Devoir de Philosophie

Le mot "oeil" dans l'oeuvre de DESCARTES

Publié le 30/08/2006

Extrait du document

descartes

 

Règles pour la direction de l’esprit, Règle troisième.

tout de même que nous savons que le dernier anneau d’une longue chaîne tient au premier, encore que nous ne puissions embrasser d’un coup d’oeil les anneaux intermédiaires, pourvu qu’après les avoir parcourus successivement nous nous rappelions que, depuis le premier jusqu’au dernier, tous se tiennent entre eux.

  Règles pour la direction de l’esprit, Règle sixième.

ce qui paraîtra au premier coup d’oeil ;

  Règles pour la direction de l’esprit, Règle septième.

Aussi j’en parcourrai la suite de manière que l’imagination à la fois en voie une et passe à une autre, jusqu’à ce que je puisse aller de la première à la dernière avec une telle rapidité que, presque sans le secours de la mémoire, je saisisse l’ensemble d’un coup d’oeil.

  Règles pour la direction de l’esprit, Règle douzième.

Ainsi la partie d’abord opaque qui est dans l’oeil reçoit la figure que lui apporte l’impression de la lumière teinte des différentes couleurs.

Cinquièmement enfin, il faut concevoir que cette force par laquelle nous connaissons proprement les objets, est purement spirituelle, et n’est pas moins distincte du corps tout entier que ne l’est le sang des os et la main de l’oeil ;

L’homme attaqué de la jaunisse croit que tout est jaune, parce que son oeil est de cette couleur :

Ainsi, quand l’homme malade de la jaunisse se persuade que ce qu’il voit est jaune, sa connaissance est composée et de ce que son imagination lui représente, et de ce qu’il tire de lui-même, savoir, que la couleur jaune vient non d’un défaut de son oeil, mais de ce que les choses qu’il voit sont réellement jaunes.

  Règles pour la direction de l’esprit, Règle treizième.

au premier coup d’oeil tout l’artifice paraît devoir être dans la construction de la figure de Tantale, qui cependant ne détermine nullement la question, mais seulement l’accompagne.

  Règles pour la direction de l’esprit, Règle quinzième.

De même, nous représenterons ainsi à l’oeil les termes d’une proposition, lorsqu’il faudra en examiner à la fois les grandeurs diverses, par un rectangle dans lequel deux côtés seront les deux grandeurs proposées (.

  ABREGE DE LA MUSIQUE, Choses à remarquer.

au lieu qu’une figure comme pourrait être l’araignée du même astrolabe, dont les parties sont plus égales et observent plus de symétrie, gêne moins l’oeil qui le regarde ;

  DISCOURS DE LA METHODE, Première partie.

Car j’en ai déjà recueilli de tels fruits, qu’encore qu’au jugement que je fais de moi-même je tâche toujours de pencher vers le côté de la défiance plutôt que vers celui de la présomption, et que, regardant d’un oeil de philosophe les diverses actions et entreprises de tous les hommes, il n’y en ait quasi aucune qui ne me semble vaine et inutile, je ne laisse pas de recevoir une extrême satisfaction du progrès que je pense avoir déjà fait en la recherche de la vérité, et de concevoir de telles espérances pour l’avenir, que si, entre les occupations des hommes, purement hommes, il y en a quelqu’une qui soit solidement bonne et importante, j’ose croire que c’est celle que j’ai choisie.

  DISCOURS DE LA METHODE, Cinquième partie.

Au reste, afin que ceux qui ne connaissent pas la force des démonstrations mathématiques, et ne sont pas accoutumés à distinguer les vraies raisons des vraisemblables, ne se hasardent pas de nier ceci sans l’examiner, je les veux avertir que ce mouvement, que je viens d’expliquer, suit aussi nécessairement de la seule disposition des organes qu’on peut voir à l’oeil dans le coeur, et de la chaleur qu’on y peut sentir avec les doigts, et de la nature du sang qu’on peut connaître par expérience, que fait celui d’une horloge, de la force, de la situation et de la figure de ses contrepoids et de ses roues.

  LA DIOPTRIQUE, DISCOURS PREMIER, DE LA LUMIERE.

puis, ayant fait une briève description des parties de l’oeil, je dirai particulièrement en quelle sorte se fait la vision ;

Or, n’ayant ici autre occasion de parler de la lumière, que pour expliquer comment ses rayons entrent dans l’oeil, et comment ils peuvent être détournés par les divers corps qu’ils rencontrent, il n’est pas besoin que j’entreprenne de dire au vrai quelle est sa nature, et je crois qu’il suffira que je me serve de deux ou trois comparaisons, qui aident à la concevoir en la façon qui me semble la plus commode, pour expliquer toutes celles de ses propriétés que l’expérience nous fait connaître, et pour déduire ensuite toutes les autres qui ne peuvent pas si aisément être remarquées.

comme, encore que ceux qui tombent sur la superficie du corps blanc AB, ne viennent que du flambeau C, ils ne laissent pas de se réfléchir tellement de tous côtés, qu’en quelque lieu qu’on pose l’oeil, comme par exemple vers D, il s’en trouve toujours plusieurs venant de chaque endroit de cette superficie AB, gui tendent vers lui.

Et même, si l’on suppose ce corps fort délié comme un papier ou une toile, en sorte que le jour passe au travers, encore que l’oeil soit d’autre côté que le flambeau, comme vers E, il ne laissera pas de se réfléchir vers lui quelques rayons de chacune des parties de ce corps.

  LA DIOPTRIQUE, DISCOURS SECOND, DE LA REFRACTION.

Et il est temps que je commence à vous décrire quelle est la structure de l’oeil, afin de vous pouvoir faire entendre comment les rayons qui entrent dedans s’y disposent pour causer le sentiment de la vue.

  LA DIOPTRIQUE, DISCOURS TROISIEME, DE L’OEIL.

S’il était possible de couper l’oeil par la moitié, sans que les liqueurs dont il est rempli s’écoulassent, ni qu’aucune de ses parties changeât de place, et que le plan de la section passât justement par le milieu de la prunelle, il paraîtrait tel qu’il est représenté en cette figure.

En la seconde, la superficie intérieure de la partie EF, qui regarde le fond de l’oeil, est toute noire et obscure ;

et elle a au milieu un petit trou rond FF, qui est ce qu’on nomme la prunelle, et qui paraît si noir au milieu de l’oeil, quand on le regarde par dehors, Ce trou n’est pas toujours de même grandeur, et la partie EF de la peau en laquelle il est, nageant librement en l’humeur K, qui est fort liquide, semble être comme un petit muscle, qui se peut étrécir et élargir à mesure qu’on regarde des objets plus ou moins proches, ou plus ou moins éclairés, ou qu’on les veut voir plus ou moins distinctement.

Et vous pourrez voir facilement l’expérience de tout ceci en l’oeil d’un enfant ;

EN, EN sont plusieurs petit filets noirs, qui embrassent tout autour l’humeur marquée L, et qui, naissant aussi de la seconde peau, en l’endroit où la troisième se termine, semblent autant de petits tendons, parle moyen desquels cette humeur L, devenant tantôt plus voûtée, tantôt plus plate, selon l’intention qu’on a de regarder des objets proches ou éloignés, change un peu toute la figure du corps de l’oeil.

