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SIGNE ET SYMBOLE ?

Publié le 14/03/2004

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Il ne cesse de fleurir dans les traditions religieuses des peuples primitifs et les psychanalystes découvrent sa présence dans nos rêves ou dans ces « archétypes » que les âges anciens ont, selon Jung, légués à notre inconscient. Le symbole est une image qui se donne pour une réalité, exactement comme la magie (qui ne se nourrit que de symboles) est un rêve qui se prend pour une action. Tandis que le magicien confond les gestes symboliques avec l'action réelle, le technicien au moyen des signes scientifiques se donne une représentation adéquate du monde et parvient à le dominer. A l'époque néolithique, l'invention de l'écriture, et celle de la monnaie, autre abstraction, c'est le congé donné par la technique rationnelle à l'impérialisme de la pensée mythique ; c'est le signe qui commence à chasser le symbole.Mais pour nous qui avons connu toutes les démythisations et qui vivons sous l'empire du signe mathématique. ce rationalisme d'une sèche probité paraîtra trop exsangue. Notre époque où le signe triomphe a la nostalgie des symboles. La vogue des psychanalyses, l'incessant appel aux mythes dans notre théâtre ou notre philosophie en témoignent surabondamment.Le signe mathématique est l'expression de l'intelligibilité suprême si l'on entend par intelligibilité l'absence totale du mystère, la pleine possession par l'esprit de ses instruments ; il est l'expression de la puissance humaine si l'on entend par puissance le pouvoir d'agir sur la matière, de bouleverser les objets du monde. Mais la spiritualité de l'algébriste et la puissance du technicien ne sont-elles pas une caricature de la véritable spiritualité et de la véritable puissance ?

« e.

Des noms dérivés aux noms primitifsIl faut d'abord, dit Socrate, examiner les noms appliqués à ce qui a, par nature, une existence éternelle.

Car c'est làsurtout que l'attribution des noms doit avoir été faite avec soin.

Socrate passe alors en revue troisgroupes de noms dont il indique l'étymologie : ceux des Dieux, ceux des astres et des phénomènes naturels, ceuxdes notions morales.

Mais ces noms sont des dérivés et des composés.

Pour les interpréter, il faut remonter auxnoms primitifs dont ils proviennent.

Ainsi, par exemple, agathon (bien) est composé de agaston (admirable) et dethoon (rapide) ; ce n'est pas tout : le mot thoon pourrait sans doute être tiré de noms différents, et ceux-là,d'autres encore, jusqu'à ce qu'on parvienne à un élément qui ne puisse plus être rapporté à d'autres noms. f.

La justesse des noms primitifsLes noms primitifs ne pouvant être expliqués par d'autres noms, il faut faire intervenir la notion d'imitation.

Leurjustesse consisterait dans une certaine imitation des objets.

Selon Socrate, le nom serait «une façon de mimer parla voix ce que l'on mime et nomme, quand on se sert de la voix pour mimer ce qu'on mime».

Mais si l'on ne veut passoutenir cette absurdité que les «gens qui imitent les brebis, les coqs et les autres animaux» nomment ce qu'ilsmiment, l'imitation devra être obtenue au moyen des syllabes et des sons élémentaires d'une langue, de ses voyelleset de ses consonnes, et ne porter ni sur les sons émis par les choses ainsi nommées (sans quoi elle se confondraitavec la musique), ni sur la forme ou la couleur (ce qui est le propre de la peinture) mais sur ce que les choses sonten elles-mêmes, sur leur essence.

Et puisque c'est avec des syllabes et des lettres que se fait l'imitation del'essence, il convient d'abord de distinguer les éléments, les voyelles, les muettes, les demi-voyelles et de lesclasser par espèces.

Puis on distinguera correctement tous les êtres auxquels doivent s'appliquer les noms.

Dès lors,on saura attribuer chaque élément, d'après sa ressemblance avec l'objet.

Ces distinctions nécessaires, Socrate sedéclare incapable de les faire.

Il essaiera pourtant car si l'on ignore en quoi consiste la justesse de ces nomsprimitifs, il est impossible de connaître celle des dérivés et on ne dira dès lors que des sornettes.

Ainsi, même si sesimpressions personnelles sur les noms primitifs lui semblent «au plus haut point téméraires et risibles», Socrate tentede préciser les idées que suggèrent les sons ou les lettres : le «r» semble propre à l'expression du mouvement ; le«i» exprime la légèreté..., etc.

(voir extrait du Cratyle p.

