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Article de presse: De Gaulle hostile au projet de Constitution

Publié le 17/01/2022

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22 septembre 1946 - Le 5 mai 1946, le projet de Constitution soutenu par le PCF et la SFIO est rejeté par 52,8 % des suffrages exprimés. Un second projet est élaboré, avec l'accord cette fois du PCF, de la SFIO et du MRP. Le 20 septembre 1946, au cours d'un entretien accordé au Monde, le général de Gaulle intervient dans le débat et appelle à refuser ce nouveau projet. Le 22 septembre, il renouvelle son opposition dans un discours public à Epinal. Finalement, le projet de constitution est accepté lors du référendum du 13 octobre 1946 par 53,6 % des suffrages exprimés. Estimez-vous satisfaisant le projet de Constitution tel qu'il a été voté en première lecture par l'Assemblée nationale constituante ? Non ! Car, en dépit de quelques apparences, ce projet est, en réalité, le même que celui que le pays a refusé à juste titre le 5 mai dernier : une Assemblée omnipotente, le gouvernement d'Assemblée, un chef de l'Etat pour la montre, pas d'organisation valable de l'Union française. Pour la France et pour l'Union française, un tel régime, à mon avis, risquerait fort de nous mener finalement à l'anarchie ou à la dictature. Nous ne sommes plus assez riches pour nous payer ni l'un ni l'autre. Malgré les défauts du projet de Constitution, estimez-vous que le pays doive l'accepter lors du prochain référendum afin de sortir à tout prix du provisoire ? Non. Nul n'est plus convaincu que moi qu'il faut sortir du régime actuel, qui ne peut valoir, en effet, que pour une très courte période et qui n'a, d'ailleurs, été conçu que pour cela. Mais le projet de Constitution, si on le dépouille de ses ornements de forme, ne fait que rendre définitif le système sous lequel nous vivons : Assemblée unique, gouvernement d'Assemblée, pas de chef de l'Etat qui en soit un, pas d'organisation valable de l'Union française. Ce n'est donc pas : en sortir. Dans votre déclaration du 27 août vous avez préconisé pour l'Union française des institutions d'ordre fédéral : président de l'Union française, Conseil de l'Union française, caractère fédéral de certains ministres. Le projet de Constitution, tel qu'il a été amendé, semble répondre à cette conception. Le jugez-vous satisfaisant à ce point de vue ? Il le serait si celles des institutions françaises auxquelles le projet " accroche " à juste titre les institutions fédérales devaient avoir elles-mêmes une réelle capacité. Or ce n'est pas le cas. D'après le projet de Constitution, le président de la République, qui devrait être en même temps président de l'Union française, n'existerait que pour la forme; le Conseil de la République, qui serait Conseil de l'Union française lorsqu'il s'adjoindrait les délégués des territoires d'outre-mer, n'aurait aucun pouvoir effectif. Quant aux ministres fédéraux, ils ne procéderaient, comme les autres, que de l'investiture donnée au président du conseil par l'Assemblée nationale et ne seraient responsables que devant elle, bien qu'elle n'ait rien de fédéral. Bref ce système est un faux-semblant, qui n' " accroche " qu'à des fictions les institutions fédérales. Pour qu'il en fût autrement, il faudrait que le président de l'Union française et le Conseil de l'Union française eussent de réelles capacités et que les ministres fédéraux eussent le caractère fédéral, ce qui exige qu'ils procèdent du chef de l'Etat fédéral. Tout se tient. On ne peut bâtir réellement les institutions de l'Union française que si les institutions correspondantes de la France sont elles-mêmes des réalités. Que le projet actuel de Constitution soit ou non rejeté par le pays, comptez-vous intervenir dans la prochaine campagne électorale ? Dans la situation où se trouvent la France et l'Union française, aucun problème ne me paraît plus urgent et plus important que celui de rebâtir l'Etat républicain. Ce problème domine tous les autres. Je crois qu'à cet égard la voie qui a été suivie jusqu'à présent au Parlement par le plus grand nombre n'est pas la bonne voie. Tous mes voeux vont donc à ceux et à celles qui se proposeront aux suffrages en s'engageant à suivre l'autre route. Je le dis et je le dirai. Croyez-vous que ces conceptions l'emportent en définitive ? J'en suis sûr ! En dépit de tout et grâce à son peuple, la France se relève pour ce qui est de sa substance. En dépit de tout et grâce à son peuple, le bon sens l'emportera pour ce qui est de ses institutions.

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