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Article de presse: Belgrade reconnaît la victoire de l'opposition dans quatorze villes

Publié le 22/02/2012

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11 février 1997 - La coalition d'opposition Zajedno (Ensemble) a remporté les élections municipales du 17 novembre dans quatorze villes de Serbie, dont Belgrade ! Le Parlement serbe, contrôlé par le parti du président Slobodan Milosevic, a voté, mardi 11 février, la "loi spéciale" reconnaissant ces victoires électorales. Plus de deux mois et demi de protestations intenses, sans précédent en Serbie, auront été nécessaires pour parvenir à ce résultat. Les opposants d'Ensemble et les étudiants vont cependant poursuivre leur mouvement de contestation et se retrouver chaque jour dans les rues de la capitale, tant le sentiment de méfiance est fort à l'égard d'un pouvoir toujours soupçonné de ne pas avoir rendu les armes. Les protestataires vont attendre dans le froid, le sifflet aux lèvres, que les conseils municipaux soient installés dans leurs fonctions et ils vérifieront la répartition exacte des sièges avant de crier victoire. La loi adoptée par le Parlement doit encore être publiée au journal officiel et surtout appliquée dans chaque ville. Les manifestations quotidiennes devraient alors s'interrompre mais les opposants politiques et les étudiants ont annoncé leur volonté de continuer à exiger des réformes démocratiques, notamment la liberté des médias et l'indépendance de la justice. Effets de l'embargo L'opposition craint que le contrôle des télévisions et radios locales ne soient un nouveau motif de confrontation avec le Parti socialiste (SPS), dans chaque ville où la victoire de l'opposition a été reconnue. Depuis cinq ans, Slobodan Milosevic a largement utilisé les médias audiovisuels pour asseoir son autorité et défendre sa politique, et peu de Serbes imaginent que le président lâchera facilement ses outils de propagande. Enfin, Ensemble doit vérifier qu'elle aura bien les budgets correspondants à la gestion de ces quatorze villes, et que les fonds ne seront pas retenus par le pouvoir central. Lorsque le pouvoir a pris la décision d'annuler les victoires de l'opposition en novembre dernier, nul n'aurait pu imaginer que la Serbie allait peu à peu se mobiliser au point de déstabiliser le président Milosevic. En cinq années de guerre, le président serbe était parvenu à réduire au silence son opposition, à museler la majorité des médias indépendants et surtout à étouffer tout débat sur son projet pour l'ex-Yougoslavie. Une contestation silencieuse est née uniquement lorsque la population a commencé à souffrir des effets de l'embargo économique imposé par la communauté internationale. Finalement, les Serbes qui avaient suivi assez docilement leur chef pendant la guerre, n'ont pas supporté qu'il bafoue le résultat des élections une fois la paix revenue. L'effet "Zajedno" a alors correspondu avec les aspirations populaires, notamment à Belgrade et dans les principales villes de province. Jusqu'alors éclatée, dispersée, l'opposition est parvenue à s'unir autour d'un objectif clair : obtenir la gestion des municipalités et des médias locaux, là où elle avait gagné. Tout en votant la loi concoctée par Slobodan Milosevic, le Parlement serbe a marqué sa fermeté à l'égard de cette opposition devenue dangereuse. Son président, Mirko Marjanovic, a accusé la coalition Ensemble d'avoir organisé les manifestations pour "prendre le pouvoir par la violence" et lui a reproché d'avoir "entaché la réputation de la Serbie à travers le monde". Si les députés ont été contraints de suivre les recommandations de l'Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), ils n'en ont pas moins manifesté leur mécontentement. D'où la crainte que, dans les villes et les conseils municipaux, la bataille pour le pouvoir s'annonce aussi rude que la bataille pour la reconnaissance des résultats. "Même endroit" demain "Même heure demain, même endroit", a déclaré mardi Zoran Djindjic, le futur maire de Belgrade, aux manifestants. "Nous nous verrons souvent et il se peut que nous ne nous séparions pas", a ajouté un autre chef de l'opposition, Vesna Pesic. La coalition Ensemble va tenter de maintenir vivace la flamme qui s'est emparée des Belgradois, pour que l' "esprit du mouvement Zajedno" survive aux concessions arrachées à Slobodan Milosevic. Les manifestants ont prouvé qu'un changement était possible en Serbie, sans que l'ex-Yougoslavie risque à nouveau de s'embraser. Des pays occidentaux, dont les Etats-Unis et la France, ont clairement soutenu les dirigeants d'Ensemble en dépit de leur "partenariat daytonien" avec l'homme fort de Belgrade. Sans programme clair sur la question bosniaque, et encore moins sur la question albanaise au Kosovo, l'opposition a su s'imposer comme une force politique en Serbie. Et elle va se préparer, en tentant de conserver son unité, sous le regard méfiant de la population serbe et sceptique des chancelleries occidentales, à affronter les scrutins nationaux (présidentiel et législatif) de la fin de l'année. REMY OURDAN Le Monde du 13 février 1997

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