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Article de presse: Les accords d'Evian

Publié le 17/01/2022

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18 mars 1962 - Au lendemain de la signature des accords d'Evian, Le Monde dresse à chaud un premier bilan d'une guerre qui avait duré sept ans et avait lourdement pesé sur la vie politique française au point d'entraîner la chute de la IVe République et l'instauration, sous l'égide du général de Gaulle, d'un nouveau régime lui-même plusieurs fois menacé par des putschs avant de parvenir à un accord négocié avec les chefs de la rebellion algérienne. Nous reproduisons ci-dessous les principales pièces de ce dossier. De " L'Algérie, c'est la France " à l'indépendance Lorsque la rébellion algérienne-elle ne devait être baptisée officiellement " guerre " qu'en 1957-éclata le 1er novembre 1954, nul n'imaginait en France qu'elle s'achèverait sept ans et cinq mois plus tard par la reconnaissance négociée de l'indépendance de l'Algérie. Deux régimes, trois législatures et huit gouvernements ont jalonné le long cheminement qui a conduit le pays de l'Algérie française à l'Algérie indépendante. Chaque étape a duré environ deux ans. 1954-1956 : l'intégrité de la République C'est sous le gouvernement Mendès France que la révolte éclate dans la nuit de la Toussaint. Onze jours après, un débat a lieu à l'Assemblée nationale, et le président du conseil déclare : " L'Algérie, c'est la France. " Il dit aussi : " On ne transige pas lorsqu'il s'agit de défendre la paix intérieure de la nation et l'intégrité de la République. " Pierre Mendès France n'a pas alors d'autre politique que celle du statut... de 1947 assorti de quelques réformes dont le droit de vote aux musulmanes. C'est encore trop. Il est renversé le 5 février 1955. ... Edgar Faure, qui lui succède, reprend la même politique : unité de la métropole et de l'Algérie et respect du statut de 1947 il y ajoute le collège unique, que combattent aussitôt les élus européens d'Algérie. Les communistes puis les socialistes réclament de plus en plus fortement des négociations et, l'Assemblée dissoute, la gauche fait sa campagne électorale sur le thème de la " guerre imbécile et sans issue " dénoncée par Guy Mollet. 1956-1958 : la personnalité algérienne Président du conseil le 1er février, Guy Mollet se propose de rétablir la paix et de " renforcer l'union indissoluble entre l'Algérie et la France métropolitaine ", mais en même temps " de respecter la personnalité algérienne, de réaliser l'égalité politique totale de tous les habitants de l'Algérie ", de procéder le plus rapidement possible à des élections libres. Ce programme et le choix du général Catroux comme ministre résident en Algérie lui valent, cinq jours après, d'être l'objet de violentes manifestations à Alger. Parti pour réaliser l'apaisement chez les musulmans, il revient avec le souci de le rechercher chez les Européens et en charge Robert Lacoste. La perspective a changé : le gouvernement conduit néanmoins deux politiques parallèles : une action militaire, renforcée par l'envoi du contingent et les pouvoirs spéciaux, et d'autre part, d'avril à septembre, une série de conversations secrètes avec le FLN. Elles échouent. Du côté algérien, on réclame la reconnaissance non de l'indépendance, mais du " droit à l'indépendance " : du côté français, on n'offre que celle de la personnalité algérienne. Tout en proposant le fameux triptyque : " cessez-le-feu, élections, négociations ", le gouvernement met à l'étude en septembre, à Paris et à Alger, les " fondements d'une Algérie nouvelle et pacifiée ". La crise de Suez survient et le statut n'a pas encore vu le jour lorsque Guy Mollet est renversé en mai 1957. Son successeur, Maurice Bourgès-Maunoury, met en chantier un " projet de loi-cadre ", y passe laborieusement tout son été avant d'être lui-même renversé en septembre sur le projet qu'il soumet à l'Assemblée nationale. Une première version instituait un conseil de gouvernement et une Assemblée élue tant au niveau des " territoires " qu'au niveau fédéral à Alger. Ses adversaires y virent une évolution inévitable vers la sécession. Bien qu'édulcorée, la seconde version est repoussée par l'Assemblée. Un troisième texte, encore en retrait et qui ne doit être mis en vigueur que trois mois après le retour au calme, est adopté sous le gouvernement suivant, celui de Félix Gaillard, en novembre 1957. Il ne sera jamais appliqué. 