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Un écrivain contemporain déclare : « C'est une profonde erreur de porter un roman à l'écran. » Partagez-vous ce sentiment ?

Publié le 13/04/2009

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  • Remarques sur le sujet

   1. Est posé ici le problème de l'adaptation d'une œuvre littéraire au cinéma; le sujet ne porte cependant que sur le roman. On laissera donc de côté le problème très différent de l'adaptation d'une pièce de théâtre. Par contre on pourra, en considérant qu'elle fait partie du genre romanesque, parler de la nouvelle.    2. Il y a bon nombre de candidats qui laisseront ce sujet de côté : ce sont les candidats dont la culture cinématographique est faible et qui en particulier n'ont jamais vu de films tirés de romans qu'ils ont lus.  Les candidats qui ont beaucoup lu et vu beaucoup de films veilleront à éviter un défaut fréquent : celui qui consiste à multiplier à l'excès les références, et de ce fait à disperser l'attention. A la limite, le devoir pourrait être fait à partir de l'analyse d'une seule adaptation.    3. Les possibilités de plan sont nombreuses. On peut, bien que ce ne soit pas la meilleure solution, organiser le devoir autour du commentaire de deux ou trois œuvres marquantes.  On peut aussi prendre comme centres d'intérêt les oppositions traditionnelles entre les deux genres et les discuter.  

  • Introduction

   Peut-être parce qu'il est né parmi les forains et les bateleurs, le cinéma a longtemps été tenu en suspicion dans les milieux intellectuels; les gens du cinéma étaient des barbares qui menaçaient la « culture cultivée «, et il importait de limiter leurs empiétements. Il n'est donc pas étonnant que ce soit à un écrivain qu'on doive l'affirmation selon laquelle « C'est une profonde erreur de porter un roman à l'écran «.  Aujourd'hui les positions sont heureusement moins tranchées : hommes de lettres et cinéastes collaborent. Mais le problème demeure : une adaptation peut-elle être autre chose qu'une trahison?  

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« 6.

Durée du film : Toujours pour des raisons commerciales, le film doit durer environ deux heures.

Renoir, qui avait réalisé une MadameBovary de trois heures, devra en supprimer un tiers, d'où évidemment déformation de l'œuvre.A l'opposé, le réalisateur est amené à faire du remplissage pour que l'adaptation d'une nouvelle dure deux heures.Conclusion de la première partie :Les raisons pour que l'adaptation d'un roman soit un échec sont nombreuses; la liste est d'ailleurs longue desmauvais films tirés de bons romans.

On comprend donc que la plupart des romanciers soient déçus par lesadaptations tirées de leurs œuvres; ils ont l'impression qu'on éprouve à visiter une maison aimée transformée pard'autres.

Et leur amertume envers les gens du cinéma pourrait se résumer par la formule de l'un d'eux : « Lalittérature leur résistait, ils l'ont assassinée.

» Deuxième partie : causes « intrinsèques » de la dénaturation d'un roman par l'adaptation Cependant, lorsque toutes les contraintes évoquées ci-dessus sont absentes, lorsque le réalisateur est parfaitementlibre (situation utopique mais dont on se rapproche parfois), lorsqu'il travaille même en collaboration avec leromancier, il arrive que l'adaptation soit un échec, que l'essentiel du roman ne soit pas rendu dans le film.

Ceci peuts'expliquer par un certain nombre d'irréductibilités entre les deux genres. 1.

Le problème du temps : Le temps serait la matière du roman.

Aucun autre genre ne saurait mieux traduire son emprise sur les choses et lesêtres.Le film ne peut rendre en deux heures (ou même en quatre) l'écoulement du temps dans son flux insaisissable.

D'oùdifficulté de traduire des œuvres comme Anna Karénine, ou même impossibilité pour l'œuvre de Proust ou un romancomme Jude l'obscur de Thomas Hardy. 2.

Le problème de l'atmosphère, de l'ambiance : L'ambiance est souvent faite d'impondérables plus faciles à suggérer par l'écriture que par l'image.

Difficulté par exemple à restituer l'atmosphère des romans de Simenon.

Lechoix de l'acteur est ici primordial; aucun de ceux qui ont tenté l'épreuve (Harry Laughton, Jean Gabin, JeanRichard) n'a vraiment réussi à recréer l'atmosphère indissociable du personnage de Maigret. 3.

Le problème de la vie intérieure : La complexité de la vie intérieure ne serait pas accessible au cinéma plutôt fait pour l'action et la description.

Ceciétait particulièrement vrai à l'époque du muet et aux débuts du parlant. 4.

Le problème de la différence de nature entre les deux genres : La meilleure preuve que l'on puisse donner de cette différence est la constatation suivante : chaque fois qu'un réalisateur à voulu être fidèle, suivre le roman detrès près, il a finalement trahi l'esprit du livre en voulant en respecter la lettre.Exemple : L'Étranger de Camus adapté par Visconti. Conclusion de la deuxième partie : Il y a donc de profondes différences entre les deux genres.

Et ce ne sont pas seulement les défenseurs du romanqui refusent l'adaptation; ce sont aussi les défenseurs du septième art qui, au nom de la spécificité du cinéma,refusent d'en faire un parent pauvre de la littérature.

Le cinéma doit être pour eux un art pleinement original, et nonun art qui reste à la remorque du roman ou du théâtre. Troisième partie : j'ai rencontré des adapteurs heureux On trouve donc aussi bien chez les romanciers (qui y voient une dégradation de leur art) que chez les cinéastes (quiy voient une subordination du cinéma à la littérature) des ennemis de l'adaptation d'un roman au cinéma; lesarguments ne manquent pas, nous l'avons vu.

Cependant le refus de l'adaptation est aujourd'hui beaucoup plusrarement affirmé que par le passé, et ceci pour deux raisons : le cinéma est devenu un art plus completqu'auparavant, et la notion d'adaptation est mieux définie que par le passé. A.

Le cinéma est un art plus complet que par le passé.

Ce que nous avons dit plus haut sur les incompatibilités entre les deux genres était particulièrement vrai à l'époque du muet et au début du parlant.

Mais les procédés ducinéma et ses techniques se sont affinés, et on peut dire que le cinéma est capable de tout exprimer.

Il est devenu« Un moyen d'écriture aussi souple et aussi subtil que celui du langage écrit » (Astruc).Exemples : Expression du temps : Citizen Kane de Wells, la recherche du temps perdu; idem avec Fellini, le tempsretrouvé; expression du temps qui se répète dans les adaptations par Ophuls des nouvelles de Maupassant; le poidsdu passé dans Hiroshima mon amour, etc.Le cinéma peut très bien être un art du temps et de la fuite du temps.Expression de la vie intérieure : le monologue intérieur peut être rendu par la voix off, le flash-back, lasurimpression, les effets de montage, les interventions de la musique, etc.Le film peut très bien traduire une ambiance (Le Silence de la mer, d'après Vercors).. »

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