Enfin O, O sont six ou sept muscles attachés à l’oeil par dehors, qui le peuvent mouvoir de tous côtés, et même aussi, peut-être, en le pressant ou retirant, aider à changer sa figure.

  LA DIOPTRIQUE, DISCOURS CINQUIEME, DES IMAGES QUI SE FORMENT SUR LE FOND DE L’OEIL.

Car ils disent que cette chambre représente l’oeil ;

ce verre, l’humeur cristalline, ou plutôt toutes celles des parties de l’oeil qui causent quelque réfraction ;

Mais vous en pourrez être encore plus certain, si, prenant l’oeil d’un homme fraîchement mort, ou, au défaut, celui d’un boeuf ou de quelque autre gros animal, vous coupez dextrement vers le fond les trois peaux qui l’enveloppent, en sorte qu’une grande partie de l’humeur M, qui y est, demeure découverte, sans qu’il y ait rien d’elle pour cela qui se répande ;

puis, l’ayant recouverte de quelque corps blanc, qui soit si délié que le jour passe au travers, comme, par exemple, d’un morceau de papier ou de la coquille d’un oeuf RST, que vous mettiez cet oeil dans le trou d’une fenêtre fait exprès, comme Z, en sorte qu’il ait le devant BCD, tourné vers quelque lieu où il y ait divers objets, comme V, X, Y, éclairés par le soleil ;

et le derrière, où est le corps blanc RST, vers le dedans de la chambre, P, où vous serez, et en la quelle il ne doit entrer aucune lumière, que celle qui pourra pénétrer au travers de cet oeil, dont vous savez que toutes les parties, depuis C jusqu’à S, sont transparentes.

Car, cela fait, si vous regardez sur ce corps blanc RST, vous y verrez, non peut-être sans admiration et plaisir, une peinture, qui représentera fort naïvement en perspective tous les objets qui seront au dehors vers VXY, au moins si vous faites en sorte que cet oeil retienne sa figure naturelle, proportionnée à la distance de ces objets ;

Considérez donc premièrement que, de chaque point des objets VXY, il entre en cet oeil autant de rayons, qui pénètrent jusqu’au corps blanc RST, que l’ouverture de la prunelle FF en peut comprendre, et que, suivant ce qui a été dit ici dessus, tant de la nature de la réfraction que de celle des trois humeurs K, L, M, tous ceux de ces rayons, qui viennent d’un même point, se courbent en traversant les trois superficies BCD, 123 et 456, en la façon qui est requise pour se rassembler derechef environ vers un même point.

à savoir de ce que, la prunelle de l’oeil ayant quelque grandeur, il y entre plusieurs rayons de chaque point de l’objet, comme ici XB14S, XC25S, XD36S, et tout autant d’autres qu’on en puisse imaginer entre ces trois, y viennent du seul point X ;

et de ce que ces rayons souffrent dans l’oeil de telles réfractions, que ceux qui viennent de divers points se rassemblent à peu près en autant d’autres divers points sur le corps blanc RST ;

Et la prunelle étant un peu grande, s’il ne se faisait dans l’oeil aucune réfraction, les rayons qui viendraient de chaque point des objets, s’épandraient çà et là en tout l’espace RST, en sorte que, par exemple, les trois points VXY enverraient trois rayons vers R, qui, se réfléchissant de là tous ensemble vers vos yeux, vous feraient paraître ce point R d’une couleur moyenne entre le rouge, le jaune et le bleu, et tout semblable aux points S et T, vers lesquels les mêmes points VXY enverraient aussi chacun un de leurs rayons.

Et il arriverait aussi quasi le même, si la réfraction qui se fait en l’oeil était plus ou moins grande qu’elle ne doit, à raison de la grandeur de cet oeil :

Mais, après vous avoir parlé des perfections de cette peinture, il faut aussi que je vous fasse considérer ses défauts, dont le premier et le principal est que, quelques figures que puissent avoir les parties de l’oeil, il est impossible qu’elles fassent que les rayons qui viennent de divers points, s’assemblent tous en autant d’autres divers points, et que tout le mieux qu’elles puissent faire c’est seulement que tous ceux qui viennent de quelque point, comme d’X, s’assemblent en un autre point, comme S, dans le milieu du fond de l’oeil ;

Notez aussi que ces rayons s’écarteraient encore plus autour du point R, qu’ils ne font, si le point V, d’où ils viennent, était beaucoup plus proche de l’oeil, comme vers 10, ou beaucoup plus éloigné, comme vers 11, que n’est V à la distance duquel je suppose que la figure de l’oeil est proportionnée ;

Or, ayant ainsi vu cette peinture dans l’oeil d’un animal mort, et en ayant considéré les raisons, on ne peut douter qu’il ne s’en forme une toute semblable en celui d’un homme vif, sur la peau intérieure, en la place de laquelle nous avions substitué le corps blanc RST ;

Et peut-être aussi qu’en l’oeil d’un boeuf la figure de la prunelle, qui n’est pas ronde, empêche que cette peinture n’y soit si parfaite.

On ne peut douter non plus que les images qu’on fait paraître sur un linge blanc, dans une chambre obscure, ne s’y forment tout de même et pour la même raison qu’au fond de l’oeil ;

en sorte que, si on pouvait aussi faire un oeil, dont la profondeur fût fort grande, et la prunelle fort large, et que les figures de celles de ses superficies qui causent quelque réfraction, fussent proportionnées à cette grandeur, les images s’y formeraient d’autant plus visibles.

Au reste, les images des objets ne se forment pas seulement ainsi au fond de l’oeil, mais elles passent encore au delà jusqu’au cerveau, comme vous entendrez facilement, si vous pensez que, par exemple, les rayons qui viennent dans l’oeil de l’objet V touchent au point R l’extrémité de l’un des petits filets du nerf optique, qui prend son origine de l’endroit 7 de la superficie intérieure du cerveau 789 ;

  LA DIOPTRIQUE, DISCOURS SIXIEME, DE LA VISION.

Ce que vous croirez facilement, si vous remarquez qu’il semble à ceux qui reçoivent quelque blessure dans l’oeil, qu’ils voient une infinité de feux et d’éclairs devant eux, nonobstant qu’ils ferment les yeux, ou bien qu’ils soient en lieu fort obscur ;

car elle n’est pas toujours égale à la lumière qui est dans les objets, mais elle varie à raison de leur distance et de la grandeur de la prunelle, et aussi à raison de l’espace que les rayons, qui viennent de chaque point de l’objet, peuvent occuper au fond de l’oeil.

Comme, par exemple, il est manifeste que le point X enverrait plus de rayons dans l’oeil B qu’il ne fait, si la prunelle FF était ouverte jusqu’à G ;

et qu’il en envoie tout autant en cet oeil B qui est proche de lui, et dont la prunelle est fort étroite, qu’il fait en l’oeil A, dont la prunelle est beaucoup plus grande, mais qui est à proportion plus éloignée.

