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Article de presse: Georges Papandréou, conservateur et républicain

Publié le 17/01/2022

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1er novembre 1968 - Jeune politicien, les risques qu'il prend confirment ses professions de foi républicaines. Venizéliste (1)de la première heure, ancien préfet de l'île de Mytilène, Georges Papandréou participe en 1916 (il a alors vingt-huit ans) au coup d'Etat de Salonique et se trouve contraint de s'exiler à Constantinople. De retour à Athènes, il publie un article courageux dans Patris dans lequel il exige l'abdication du roi. Condamné par une cour martiale à dix-huit mois de prison, il quitte sa geôle pour devenir, quelques mois plus tard, ministre de l'Intérieur dans le gouvernement Gonatas. Elu pour la première fois député de Mytilène en 1923, de nouveau ministre en 1925, il est arrêté et déporté l'année suivante pour avoir dit non à la dictature de Pangalos. Il récidive quelques années plus tard, en 1935, en prenant part au coup d'Etat de Venizélos. Arrêté, libéré, puis incarcéré à nouveau par Metaxas, il demeurera interné sous l'occupation italo-allemande jusqu'en avril 1944. Il parviendra alors à s'échapper et à rejoindre le gouvernement grec en exil au Caire. Six mois plus tard, il sera le chef du " cabinet de libération " qui fera une entrée triomphale à Athènes le 18 octobre 1944. Georges Papandréou aura le privilège de hisser le drapeau grec au-dessus de l'Acropole, sous les yeux d'un peuple meurtri par une longue et cruelle occupation. Cependant, trois ans auparavant, un jeune résistant communiste, Manolis Glezos, avait escaladé, au péril de sa vie, l'Acropole pour arracher, à la barbe des nazis, l'étendard frappé de la croix gammée. Et la reconnaissance de la plupart allait davantage à celui-ci qu'au politicien revenu d'exil. Les partisans de l'ELAS (les forces de guérilla contrôlées par l'extrême gauche) dominaient pratiquement le pays et exigeaient le partage, sinon encore le monopole du pouvoir. Georges Papandréou, le libéral, le républicain, choisit, devant le danger communiste, de se ranger aux côtés des forces monarchistes parfois les plus rétrogrades. Par tempérament, il est d'ailleurs un homme d'ordre. Une semaine après son retour à Athènes, et malgré le pacte qu'il avait conclu en mai avec les représentants de l'extrême gauche, il décrète, en accord avec les Britanniques, la dissolution des forces de l'ELAS. Les ministres communistes et socialistes quittent son gouvernement. L'insurrection éclate aussitôt, ouvrant la voie à la guerre civile. La polarisation politique qui s'ensuit empêche le centriste Georges Papandréou de jouer un rôle de premier plan. L'homme politique végétera jusqu'au jour où la situation intérieure et internationale sera suffisamment transformée pour lui permettre d'émerger à nouveau. 1961, c'est l'année du dégel Est-Ouest et de l'avènement de John Kennedy à la magistrature suprême des Etats-Unis. La nouvelle administration cherche à s'appuyer, à l'étranger, sur des équipes plus libérales et mieux disposées à l'égard d'une politique de détente. Georges Papandréou leur paraît être l'homme le plus indiqué pour succéder à Constantin Caramanlis, fortement marqué par la " guerre froide ". Un haut personnage du département d'Etat, M. McGhee, et l'ambassadeur américain à Athènes patronnent en quelque sorte les négociations entre diverses formations qui aboutissent, en septembre 1961, à la création de l'Union du centre sous la présidence de Georges Papandréou. Il prend la relève de M. Caramanlis deux ans plus tard, à l'issue d'une victoire électorale à laquelle la neutralité bienveillante des Américains et du Palais n'aura pas été étrangère. Son parti, l'Union du centre, est un agglomérat hétéroclite d'anciennes formations qui se situent les unes à gauche, les autres à droite de l'échiquier politique grec. Des gens modestes, voire des prolétaires, y côtoient de grands bourgeois. Une jeunesse dépourvue du complexe de l'anticommunisme, dont sont affligés les aînés, qui ont connu les atrocités de la guerre civile, est venue, en masse, chercher au centre les voies du renouveau. Tiraillé par ces forces opposées, M. Georges Papandréou a pratiqué, de février 1964 à juillet 1965, la politique de la corde raide. Il devait tomber à droite, du côté où se situait le centre de gravité du monde politique grec. Le coup d'Etat du 21 avril 1967 ne l'avait pas totalement surpris. Depuis son éviction du pouvoir en juillet 1965, il n'avait cessé de dénoncer non sans lucidité les intrigues de la " junte ", terme qui était devenu en Grèce synonyme de la trinité du pouvoir occulte qui s'y exerçait : l'armée, le Palais et les Américains. Profitant d'un entracte de liberté en avril dernier, il enregistra sur une bande magnétique qu'il envoya clandestinement à l'étranger un sévère réquisitoire contre " la dictature des colonels ". Son audace lui avait valu d'être mis, à nouveau, en résidence surveillée.

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