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S'engager est-ce affirmer ou perdre sa liberté ?

Publié le 10/04/2005

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Dans quelle mesure un engagement peut-il être source de perte de liberté et d'aliénation ? Il conviendrait de voir si c'est l'engagement comme tel qui est source de servitude ou certains engagements (Qu'est-ce que les Lumières ? de Kant : la paresse et la lâcheté de l'homme sont fréquemment à l'origine de notre servitude volontaire). S'engager, en un certain sens, c'est éliminer des possibles, et donc restreindre le champ de ces mêmes possibles.  [Toute promesse faite à autrui m'oblige à renoncer à une part de ma liberté. Tout engagement me lie, et ce qui me lie me prive de ma liberté. Lorsque je contracte une dette morale ou légale envers une autre personne, j'ai des obligations envers elle et je ne suis plus libre de mes actions.] Tout engagement crée des obligations Si je m'engage envers une personne, c'est comme si je signais un contrat moral avec elle. Je fais la promesse de me comporter d'une certaine manière, je me donne des obligations et abandonne de fait une partie de ma liberté. Un engagement a valeur de loi Certains engagements se traduisent par un contrat légal.

L’homme est libre par définition. Le temps des esclaves est révolu et aujourd’hui, tout individu humain naît libre et est censé le rester tout au long de son passage sur Terre. L’homme libre a le choix de faire ce qu’il veut, pourvu que ce choix ne soit influencé en aucune manière. Nous nous demandons ici si s’engager fait perdre ou affirmer sa liberté. Le verbe s’engager à deux sens. Le premier désigne une promesse, souvent accompagnée d’un contrat écrit et officiel, de tenir une fonction en acceptant les contraintes qui lui sont associées. Le militaire et l’homme marié se sont engagés en ce sens. Le second sens que l’on pet accorder au verbe s’engager est le fait de s’avancer, de s’aventurer sur une voie, concrète ou abstraite, en prenant en compte les risques qui peuvent parfois, selon les circonstances, en résulter. C’est cet engagement que prend celui qui se lance dans des études ou dans une conversation. Lorsque donc l’homme s’engage, qu’en advient-il de sa liberté ? Le choix qu’il fait e s’engageant lui fait-il affirmer qu’il est libre, puisque cette décision est personnelle ? Ou bien au contraire, les contraintes liées à l’engagement pris font-elles perdre sa liberté à l’individu ? Nous nous heurterons à deux objections principales que seront l’influence face à un choix qui fait que celui-ci n’est plus réellement libre et l’observation que l’engagement n’est pas toujours respecté.

« liberté. Un engagement a valeur de loiCertains engagements se traduisent par un contrat légal.

C'est le cas, par exemple, du mariage.

Lorsque je memarie, je prends l'engagement de rester fidèle à une personne, de subvenir à une partie de ses besoins, de laprotéger, de veiller à son bien-être comme si c'était le mien.

Si je m'engage à rester fidèle à ma femme, celaréduit ma liberté car je ne peux plus séduire toutes les autres, car cela serait moralement condamnable.

Lemariage crée des obligations légales qui font que je ne suis plus libre.

Je peux être poursuivi en justice parmon conjoint si je ne les respecte pas. L'engagement est un lien«S'engager porte malheur», disait une inscription sur le temple d'Apollon à Delphes.

Celui qui s'engage ou estengagé - que ce soit dans l'armée, dans une entreprise, vis-à-vis d'un assureur, dans une relation de couple -n'est plus le seul maître de sa destinée.

Il doit rendre compte de ses actes aux personnes avec lesquelles ils'est lié.

[Il n'y a de liberté possible que si l'on s'engage dans un lien avec autrui.

M'engager envers quelqu'un, ce n'est pas m'enchaîner à lui mais, au contraire,choisir librement de remplir mes responsabilités à son égard.

L'engagement envers autrui est donc une manière de réaliser ma liberté.] Je réalise ma liberté en m'engageant Pour Sartre, liberté, action et engagement sont étroitement liés.

Eneffet, la liberté ne se réalise que dans l'action.

Être libre, c'est être libred'agir.

Celui qui ne fait rien ne préserve pas sa liberté mais, aucontraire, la gaspille.

Par ailleurs, l'action ne se réalise que dansl'engagement envers autrui.

Agir, en effet, ce n'est pas faire n'importequel geste sans conséquence, mais c'est me situer par rapport auxautres, m'impliquer dans un contexte social, bref, m'engager.L'expérience de la guerre et de ses atrocités, la découverte dutotalitarisme, la présence dans le monde dit « libre » de formesouvertes ou dissimulées d'exploitation de l'homme — du prolétaire aussibien que du colonisé —, révèlent la présence massive et incontournabledu mal.

La bonne conscience, la fuite dans l'anonymat du « on » n'estplus possible à moins de se ranger dans la catégorie des « salauds »,ces « gros pleins d'être » qui feignent de trouver l'existence naturelle etqui continuent à vaquer à leurs affaires et à leurs amours.

Certainschoisissent — à titre individuel — de faire le bien : accomplirscrupuleusement leur devoir de père, de citoyen, voire secourir unvoisin dans la détresse, mais cela n'empêche aucunement la mauvaisefoi.

Les hommes ne sont pas placés côte à côte comme des petits poisdans une boîte : ils entretiennent entre eux des relations étroites,même si elles sont masquées par l'idéologie individualiste, même si ellessont exposées à une réification. Sartre reprend ici les analyses du marxisme qui sont focalisées sur la pleine conscience des réseaux multiplesde détermination constitutifs de la trame sociale de l'existence.

Toutefois le marxisme privilégie l'action et laprise de conscience collectives : je ne peux modifier la situation de l'homme dans le monde pour rendrechacun maître de son existence que si je m'engage consciemment dans une action collective (la révolution)qui transformera les bases de la société, par exemple en supprimant la propriété privée des moyens deproduction.

En définitive, je devrais pour réaliser cette fin, utiliser tous les moyens à ma portée, y compris lemensonge et la violence.

Ici éclate le paradoxe de la morale que l'oeuvre littéraire de Sartre, (théâtre,romans, essais) s'attache à exprimer : ou bien je vais traiter (selon l'expression kantienne) quelques-uns demes proches comme des fins et je vais garder les « mains pures », mais je me condamne à accepter tout cequi ne dépend pas de moi ; ou bien je vais m'engager dans un parti strictement révolutionnaire et par-là mêmeje me condamne à traiter tous les hommes en moyens pour une fin (la société sans classe, réconciliée) dontje ne verrai jamais la réalisation effective, et ce faisant j'aurai les « mains sales ». « Celui qui prend conscience en lui de cette contradiction explosive — entre ce qu'il est pour lui-même et cequ'il est aux yeux d'autrui — celui-là connaît la vraie solitude, celle du monstre raté par la Nature et la société; il vit jusqu'à l'extrême, jusqu'à l'impossible, cette solitude latente, larvée qui est la nôtre et que noustentons de passer sous silence ».. »

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