Et encore qu’il n’entre pas plus de rayons des divers points de l’objet VXY, considérés tous ensemble, dans le fond de l’oeil A que dans celui de l’oeil B, toutefois, parce que ces rayons ne s’y étendent qu’en l’espace TR, qui est plus petit que n’est HI, dans lequel ils s’étendent au fond de l’oeil B, ils y doivent agir avec plus de force contre chacune des extrémités du nerf optique qu’ils y touchent ;

Car, si, par exemple, l’espace HI est quadruple de TR, et qu’il contienne les extrémités de quatre mille des petits filets du nerf optique, TR ne contiendra que celles de mille, et par conséquent chacun de ces petits filets sera mû, dans le fond de l’oeil A, par la millième partie des forces qu’ont tous les rayons qui y entrent, jointes ensemble, et, dans le fond de l’oeil B, par le quart de la millième partie seulement.

et que la vision distincte de ces couleurs ne dépend pas seulement de ce que tous les rayons, qui viennent de chaque point de l’objet, se rassemblent à peu près en autant d’autres divers points au fond de l’oeil, et de ce qu’il n’en vient aucuns autres d’ailleurs vers ces mêmes points, ainsi qu’il a été tantôt amplement expliqué ;

mais aussi de la multitude des petits filets du nerf optique, qui sont en l’espace qu’occupe l’image au fond de l’oeil.

Car si, par exemple, l’objet VXY est composé de dix mille parties, qui soient disposées à envoyer des rayons vers le fond de l’oeil RST ;

et enfin que, plus on peut faire que l’image d’un même objet occupe d’espace au fond de l’oeil, plus il peut être vu distinctement.

Et ainsi, lorsque notre oeil ou notre tête se tournent vers quelque côté, notre âme en est avertie par le changement que les nerfs insérés dans les muscles, qui servent à ces mouvements, causent en notre cerveau.

Comme ici, en l’oeil RST, il faut penser que la situation du petit filet du nerf optique, qui est au point R, ou S, ou T, est suivie d’une autre certaine situation de la partie du cerveau 7, ou 8, ou 9, qui fait que l’âme peut connaître tous les lieux qui sont en la ligne RV, ou SX, ou TY.

De façon que vous ne devez pas trouver étrange que les objets puissent être vus en leur vraie situation, nonobstant que la peinture, qu’ils impriment dans l’oeil, en ait une toute contraire :

La vision de la distance ne dépend non plus que celle de la situation d’aucunes images envoyées des objets, mais, premièrement, de la figure du corps de l’oeil ;

Nous pouvons aussi le même par l’aide d’un oeil seul, en lui faisant changer de place :

Nous avons encore une autre façon d’apercevoir la distance, à savoir par la distinction ou confusion de la figure, et ensemble par la force ou débilité de la lumière, Comme, pendant que nous regardons fixement vers X, les rayons qui viennent des objets 10 et 12, ne s’assemblent pas si exactement vers R et vers T, au fond de notre oeil, que si ces objets étaient aux points V et Y ;

Puis, de ce que la lumière, qui vient de l’objet 10 vers notre oeil, est plus forte que si cet objet était vers V, nous le jugeons être plus proche ;

Ë savoir, leur grandeur s’estime par la connaissance, ou l’opinion, qu’on a de leur distance, comparée avec la grandeur des images qu’ils impriment au fond de l’oeil ;

Et il est manifeste aussi que la figure se juge par la connaissance, ou l’opinion, qu’on a de la situation des diverses parties des objets, et non par la ressemblance des peintures qui sont dans l’oeil :

Mais, afin que vous ne puissiez aucunement douter que la vision ne se fasse ainsi que je l’ai expliquée, je vous veux faire encore ici considérer les raisons pourquoi il arrive quelquefois qu’elle nous trompe, Premièrement, à cause que c’est l’âme qui voit, et non pas l’oeil, et qu’elle ne voit immédiatement que par l’entremise du cerveau, de là vient que les frénétiques, et ceux qui dorment, voient souvent, ou pensent voir, divers objets qui ne sont point pour cela devant leurs yeux :

Comme si l’oeil rst, étant disposé de soi à regarder vers X, est contraint par le doigt N à se tourner vers M, les parties du cerveau d’où viennent ses nerfs, ne se disposent pas tout à fait en même sorte que si c’étaient ses muscles qui le tournassent vers M ;

et ainsi l’objet M paraîtra au lieu où est Y, par l’entremise de cet oeil, et Y au lieu où est X, et X au lieu où est V, et ces objets paraissant aussi en même temps en leurs vrais lieux, par l’entremise de l’autre oeil RST, ils sembleront doubles.

car, quant à la figure de l’oeil, elle ne varie quasi plus sensiblement, lorsque l’objet est à plus de quatre ou cinq pieds loin de lui, et même elle varie si peu lorsqu’il est plus proche, qu’on n’en peut tirer aucune connaissance bien précise.

Or la raison qui les fait paraître plus proches, est que le mouvement dont la prunelle s’étrécit pour éviter la force de leur lumière, est tellement joint avec celui qui dispose tout l’oeil à voir distinctement les objets proches, et par lequel on juge de leur distance, que l’un ne se peut guère faire, sans qu’il se fasse aussi un peu de l’autre :

Et la raison pourquoi ces corps blancs ou lumineux paraissent plus grands, ne consiste pas seulement en ce que l’estime qu’on fait de leur grandeur dépend de celle de leur distance, mais aussi en ce que leurs images s’impriment plus grandes dans le fond de l’oeil.

Comme, si les bouts de ces petits filets sont 1, 2, 3, et que les rayons qui viennent, par exemple, tracer l’image d’une étoile sur le fond de l’oeil, s’y étendent sur celui qui est marqué I, et tant soit peu au delà tout autour sur les extrémités des six autres marqués 2, sur lesquels je suppose qu’il ne vient point d’autres rayons, que fort faibles, des parties du ciel voisines à cette étoile, son image s’étendra en tout l’espace qu’occupent ces six marqués 2, et même peut-être encore en tout celui qu’occupent les douze marqués 3, si la force du mouvement est si grande qu’elle se communique aussi à eux.

Eet qu’encore qu’elles ne seraient pas entièrement rondes, elles ne laisseraient pas de paraître telles, comme aussi une tour carrée étant vue de loin paraît ronde, et tous les corps qui ne tracent que de fort petites images dans l’oeil, n’y peuvent tracer les figures de leurs angles.

  LA DIOPTRIQUE, DISCOURS SEPTIEME, DES MOYENS DE PERFECTIONNER LA VISION.

Si bien qu’il ne nous reste à considérer que les organes extérieurs, entre lesquels je comprends toutes les parties transparentes de l’oeil aussi bien que tous les autres corps qu’on peut mettre entre lui et l’objet.

