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Article de presse: Leonid Brejnev, le premier des apparatchiks

Publié le 17/01/2022

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10 novembre 1982 - Quelques jours après la chute de Khrouchtchev, alors que Leonid Ilyitch Brejnev venait de prendre la direction du parti, les Moscovites analysaient la situation par un jeu de mots : " Comment vivrons-nous désormais? ", demandaient-ils. " Kak po brejnemou... ", répondaient-ils ( " comme avant " ). Le nouveau numéro un du régime était depuis longtemps en vedette. Il avait occupé pendant quatre ans les fonctions de chef de l'Etat. On l'avait vu dans d'innombrables réunions. Il avait fait quatorze voyages à l'étranger. La presse avait maintes fois reproduit les photos de ce hiérarque à la silhouette plutôt lourde, qui aimait les plaisirs de la vie et cultivait les bonnes manières. Mais que représentait donc ce dirigeant dont on disait jusqu'au 15 octobre 1964 qu'il était le plus fidèle des khrouchtchéviens? Personne, surtout parmi les Soviétiques, ne voulait prendre position à son sujet. On consentait toutefois à lui reconnaître une qualité : Brejnev était un bel homme. Sa biographie était pourtant exemplaire. Il naquit en 1906 dans la région de Dniepropetrovsk, en Ukraine. Son père était ouvrier métallurgiste. Comme beaucoup d'autres, le jeune Leonid Ilyitch adhéra au Komsomol alors qu'il avait dix-sept ans et qu'il suivait les cours d'une école technique d'agriculture à Koursk. Il reçut son premier poste en Oural et devint vice-président d'un soviet rural. Il s'initia ensuite aux questions industrielles et obtint en 1935 un diplôme d'ingénieur de la métallurgie. Il était évidemment passé du Komsomol au Parti communiste et, en 1938, il délaissa la technique pour se consacrer de plus en plus à l'appareil du parti... Géneral à la fin de la guerre L'Ukraine était alors décimée par les purges. Staline avait liquidé tous les dirigeants du parti de cette République qui, à ses yeux, étaient coupables de nationalisme, et il avait envoyé Khrouchtchev à Kiev. Le nouveau maître recherchait les jeunes cadres. Il remarqua parmi beaucoup d'autres Leonid Brejnev, un des secrétaires de la région de Dniepropetrovsk. Ainsi commença une collaboration qui devait se poursuivre pendant vingt-cinq ans. On pourrait même, en suivant les méandres de la carrière de Leonid Brejnev, tracer la courbe de l'influence de Nikita Khrouchtchev. Période ascendante: la guerre. Comme M. " K ", Leonid Brejnev sert sur le front ukrainien en qualité de commissaire politique, ce qui lui vaut d'obtenir à l'âge de trente-huit ans le grade de général. Après la capitulation allemande, il revient dans l'appareil civil du parti en Ukraine, avec Khrouchtchev. Il est déjà élevé dans la hiérarchie; il dirige la région de Zaporoje, puis celle de Dniepropetrovsk, et, en 1949, il est élu membre du comité central de la République. Mais son protecteur subit un recul. D'abord Staline envoie à Kiev un super-intendant du parti, Lazare Kaganovitch, puis, en 1950, la Pravda fait nettement comprendre que " K " a tort de vouloir transformer les villages en " agrovilles ". C'est alors que Leonid Brejnev quitte l'Ukraine. Apparemment, il bénéficie d'une importante promotion puisqu'il devient premier secrétaire de la République de Moldavie. Mais chacun sait que le cadeau est empoisonné. La situation est difficile dans cette région après la guerre, et les dirigeants du parti sont, les uns après les autres, voués à l'abomination parce qu'ils sont incapables de faire état de bonnes récoltes. Mais Leonid Brejnev passe l'épreuve avec succès. Du moins ne lui reproche-t-on pas de ne pas avoir opéré de miracles. Il est vrai que, pendant ce temps, " K " a consolidé sa position à Moscou: Staline l'a chargé de préparer la réforme des statuts du parti, et, au XIXe congrès (octobre 1952), il le met en vedette avec Malenkov. Tandis