

Mais cette vitesse est si grande que toute mesure directe reste hors de portée des physiciens.

Et ce, jusqu'à Fizeau etFoucault, en 1850. Les laplaciens Dans une large mesure, le souci de précision expérimentale qui culmine chez Fizeau et Foucault s'est nourri des réformes entreprisespar les laplaciens cinquante ans plus tôt.

Laplace avait commencé sa carrière en approfondissant la mécanique céleste newtonienne.Il n'aurait toutefois su se contenter de compléter l'œuvre d'un autre, fut-ce Newton.

En quête de royaumes scientifiques inexplorés, ilquitta donc, vers les années 1790, le vaste monde des planètes et se tourna vers le monde " microscopique " : celui des minusculescorpuscules, les éléments supposés constitutifs de la matière ordinaire et des " fluides impondérables " telles la chaleur, la lumière etl'électricité . Au cours des années 1780, Charles Coulomb, mesurant la force d'attraction électrique au moyen d'une balance de torsion trèssensible, avait montré qu'à l'instar de la gravitation newtonienne cette force obéissait à une loi en inverse du carré des distances.

Cetravail fit l'admiration de Laplace qui conçut dès lors le projet d'étendre à tous les phénomènes moléculaires des lois de ce type. Un programme détaillé, reposant sur deux volets, fut mis sur pied : 1/l'établissement des lois des forces intermoléculaires au moyen de mesures semblables à celle de Coulomb; 2/la reconstruction des phénomènes observés par une théorie mathématique.

En 1796,Laplace écrit dans son Système du monde qu'avec la découverte des lois des forces intermoléculaires " on pourra élever la physique des corps terrestres au degré de perfection, que la découverte de la pesanteur universelle a donné à la physique céleste ". L'accomplissement de ce programme immensément ambitieux allait conduire la physique vers de nouveaux sommets. Le chimiste Claude Berthollet partageait nombre des buts scientifiques de Laplace et ils devinrent très rapidement amis etcollaborateurs.

L'un et l'autre avaient occupé le premier rang de la scène scientifique avant la révolution française.

Ils s'élevèrent encoredavantage après.

Devenus sénateurs grâce à leur amitié avec Napoléon, ils eurent alors les moyens financiers et institutionnels demettre en œuvre leur programme.

Ils avaient leurs entrées dans la première classe de l'Institut, qui avait remplacé l'ancienne Académiedes sciences, ainsi qu'à l'Ecole polytechnique où ils purent recruter leurs disciples parmi la crème du jeune talent scientifique français.En fait, quiconque appelé à avoir des liens avec le groupe de Laplace étudia ou enseigna à l'Ecole polytechnique. En 1801, Berthollet achète une maison de campagne à Arcueil près de Paris et y équipe un très bon laboratoire.

Laplace s'installe àcôté en 1806.

Un an plus tard, ils fondent " la société d'Arcueil ", une sorte de club scientifique privé qui se réunit tous les quinze jourschez Berthollet.

Jusqu'à sa dissolution en 1813, ce petit groupe, dont les membres triés sur le volet ne seront jamais très nombreux,va orienter le cours de la physique et de la chimie françaises. Laplace et Berthollet le dirigent comme un séminaire de recherche de pointe, recrutant dans le vivier de Polytechnique de brillantssujets qu'ils amènent à travailler sur le programme laplacien et dont ils protègent ensuite la carrière.

Citons quelques noms parmi lesplus importants : Jean-Baptiste Biot, Siméon Denis Poisson, Louis Joseph Gay-Lussac, François Arago et Pierre Dulong.

Ils seront laforce vive du groupe laplacien, la société d'Arcueil constituant, elle, l'outil social et institutionnel du programme.. »

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