Le second, que ces images soient fort grandes, non pas en étendue de lieu, car elles ne sauraient occuper que le peu d’espace qui se trouve au fond de l’oeil, mais en l’étendue de leurs linéaments ou de leurs traits, car il est certain qu’ils seront d’autant plus aisés à discerner qu’ils seront plus grands.

Et le quatrième, qu’il y ait le plus d’objets qu’il sera possible dont les images se forment dans l’oeil en même temps, afin qu’on en puisse voir le plus qu’il sera possible tout d’une vue.

Car premièrement, remplissant l’oeil de liqueurs fort transparentes et qui ne sont teintes d’aucune couleur, elle a fait que les actions qui viennent de dehors peuvent passer jusqu’au fond sans se changer.

Puis, par la couleur noire dont elle a teint toutes les parties de l’oeil opposées au nerf, qui ne sont point transparentes, elle a empêché qu’il n’allât aucun autre rayon vers ces mêmes points.

Et enfin, par le changement de la figure du corps de l’oeil, elle a fait qu’encore que les objets en puissent être plus ou moins éloignés une fois que l’autre, les rayons qui viennent de chacun de leurs points ne laissent pas de s’assembler, toujours aussi exactement qu’il se peut, en autant d’autres points au fond de l’oeil.

Car par exemple l’oeil B ou C, étant disposé à faire que tous les rayons qui viennent du point H ou I s’assemblent au milieu de son fond ;

et la seconde, que par leur moyen les rayons qui viennent des autres points de l’objet, comme EE, entrent dans l’oeil à peu près de même que s’ils venaient d’autant d’autres points, comme FF :

car, outre qu’il serait peut-être assez malaisé à déterminer par géométrie, entre une infinité de figures qui peuvent servir à ce même effet, celles qui y sont exactement les plus propres, il serait entièrement inutile, à cause que l’oeil même ne faisant pas que tous les rayons qui viennent de divers points s’assemblent justement en autant d’autres divers points, elles ne seraient pas sans doute pour cela les plus propres à rendre la vision bien distincte ;

et il est impossible en ceci de choisir autrement qu’à peu près, à cause que la figure précise de l’oeil ne nous peut être connue.

Pour la grandeur des images, il est à remarquer qu’elle dépend seulement de trois choses, à savoir de la distance qui est entre l’objet et le lieu où se croisent les rayons qu’il envoie de divers de ses points vers le fond de l’oeil, puis de celle qui est entre ce même lieu et le fond de l’oeil, et enfin de la réfraction de ces rayons.

ou bien, si on pouvait faire que le corps de l’oeil fût plus long, en sorte qu’il y eût plus de distance qu’il n’y a depuis sa superElcie BCD, qui fait que ces rayons s’entrecroisent, jusques au fond RST ;

afin d’y ajouter par art tout ce qui se peut, il est seulement besoin d’interposer un verre tel que celui qui est marqué P, dont il a été parlé tout maintenant, qui fasse que tous les rayons qui viennent d’un point le plus proche qu’il se pourra entrent dans l’oeil comme s’ils venaient d’un autre point plus éloigné :

or tout le plus qu’on puisse faire par ce moyen, c’est qu’il n’y aura que la douze ou quinzième partie d’autant d’espace entre l’oeil et l’objet qu’il y en devrait avoir sans cela, et ainsi que les rayons qui viendront de divers points de cet objet, se croisant douze ou quinze fois plus près de lui, ou même quelque peu davantage, à cause que ce ne sera plus sur la superficie de l’oeil qu’ils commenceront à se croiser, mais plutôt sur celle du verre dont l’objet sera un peu plus proche, ils formeront une image dont le diamètre sera ou douze ou quinze fois plus grand qu’il ne pourrait être si on ne se servoit point de ce verre :

Car par exemple, si en regardant l’objet X au travers du verre P, on dispose son oeil C en même sorte qu’il devrait être pour voir un autre objet qui serait à vingt ou trente pas de lui, et que, n’ayant d’ailleurs aucune connaissance du lieu où est cet objet X, on le juge être véritablement à trente pas, il semblera plus d’un million de fois plus grand qu’il n’est, en sorte qu’il pourra devenir d’une puce un éléphant ;

car il est certain que l’image que forme une puce au fond de l’oeil, lorsqu’elle en est si proche, n’est pas moins grande que celle qu’y forme un éléphant lorsqu il en est à trente pas.

Il ne reste plus qu’un autre moyen pour augmenter la grandeur des images, qui est de faire que les rayons qui viennent de divers points de l’objet se croisent le plus loin qu’il se pourra du fond de l’oeil ;

comme par exemple d’autant que la première des trois liqueurs dont l’oeil est rempli cause à peu près même réfraction que l’eau commune, si on applique tout contre un tuyau plein d’eau, comme EF, au bout duquel il y ait un verre GHI, dont la figure soit toute semblable à celle de la peau BCD qui couvre cette liqueur, et ait même rapport à la distance du fond de l’oeil, il ne se fera plus aucune réfraction à l’entrée de cet oeil ;

Et ainsi l’eau EF faisant l’office de l’humeur K, le verre GHI celui de la peau BCD, et l’entrée du tuyau GI celui de la prunelle, la vision se fera en même façon que si la nature avait fait l’oeil plus long qu’il n’est de toute la longueur de ce tuyau.

Sans qu’il y ait autre chose à remarquer, sinon que la vraie prunelle sera pour lors non seulement inutile, mais même nuisible, en ce qu’elle exclura par sa petitesse les rayons qui pourraient aller vers les côtés du fond de l’oeil, et ainsi empêchera que les images ne s’y étendent en autant d’espace qu’elles feraient, si elle n’était point si étroite.

et c’est pour cette même raison que ci-dessus je n’ai point parlé des réfractions que peuvent causer les peaux qui enveloppent les humeurs de l’oeil, mais seulement de celles de ses humeurs.

Or, d’autant qu’il y aurait beaucoup d’incommodité à joindre de l’eau contre notre oeil en la façon que je viens d’expliquer, et même que, ne pouvant savoir précisément quelle est la figure de la peau BCD qui le couvre, on ne saurait déterminer exactement celle du verre GHI pour le substituer en sa place ;

Et de faire, par le moyen d’un ou de plusieurs verres, ou autres corps transparents enfermés aussi en un tuyau, mais non pas joints à l’oeil si exactement qu’il ne demeure un peu d’air entre deux, que, dès l’entrée de ce tuyau, les rayons qui viennent d’un même point de l’objet.

se plient ou se courbent en la façon qui est requise, pour faire qu’ils aillent se rassembler en un autre point vers l’endroit où se trouvera le milieu du fond de l’oeil quand ce tuyau sera mis au-devant.