61-62)Ainsi, conclut Socrate, pour chaque être, le législateur a créé un signe et un nom, et est parti de là pour composerle reste, par imitation, avec ces mêmes éléments.

Voilà en quoi consiste la justesse des noms.3 Entretien de Socrate avec Cratyle (428a-440e)Cratyle approuve la théorie du langage proposée par Socrate : «Je trouve tes oracles tout à fait à mon gré, que tudoives ton inspiration à Euthyphron, ou que depuis longtemps quelque autre muse t'habitât à ton insu.» MaisSocrate «se méfie de sa propre sagesse» et souhaite soumettre la question à un nouvel examen. Signes et symboles ont quelque chose d'impur et d'ambigu ; nous avons dit que ce sont des signifiants quireprésentent des signifiés.

Donc, d'une part le signifiant renvoie à un signifié, mais d'autre part il en tient lieu.

Lesignifiant conduit au signifié mais se substitue à lui ; on ne sait trop si ce mode d'existence du signifiant est unecommodité ou une escroquerie ; si l'invisible doit être figuré par le visible, l'esprit par la chair et la pensée par lelangage, du moins convient-il que le visible, la chair et le langage ne fassent pas écran aux valeurs qu'ilsreprésentent ; le signifiant doit être le plus discret possible, il doit s'effacer devant ce qu'il signifie, se réduire à safonction de re-présentant et faire oublier sa présence.

Delacroix exprimait en ce sens les relations idéales entre lesignifiant et le signifié lorsqu'il écrivait : « Le signe disparaît presque, il devient translucide : la compréhension dulangage, c'est un peu le langage supprimé ».

Ceci nous fait comprendre que le rationalisme ait une tendance àpréférer le signe au symbole et interprète l'invasion des signes et le recul des symboles comme l'expression même duprogrès spirituel.

Telle est notamment l'attitude de Brunschvicg qui pourchasse les mythologies - - expressions tropcharnelles de la vie de l'esprit — et chante le progrès de la pensée mathématique, qui est une pensée exprimée pardes signes parfaitement clairs, et parfaitement dominés par leur créateur.

Les mots d'un tel langage n'ont pasd'ancêtres.

Inventés après coup ils n'ont d'autre sens que celui qui résulte de leur définition même.

Langage neuf,abstrait, translucide, l'algèbre nous apparaît dépouillée de cette charge émotive, de cette enveloppe de mystère quipénètre de confusion les symboles poétiques et même les mots du langage ordinaire.

Il y a toujours lieu de craindreque le symbole trop charnel ne trahisse ce qu'il est censé traduire.

Parler de Dieu comme d'un Père ou d'un Seigneur,c'est tomber dans le piège de l'anthropomorphisme toujours tendu sur les chemins faciles de la pensée symbolique.Le symbole appartient à la pensée prélogique.

Il ne cesse de fleurir dans les traditions religieuses des peuplesprimitifs et les psychanalystes découvrent sa présence dans nos rêves ou dans ces « archétypes » que les âgesanciens ont, selon Jung, légués à notre inconscient.

Le symbole est une image qui se donne pour une réalité,exactement comme la magie (qui ne se nourrit que de symboles) est un rêve qui se prend pour une action.

Tandisque le magicien confond les gestes symboliques avec l'action réelle, le technicien au moyen des signes scientifiquesse donne une représentation adéquate du monde et parvient à le dominer.

A l'époque néolithique, l'invention del'écriture, et celle de la monnaie, autre abstraction, c'est le congé donné par la technique rationnelle à l'impérialismede la pensée mythique ; c'est le signe qui commence à chasser le symbole.Mais pour nous qui avons connu toutes les démythisations et qui vivons sous l'empire du signe mathématique.

cerationalisme d'une sèche probité paraîtra trop exsangue.

Notre époque où le signe triomphe a la nostalgie dessymboles.

La vogue des psychanalyses, l'incessant appel aux mythes dans notre théâtre ou notre philosophie entémoignent surabondamment.Le signe mathématique est l'expression de l'intelligibilité suprême si l'on entend par intelligibilité l'absence totale dumystère, la pleine possession par l'esprit de ses instruments ; il est l'expression de la puissance humaine si l'onentend par puissance le pouvoir d'agir sur la matière, de bouleverser les objets du monde.

Mais la spiritualité del'algébriste et la puissance du technicien ne sont-elles pas une caricature de la véritable spiritualité et de lavéritable puissance ? Simone Weil dénonce la sécheresse monstrueuse des signes lorsqu'elle écrit : "Argent,. »

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