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L'IMMIGRATION dans les années 1980: Histoire

Publié le 30/11/2018

Extrait du document

immigration

Jamais le monde occidental ne s’est autant préoccupé de ses immigrés qu’en ces années quatre-vingt. Laissés-pour-compte de la croissance ou premières victimes de la crise, relégués dans les tristes banlieues des grands centres industriels, mal admis dans la société d’accueil, mais déjà étrangers dans leur propre pays, ces marginaux sont au centre de l’actualité.

 

En France, faits divers dramatiques et grandes crises nationales les propulsent sur le devant de la scène sociale. En août 1989, la destruction d’une mosquée à Charvieu-Chavagneux (Isère) fait écho à la mise à sac du foyer d’immigrés de Saint-Maur-des-Fossés (Val-de-Marne), la veille de Noël 1980. Dans la nuit du 14 au 15 novembre 1983, un touriste -algérien est jeté d’un train par ses assassins, trois candidats légionnaires. Incident isolé que ce drame dont Roger Hanin tire le sujet d’un film, Train d’enfer? Sans doute. Pourtant la violence s’organise. En août 1986, quatre militants des «Commandos de France contre l’invasion maghrébine» meurent dans l’explosion de leur propre bombe. Non sans avoir revendiqué, en mai-juin, plus de six attentats à Marseille, Toulon, Fréjus et Draguignan. Trois ans plus tard, la police écroue le président du parti nationaliste français et européen (PNFE). Ce groupuscule néo-nazi est soupçonné d’être à l’origine d’attentats meurtriers contre les foyers Sonacotra de Cannes et de Cagnes-sur-Mer en 1988. Confrontés à l’hostilité de municipalités xénophobes, victimes du terrorisme d’extrême droite, les immigrés font preuve d’un étonnant pouvoir de mobilisation que révèlent tour à tour les grands conflits sociaux de la décennie. A la surprise des téléspectateurs devant les images de grévistes maghrébins en prière dans les usines paralysées de Citroën et de Renault, en 1982-1983, succède l’émotion, en décembre 1986, à la mort de Malik Oussekine lors des manifestations d'étudiants et de lycéens.

 

Vive émotion aussi outre-Manche où, dès avril 1981, dans le quartier londonien de Brixton, des émeutiers jamaïcains font reculer la police à plusieurs reprises. Bilan des affrontements: près de 250 blessés. Trois mois plus tard, la violence a gagné les autres quartiers d’immigrés de Londres et des grands centres industriels: Birmingham, Newcastle, Huit, Leicester, Derby, Nottingham, Hudders-field, Liverpool enfin où la «Dame de fer» est accueillie à coups de tomates, avant d’affronter les foudres de l’opposition parlementaire. En septembre 1985, alors que la violence fait rage de nouveau, c’est à coups de pierres qu’est reçu le ministre de l’intérieur, Douglas Hurd, dans le quartier d’immigrés de Handsworth, à Birmingham, sur les lieux d’incendies qui ont fait deux morts. En Allemagne fédérale, pôle d’attraction de très nombreux immigrés turcs, des jeux informatiques se donnent pour but, tout simplement, de les exterminer. Sinistre parodie des massacres hitlériens...

 

Des FLUX PLANÉTAIRES

 

Le phénomène de l’immigration ne date pourtant pas d’hier. Pas plus qu’il ne se borne à la seule Europe occidentale. Mais les années quatre-vingt voient à la fois une profonde mutation qualitative de la population immigrée d’Europe et une redistribution de la carte

MALAISE DANS L’IMMIGRATION.

 

En France, les immigrés sont les premières victimes de la crise économique et une cible désignée pour l'extrême droite renaissante.

 

Ci-contre: un gréviste à l’usine Talbot en janvier 1984.

 

© Aventurier - Gamma

mondiale des flux migratoires. Aux États-Unis, où le melting pot appartient depuis l’origine au credo officiel, l’Amérique latine, l'Afrique et surtout l’Asie se substituent de plus en plus au Vieux Monde comme source d’une immigration évaluée à quelque 600 000 nouveaux venus par an (sans compter les immigrants illégaux) et que réglemente à dater de 1986 l’immigration Reform and Control Act (IRCA). Pays fermé, s’il en fut, à toute immigration, le Japon doit pourtant faire face, conséquence de son développement, à des milliers de «clandestins» qui taillent un premier accroc dans un tissu social pourtant réputé pour sa cohésion.

 

Au Proche-Orient, l’inauguration du port de Noueibaa, en 1985, précipite vers l’eldorado irakien un flot presque ininterrompu de centaines de milliers d’«oiseaux migrateurs» égyptiens. En l’espace de deux mois seulement, de janvier à mars 1983, le Nigeria expulse plus de 2 millions de travailleurs étrangers (un million de Ghanéens, 500 000 Nigériens, des Camerounais, Togolais, Tchadicns, etc.). En Inde enfin, c’est l’explosion en 1983, quand des millions d’immigrés du Népal et du Bangladesh, qui depuis 1961 trouvent asile en Assam, se heurtent à la montée du nationalisme assamais: en quelques jours de terrifiants pogroms, des milliers d’hommes et de femmes périssent aux mains des nationalistes, dont le programme «anti-immigrés» triomphe aux élections de décembre 1985.

