Article de presse: Le martyre de Jan Palach
Publié le 17/01/2022
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16 janvier 1969 - Jeudi 16 janvier 1969, en début d'après-midi. Au pied du Musée national de Prague, qui surplombe l'avenue Venceslas, principale artère de la capitale, un aiguilleur de tramway voit soudain flamber une torche vivante sur la rampe du musée. C'est un jeune homme dont le nom deviendra, dans le monde entier, le symbole de la résistance tchécoslovaque à l'oppression. On ne saura jamais comment il est arrivé là, s'est arrosé d'essence et immolé par le feu tel un bonze vietnamien, dans un suicide atroce et spectaculaire, étranger aux traditions de l'Europe.
Secouru aussitôt, le malheureux est transporté à l'hôpital, où les médecins désespèrent de le sauver. Jan Palach, étudiant en philosophie à l'université Charles, âgé de vingt et un ans, mourra le dimanche 19 janvier dans l'après-midi.
Le suicide suscite dans le pays une émotion intense. Le comité central du Parti communiste, qui siège depuis le jeudi matin sous la présidence d'Alexandre Dubcek pour examiner les " tâches urgentes " du PC, publie un communiqué pour exprimer " sa profonde émotion devant l'acte tragique de Jan Palach, qui a décidé de sacrifier sa vie ".
" Nous pouvons comprendre, ajoute le comité central, les craintes de nombre de jeunes gens concernant la politique de développement socialiste que notre parti mène depuis janvier 1968. (...) Mais seul le travail et l'effort patients peuvent assurer l'application des idées socialistes que la jeune génération attend de la société. " Les étudiants de la faculté de philosophie accusent, eux, " les dirigeants soviétiques d'avoir, par leur politique, ajouté une nouvelle victime, qui ne sera peut-être pas la dernière, à celles du 21 août ". Ils font grief à " la direction de la Tchécoslovaquie d'avoir, au nom d'un prétendu réalisme, entraîné le peuple dans cette situation par la mesquinerie de sa politique et la trahison de ses idéaux proclamés ". Ils ajoutent : " Nous craignons que, dans ces conditions, l'espoir de trouver, à l'avenir, un langage commun avec cette direction ne s'évanouisse définitivement. " Ses obsèques à Prague, le samedi 25 janvier, en témoignent. Sous un ciel gris et bas, en ce début d'après-midi, dans une atmosphère de recueillement et de silence quasi religieux, toute la ville s'est figée, alors que sonne le glas.
AMBER BOUSOGLOU, JEAN TESAR
Le Monde du 15-16 janvier 1984
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