1958-1960 : l'association La solution politique n'a pratiquement pas progressé depuis quatre ans lorsque, sollicité de constituer le gouvernement après vingt-trois jours de crise, Pierre Pflimlin se propose de poursuivre l'effort militaire, mais aussi d'offrir le moment venu " des pourparlers en vue d'un cessez-le-feu ". Il avait précisé quelques jours auparavant qu'il fallait le faire à partir d'une situation de force. Néanmoins, c'en est trop. Et c'est le 13 mai. La IVe République s'effondre. Le 13 mai est apparemment la victoire de l'Algérie française et, si mesurés ou ambigus qu'ils soient, les propos du général de Gaulle entretiennent cet espoir jusqu'au référendum du 28 septembre 1958. Le " Je vous ai compris ! " du 4 juin retentira longtemps comme une promesse avant de lui être porté à charge comme une duperie. La déclaration du 23 octobre 1958, qui comporte l'appel à la " paix des braves ", retient comme base de la solution politique " la personnalité courageuse de l'Algérie et son association étroite avec la métropole française ". Le 8 janvier 1959, le jour même où il prend ses fonctions de président de la République, le général de Gaulle destine à cette même Algérie " étroitement associée à la France " une " place de choix " dans l'ensemble formé par la métropole et les républiques africaines. Pendant neuf mois, la solution politique s'en tiendra là, et le gouvernement cherchera plutôt une issue ou une évolution dans le domaine économique et social (plan de Constantine) et militaire (plan Challe). Vient enfin la déclaration du 16 septembre 1959, dont les termes, soigneusement pesés, laissent apparaître un tournant décisif, en tout cas une telle préférence. Certes, le chef de l'Etat donne comme fondement à sa politique l'autodétermination, mais il est clair qu'entre les trois options théoriques qu'il envisage il écarte l'intégration baptisée francisation et la sécession qui ne se confond pas dans son esprit avec l'indépendance, et qu'il ne retient finalement que " le gouvernement des Algériens par les Algériens ". 1960-1962 : l'Algérie algérienne et l'indépendance C'est au dernier jour de la " tournée des popotes ", le 4 mars 1960, que le général de Gaulle prononce pour la première fois, comme à la cantonade, l'expression " l'Algérie algérienne ". Comme lors de la déclaration du 16 septembre, on s'empresse à Alger d'indiquer qu'il ne faut pas prendre la formule au pied de la lettre. En fait, la formule et la politique qu'elle implique ne cessera plus de développer ses virtualités et ses effets. Le 4 novembre 1960, le général de Gaulle affirme que " l'Algérie aura son gouvernement, ses institutions et ses lois "; Il glisse même les deux mots explosifs, la " République algérienne ", pour dire que, si elle n'a encore jamais existé, " elle existera un jour ". Un mois après, son voyage en Algérie est accompagné de violentes manifestations européennes, puis de contre-manifestations musulmanes aux cris d'Algérie algérienne ou musulmane. Nul ne peut plus entretenir de doute sur la politique algérienne, et c'est à cette époque que se nouent les premiers contacts en vue d'un putsch militaire en Algérie. Tandis que les deux parties affirment publiquement leur volonté de négocier et que des conversations ont commencé en secret, le général de Gaulle apporte un développement nouveau à sa politique. Le 11 avril, il se dit persuadé que l'Algérie sera un Etat souverain, " au-dedans et au-dehors ". Le putsch a lieu dix jours après pour tenter de sauver, d'imposer, l'Algérie française. Enfin, pour la première fois, le 11 juillet, le président de la République déclare que la France accepte " un Etat algérien indépendant "; " un Etat souverain et indépendant ", confirmera-t-il le 2 octobre. " L'association " avec la France, qui reste la contrepartie de l'indépendance, devient cependant " coopération ". Faute de quoi il y aura " dégagement ". En sept ans (du 1er novembre 1954 au 2 octobre 1961), la solution politique s'est précisée peu à peu, s'est imposée en dépit des prudences verbales, des refus de principe, des crises politiques et des coups de force. JACQUES FAUVET Le Monde du 20 mars 1962

« force.