que le dictateur envisage de liquider ses plus anciens compagnons, Nikita Khrouchtchev réussit à faire monter à la direction suprême quelques-uns de ses amis. En octobre 1952, Leonid Brejnev est nommé membre suppléant du présidium et secrétaire du comité central. Six mois plus tard, tout est à recommencer. Les anciens se ressaisissent lorsque meurt Staline. Leur premier soin est d'envoyer à des tâches plus obscures ces nouveaux venus qui se croyaient tout près du sommet. Pour Leonid Brejnev, adieu présidium, secrétariat. On le case pendant quelques mois à la direction politique de la marine, puis, en 1954, Khrouchtchev l'envoie au Kazakhstan, où s'engage l'expérience de défrichage des terres vierges. Après un entracte de trois ans, Leonid Brejnev revient à Moscou, et il consolide sa position en 1957 lorsque la défaite du groupe anti-parti exige le renouvellement du présidium. Pourtant, en 1960, les temps sont à nouveau difficiles. Le premier secrétaire ne contrôle pas comme il le voudrait le présidium. Le 7 mai il bénéficie d'une promotion très flatteuse puisqu'il remplace à la tête de l'Etat le vieux maréchal Vorochilov. Mais ne perd-il pas le pouvoir réel le 16 juillet, lorsqu'il cesse d'être secrétaire du parti? On pouvait alors penser qu'il avait atteint le sommet de sa carrière. Mais il avait les apparences de la gloire. Alors que " K " devait quelque peu réduire son activité, Leonid Brejnev jouait à merveille son rôle de représentation. Au début de 1963, les actions de " K ", qui avaient été au plus bas à Moscou pendant l'hiver, remontaient. Frol Kozlov, malade, était mis hors circuit. Aussi personne ne fut étonné de voir Leonid Brejnev nommé en même temps que Nicolai Podgorny au secrétariat. Ses nouvelles fonctions l'absorbaient à un point tel qu'en juillet 1964 il dut céder à Anastase Mikoyan la présidence du Soviet suprême. Il devenait ainsi le numéro deux du régime. Homme de confiance de khrouchtchev La signification de ce changement de personnel paraissait alors claire. " K " préparait sa succession, et il voulait prendre pour adjoint un homme en qui il avait toute confiance. Qui était mieux qualifié que Leonid Brejnev pour tenir l'emploi? Il n'avait jamais hésité à condamner les membres du groupe antiparti, alors que d'autres dirigeants du présidium adoptaient une position plutôt réservée. Il était prêt à porter dans les provinces la bonne parole contre les dogmatiques chinois. Et c'est lui qui, en août 1964, représenta Nikita Khrouchtchev aux obsèques de Togliatti. Sa mission était difficile: les Soviétiques cherchaient encore à persuader les communistes italiens de ne pas publier le " testament " de leur secrétaire général. Et voilà qu'en octobre 1964 ce fidèle se retrouva dans l'autre camp. Etait-il depuis des mois déjà dans la conjuration? Se rallia-t-il au dernier moment? Le complot, en tout cas, ne pouvait pas être monté en dehors de lui. Puisqu'il était appelé à prendre la succession de Nikita Khrouchtchev, il fallait tout de même obtenir son consentement. Et qui donc, sinon le second secrétaire, pouvait, en l'absence du patron, convoquer le comité central? Pendant son passage à la direction suprême, il voulut, tout en s'appuyant d'abord sur l'appareil du parti, faire plaisir à tout le monde. Il honora le maréchal Joukov, rendit un hommage remarqué à Staline, fit condamner par les idéologues le " communisme du ventre " et s'efforça de rassurer ceux qui réclamaient une plus grande liberté dans la recherche. Il essaya vainement de calmer les Chinois en ne répondant pas à leurs insultes. Les quelques discours qu'il prononça traduisent les incertitudes du personnage plutôt qu'ils n'annoncent ses couleurs. Dès qu'il fut élu premier secrétaire, on eut le sentiment que ce choix était le fruit d'un compromis. Leonid Brejnev rassurait les " clients " du patron destitué-il avait été des leurs-et en même temps il apaisait ceux qui en avaient