Puis derechef que ces mêmes rayons en sortant de ce tuyau se plient et se redressent en telle sorte qu’ils puissent entrer dans l’oeil tout de même que s’ils n’avaient point du tout été pliés, mais seulement qu’ils vinssent de quelque lieu qui fût plus proche ;

et ensuite que ceux qui viendront de divers points, s’étant croisés dès l’entrée de ce tuyau, ne se décroisent point à la sortie, mais qu’ils aillent vers l’oeil en même façon que s’ils venaient d’un objet qui fût plus grand ou plus proche.

et que son autre superficie KM les plie derechef en telle sorte qu’ils tendent de là vers l’oeil en même façon que s’ils venaient du point x, que je suppose en tel lieu que les lignes xC et CS ont entre elles même proportion que XH et HS ;

ceux qui viendront du point V les croiseront nécessairement en la superficie GHI, de façon que, se trouvant déjà éloignés d’eux, lorsqu’ils seront à l’autre bout du tuyau, la superficie KM ne les en pourra pas rapprocher, principalement si elle est concave, ainsi que je la suppose, mais elle les renverra vers l’oeil à peu près en même sorte que s’ils venaient du point v, au moyen de quoi ils formeront l’image RST d’autant plus grande que le tuyau sera plus long.

Car, premièrement, lorsque ces actions sont si fortes qu’on ne peut assez étrécir les prunelles pour les souffrir, comme lorsqu’on veut regarder le soleil, il est aisé d’y apporter remède en se mettant contre l’oeil quelque corps noir, dans lequel il n’y ait qu’un trou fort étroit qui fasse l’office de la prunelle ;

ou bien en regardant au travers d’un crêpe ou de quelque autre tel corps un peu obscur, et qui ne laisse entrer en l’oeil qu’autant de rayons de chaque partie de l’objet qu’il en est besoin pour mouvoir le nerf optique sans le blesser.

Et il est à remarquer que, si on ne faisait point cette ouverture plus large que n’est la prunelle, les rayons agiraient moins fort contre chaque partie du fond de l’oeil que si on ne se servait point de lunettes :

Comme si le verre GgHi fait que tous les rayons qui viennent du point qu’on veut regarder tendent vers S, et qu’ils soient redressés par le verre KLM, en sorte que de là ils tendent parallèles vers l’oeil :

car il est manifeste que si on la faisait plus grande, il n’entrerait point pour cela dans l’oeil plus de rayons du point vers lequel on dresse sa vue, et que pour ceux qui y viendraient de plus des autres lieux, ne pouvant aider à la vision, ils ne feraient que la rendre plus confuse.

Et si cette ligne Sl n’est pas plus grande que le diamètre de l’oeil, la vision sera aussi forte à peu près et aussi claire que si on ne se servait point de lunettes, et que les objets fussent en récompense plus proches qu’ils ne sont, d’autant qu’ils paraissent plus grands.

En sorte que, si la longueur du tuyau fait, par exemple, que l’image d’un objet éloigné de trente lieues se forme aussi grande dans l’oeil que s’il n’était éloigné que de trente pas, la largeur de son entrée, étant telle que je viens de la déterminer, fera que cet objet se verra aussi clairement que si, n’en étant véritablement éloigné que de trente pas, on la regardait sans lunettes.

Et même il faut observer qu’il sera mieux de couvrir le verre par le dehors que par le dedans, afin que les réflexions qui se pourraient faire sur les bords de sa superficie n’envoient vers l’oeil aucuns rayons ;

même tout au contraire, d’autant plus que par le moyen de quelques lunettes, on augmente la grandeur des linéaments de l’image qui s’imprime au fond de l’oeil ;

Au reste, afin que je n’omette ici aucune chose, j’ai encore à vous avertir que les défauts de l’oeil, qui consistent en ce qu’on ne peut assez changer la figure de l’humeur cristalline ou bien la grandeur de la prunelle, se peuvent peu à peu diminuer et corriger par l’usage, à cause que cette humeur cristalline et la peau qui contient cette prunelle étant de vrais muscles, leurs fonctions se facilitent et s’augmentent lorsqu’on les exerce, ainsi que celles de tous les autres muscles de notre corps.

  LA DIOPTRIQUE, DISCOURS HUITIÈME, DES FIGURES QUE DOIVENT AVOIR LES CORPS TRANSPARENTS POUR DÉTOURNER LES RAYONS PAR RÉFRACTION EN TOUTES LES FACONS QUI SERVENT A LA VUE.

Comme lorsque j’ai dit que ceux de l’objet VXY, qui forment l’image RST sur le fond de l’oeil, se croisent dès la première de ses superficies BCD.

  LA DIOPTRIQUE, DISCOURS NEUVIEME, LA DESCRIPTION DES LUNETTES.

Comme par exemple l’oeil B, ou C, étant disposé à faire que tous les rayons, qui viennent du point H, ou I, s’assemblent exactement au milieu de son fond, et non pas ceux du point V ou X, il faut, pour lui faire voir distinctement l’objet qui est vers V, ou X, mettre entre deux le verre O, ou P, dont les superficies, l’une convexe et l’autre concave, ayant les figures tracées par deux hyperboles qui soient telles qu’H, ou I, soit le point brûlant de la concave, qui doit être tournée vers l’oeil, et V, ou X, celui de la convexe.

à savoir l’intérieure qui regarde vers l’oeil, si c’est I qui soit assez éloigné ;

Car lors une partie de l’objet de la grandeur de la prunelle pourra tenir lieu d’un seul point, à cause que son image n’occupera guère plus d’espace au fond de l’oeil que l’extrémité de l’un des petits filets du nerf optique.

Que si on veut par le moyen aussi d’un seul verre faire que les objets accessibles, c’est-à-dire ceux qu’on peut approcher de l’oeil autant qu’on veut, paraissent beaucoup plus grands, et se voient beaucoup plus distinctement que sans lunettes :

le plus commode sera de faire celle des superficies de ce verre qui doit être tournée vers l’oeil toute plates et donner à l’autre la figure d’une hyperbole, dont le point brûlant soit au lieu où on voudra mettre l’objet.

Et que la matière en quoi il sera enchâssé soit toute noire du côté qui doit être tourné vers l’oeil, ou même aussi il ne sera pas inutile qu’elle soit garnie tout autour d’un bord de panne ou velours noir, afin qu’on la puisse commodément appuyer tout contre l’oeil, et ainsi empêcher qu’il n’aille vers lui aucune lumière, que par l’ouverture du verre.

Comme si A est le verre, C la partie intérieure de la matière en laquelle il est enchâssé, D l’extérieure, E l’objet, G le petit bras qui le soutient, II l’oeil et I le soleil, dont les rayons ne vont point en l’oeil  directement, à cause de l’interposition tant de la lunette que de l’objet, mais donnant contre le corps blanc, ou le miroir D, ils se réfléchissent premièrement de là vers E, puis d’E ils se réfléchissent vers l’oeil.

Et premièrement abc la superficie du verre concave abcdef, doit avoir la figure d’une hyperbole, qui ait son point brûlant à la distance à laquelle l’oeil, pour lequel on prépare cette lunette, peut voir le plus distinctement ses objets.

Comme ici l’oeil G étant disposé à voir plus distinctement les objets qui sont vers H qu’aucuns autres, H doit être le point brûlant de l’hyperbole abc :

Puis l’autre superficie def doit avoir la figure d’une autre hyperbole, dont le point brûlant I soit éloigné d’elle de la largeur d’un pouce, ou environ, en sorte qu’il se rencontre vers le fonds de l’oeil, lorsque ce verre est appliqué tout contre sa superficie.