Néanmoins, c'en est trop.

Et c'est le 13 mai.

La IV e République s'effondre. Le 13 mai est apparemment la victoire de l'Algérie française et, si mesurés ou ambigus qu'ils soient, les propos du général deGaulle entretiennent cet espoir jusqu'au référendum du 28 septembre 1958.

Le " Je vous ai compris ! " du 4 juin retentiralongtemps comme une promesse avant de lui être porté à charge comme une duperie. La déclaration du 23 octobre 1958, qui comporte l'appel à la " paix des braves ", retient comme base de la solution politique" la personnalité courageuse de l'Algérie et son association étroite avec la métropole française ".

Le 8 janvier 1959, le jour mêmeoù il prend ses fonctions de président de la République, le général de Gaulle destine à cette même Algérie " étroitement associéeà la France " une " place de choix " dans l'ensemble formé par la métropole et les républiques africaines. Pendant neuf mois, la solution politique s'en tiendra là, et le gouvernement cherchera plutôt une issue ou une évolution dans ledomaine économique et social (plan de Constantine) et militaire (plan Challe). Vient enfin la déclaration du 16 septembre 1959, dont les termes, soigneusement pesés, laissent apparaître un tournant décisif,en tout cas une telle préférence.

Certes, le chef de l'Etat donne comme fondement à sa politique l'autodétermination, mais il estclair qu'entre les trois options théoriques qu'il envisage il écarte l'intégration baptisée francisation et la sécession qui ne se confondpas dans son esprit avec l'indépendance, et qu'il ne retient finalement que " le gouvernement des Algériens par les Algériens ". 1960-1962 : l'Algérie algérienne et l'indépendance C'est au dernier jour de la " tournée des popotes ", le 4 mars 1960, que le général de Gaulle prononce pour la première fois,comme à la cantonade, l'expression " l'Algérie algérienne ". Comme lors de la déclaration du 16 septembre, on s'empresse à Alger d'indiquer qu'il ne faut pas prendre la formule au piedde la lettre. En fait, la formule et la politique qu'elle implique ne cessera plus de développer ses virtualités et ses effets. Le 4 novembre 1960, le général de Gaulle affirme que " l'Algérie aura son gouvernement, ses institutions et ses lois "; Il glissemême les deux mots explosifs, la " République algérienne ", pour dire que, si elle n'a encore jamais existé, " elle existera un jour ". Un mois après, son voyage en Algérie est accompagné de violentes manifestations européennes, puis de contre-manifestationsmusulmanes aux cris d'Algérie algérienne ou musulmane.

Nul ne peut plus entretenir de doute sur la politique algérienne, et c'est àcette époque que se nouent les premiers contacts en vue d'un putsch militaire en Algérie. Tandis que les deux parties affirment publiquement leur volonté de négocier et que des conversations ont commencé en secret,le général de Gaulle apporte un développement nouveau à sa politique.

Le 11 avril, il se dit persuadé que l'Algérie sera un Etatsouverain, " au-dedans et au-dehors ".

Le putsch a lieu dix jours après pour tenter de sauver, d'imposer, l'Algérie française. Enfin, pour la première fois, le 11 juillet, le président de la République déclare que la France accepte " un Etat algérienindépendant "; " un Etat souverain et indépendant ", confirmera-t-il le 2 octobre.

" L'association " avec la France, qui reste lacontrepartie de l'indépendance, devient cependant " coopération ".

Faute de quoi il y aura " dégagement ". En sept ans (du 1 er novembre 1954 au 2 octobre 1961), la solution politique s'est précisée peu à peu, s'est imposée en dépit des prudences verbales, des refus de principe, des crises politiques et des coups de force. JACQUES FAUVET Le Monde du 20 mars 1962. »

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