assez du tohu-bohu. Son premier soin fut de rétablir l'unité d'organisation du parti et de redonner aux fonctionnaires de l'appareil la considération qu'ils étaient en train de perdre. Noyé dans la direction suprême, surveillé par ses pairs, il était condamné à gouverner dans une grisaille dont il s'accommodait fort bien, à bouger le moins possible. Dans le climat de 1964, sa victoire était celle du conservatisme. A ses côtés, Alexis Kossyguine, le nouveau chef du gouvernement, faisait figure de progressiste. A ce moment, une vaste réforme de la gestion était en préparation. Leonid Brejnev fut de ceux qui la freinèrent, moins parce qu'il attendait des miracles des ordinateurs que parce qu'il redoutait un changement de l'équilibre du pouvoir. A la direction suprême-et c'est ce qui faisait sa prééminence-il représentait les " apparatchiks " qui, depuis une quarantaine d'années, étaient les maîtres du pays. La réforme fut adoptée en 1965 par le comité central et le Soviet suprême, mais assortie de conditions telles qu'elle perdit beaucoup de sa signification. Les gestionnaires eurent une bonne marge d'initiative, mais le parti et ses fonctionnaires se virent reconnaître le droit et assigner le devoir d'exercer un contrôle à tous les stades de la production. Dans cette querelle, Leonid Brejnev fut visiblement à la tête de ceux qui réussirent à restreindre la portée de la réforme. Il donna d'autres gages aux conservateurs. En mai 1965, à l'occasion du vingtième anniversaire de la victoire, il rendit un hommage bref mais remarqué à Staline. Le discours prenait valeur d'avertissement: le parti, par la voix de son chef, signifiait que la déstalinisation c'était fini, qu'il fallait maintenant restaurer les valeurs morales et militaires mises à mal pendant la période de dénonciation du " culte ". L'armée avait demandé et obtenu cette sorte de réhabilitation de Staline, qui l'avait fait souffrir mais lui avait donné prestige et gloire. Le XXIIe congrès (1966) apporta de nouveaux indices de " normalisation ". Pour la première fois, Leonid Brejnev tenait la vedette dans cette assemblée. Il fut servi. Un des orateurs proposa que le premier secrétaire prît le titre de secrétaire général. Lui-même suggéra que le présidium du comité central redevint le bureau politique. Il s'agissait, en principe, d'un retour à Lénine. En fait, le parti remettait à l'honneur les appellations qui avaient eu cours pendant la période stalinienne. La " doctrine de souveraineté limitée " Autre signe de conservatisme: en 1968, Brejnev lança une campagne pour la restauration de la discipline et l'orthodoxie dans le parti. A ce moment, les Tchécoslovaques commençaient leur expérience libérale, qui inquiétait la plupart des communistes établis au pouvoir. Dans cette bataille, disait-il, personne ne peut rester neutre, et les intellectuels moins que quiconque. Les écrivains non conformistes étaient prévenus: le parti n'était pas d'humeur à supporter leurs écarts. Quelques mois plus tard, en juillet, à l'occasion d'une visite de Janos Kadar à Moscou, il revenait à la charge: " Nous ne pouvons rester indifférents aux destinées de la construction du socialisme dans les autres pays. " Cette déclaration prit tout son sens le 20 août de la même année lorsque les troupes du pacte de Varsovie allèrent " rétablir l'ordre " à Prague. Leonid Brejnev n'avait-il pas défini et mis en pratique une " doctrine de souveraineté limitée des Etats socialistes "? Premier parmi ses égaux, le secrétaire général laissait, au début, à Alexis Kossyguine le soin de contrôler la diplomatie et la gestion de l'industrie. Il recevait rarement un homme d'Etat étranger. Il ne quittait son pays que pour aller dans un autre pays socialiste. Lui-même traitait quasi souverainement de la vie du parti, ce qui est tout de même essentiel en URSS, et de la politique agricole. Et puis, à partir de 1970, il se met à parler de tout. Sans