Et je puis seulement dire en général que les autres choses, étant égales, d’autant que ce point I sera plus proche, d’autant les objets paraîtront plus grands, à cause qu’il faudra disposer l’oeil comme s’ils étaient plus près de lui ;

car encore qu’en l’augmentant on puisse faire que l’image des objets soit un peu plus grande, à cause que les rayons qui viennent de divers points s’écartent un peu plus du côté de l’oeil, on fait aussi en revanche qu’ils paraissent en moindre quantité et moins clairs.

Et il doit être tout noir par le dedans, et même avoir un bord de panne ou velours noir vers M, afin qu’on puisse en l’appliquant tout contre l’oeil, empêcher qu’il n’y entre aucune lumière que par le verre NOPQ.

car de là entrant dans le tuyau, quelques-uns d’eux se pourraient réfléchir vers l’oeil et affaiblir d’autant la vision, parce qu’encore que ce tuyau doive être tout noir par le dedans, il ne le peut être toutefois si parfaitement que sa matière ne cause toujours quelque peu de réflexion, lorsque la lumière est fort vive, ainsi qu’est celle du soleil.

Vous voyez bien pourquoi j’ai ici tant de soin de faire que l’objet soit fort éclairé, et qu’il vienne beaucoup de ses rayons vers l’oeil, car le verre NOPR qui en cette lunette fait l’office de la prunelle, et dans lequel se croisent ceux de ces rayons qui viennent de divers points, étant beaucoup plus proche de l’objet que de l’oeil, est cause qu’ils s’étendent sur les extrémités du nerf optique, en un espace beaucoup plus grand que n’est la superficie de l’objet d’où ils viennent ;

Et c’est de là que dépend la longueur de cette lunette, c’est-à-dire, la distance qui doit être entre l’hyperbole NOP et son point brûlant Car d’autant qu’elle est plus longue, d’autant l’image de l’objet est plus étendue dans le fond de l’oeil, ce qui  fait que toutes ses petites parties y sont plus distinctes.

mais où ils ne feraient pas que ces rayons venant de divers points de l’objet s’assemblassent si exactement vers l’oeil en autant d’autres divers points ;

Seulement vous veux-je encore avertir que ces lunettes ne pouvant être appliquées qu’à un seul oeil, il sera mieux de bander l’autre, ou le couvrir de quelque voile fort obscur, afin que sa prunelle demeure la plus ouverte qu’il se pourra, que de le laisser exposé à la lumière, ou de le fermer par l’aide des muscles qui meuvent ces paupières ;

De plus il ne sera pas inutile non seulement d’appuyer cette lunette tout contre l’oeil, en sorte qu’il ne puisse venir vers lui aucune lumière que par elle, mais aussi d’avoir auparavant attendri sa vue en se tenant en lieu obscur, et d’avoir l’imagination disposée comme pour regarder des choses fort éloignées et fort obscures, afin que la prunelle s’ouvre d’autant plus, et qu’ainsi on en puisse voir un objet d’autant plus grand.

  LA DIOPTRIQUE, DISCOURS DIXIEME, DE LA FACON DE TAILLER LES VERRES.

Puis je voudrais qu’on fît des verres concaves de diverses figures en les creusant toujours de plus en plus jusques à ce qu’on eût trouvé par expérience la juste figure de celui qui rendrait cette lunette la plus parfaite qu’il soit possible et la mieux proportionnée à l’oeil qui aurait à s’en servir.

Or, ayant ainsi trouvé ce verre concave, d’autant que le même peut servir au même oeil pour toute autre sorte de lunettes, il n’est plus besoin pour les lunettes qui servent à voir les objets inaccessibles, que de s’exercer à faire d’autres verres convexes qui doivent être posés plus loin du concave que le premier, et à en faire aussi par degrés qui doivent être posés de plus en plus loin jusques à la plus grande distance qu’il se pourra, et qui soient aussi plus grands à proportion.

Mais notez que, d’autant que ces verres convexes doivent être posés plus loin des concaves et par conséquent aussi de l’oeil, d’autant doivent-ils être taillés plus exactement, à cause que les mêmes défauts y détournent les rayons d’autant plus loin de l’endroit où ils doivent aller.

  LES METEORES, DISCOURS TROISIEME, Du sel.

mais qu’y en venant d’autres qui s’y joignent en travers, comme vers O, celles ci aident aux autres des bords à s’abaisser presque autant que celles du milieu, et en telle sorte que la petite table carrée qui sert de base à un grain de sel, se formant ordinairement de plusieurs centaines jointes ensemble, ne peut paraître à l’oeil que toute plate, encore qu’elle soit toujours tant soit peu courbée.

  LES METEORES, DISCOURS SIXIEME, DE LA NEIGE, DE LA PLUIE, ET DE LA GRELE.

Toutefois, au lieu d’être exactement ronds, comme sans doute ces gouttes avaient été, ils avaient un côté notablement plus plat que l’autre, en sorte qu’ils ressemblaient presque en figure à la partie de notre oeil qu’on nomme l’humeur cristalline.

  LES METEORES, DISCOURS SEPTIEME, DES TEMPETES, DE LA FOUDRE ET DE TOUS LES AUTRES FEUX QUI S’ALLUMENT EN L’AIR.

Et parce qu’il ne se voit quasi jamais d’autres nues en ces lieux-là, sitôt que les mariniers y en aperçoivent quelqu’une qui commence à se former, bien qu’elle paraisse quelquefois si petite que les Flamands l’ont comparée à l’oeil d’un boeuf, duquel ils lui ont donné le nom, et que le reste de l’air semble fort calme et fort serein, ils se hâtent d’abattre leurs voiles, et se préparent à recevoir une tempête qui ne manque pas de suivre tout aussitôt.

  LES METEORES, DISCOURS HUITIEME, DE L’ARC-EN-CIEL.

Et ayant rempli d’eau, à cet effet, une grande fiole de verre toute ronde et fort transparente, j’ai trouvé que le soleil venant, par exemple, de la partie du ciel marquée AFZ, et mon oeil étant au point E, lorsque je mettais cette boule en l’endroit BCD, sa partie D me paraissait toute rouge et incomparablement plus éclatante que le reste ;

et que, soit que je l’approchasse, soit que je la reculasse, et que je la misse à droite ou à gauche, ou même la fisse tourner en rond autour de ma tête, pourvu que la ligne DE fît toujours un angle d’environ 42 degrés avec la ligne EM, qu’il faut imaginer tendre du centre de, l’oeil vers celui du soleil, cette partie D paraissait toujours également rouge ;

D’où j’ai connu manifestement que, tout l’air qui est vers M étant rempli de telles boules, ou en leur place de gouttes d’eau, il doit paraître un point fort rouge et fort éclatant en chacune de celles de ces gouttes dont les lignes tirées vers l’oeil E font un angle d’environ 42 degrés avec EM, comme je suppose celles qui sont marquées R ;

De façon que le premier arc-en-ciel est causé par des rayons qui parviennent à l’oeil après deux réfractions et une réflexion, et le second par d’autres rayons qui n’y parviennent qu’après deux réfractions et deux réflexions ;

Mais la principale difficulté restait encore qui était de savoir pourquoi, y ayant plusieurs autres rayons qui, après deux réfractions et une ou deux réflexions, peuvent tendre vers l’oeil quand cette boule est en autre situation, il n’y a toutefois que ceux dont j’ai parlé qui fassent paraître quelques couleurs.

