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Article de presse: Cuba, si !

Publié le 22/02/2012

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cuba
1er janvier 1959 - Un an après la prise de pouvoir par Fidel Castro, l'envoyé du Monde, Claude Julien, était en reportage à Cuba. Malgré les nuages de poussière soulevés par les pneus, une ribambelle de gamins courent derrière la voiture. Ils sont dix, vingt, bientôt trente ou quarante, presque en guenilles, pieds nus, hurlant de joie sur notre passage. Ils sortent de misérables taudis alignés le long du mauvais chemin dont les ornières profondes nous condamnent à une allure de tortue. Cette escorte enthousiaste acclame le commandant Escalona, chef de la province de Pinar-del-Rio, qui soudain s'est arrêté de parler. Que pourrait-il dire ? Il lui suffit de savoir que je regarde. Là, sous mes yeux, la misère des paysans, une misère qui deux ans plus tôt, sous la dictature de Batista, m'était apparue comme indissolublement liée au régime... et peut-être même au pays. Deux cents mètres plus loin les petites maisons neuves qui dans quelques jours deviendront la propriété de chacune de ces familles qui osent à peine croire au miracle. S'il existe ici des contre-révolutionnaires, il faut croire qu'ils ne sont pas dangereux. Le commandant de la province circule sans armes. Nous revenons très tard vers la capitale de la province. Jusqu'à l'horizon les champs de tabac sont entièrement recouverts de toile de jute qui les protège et assure à la récolte une qualité supérieure. Dans la ville les gens prennent le frais sur le pas de leur porte. Nous entrons dans la caserne. Etrange caserne sans poste de garde, sans la moindre sentinelle. Les bâtiments s'étendent au carré autour d'une cour où pousse du gazon. J'ouvre une porte. Une main tourne un interrupteur, et en même temps que la lumière jaillissent les pleurs d'une trentaine de bébés qui commençaient à s'endormir en suçant leur pouce. Je m'enfuis précipitamment vers la pièce voisine. Dans les lits repeints en blanc les mercenaires de l'armée batistienne ont ici fait place à quarante fillettes qui se dressent sur leur séant et m'accablent de questions en me montrant les jouets qu'elles ont reçus pour la fête des Rois. Plus loin c'est le dortoir des garçons, puis le réfectoire, puis les salles de classe. Des infirmières et des assistantes sociales s'occupent de ces cent soixante enfants qui voilà deux ans erraient toute la journée dans la rue, abandonnés par leur famille, à moins que celle-ci ne les ait entraînés à la mendicité et au vol. Pour les filles, dès treize ou quatorze ans, il n'était pas rare qu'elles soient envoyées dans la capitale, où des trafiquants les livraient à la prostitution. Hier abandonnée, cette jeunesse a maintenant un toit et un couvert, et des institutrices lui enseignent la lecture et l'écriture, en attendant de lui donner un métier. En dehors de la ville nous pénétrons dans une seconde caserne, ou plus exactement dans un camp militaire. Au bout du camp un bâtiment est affecté à la construction d'éléments préfabriqués pour les maisons qui seront données aux paysans. L'armée rebelle n'a plus besoin de s'initier au maniement des armes qui lui ont permis de libérer le pays. Alors elle travaille. Sous un vaste hangar elle fabrique d'étranges fourneaux à pétrole : tôle mince émaillée en bleu ou en rose bonbon, avec deux brûleurs et un réservoir. Elle construit ou entretient les routes et les ponts. Elle édifie de nouveaux villages où la population sera à l'abri du soleil, de la pluie et de la vermine. Elle creuse des piscines et bâtit des motels pour le tourisme populaire. Dans une caserne isolée, elle répare les murs et le toit endommagés par les combats de la libération, et dans une pièce déjà remise en état un médecin itinérant donne une première consultation à des femmes accourues de plusieurs kilomètres à la ronde. Ce n'est pas le goût des armes qui avait poussé les paysans et les étudiants à se réfugier dans le maquis. Leur victoire n'en a pas fait des hommes de guerre. Redoutables au combat, ils ont gardé cet idéalisme