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SUIS-JE UNE "SUBSTANCE" SPIRITUELLE?

Publié le 11/04/2011

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Matière et esprit : le spiritualisme et ses critiques. L'idée intuitive d'esprit/chose :

L'idée que les hommes ont un esprit ou une âme conçue comme une entité distincte du corps est peut-être aussi ancienne qu'Homo Sapiens (H.S. Néandertalensis lui-même paraît l'avoir envisagée): la paléoanthropologie a mis à jour des tombes extrêmement anciennes attestant l'exécution de rites funéraires (corps enterrés en position foetale, présence d'objets et de parures aux côtés du squelette), lesquels laissent à penser que les anciens Homo considéraient la mort comme un départ de l'âme hors du corps. Dans les religions les plus primitives qui existent encore aujourd'hui, il n'est pas question d'un Dieu créateur, mais on vénère et on craint les esprits des ancêtres. La notion d'esprit(s) et d'intentions cachés, transcendants ou immanents à la nature, est l'un des rares points communs entre (presque) toutes les religions. Cette universalité a parfois été mise au compte de l'angoisse de la mort que les hommes tenteraient par là de conjurer, mais elle s'explique sans doute aussi, en partie et entre autres, par l'expérience spontanée que chaque homme fait de lui-même, l'impression qu'il «séjourne « en son corps, qu'il est une « chose « en lui, liée à lui (sensations, émotions), mais néanmoins relativement autonome (expérience du contrôle volontaire, et d'activités mentales sans perception consciente de modifications physiologiques sous-jacentes). L'idée que « je « serait simplement un courant de conscience, une suite rapide et continue d'opérations mentales (perceptions, émotions, réflexions, réminiscences, discours interne…) sous-tendues par un organe particulier de notre corps (le cerveau), opérations perpétuellement accompagnées d'une opération parallèle (le « sentiment de soi «) est tout sauf intuitive.

« convergent.

Or le cerveau est un organe « double » (deux hémisphères), seule une glande pinéale unique etcentrale remplit les conditions requises pour être le siège de l'esprit. Les critiques du dualisme cartésien :1- Depuis Darwin, on sait que l'homme est un produit de l'évolution biologique.

Comment pourrait-il transcender leslois de la biologie ? L'illusion d'une césure radicale entre le singe et l'homme tient à l'extinction des formesantérieures de la lignée des hominidés, qui nous auraient offert sans nul doute une palette de nuances intellectuellesintermédiaires.

Il n'est pas question de nier les différences très importantes entre le fonctionnement mental de l'êtrehumain et celui du chimpanzé : par exemple, en dépit de tous les efforts de ses instructeurs, un chimpanzé nemaîtrise jamais vraiment le langage humain - cf travaux de S.

Savage-Rumbaugh : il peut parvenir à maîtriser dessymboles arbitraires pour désigner des choses, mais il ne formule jamais de phrases grammaticales ; cependant, iln'est plus guère possible de refuser catégoriquement la « conscience » et l' « intelligence » à l'animal - l'intelligence,càd un certain nombre d'aptitudes cognitives, et notamment d'aptitudes à la résolution de problèmes spécifiques(dénombrement, orientation, catégorisation…).

Ainsi, cf les pratiques « techniques » élémentaires deschimpanzés (empilements, concassage, pêche à la termite…), même si leurs performances évidemmentn'atteignent pas celles d'un homme.

Il n'empêche qu'ils sont capables de résoudre des problèmes spécifiques inéditsqui se présentent à eux, même si leurs solutions sont limitées.

Et l'explication par l'instinct (au sens de mécanismeinné rigide induisant de façon automatique des conduites communes à l'espèce) est parfois insuffisante (la pêche àla termite est pratiquée par certains groupes de chimpanzé en liberté, mais pas par d'autres).

Les chimpanzésauraient-ils donc … une âme ? La conscience de soi serait-elle le critère ? Pour la conscience du chimpanzé, cf le protocole de la tâche rouge, imaginé par G.

Gallup : un chimpanzé endormisur le front duquel on applique une tâche rouge, inodore et indolore, lorsqu'il se réveille face à un miroir, toucheimmédiatement son front et non celui de l'image spéculaire qui lui fait face.

C'est donc qu'il sait, semble-t-il, que lecorps qu'il voit est le sien, et qu'il est donc conscient de lui-même.

Le test n'est toutefois pas totalement probant.En effet, l'interprétation la plus économique du comportement du singe face au miroir est qu'il révèle une capacitéde reconnaissance visuelle de son corps propre et des modifications qui l'affectent (dont une machine pourraitdisposer).

Gallup, qui attribue la csc de soi au chimpanzé confond csc de soi et reconnaissance physique de soi.

Orrien dans l'absolu ne permet d'inférer la première de la seconde.Certes… Gallup répond cependant que dans l'absolu, la seule conscience dont je sois immédiatement sûr estla mienne, et que sur la base d'arguties similaires, je pourrais très bien la refuser aux autres hommes.

Ce serait biensûr pousser le scepticisme un peu loin, mais cela suggère que les signes de conscience que donnent le chimpanzésont tellement forts que l'on ne peut lui refuser une certaine conscience de soi.

Ces signes sont tels que l'accorderaux (autres) hommes (que soi) et pas au chimpanzé relève sans doute d'un anthropocentrisme larvé. 2- D'autres problèmes cruciaux avaient été perçus par des contemporains de Descartes lui-même, notamment parses objecteurs (entre autres : Gassendi).

Descartes fut ainsi forcé de concéder que si un esprit immatériel habite lecorps, même dans un lieu minuscule comme la glande pinéale, il a en quelque sorte des dimensions ; et qu'en outrel'interaction de l'esprit et du corps est inintelligible : comment l'esprit peut-il être affecté par les mouvements de laglande (dans l'émotion) ? Inversement, comment l'esprit peut-il mouvoir la glande de l'intérieur dans l'actevolontaire, et transmettre ainsi ses ordres au corps sous forme de message nerveux (problème du point de contactesprit/glande, et de la transmutation de la volonté comme acte mental en impulsion nerveuse physiologique) ? Maiscette inintelligibilité apparaissait à Descartes secondaire par rapport à celle d'une entité matérielle capable depenser.

Spinoza, le premier, s'efforcera de surmonter cette difficulté, en « déréifiant » l'esprit, dans sa doctrine duparallélisme : tout le problème vient de ce que Descartes a considéré l'esprit comme une « chose » (conformémentaux intuitions immédiates – erronées – de tout un chacun).

Il ne faut pas considérer le corps etl'esprit comme deux entités susceptibles d'interagir, mais comme deux réalités parallèles dont les activités ou lesétats correspondent, en totale simultanéité.

Un esprit et un corps seraient la même chose considérés de deuxpoints de vue différents.

Des neurologues contemporains aussi prestigieux que Damasio (Spinoza avait raison) etChangeux (Ce qui nous fait penser : dialogue avec P.

Ricoeur) voient dans l'Ethique de Spinoza un cadre théoriqueglobalement pertinent pour penser les rapports de l'esprit et du corps, et en Spinoza un précurseur de l'approchecérébraliste de l'esprit : l'esprit ne serait pas une « chose », mais le reflet dynamique de l'activité cérébrale –« je » ne suis pas une « chose qui pense » : « je » suis une succession ininterrompue d'opérations mentalesopérations mentales corrélées point par point à des processus physiologiques.

A contrario, Descartes est devenudans la littérature neurobiologique le paradigme de la position spiritualiste, sur lequel s'abattent les critiques.

Dès le18è s., La Mettrie, disciple « hérétique » de Descartes, étend la théorie cartésienne de l'animal-machine à l'homme.Pour Descartes, le corps de l'homme comme celui des animaux était une « machine », mais son esprit une entitéimmatérielle siégeant dans la machine, et distincte d'elle.

Avec La Mettrie, l'homme entier devient une machine : son« esprit » n'est que le reflet du fonctionnement « machinal » de son cerveau.

Au 20è s, le philosophe G.

Ryle se faitplus sévère, qui tourne en dérision le spiritualisme cartésien dans une formule célèbre : la « res cogitans » revient àadmettre l'existence d'« un fantôme dans une machine », dont en réalité la machine cérébrale peut rendre comptede toutes les activités. 3- L'apport principal de la neurobiologie, c'est de montrer que sous l'apparente unité de l'esprit se cache en réalitéun ensemble hétérogène d'aptitudes émotives/perceptives/cognitives relativement indépendantes, parfois, les unesdes autres, et solidaires chacune d'un ancrage cérébral spécifique.

L'esprit/cerveau serait donc « modulaire », selonl'expression du philosophe J.

Fodor (La modularité de l'esprit).

C'est ce que montre l'étude de lésions cérébrales. »

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