Puis, j’ai trouvé aussi qu’après deux réflexions et deux réfractions, il y en a beaucoup plus qui viennent vers l’oeil sous l’angle de 51 à 52 degrés que sous aucun plus grand ;

De façon qu’il y a de l’ombre de part et d’autre qui termine la lumière, laquelle, après avoir passé par une infinité de gouttes de pluie éclairées par le soleil, vient vers l’oeil sous l’angle de 42 degrés, ou un peu au-dessous, et ainsi cause le premier et principal arc-en-ciel.

Puis je considère un de ces rayons en particulier, par exemple EF qui, au lieu de passer tout droit vers G, se détourne vers K, et se réfléchit de K vers N, et de là va vers l’oeil P ;

ou bien se réfléchit encore une fois de N vers Q, et de là se détourne vers l’oeil R.

et si on la suppose assez petite pour faire qu’il soit véritablement de 45, on trouvera que celui de l’extérieur ne sera aussi guère plus que de 45, au lieu qu’il paraît à l’oeil beaucoup plus grand que celui de l’intérieur.

car la même cause pour laquelle c’est vers F, plutôt que vers H, qu’il paraît au travers du cristal MNP, fait que si, ayant l’oeil en la place du linge blanc FGH, on regarde ce cristal, on y verra le rouge vers sa partie plus épaisse MP, et le bleu vers N, parce que le rayon teint de rouge qui va vers F, vient de C, la partie du soleil la plus avancée vers MP.

comme lorsque l’arc n’est pas exactement rond, ou que son centre n’est pas en la ligne droite qui passe par l’oeil et le soleil, ce qui peut arriver si les vents changent la figure des gouttes de pluie ;

Ce que je ne saurais juger être arrivé que par la réflexion des rayons du soleil donnant sur l’eau de la mer, ou de quelque lac, Comme si, venant de la partie du ciel SS, ils tombent sur l’eau DAE, et de là, se réfléchissent vers la pluie CF, l’oeil B verra l’arc FF, dont le centre est au point C, en sorte que, CB étant prolongée jusques à A, et AS passant par le centre du soleil, les angles SAD et BAE soient égaux, et que l’angle CBF soit d’environ 42 degrés, Toutefois, il est aussi requis à cet effet, qu’il n’y ait point du tout de vent qui trouble la surface de l’eau vers E, et peut-être avec cela qu’il y ait quelque nue, comme G qui empêche que la lumière du soleil, allant en ligne droite vers la pluie, n’efface celle que cette eau E y envoie ;

Outre cela, l’oeil peut être en telle situation, au respect du soleil et de la pluie, qu’on verra la partie inférieure qui achève le cercle de l’arc-en-ciel, sans voir la supérieure ;

Comme, si l’eau qui sort par les petits trous ABC, sautant assez haut, s’épand en l’air de tous côtés vers R, et que le soleil soit vers Z, en sorte que, ZEM étant ligne droite, l’angle MER puisse être d’environ 42 degrés, l’oeil E ne manquera pas de voir l’iris vers R, tout semblable à celui qui paraît dans le ciel.

  LES METEORES, DISCOURS NEUVIEME , De la couleur des nues et des cercles ou couronnes qu’on voit quelquefois autour des astres.

Et encore que la plus part de celles qui tombent, paraissent à l’oeil extrêmement plates et unies, il est certain néanmoins qu’elles sont toutes quelque peu plus épaisses au milieu qu’aux extrémités, ainsi qu’il se voit aussi à l’oeil en quelques unes, et selon qu’elles le sont plus ou moins, elles font paraître ces cercles plus ou moins grands :

Soit par exemple ABC le soleil, D l’oeil, EFG plusieurs petites parcelles de glace transparentes, arrangées côte à côte les unes des autres ;

Enfin pour ce qui est de celles qu’on voit quelquefois autour des lampes et des flambeaux la cause n’en doit point être cherchée dans l’air mais seulement dans l’oeil qui les regarde.

ce fut en voyageant de nuit dans un navire, où après avoir tenu tout le soir ma tête appuyée sur une main, dont je fermais mon oeil droit, pendant que je regardais de l’autre vers le ciel, on apporta une chandelle au lieu où j’étais :

Après cela refermant l’oeil droit, j’aperçus que ces couronnes disparaissaient ;

ce qui m’assura qu’elles ne procédaient que de quelque disposition que mon oeil droit avait acquise pendant que je l’avais tenu fermé, et qui était cause, qu’outre que la plus part des rayons de la flamme qu’il recevait la représentaient vers O où ils s’assemblaient, il y en avait aussi quelques uns qui étaient tellement détournés, qu’ils s’étendaient en tout l’espace fO où ils peignaient la couronne CD ;

Comme s’il y à seulement une ou deux petites rides en quelqu’une des superficies E, M, P qui à cause de la figure de l’oeil s’y étendent en forme d’un cercle dont le centre soit en la ligne E, O, comme il y en a souvent de toutes droites qui se croisent en cette ligne E, O, et nous font voir de grands rayons épars ça et la autour des flambeaux.

Ou bien qu’il y ait quelque chose d’opaque entre E, et P, où même à côté en quelque lieu, pourvu qu’il s’y étende circulairement, ou enfin que les humeurs, ou les peaux de l’oeil, ayant en quelque façon changé de tempérament, ou de figure.

dont la raison vous sera claire, si vous considérés qu’en la production de leurs couleurs, c’est l’humeur cristalline PNM qui tient lieu du prisme de cristal dont il a tantôt été parlé, et le fonds de l’oeil FGf qui tient lieu du linge blanc qui était derrière.

si ce n’est que vous considériez que les rayons qui viennent de chaque point de ces objets vers chaque point du fonds de l’oeil, passant les uns par celui de ses cotés qui est marqué N, et les autres par celui qui est marqué S, ont des actions toutes contraires, et qui se détruisent les unes les autres ;

  LES METEORES, DISCOURS DIXIEME, De l’apparition de plusieurs soleils.

Car vous savez que la réflexion se fait toujours par angles égaux, et que la glace étant un corps poli doit représenter le soleil en tous les lieux d’où ses rayons se peuvent réfléchir vers l’oeil.

Premièrement bien que le soleil ne soit pas en la ligne droite qui va d’E vers l’oeil K mais plus haut ou plus bas, il ne doit pas laisser dé paraître vers là.