un peu échevelé qui leur a permis de vaincre. " La liberté ou la mort ", disaient-ils alors. Le choix était simple dans sa brutalité. Maintenant qu'ils ont la liberté, leur tâche est beaucoup plus complexe. Il s'agit de chasser la misère, de rendre au pays son indépendance économique. Il n'est plus question de mourir, mais de travailler. Alors l'armée rebelle conduit des tracteurs et des bulldozers, construit, creuse, cultive. Un pays ne sort pas brutalement de la corruption et de la tyrannie pour devenir sans heurts une association de bienfaisance. Il doit bien y avoir une paille dans le métal. Il y a des adversaires. Que disent-ils ? Jeune et beau, chaussé de courtes bottes élégamment décorées, il m'accueille avec une prudente courtoisie. Il se laisse aller aux confidences. " La loi de réforme agraire, dit-il, n'est pas appliquée. Elle prévoit que nul ne peut posséder plus de 400 hectares. Or on m'a tout pris, on ne m'a pas laissé la parcelle de terre que j'ai le droit de conserver. Les services administratifs outrepassent la volonté de Fidel Castro. Je le connais, j'ai financé la révolution, je vais essayer de le voir pour lui expliquer que la loi est violée "... Parmi les premières terres frappées par la réforme agraire figurent celles de Fidel Castro lui-même et de ses parents. Le statut juridique des terres saisies n'est pas simple. En espagnol on dit qu'elles sont " intervenidas ", c'est-à-dire placées sous séquestre. Un jour un tribunal fixera leur sort et laissera aux anciens propriétaires la portion que la loi les autorise à conserver. " Oui, dit-il, mais en attendant je suis ruiné. Ce n'est d'ailleurs qu'un aspect de la question. Le plus grave c'est qu' " ils " manquent d'expérience. La récolte de tabac sera moins bonne cette année. Le cheptel est mal soigné les bestiaux qui arrivent aux abattoirs pèsent jusqu'à 200 kilogrammes de moins que la normale. Les grands propriétaires terriens connaissaient leur travail, mais la plupart sont partis, comme les spécialistes américains de l'élevage. Maintenant c'est une catastrophe. Je suis ruiné, mais surtout l'ensemble du pays risque d'être conduit à la faillite économique "... D'autres personnages propagent les mêmes objections. On a bien fait venir des ingénieurs hollandais pour de grands travaux d'irrigation, mais on leur reproche de ne rien connaître aux cultures tropicales. Pour les rizières, qui viennent d'être crées, il y a aussi des agronomes japonais, mais il paraît qu'on ne pourrait pas à Cuba cultiver le riz comme au Japon. Plusieurs critiques, que j'avais connus hostiles à Batista, m'expriment aussi leur crainte que la révolution échoue économiquement en voulant aller trop vite, en voulant tout faire à la fois malgré la pénurie de spécialistes. Mais mon interlocuteur m'intéresse plus que tous les autres, car il a financé une révolution dont il est aujourd'hui la victime. -Et si c'était à refaire ? lui dis-je. -Je recommencerais. Tout vaut mieux que la dictature de Batista... Je donnerais encore des centaines de milliers de dollars... Mais quand même... Les propriétaires terriens qui n'avaient pas souhaité et aidé la révolution sont en exil. Je ne les rencontrerai donc pas. Dans d'autres cercles j'ai trouvé des adversaires virulents. Tous admettent cependant que la réforme agraire était indispensable ils en critiquent les modalités d'application. La distribution des terres Je me suis alors reporté aux statistiques héritées de la dictature. Onze compagnies américaines contrôlaient 1 181 088 hectares, représentant 47,4 % des terres consacrées à la canne à sucre. Neuf propriétaires cubains contrôlaient 623 700 hectares, représentant 25,1 % du total. A elle seule, la Cuban Atlantic Sugar Co possédait 250 000 hectares de champs de canne à sucre, soit la superficie de la moitié d'un département français. Une grande partie de ces terres était laissée en friche. C'est pourquoi la loi de réforme agraire a institué un système assez compliqué : les terres en friche sont automatiquement saisies et distribuées aux paysans en outre, la proportion des terres placées sous séquestre est calculée en