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La communication dans la décision collective chez les abeilles. KARL VON FRISCH.

Publié le 22/02/2012

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Immédiatement après avoir essaimé, les abeilles se réunissent autour de leur reine et forment une « grappe », qui est la plupart du temps suspendue à un arbre des environs. C'est alors aux éclaireuses qu'incombe la tâche de découvrir à la jeune colonie un abri approprié : arbre creux, cavité ménagée dans le roc ou dans un mur, ruche vide, et ainsi de suite. Les émissaires s'en vont par douzaines, dans toutes les directions, et il ne faudra pas longtemps pour que l'un ou l'autre d'entre eux ait découvert, ici ou là, un emplacement qui mérite d'être pris en considération, quand bien même il serait à des kilomètres de distance. A leur retour, les éclaireuses dont les recherches ont été couronnées de succès dansent sur la grappe formée par l'essaim, et indiquent ainsi la direction et l'éloignement de l'abri qu'elles ont trouvé, exactement comme le font les pourvoyeuses pour la localisation d'une récolte. A la suite de cela, on observe un nombre croissant de danses dans l'essaim ; les unes indiquent une petite distance, les autres une plus grande ; celles-ci une telle direction, celles-là encore une autre, chacune selon l'habitat découvert. Il est curieux de constater que la vigueur avec laquelle la danseuse invite les ouvrières à se joindre à elle, est en rapport avec le lieu en faveur duquel elle se démène. De même que les danses, pour une récolte abondante et très sucrée, sont pleines de vitalité et mettent toute la colonie en émoi alors qu'elles s'alanguissent lorsque le nectar possède moins de qualités, ainsi les éclaireuses, s'en tenant à des normes très strictes, dansent d'autant plus vigoureusement que l'abri découvert par elles répond mieux aux besoins de la colonie. Et ici, beaucoup de facteurs entrent en ligne de compte : les dimensions de l'excavation repérée, le fait que son entrée soit protégée du vent et qu'il n'y ait pas de courants d'air à l'intérieur, une éventuelle odeur qui devra plaire aux abeilles, et qui sait quoi d'autre encore ! Alors se produit, en quelques heures ou parfois même en quelques jours, une chose extrêmement remarquable. Les danseuses les plus animées sont suivies d'un nombre de plus en plus grand de compagnes qui sont allées explorer l'endroit signalé et qui — après s'être pour ainsi dire convaincues e de visu » de ses qualités — se mettent à danser et à faire de la propagande pour lui. Il arrive même que des danseuses qui jusqu'alors avaient fait du racolage en faveur d'une autre demeure présentant moins d'avantages, soient entraînées par le tourbillon d'une éclaireuse plus heureuse qu'elles et se laissent convertir, en ce sens qu'elles commencent par suivre leur concurrente dans la grappe de l'essaim, puis que, obéissant à ses directives, elles s'en aillent visiter l'autre abri et finissent même par faire du recrutement pour leur rivale. Beaucoup d'éclaireuses qui ne pouvaient défendre leur découverte avec autant d'ardeur, cessent tout simplement de danser lorsque les choses ont atteint ce stade. Peu à peu, on en arrive ainsi à une unification : toutes dansent au même rythme et selon la même direction, et dès que les choses en sont là, la grappe de l'essaim se disloque et s'envole, sous la conduite de centaines d'ouvrières qui connaissent déjà le chemin, vers l'objectif qui a recueilli, de tous, le plus de suffrages. KARL VON FRISCH

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