Comme si elle a en son épaisseur la figure comprise entre les lignes 123 et 456, il est évident que non seulement lorsque le soleil sera en la ligne droite A2, ses rayons la traversant pourront aller vers l’oeil K mais aussi lorsqu’il sera beaucoup plus bas, comme en la ligne S I, ou beaucoup plus haut, comme en la ligne T3 ;

Toutefois si le soleil est beaucoup plus bas qu’il ne paraît vers E, en sorte que ses rayons passent aussi en ligne droite par le dessous de la glace, jusques à l’oeil K, comme S7K que je suppose parallèle à S1, alors outre les six soleils précédents on en verra encore un septième au dessous d’eux, et qui ayant le plus de lumière, effacera l’ombre qu’ils pourraient causer dans les Horloges.

en sorte que l’oeil doit être fort proche du point E, lorsque cette largeur lui paraît assez grande pour y distinguer trois soleils l’un sur l’autre ;

Et plusieurs choses ont pu empêcher qu’il n’ait paru encore un sixième soleil vers V, dont la plus vraisemblable est que l’oeil en était si proche, à raison de la hauteur de la nue que tous les rayons qui donnaient sur la glace, vers là, se réfléchissaient plus loin que le point A.

Outre que sans doute ces nues ne sont jamais extrêmement rondes, bien qu’elles paraissent à l’oeil être telles.

Mais je ne juge pas pour cela que leur centre soit toujours en la ligne droite tirée de l’oeil vers le soleil, si précisément qu’y est celui de l’arc-en-ciel ;

  L’HOMME.

Voyez après cela comment le tuyau, ou petit nerf bf, se va rendre dans le muscle D, que je suppose être l’un de ceux qui meuvent l’oeil ;

et comment y étant il se divise en plusieurs branches, composées d’une peau lâche, qui se peut étendre, ou élargir et rétrécir, selon la quantité des esprits animaux qui y entrent ou qui en sortent, et dont les rameaux ou les fibres sont tellement disposées, que lorsque les esprits animaux entrent dedans, ils font que tout le corps du muscle s’enfle et s’accourcit, et ainsi qu’il tire l’oeil auquel il est attaché ;

Et que, tout de même le muscle E, que je suppose servir à mouvoir l’oeil tout au contraire du précédent, reçoit les esprits animaux du cerveau par le tuyau cg, et du muscle D par dg, et les renvoie vers D par ef.

Mais si les esprits qui sont dans le cerveau tendent à entrer avec quelque force dans les deux tuyaux bf, cg, et que cette force soit égale des deux côtés, ils ferment aussitôt les deux passages g et f, et enflent les deux muscles D et E autant qu’ils peuvent, leur faisant par ce moyen tenir et arrêter l’oeil ferme en la sit

descartes

« Au reste, afin que ceux qui ne connaissent pas la force des démonstrations mathématiques, et ne sont pas accoutumés à distinguerles vraies raisons des vraisemblables, ne se hasardent pas de nier ceci sans l'examiner, je les veux avertir que ce mouvement, queje viens d'expliquer, suit aussi nécessairement de la seule disposition des organes qu'on peut voir à l'oeil dans le coeur, et de lachaleur qu'on y peut sentir avec les doigts, et de la nature du sang qu'on peut connaître par expérience, que fait celui d'unehorloge, de la force, de la situation et de la figure de ses contrepoids et de ses roues. LA DIOPTRIQUE, DISCOURS PREMIER, DE LA LUMIERE. puis, ayant fait une briève description des parties de l'oeil, je dirai particulièrement en quelle sorte se fait la vision ; Or, n'ayant ici autre occasion de parler de la lumière, que pour expliquer comment ses rayons entrent dans l'oeil, et comment ilspeuvent être détournés par les divers corps qu'ils rencontrent, il n'est pas besoin que j'entreprenne de dire au vrai quelle est sanature, et je crois qu'il suffira que je me serve de deux ou trois comparaisons, qui aident à la concevoir en la façon qui me semblela plus commode, pour expliquer toutes celles de ses propriétés que l'expérience nous fait connaître, et pour déduire ensuitetoutes les autres qui ne peuvent pas si aisément être remarquées. comme, encore que ceux qui tombent sur la superficie du corps blanc AB, ne viennent que du flambeau C, ils ne laissent pas dese réfléchir tellement de tous côtés, qu'en quelque lieu qu'on pose l'oeil, comme par exemple vers D, il s'en trouve toujoursplusieurs venant de chaque endroit de cette superficie AB, gui tendent vers lui. Et même, si l'on suppose ce corps fort délié comme un papier ou une toile, en sorte que le jour passe au travers, encore que l'oeilsoit d'autre côté que le flambeau, comme vers E, il ne laissera pas de se réfléchir vers lui quelques rayons de chacune des partiesde ce corps. LA DIOPTRIQUE, DISCOURS SECOND, DE LA REFRACTION. Et il est temps que je commence à vous décrire quelle est la structure de l'oeil, afin de vous pouvoir faire entendre comment lesrayons qui entrent dedans s'y disposent pour causer le sentiment de la vue. LA DIOPTRIQUE, DISCOURS TROISIEME, DE L'OEIL. S'il était possible de couper l'oeil par la moitié, sans que les liqueurs dont il est rempli s'écoulassent, ni qu'aucune de ses partieschangeât de place, et que le plan de la section passât justement par le milieu de la prunelle, il paraîtrait tel qu'il est représenté encette figure. En la seconde, la superficie intérieure de la partie EF, qui regarde le fond de l'oeil, est toute noire et obscure ; et elle a au milieu un petit trou rond FF, qui est ce qu'on nomme la prunelle, et qui paraît si noir au milieu de l'oeil, quand on leregarde par dehors, Ce trou n'est pas toujours de même grandeur, et la partie EF de la peau en laquelle il est, nageant librementen l'humeur K, qui est fort liquide, semble être comme un petit muscle, qui se peut étrécir et élargir à mesure qu'on regarde desobjets plus ou moins proches, ou plus ou moins éclairés, ou qu'on les veut voir plus ou moins distinctement. Et vous pourrez voir facilement l'expérience de tout ceci en l'oeil d'un enfant ; EN, EN sont plusieurs petit filets noirs, qui embrassent tout autour l'humeur marquée L, et qui, naissant aussi de la seconde peau,en l'endroit où la troisième se termine, semblent autant de petits tendons, parle moyen desquels cette humeur L, devenant tantôtplus voûtée, tantôt plus plate, selon l'intention qu'on a de regarder des objets proches ou éloignés, change un peu toute la figuredu corps de l'oeil. Enfin O, O sont six ou sept muscles attachés à l'oeil par dehors, qui le peuvent mouvoir de tous côtés, et même aussi, peut-être,en le pressant ou retirant, aider à changer sa figure. LA DIOPTRIQUE, DISCOURS CINQUIEME, DES IMAGES QUI SE FORMENT SUR LE FOND DE L'OEIL. Car ils disent que cette chambre représente l'oeil ; ce verre, l'humeur cristalline, ou plutôt toutes celles des parties de l'oeil qui causent quelque réfraction ;. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles