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Proposition de plan : Faut-il accorder de l'importance aux mots ?

Publié le 22/02/2012

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[ EN QUEL(S) SENS LES MOTS POURRAIENT-ILS NE PAS COMPTER ? 1. Les mots comme « monnaie de singe » à laquelle on ne peut se fier. On ne peut prendre les mots pour argent comptant :ils incluent, de structure, le registre du mensonge . ils n'ont pas le sérieux des actes : combien de promesses (électorales par ex mais pas seulement) sont faites « en l'air »... 2. Les mots peuvent paraître faibles ou vains face au réel :les mots manquent lorsque le réel nous submerge. Le beau par ex rend muet ; et l'horreur nous confronte à un trou dans le symbolique : le silence ou le cri seuls tiennent alors lieu de langage. 3. Cette faiblesse et même cette faillite des mots n'empêchent pas l'inflation extraordinaire de la soi-disant communication. Les technologies nouvelles donnent à notre bavardage un essor sans limite :mais que nous « communiquions » de plus en plus sous le règne du quantitatif, cela ne nous étourdit-il pas dans un tourbillon de mots souvent creux, où risque de se noyer, de se perdre l'essentiel ? II CEPENDANT LES MOTS NE FONT-ILS PAS L'HUMANITE DE L'HOMME ? 1. Les mots insignifiants, la « parlotte », ne sont peut-être pas si nuls : ils ont une fonction sociale éminente. Repérée par les linguistes sous l'appellation de fonction phatique. Les mots échangés, même vides, ou presque, de contenu, sont le moyen de tisser le lien social. Plusieurs ex possibles, des conversations banales sur le temps qu'il fait, au devoir de parole du chef indien, en passant par le souci de meubler parfois un silence qui pourrait être « mortel ». 2. Et surtout, les mots, même repérés comme menteurs, agissent :il y a une magie des mots. Qui est d'ailleurs le ressort de l'efficacité magique. C'est que les mots, du fait de leur « négativité », ont le pouvoir d'opérer une métamorphose du réel, le pouvoir de faire exister ce qu'ils nomment, et/ou de nier ce qui est. De la calomnie ou de la flatterie par ex, il reste tjs quelque chose. Cela tient à la fonction symbolique des mots, qui, nous donnant aussi bien une prise formidable sur le monde, nous émancipe de l'animalité. 3. Ce qui se vérifie aussi en ceci que les mots sont la condition de la pensée : ils ne sont pas seulement le moyen de la véhiculer, et de la transmettre. Les mots en effet donnent corps à la pensée, et c'est ce que l'on peut dire qui délimite et organise ce que l'on peut penser. On analyse son expérience et on perçoit le monde en fonction de la ou des langue(s) qu'on parle. III SI LES MOTS IMPORTENT A CE POINT, N'Y A-T-IL PAS DU COUP POUR NOUS UN DEVOIR DE « BIEN DIRE » ? 1. S'il y a une vertu de l'expression verbale, « bien dire », c'est s'efforcer de bien penser, autrement dit de penser «par soi-même». En tirant de son propre fonds un agencement original de ces mots généraux et reçus de la langue commune, on peut les faire vivre et leur faire dire, peut-être, ce qu'ils n'ont encore jamais dit : on peut engager toute sa personne dans sa parole ou son écriture. 2. Cette persévérance dans la recherche du « bien dire » a une portée éthique considérable. Car enfiler en automate du langage des clichés et des formules toutes faites, c'est aligner des mots « aussi morts que des chiffres dans les colonnes d'un bilan » comme l'écrit Michel Leiris : c'est laisser s'endormir sa raison ; or, justement... « le sommeil de la raison engendre des monstres » selon la formule célèbre de Goya. Il semble bien, si l'on suil Hannah Arendt, que cet Eichmann qui, en automate du régime nazi organisa la « solution finale », fut aussi et peut-être d'abord un automate du langage. 3. Les mots portent d'autant plus à conséquence qu'on ne mesure généralement pas leur poids, tant ils nous « collent à la peau » depuis toujours. Ils nous échappent bien souvent, pour le meilleur et pour le pire. Combien de paroles stigmatisantes de la part des enseignants, des parents, de ceux qui sont en position d'autorité enferment parfois les sujets sous des étiquettes dont ils auront le plus grand mal à se décoller. Et à l'inverse, comment niei le orix inestimable des mots justes, de ces mots qui s'avèrent capables de « panser » les maux.

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