fonction de leur productivité. Autrement dit la loi considère que les " propriétaires " n'ont aucun droit sur les terres qu'ils ne cultivaient pas, et des droits limités sur les terres dont le rendement était insuffisant. Les premières terres saisies ont été celles des dignitaires du régime déchu. Il s'agissait de domaines volés, ou légalement achetés avec de l'argent volé dans le trésor public. J'ai partagé le repas des paysans et des barbudos de la finca El Rosario : 5 400 hectares, quatre mille vaches, que s'était appropriés un ancien ministre. Un domaine quarante-cinq fois moins grand que ceux de la Cuban Atlantic Sugar Co... Les quelque deux cents familles de paysans qui en avaient été chassées sont revenues et ont retrouvé le travail qui assure leur subsistance. L'armée leur construit des petites maisons de quatre pièces en brique qui prennent des allures de palaces à côté des chaumières d'autrefois. Ces paysans, ils étaient plus de cent mille sur des terres qui ne leur appartenaient pas. Environ quarante-six mille avaient obtenu le privilège d'une location. Près de sept mille étaient sous-locataires. Quelque trente-trois mille travaillaient comme métayers. A un échelon inférieur venaient les treize mille sept cents cultivateurs désignés par le nom éloquent de precaristas : taillables et corvéables à merci, ils n'avaient pratiquement aucun droit... Puis, au bas de la hiérarchie sociale, quelque cinq cent mille ouvriers agricoles, dont la plupart ne trouvaient à s'employer que dix ou quinze semaines par an, au moment de la récolte de la canne à sucre. Endettés pour plusieurs années, ils se croyaient rivés à la misère. La terre leur est maintenant distribuée. Dans certaines régions le tiers, le quart ou même la moitié était en friche. Lorsqu'un paysan défonçait un lopin de terre non cultivé le propriétaire se l'attribuait. Ces friches sont maintenant systématiquement mises en exploitation. Et cela suffit à fournir du travail et de la nourriture à un nombre chaque jour plus important de campesinos. Aussitôt, conformément aux prescriptions de la loi agraire, ils s'organisent en coopérative et élisent son administrateur. Le paysan possède la terre, mais la coopérative est chargée de vendre la récolte, dont le produit est ensuite distribué. A l'heure actuelle cinq cent quarante-sept coopératives ont ainsi été crées, regroupant cent quatre-vingt mille familles de cinq personnes en moyenne. Les salaires des ouvriers agricoles ont pu être triplés. La coopérative fournit les semences, les engrais, le matériel nécessaires. Si le paysan ne peut pas payer, sa dette est à valoir sur la récolte prochaine. La seule mise en culture des terres en friche donne du travail aux innombrables desocupados. Mais pour cela il faut des machines. L'ancien système décourageait les paysans de défricher, et le propriétaire, satisfait de ses revenus, ne se souciait guère d'étendre ses cultures. Dans les mois qui suivirent la chute de la dictature, des collectes publiques furent organisées pour acheter du matériel. Les dons de la classe moyenne comme les modestes centavos économisés par les écoliers s'additionnèrent pour permettre l'acquisition de neuf cent seize tracteurs. Un crédit servit à en importer neuf cent quatre-vingt-quatorze de plus. Il en faudrait encore mille cinq cents. Une centaine d'instructeurs se déplacent à travers les différentes provinces pour initier les paysans à la conduite de ces tracteurs. Cinq unités mobiles d'entretien ont été crées. Trente-neuf petits avions et neuf hélicoptères sont utilisés pour répandre les engrais et les insecticides. Jadis figées, les frontières de la terre cultivée reculent à pas de géant. Tout ce travail se déroule sous l'impulsion des barbus descendus du maquis pour devenir chefs de province ou chefs de zone. En même temps reculent les frontières de la faim. La reconversion de la loterie Sous Batista, dans certains quartiers de La Havane, trois catégories professionnelles dominaient nettement le marché : les policiers, les vendeurs de billets de loterie et les prostituées. La distinction entre les trois n'était d'ailleurs