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Suffit-il de changer pour avoir une histoire ?

Publié le 27/02/2005

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histoire

Pour Jacques Ruffié, dans De la biologie à la culture, le devenir affecte aussi la nature, mais celui-ci est le fruit du hasard, des mutations, alors que " l'adaptation culturelle, au contraire, fruit d'une volonté consciente et délibérée,[...] n'a rien d'aléatoire". Les hommes délibèrent, agissent en fonction de buts, réalisent des projets et transforment leur milieu. Mais en transformant la réalité, ils se transforment eux-mêmes. Cette historicité de l'homme a pour condition la perfectibilité de l'homme, nous dit Rousseau. C'est parce que l'homme peut sans cesse apprendre et développer ses connaissances et ses facultés que l'histoire est possible. Dans le cas inverse, les civilisations ne pourraient pas se développer et le monde humain resterait toujours au même niveau. "C'est la faculté de se perfectionner; faculté qui, à l'aide des circonstances, développe successivement toutes les autres, au lieu qu'un animal est, au bout de quelques mois, ce qu'il sera toute sa vie."( Discours sur l'origine et les fondements de l'inégalité parmi les hommes) Ainsi, c'est parce que l'homme peut consciemment mettre en oeuvre son avenir et ses actions que l'on peut dire qu'il a une histoire. Le changement pour faire l'histoire doit donc être accompagné par une raison, une conscience.

Le terme d'histoire est ambigu. Il peut en effet signifier le devenir historique en tant que tel et l'étude que l'on peut avoir de celui-ci. Le sens premier en effet donné à ce terme par Hérodote, l'un des premiers historiens, est celui d'enquête. Mais il s'agit plutôt ici de savoir à quel objet s'applique le terme d'histoire, en tant que processus de devenir. Dans un premier temps, le terme semble pouvoir n'être réservé qu'à ce qui change. Un monde dans lequel rien ne change n'a pas d'histoire, puisqu'il est défini une fois pour toute par la description de l'état permanent  dans lequel il se trouve. Pourtant s'il est vrai qu'il faut évoluer pour avoir une histoire, peut-on dire pour autant qu'une plante qui passe du bourgeon à la fleur a une histoire ? L'histoire n'entend-elle pas une conscience à l'oeuvre, une conscience qui agit en vue d'un projet bien défini ?

 

histoire

« éléments d'explication Dans le Discours sur l'inégalité, Rousseau fait l'hypothèse d'un état de nature dans lequel l'homme aurait vécu avantl'institution de la société.

Cette hypothèse doit lui permettre de mieux comprendre l'état présent, celui de l'hommecivilisé et malheureux.L'homme naturel selon Rousseau est presque un animal : « un animal moins fort que les uns, moins agile que lesautres, mais à tout prendre organisé le plus avantageusement de tous ».

Il n'est pourtant pas totalement un animal: s'il l'était, on ne comprendrait pas qu'il ait pu devenir ce que nous voyons.

Quelle différence y a-t-il donc entre lesbêtes et nous ?Traditionnellement, les philosophes répondent que l'homme est intelligent, qu'il a une raison, bref qu'il a une natureplus « riche » que celle de l'animal.

Rousseau ne se contente pas de cette perspective qui sous-estime l'influencedes causes externes.

Il soutient même que « tout animal a des idées puisqu'il a des sens », et qu' « il combine sesidées jusqu'à un certain point ».Il est par ailleurs possible que l'homme n'ait « aucun instinct qui lui appartienne », ce qui lui permettrait des'approprier tous ceux des animaux.

Mais cette question est discutée.

Elle prépare, cependant, l'introduction de lanotion île perfectibilité, finalement caractéristique incontestable- île l'homme.

En mettant en avant ce concept deperfectibilité, Rousseau définit en effet la nature de l'homme connue une pure virtualité, qui ne suppose, chezl'homme purement naturel, aucune qualité déterminée, bien qu'elle les contienne toutes en puissance.

La viesolitaire, oisive et libre, de cet homme, laisse toutes les possibilités qu'il enferme en sommeil.

Dans ce texte,Rousseau indique que la faculté de se perfectionner ne développe toutes les autres facultés qu' « à l'aide descirconstances ».

Si celles-ci n'avaient pas changé, l'homme serait resté dans son état originaire.

La perfectibilité, enelle-même, ne produit rien.En outre, ce mot ne doit pas faire penser que l'homme dont les facultés se développent se dirige nécessairementvers une « perfection », un état idéal ou simplement meilleur; pour Rousseau, au contraire, cette faculté a d'abordété « la source de tous nos malheurs », puisque sans elle nous coulerions « des jours tranquilles et innocents ».Comme le montre avec éclat l'état présent, la nature de l'homme contenait autant de possibilités de lumières qued'erreurs, de vertus que de vices, de valeurs positives que de valeurs négatives.

On peut dire que, jusqu'à présent,les défauts l'ont emporté.Mais quelles furent ces « circonstances » qui sollicitèrent des possibilités qui auraient pu ne jamais se manifester ?Rousseau parle du « concours fortuit de plusieurs causes étrangères, qui pouvaient ne jamais naître ».

Il s'agit biend'un malheur, d'une malchance, en ce sens.

Des catastrophes naturelles ont « forcé » les hommes à vivre les uns àcôté des autres, puis à s'unir en sociétés.

La nature de l'homme ne contenait aucun principe de sociabilité.

Et la viecollective explique l'apparition du langage, de l'intelligence, des passions, de la conscience morale, etc.Pourtant, il ne faudrait pas croire que Rousseau n'est que nostalgique d'un état de nature « passé » (hypothétique).C'est lui aussi qui écrit que l'homme devrait « bénir sans cesse l'instant heureux qui l'en arracha et qui, d'un animalstupide et borné, fit un être intelligent et un homme » (Contrat social, I, 8).

La perfectibilité contient peut-être lapromesse d'une certaine réalisation de soi positive, si les circonstances sont propices.

En tout cas, il est impossiblede retourner à la pure nature, l'irréversibilité de l'histoire fait de nous des êtres définitivement « dénaturés ».

Laréflexion pédagogique (cf.

Émile) et politique (cf.

le Contrat social) de Rousseau est donc la recherche de « bonnesinstitutions », de celles « qui savent le mieux dénaturer l'homme » (Émile, II), réaliser sa nature essentielle. Ainsi, c'est parce que l'homme peut consciemment mettre en oeuvre son avenir et ses actions que l'on peut dire qu'ila une histoire.

Le changement pour faire l'histoire doit donc être accompagné par une raison, une conscience. 3.

L'homme a conscience d'avoir une histoire, c'est un être qui vit dans le temps. »

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