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Traité de la nature humaine, Livre I : L'Entendement Troisième partie, section XIV - Hume

Publié le 22/03/2015

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L'idée de nécessité résulte de quelque impression. Il n'est pas d'impression transmise par nos sens qui puisse donner naissance à cette idée. Il faut donc qu'elle provienne de quelque impression interne, ou impression de réflexion. Il n'y a pas d'impression interne qui soit en relation avec ce dont nous parlons, hormis la tendance, que produit la coutume, à passer d'un objet à l'idée de son concomitant habituel. Telle est donc l'essence de la nécessité. Somme toute, la nécessité est quelque chose qui existe dans l'esprit, non pas dans les objets, et il nous est à jamais impossible d'en former une idée, même la plus lointaine, si nous la considérons comme une qualité appartenant aux corps. Soit nous n'avons pas d'idée de la nécessité, soit la nécessité n'est rien que la détermination de la pensée à passer des causes aux effets et des effets aux causes, conformément à l'expérience de leur union.

Traité de la nature humaine, Livre I : L'Entendement Troisième partie, section XIV, trad. Ph. Baranger — Ph. Saltel,

© éd. Flammarion, 1995, p. 242.

 

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« Textes commentés 41 L'inférence causale n'ayant de fondement ni a priori ni a posteriori, et se présentant néanmoins comme unfait de la nature humaine, il s'agit de lui trouver une origine.

Or toute la différence entre la conjonction constante des événements qui se présentent dans l'expérience et la connexion nécessaire qui est affirmée réside dans l'idée de nécessité, qui représente la pierre d'angle de toute la connaissance scientifique et de nos « attentes natu­ relles » : nous pensons de certaines relations qu'elles sont immuables et se répéteront toujours à l'identique, comme si l'un des deux événements conte­ nait en lui-même le pouvoir de produire l'autre!.

Ce pouvoir étant introu­ vable, le sceptique doit appliquer le principe de vérification empiriste : « de quelle impression dérive une telle idée ? », qui le conduit directement à une impression de réflexion, c'est-à-dire d'un genre tel qu'elle est une réaction de l'esprit au plaisir ou au désagrément accompagnant ses perceptions.

Cela nous instruit sur la nature de la coutume : d'ordre passionnel, elle se donne comme une préférence marquée pour la constance, qu'elle installe au rang de loi.

Hume y insiste en parlant ici de «tendance», «quelque chose qui est dans l'esprit, non pas dans les objets ».

Et telle est bien la seule solu­ tion qui s'offre au scepticisme, solution bouleversant notre conception de la causalité en montrant qu'elle peut n'être qu'une croyance produite par une inclinaison : « Quoi ! L'efficacité des causes, résider dans la détermination de l'esprit2 ! ».

Une telle proposition semble présenter un vice de forme, puisqu'elle dé­ construit notre conviction de la nécessité causale pour lui attribuer finale­ ment.

..

une cause nécessaire, une «détermination».

Cela est vrai, et rend le « système » humien plus complexe et plus délicat, en le connotant lui-même de l'incertitude des raisonnements empiriques, telle qu'il l'aura mise en lumière.

Toute inférence causale, dont celles de la philosophie, n'est qu'une hypothèse d'autant plus probable que les cas qui peuvent s'expliquer par elle sont nombreux.

Le même philosophe qui aura produit la critique la plus fameuse de l'idée de nécessité se sera donc affirmé nécessitariste dans le traitement des questions du hasard, du miracle ou de la liberté, toutes excep­ tions au cours ordinaire des choses qui se ramènent à l'incertitude de nos inférences ; « si fort que nous imaginions sentir de la liberté au-dedans de nous-mêmes, un spectateur peut d'ordinaire inférer nos actions de nos motifs et de notre caractère ; et lors même qu'il ne le peut, il conclut en général qu'il le pourrait3 ».Telle est la version empirico-sceptique du spinozisme.

l.

«les termes d'efficacité, de principe actif.

de pouvoir, de force, d'énergie, de nécessité, de connexion et de qualité productive sont tous à peu près synonymes » (TNH, iii, 14, p.

232).

2.

TNH 1, iii, 14, p.

244.

3.

EEH, VIII, n., p.

183. »

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