pas toujours facile à établir. Les agents de la force publique cumulaient en effet les fonctions de souteneurs, et les pauvres vendeurs jouaient les indicateurs. De telle sorte que les prostituées étaient encore les plus honnêtes. Mais ces trois corps de métier qui symbolisaient la dictature corrompue ont à peu près disparu. La loterie subsiste pourtant. Moyen idéal de concussion, Batista avait décrété qu'elle serait quotidienne. Pour les desocupados, elle représentait le seul espoir de s'arracher à la misère. Espoir illusoire grâce à un savant trucage qui faisait l'admiration des connaisseurs. Toute révolution étant puritaine, on pouvait prévoir que la loterie serait supprimée, comme le fut la prostitution. Mais Fidel Castro savait qu'il n'éteindrait pas du jour au lendemain la passion du jeu, solidement ancrée par une longue tradition de misère sans espérance. Il préféra donc la convertir. La loterie est revenue à un rythme hebdomadaire, tout de même plus normal. La masse des lots distribués a été comprimée, afin de restreindre l'appât du gain. Et le principe même du jeu a été radicalement bouleversé. Quiconque, en effet, achète un billet effectue un placement. Le produit net de la loterie est versé à un fonds spécial destiné à financer la construction de logements populaires. Le billet coûte 22 pesos-soit environ 22 dollars,-mais se vend aussi en centièmes au prix de 25 centavos. Ce billet doit être conservé par son acquéreur, gagnant ou pas, et la somme qu'il représente est à valoir sur le logement qu'il occupera. Ce billet est alors repris à 40 % de sa valeur la première année, à 60 % la deuxième année et à 100 % au bout de cinq ans. La loterie est ainsi devenue une sorte de caisse d'épargne-logement. " Maintenant, m'a dit, sur un ton sarcastique, un adversaire du régime, Fidel Castro trouve que les Cubains ne jouent pas assez... " " Dans la gueule du monstre " Un dirigeant révolutionnaire m'a dit exactement la même chose. Mais avec un sourire ravi... Son repaire est la Banque nationale, d'où il dirige pratiquement toute l'économie cubaine. C'est en exil que ce médecin argentin a rencontré Fidel Castro, auquel il a lié son sort. Il s'appelle Ernesto " Che " Guevara. La presse américaine le dit communiste. Les difficultés auxquelles il s'attaque paraissent insurmontables. En 1952, au moment du second coup d'Etat de Batista, la dette publique de Cuba atteint 177 millions de dollars. A la chute de la dictature elle est montée à 1 238 millions... Ces deux chiffres donnent la mesure de la prospérité factice qui régnait alors. " Tant que nous trouverons des acquéreurs pour notre sucre, me dit " Che " Guevara, l'économie cubaine ne craindra rien. Si les Etats-Unis veulent réduire ou supprimer leurs importations, eh bien ! nous vendrons ailleurs. Les pays de l'Est sont prêts à se porter acquéreurs. Que veut Washington ? Nous pousser dans les bras de Moscou ?... " Dans le New York Herald Tribune, Walter Lippmann et Joseph Alsop ont vu le danger que comporteraient des représailles économiques américaines. Ils considèrent la révolution cubaine, non pas comme une révolution communiste, mais comme une révolution nationaliste, qu'il faut garder dans le camp neutraliste au lieu de la repousser vers Moscou ou Pékin. Mais dans toute la presse américaine ils sont à peu près les seuls à tenir ce langage prudent. " Votre révolution fait ses premiers pas, dis-je à " Che " Guevara, elle est donc turbulente. Mais ne pensez-vous pas que l'enthousiasme du début se refroidira ? Que votre révolution s'assoupira, s'embourgeoisera ?... " Visiblement, malgré la frénésie de ses horaires de travail, il a pensé au problème. Et sa réponse devrait être comprise à Washington : " Le rythme de notre révolution, dit-il, s'adaptera au rythme de la contre-révolution. " Il se renverse dans son fauteuil, allume un cigare et, dans un grand éclat de rire : " Nous faisons notre révolution dans la gueule du monstre... " CLAUDE JULIEN Le Monde du 17-22 mars 1960
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« confidences. " La loi de réforme agraire, dit-il, n'est pas appliquée.

Elle prévoit que nul ne peut posséder plus de 400 hectares.

Or on m'atout pris, on ne m'a pas laissé la parcelle de terre que j'ai le droit de conserver.

Les services administratifs outrepassent la volontéde Fidel Castro.

Je le connais, j'ai financé la révolution, je vais essayer de le voir pour lui expliquer que la loi est violée "... Parmi les premières terres frappées par la réforme agraire figurent celles de Fidel Castro lui-même et de ses parents.

Le statutjuridique des terres saisies n'est pas simple.

En espagnol on dit qu'elles sont " intervenidas ", c'est-à-dire placées sous séquestre.Un jour un tribunal fixera leur sort et laissera aux anciens propriétaires la portion que la loi les autorise à conserver. " Oui, dit-il, mais en attendant je suis ruiné.

Ce n'est d'ailleurs qu'un aspect de la question.

Le plus grave c'est qu' " ils" manquent d'expérience.

La récolte de tabac sera moins bonne cette année.

Le cheptel est mal soigné les bestiaux qui arriventaux abattoirs pèsent jusqu'à 200 kilogrammes de moins que la normale.

Les grands propriétaires terriens connaissaient leurtravail, mais la plupart sont partis, comme les spécialistes américains de l'élevage.

Maintenant c'est une catastrophe.

Je suis ruiné,mais surtout l'ensemble du pays risque d'être conduit à la faillite économique "... D'autres personnages propagent les mêmes objections.

On a bien fait venir des ingénieurs hollandais pour de grands travauxd'irrigation, mais on leur reproche de ne rien connaître aux cultures tropicales. Pour les rizières, qui viennent d'être crées, il y a aussi des agronomes japonais, mais il paraît qu'on ne pourrait pas à Cubacultiver le riz comme au Japon.

Plusieurs critiques, que j'avais connus hostiles à Batista, m'expriment aussi leur crainte que larévolution échoue économiquement en voulant aller trop vite, en voulant tout faire à la fois malgré la pénurie de spécialistes. Mais mon interlocuteur m'intéresse plus que tous les autres, car il a financé une révolution dont il est aujourd'hui la victime. -Et si c'était à refaire ? lui dis-je. -Je recommencerais.

Tout vaut mieux que la dictature de Batista...

Je donnerais encore des centaines de milliers de dollars...Mais quand même... Les propriétaires terriens qui n'avaient pas souhaité et aidé la révolution sont en exil.

Je ne les rencontrerai donc pas.

Dansd'autres cercles j'ai trouvé des adversaires virulents.

Tous admettent cependant que la réforme agraire était indispensable ils encritiquent les modalités d'application. La distribution des terres Je me suis alors reporté aux statistiques héritées de la dictature. Onze compagnies américaines contrôlaient 1 181 088 hectares, représentant 47,4 % des terres consacrées à la canne à sucre.Neuf propriétaires cubains contrôlaient 623 700 hectares, représentant 25,1 % du total.

A elle seule, la Cuban Atlantic Sugar Copossédait 250 000 hectares de champs de canne à sucre, soit la superficie de la moitié d'un département français.

Une grandepartie de ces terres était laissée en friche.

C'est pourquoi la loi de réforme agraire a institué un système assez compliqué : lesterres en friche sont automatiquement saisies et distribuées aux paysans en outre, la proportion des terres placées sous séquestreest calculée en fonction de leur productivité.

Autrement dit la loi considère que les " propriétaires " n'ont aucun droit sur les terresqu'ils ne cultivaient pas, et des droits limités sur les terres dont le rendement était insuffisant. Les premières terres saisies ont été celles des dignitaires du régime déchu.

Il s'agissait de domaines volés, ou légalementachetés avec de l'argent volé dans le trésor public.

J'ai partagé le repas des paysans et des barbudos de la finca El Rosario :5 400 hectares, quatre mille vaches, que s'était appropriés un ancien ministre.

Un domaine quarante-cinq fois moins grand queceux de la Cuban Atlantic Sugar Co...

Les quelque deux cents familles de paysans qui en avaient été chassées sont revenues etont retrouvé le travail qui assure leur subsistance.

L'armée leur construit des petites maisons de quatre pièces en brique quiprennent des allures de palaces à côté des chaumières d'autrefois. Ces paysans, ils étaient plus de cent mille sur des terres qui ne leur appartenaient pas.

Environ quarante-six mille avaient obtenule privilège d'une location.

Près de sept mille étaient sous-locataires. Quelque trente-trois mille travaillaient comme métayers.

A un échelon inférieur venaient les treize mille sept cents cultivateursdésignés par le nom éloquent de precaristas : taillables et corvéables à merci, ils n'avaient pratiquement aucun droit...

Puis, au basde la hiérarchie sociale, quelque cinq cent mille ouvriers agricoles, dont la plupart ne trouvaient à s'employer que dix ou quinze. »

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