qu'on puisse fixer avec précision la date de la mutation, il est vraiment devenu le numéro un et reconnu comme tel. L'homme a pris de l'assurance. Il est maintenant bien au-dessus des " apparatchiks " qui l'ont hissé au pouvoir. Il est chef suprême non seulement du parti, mais du pays. L'interprète des volontés du PC commence à vouloir faire sa politique, qu'on peut schématiquement résumer ainsi: pour que l'URSS occupe son rang de seconde puissance du monde, nous devons trouver dans l'Occident développé les concours dont nous avons besoin. La politique internationale, aurait-il dit, est le problème numéro un de la politique intérieure. Problème numéro un en ce sens que les membres du bureau politique ne partagent pas toutes les conceptions de leur secrétaire général. Une opposition, animée sans doute par Piotr Chelest, refusait une détente qui aurait fait la part belle à l'ennemi de classe. Pour Leonid Brejnev, comme naguère pour Nikita Khrouchtchev, la coexistence des Etats ne signifie pas la fin de la lutte idéologique. Elle appelle même à l'intérieur du camp socialiste un renforcement de cette lutte. Mais elle exige des concessions pour amadouer l'adversaire partenaire. On recevra Richard Nixon, bien que ses avions bombardent le territoire de l'allié nord-vietnamien. On expulsera des contestataires, surtout des juifs, alors qu'en d'autres temps on les aurait tous enfermés, pour apaiser le Congrès des Etats-Unis. Leonid Brejnev a même pris de plus en plus de risques. Alors que, au moment de sa chute, Nikita Khrouchtchev s'était vu amèrement reprocher d'avoir cherché à s'entendre avec Bonn, son successeur fit négocier un traité avec l'Allemagne fédérale, et il assista, en août 1970, à la signature de ce document. Un an plus tard il reçut très chaleureusement le chancelier Brandt dans sa résidence d'Oréanda, en Crimée, et la presse soviétique fit une large publicité à l'événement. Dès ce moment, le secrétaire général est devenu une vedette internationale. Il recevra (par deux fois) Richard Nixon, puis Gerald Ford. Il va en France, en Allemagne, aux Etats-Unis, en Yougoslavie. Le chef du gouvernement, le président du Soviet suprême, qui participaient naguère à toutes les réjouissances, se tiennent à l'écart. Parfois même la presse moscovite donne l'impression à ses lecteurs que toute la politique mondiale gravite autour de Leonid Brejnev. C'est lui d'ailleurs qui donne le la, qui mène, assisté de Andreï Gromyko, le jeu soviétique au Proche-Orient, rappelle sa volonté de vivre en paix avec le peuple chinois, tout en rejetant les prétentions des dirigeants de Pékin. Il n'avait pas, comme son prédécesseur, le don-ou le toupet-de la formule qui étonne. A l'entendre ou à lire ses discours, on s'assoupissait parfois tant il avait souci d'empêcher les remous. Mais s'il n'avait pas de style, il s'est découvert dans la dernière période de son règne un tempérament. Puisqu'il voulait tenir un rôle de vedette, il lui fallait montrer enfin quel homme il était. Il a confié ou fait confier aux journalistes qu'il était entiché de sport, qu'il éprouvait le plus grand plaisir à conduire des voitures rapides. Quand il vint aux Etats-Unis, il faillit même jouer au cow-boy. Ces dernières années, affaibli par la maladie, il avait considérablement ralenti ses activités et espacé ses voyages à l'étranger. Bien qu'incapable de remplir en totalité les obligations qui incombaient au chef du parti-chef de l'Etat, il n'avait rien abandonné de ses prérogatives et avait même ajouté de nouveaux titres à ceux qu'il collectionnait. On le fit maréchal de l'Union soviétique, prix Lénine de littérature. Pourtant, on avait l'impression, surtout depuis la mort de Souslov en janvier 1982, que la réalité du pouvoir commençait à lui échapper. En tout cas, des scandales étaient révélés qui frappaient son entourage et jusqu'à des membres de sa famille. BERNARD FERON Le Monde du 12 novembre 1982

« malade, était mis hors circuit.

Aussi personne ne fut étonné de voir Leonid Brejnev nommé en même temps que Nicolai Podgornyau secrétariat.

Ses nouvelles fonctions l'absorbaient à un point tel qu'en juillet 1964 il dut céder à Anastase Mikoyan laprésidence du Soviet suprême.

Il devenait ainsi le numéro deux du régime. Homme de confiance de khrouchtchev La signification de ce changement de personnel paraissait alors claire.

" K " préparait sa succession, et il voulait prendre pouradjoint un homme en qui il avait toute confiance.

Qui était mieux qualifié que Leonid Brejnev pour tenir l'emploi? Il n'avait jamaishésité à condamner les membres du groupe antiparti, alors que d'autres dirigeants du présidium adoptaient une position plutôtréservée.

Il était prêt à porter dans les provinces la bonne parole contre les dogmatiques chinois.

Et c'est lui qui, en août 1964,représenta Nikita Khrouchtchev aux obsèques de Togliatti.

Sa mission était difficile: les Soviétiques cherchaient encore àpersuader les communistes italiens de ne pas publier le " testament " de leur secrétaire général. Et voilà qu'en octobre 1964 ce fidèle se retrouva dans l'autre camp. Etait-il depuis des mois déjà dans la conjuration? Se rallia-t-il au dernier moment? Le complot, en tout cas, ne pouvait pas êtremonté en dehors de lui.

Puisqu'il était appelé à prendre la succession de Nikita Khrouchtchev, il fallait tout de même obtenir sonconsentement. Et qui donc, sinon le second secrétaire, pouvait, en l'absence du patron, convoquer le comité central? Pendant son passage à la direction suprême, il voulut, tout en s'appuyant d'abord sur l'appareil du parti, faire plaisir à tout lemonde.

Il honora le maréchal Joukov, rendit un hommage remarqué à Staline, fit condamner par les idéologues le " communismedu ventre " et s'efforça de rassurer ceux qui réclamaient une plus grande liberté dans la recherche.

Il essaya vainement de calmerles Chinois en ne répondant pas à leurs insultes. Les quelques discours qu'il prononça traduisent les incertitudes du personnage plutôt qu'ils n'annoncent ses couleurs. Dès qu'il fut élu premier secrétaire, on eut le sentiment que ce choix était le fruit d'un compromis.

Leonid Brejnev rassurait les" clients " du patron destitué-il avait été des leurs-et en même temps il apaisait ceux qui en avaient assez du tohu-bohu.

Sonpremier soin fut de rétablir l'unité d'organisation du parti et de redonner aux fonctionnaires de l'appareil la considération qu'ilsétaient en train de perdre.

Noyé dans la direction suprême, surveillé par ses pairs, il était condamné à gouverner dans une grisailledont il s'accommodait fort bien, à bouger le moins possible.

Dans le climat de 1964, sa victoire était celle du conservatisme.

Ases côtés, Alexis Kossyguine, le nouveau chef du gouvernement, faisait figure de progressiste. A ce moment, une vaste réforme de la gestion était en préparation. Leonid Brejnev fut de ceux qui la freinèrent, moins parce qu'il attendait des miracles des ordinateurs que parce qu'il redoutait unchangement de l'équilibre du pouvoir.

A la direction suprême-et c'est ce qui faisait sa prééminence-il représentait les" apparatchiks " qui, depuis une quarantaine d'années, étaient les maîtres du pays.

La réforme fut adoptée en 1965 par le comitécentral et le Soviet suprême, mais assortie de conditions telles qu'elle perdit beaucoup de sa signification.

Les gestionnaires eurentune bonne marge d'initiative, mais le parti et ses fonctionnaires se virent reconnaître le droit et assigner le devoir d'exercer uncontrôle à tous les stades de la production.

Dans cette querelle, Leonid Brejnev fut visiblement à la tête de ceux qui réussirent àrestreindre la portée de la réforme. Il donna d'autres gages aux conservateurs.

En mai 1965, à l'occasion du vingtième anniversaire de la victoire, il rendit unhommage bref mais remarqué à Staline.

Le discours prenait valeur d'avertissement: le parti, par la voix de son chef, signifiait quela déstalinisation c'était fini, qu'il fallait maintenant restaurer les valeurs morales et militaires mises à mal pendant la période dedénonciation du " culte ".

L'armée avait demandé et obtenu cette sorte de réhabilitation de Staline, qui l'avait fait souffrir mais luiavait donné prestige et gloire. Le XXII e congrès (1966) apporta de nouveaux indices de " normalisation ".

Pour la première fois, Leonid Brejnev tenait la vedette dans cette assemblée.

Il fut servi.

Un des orateurs proposa que le premier secrétaire prît le titre de secrétaire général. Lui-même suggéra que le présidium du comité central redevint le bureau politique.

Il s'agissait, en principe, d'un retour à Lénine.En fait, le parti remettait à l'honneur les appellations qui avaient eu cours pendant la période stalinienne. La " doctrine de souveraineté limitée ". »

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