Tragédie et catharsis (Aristote)
Publié le 13/09/2015
                            
                        
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                                A noter que Freud se référa au théâtre grec pour affiner sa terminologie. Pour lui des mythes comme celui d’Œdipe correspondent à des structures profondes de l’esprit humain. Ils touchent chacun d’entre nous parce que s’y trouve réalisé ce que nous avons plus ou moins vécu sur le mode imaginaire. Cette représentation du drame qui aurait pu être le nôtre peut soulager les tensions qui sont en nous. Comme on le voit, vingt-quatre siècles après la rédaction de la Poétique, la pensée de Freud prolonge et enrichit celle d’Aristote.
La tragédie est donc l’imitation d’une action noble, conduite jusqu’à sa fin et ayant une certaine étendue, en un langage relevé d’assaisonnement dont chaque espèce est utilisée séparément selon les parties de l’œuvre ; c’est une imitation faite par des personnages en action et non par le moyen d’une narration, et qui par l’entremise de la pitié et de la crainte, accomplit la purgation des émotions de ce genre.
Puisque nous admettons la classification des mélodies telle que la font certains philosophes, qui distinguent des chants éthiques (moralisants), dynamiques (pratiques), exaltants (enthousiastes) et attribuent à chacune de ces classes le type particulier d’harmonie qui lui correspond, et que, d’autre part, nous disons qu’on doit étudier la musique, non pas en vue d’un avantage unique, mais de plusieurs (en vue de l’éducation et de la “purgation” — ce que nous entendons par «purgation», terme employé ici en général, nous en reparlerons plus clairement dans le traité sur la Poétique — et, en troisième lieu en vue du divertissement, de la détente et du délassement après la tension de l’effort), il est évident qu’on doit employer tous les modes musicaux, mais non pas tous de la même manière: pour l’éducation, on utilise les modes les plus “éthiques” ; et, pour l’audition d’œuvres exécutées par d’autres, on se sert aussi des modes “dynamiques” et «exaltants». 4. Les émotions que ressentent avec force certaines âmes se retrouvent en toutes avec plus ou moins d’intensité — ainsi la pitié et la crainte, ou encore l’« enthousiasme » —, car certains individus ont une réceptivité particulière pour cette sorte d’émotion, et nous voyons ces gens-là, sous l’effet des chants sacrés, après avoir eu recours à ces chants qui mettent l’âme hors d’elle-même, recouvrer leur calme comme sous l’action d’une “cure médicale” ou d’une « purgation ». 5. C’est précisément le même effet que doivent nécessairement éprouver les gens enclins à la pitié ou sujets à la crainte et les tempéraments émotifs en général, et les autres dans la mesure où ces émotions peuvent affecter chacun d’eux ; et pour tous se produit une sorte de “purgation” et un soulagement mêlé de plaisir ; de la même manière aussi les chants de “purgation” procurent une joie innocente.
                                «
                                                                                                                            mélodie et 	chant».
                                                            
                                                                                
                                                                    	Par 	«espèces 	utilisées séparé	
ment», 	il veut indiquer  que certaines  parties sont seule
ment  déclamées  en vers  alors  que d'autres  bénéficient 
de  l'aide  du chant.
                                                            
                                                                                
                                                                    
Nous  utilisons  la traduction  de Michel  Magnien  qui 
propose  en 
Livre de poche 	une  nouvelle  traduction  de 
la 	
Poétique 	en  l'accompagnant 	d'un 	très  riche  appareil 
documentaire.
                                                            
                                                                                
                                                                    
Avant  d'évoquer 	
les 	différentes  interprétations  de la 
notion 	
de« 	catharsis>>, 	il est  indispensable  de complé
ter  la citation  extraite de la 
Poétique 	par 	les 	développe
ments  sur la même  notion  contenue  dans la 
Politique.
                                                            
                                                                                
                                                                    	
Ce texte  vient  au moment  où Aristote,  parlant 	del 	'édu
cation,  évoque 	
le 	rôle de la musique  : 	
«Puisque 	nous admettons  la classification  des mélo
dies  telle  que la font  certains  philosophes,  qui distin
guent  des chants  éthiques  (moralisants),  dynamiques 
(pratiques),  exaltants (enthousiastes)  et attribuent  à 
chacune  de ces  classes 	
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d'autre 	part,  nous disons 	qu'on 	doit étudier  la musique,  non pas en vue 	d'un 	
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