 

Si l’Europe n’a donc pas le monopole de la violence, elle n’en est pas moins brutalement confrontée à la «question immigrée». Dès 1973, le choc pétrolier avait enrayé la noria des vagues migratoires qui déferlaient, depuis une quinzaine d’années, dans les usines ou sur les chantiers à l’appel d’une industrie alors en pleine expansion, trop heureuse de recruter en Turquie ou dans les anciens empires coloniaux français ou britannique une main-d’œuvre bon marché qui lui faisait défaut sur place. Le 3 juillet 1974, par l’arrêt officiel de l’immigration, Vàléry Giscard d’Estaing donnait le coup d’envoi d’une «nouvelle politique» orchestrée en France par un secrétariat d’État aux Travailleurs immigrés confié d’abord à Paul Dijoud, puis à Lionel Stoléru. Peu qualifiés, et donc menacés par la robotisation, concentrés dans les secteuts les plus touchés par la crise, les immigrés subissaient les premiers les effets du chômage et de l’inflation, alors même que la fermeture des frontières les poussait à se fixer dans leur pays d’accueil et à y faire venir leurs familles. De provisoire, l’immigration, au seuil des années quatre-vingt, se fait définitive. En 1979, le triomphe de la révolution iranienne encourage les musulmans à revendiquer leur identité religieuse. Dès lors, la multiplication des mosquées, lieux de culte et associations islamiques contribue à leur donner une présence qui ne tarde pas à en faire la cible désignée d’une extrême droite en pleine expansion.

immigration

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MALAISE DANS t:IMMIGRATION.

Les immigrés, laiss é s ·pour-compr e de la croissance, vivenr souvenr confinis darrs des logemenrs insalubres.

Ci-coll/re: l'•apparrement» d'urre famille immigrée, à Paris, près de la gare de Lyo n.

© Stiplrane Duroy .

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En France, l'immigration devienr un rhème de campagne narional.

MALAISE DANS I.:lMMIGRA TION .

De violenres émeutes raciales onr lieu à Londres en jui//et /981.

Ci-conrre: confirence de presse de Jean-Marie Le Pen au siège du From nœional, en ocrobre 1987.

© Ghard Rancinan -Sygma En quelques années, celle-ci sort de la marginalité pour porter sur le terrain électoral une agitation que des groupes terroristes entretiennent par la violence.

Son seul fonds de commerce: l'immi· gration.

Outre-Rhin, c'est la montée des républicains, assez specta­ culaire pour que l'éditorialiste américain William Pfaff, après les élec­ tions européennes de 1989, s'inquiète de ce qu'une Allemagne réunifiée ne ressuscite les ambitions du lll" Reich.

En France, la croisade xénophobe du Front national investit les médias après les 17% de Jean-Pierre Stirbois aux élections municipales de Dreux, en septembre 1983 -Dreux, qui confirmera encore son vote en faveur du Front national en élisant Marie-France Stirbois députée avec 60% de suffrages, en décembre 1989.

D'émissions télévisées à Large au­ dience en manifestations et en meetings fertiles en déclarations à l'emporte-pièce, l'ancien député poujadiste Jean-Marie Le Pen mène tambour battant une campagne qui le conduit à l'élection présiden· tielle de 1988.

S'il n'y joue pas le rôle d'arbitre que semblaient présa­ ger les sondages, il n'en parvient pas moins à jeter le trouble au sein des grandes formations, ainsi sommées de préciser leur «politique de l'immigration».

UNE QUESTION EMBARRASSANTE À droite comme à gauche, la «question des immigrés» se révèle vite une source d'embarras.

Par définition, le parti socialiste a vocation à protéger tous les exclus de la croissance.

En pleine cam­ pagne présidentielle de 1981, le candidat François Mitterrand signe le manifeste «contre la France de l'apartheid», position de pri�cipe qu'il renouvelle à plusieurs reprises une fois devenu chef de l'Etat.

Mais c'est précisément à propos d'un projet de loi sur l'immigration qu'é· clate, en septembre 1981, le premier conft.it entre le gouvernement d'union de la gauche et sa majorité parlementaire.

Trois ans plus tard, l'inquiétude renaît lors de la présentation par le ministre des Affaires sociales et de la Solidarité nationale Georgina Dufoix d'un projet de mesures visant notamment à soumettre à des règles plus strictes les candidats immigrés au regroupement des familles.

À la fin de la décennie quatre-vingt, le projet d'attribution du droit de vote aux immigrés lors des élections municipales, qui constituait l'une des 101 propositions socialistes de 1981, sera passé aux oubliettes.

Ces revirements et ces contradictions n'épargnent pas les rivaux du PS.

Lors de san face-à-face télévisé d'octobre 1985 avec Laurent Fabius, Jacques Chirac, en excluant toute alliance avec l'ex­ trême droite et en se déclarant proche de son interlocuteur sur la question de l'immigration, veut rassurer l'électorat modéré.

Le mois suivant, Raymond Barre affirme à son tour le respect dû aux immigrés «qui ont contribué à notre prospérité nationale».

Mais au lendemain des élections législatives de 1986, la politique du dirigeant du RPR, avec les propositions de refonte du Code de la nationalité et l'adoption de la loi restrictive de Charles Pasqua, est d'une telle sévérité à l'égard de l'immigration qu'elle indispose une large partie de son électorat de droite.

En octobre 1986, l'incident du. »

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