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Les différents sens du mot liberté

Publié le 15/01/2004

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■ Une connaissance adéquate du monde nous apprend à distinguer deux sortes de choses : celles qui ne dépendent pas de nous, et celles qui dépendent de nous (cf. Manuel d'Épictète). Les premières sont le cours du monde, notre corps, les honneurs, les aléas de la fortune ; les secondes, nos jugements, nos désirs, nos opinions, bref, le principe directeur de notre âme, notre liberté de juger. ■ Or, le trouble de l'âme et l'inquiétude du coeur naissent de l'attachement de notre volonté aux premières, qui, nécessairement, nous déçoivent et nous font vivre dans l'inconstance. Se lier à ce qui ne dépend pas de nous revient à se rendre prisonnier de l'extériorité, à vivre hors de soi-même. ■ La seule manière d'atteindre la paix consiste donc à se détacher de toutes ces choses, pour se retirer dans la citadelle imprenable de notre liberté intérieure. Là, personne ne peut nous contraindre, là nous jouissons d'une parfaite indépendance, et jamais nous ne serons déçus. Quoi qu'il arrive, je conserve ma liberté de jugement, je suis hors d'atteinte. Je considère froidement mes passions*, qui, tout comme mon corps, ne sont que choses extérieures à moi-même, indignes d'attachement. Le but du sage est d'atteindre l'« apathie ».

« C.

La liberté comme compréhension de la nécessité • Comme les stoïciens, Spinoza considère la nature comme soumise à la nécessité.

« Dans la nature, il n'existe rien de contingent, écrit-il dans L'Éthique (1677) ; mais tout est déterminé par la nécessité de la nature divine à existeret à agir selon une modalité particulière ».

Ce que nous appelons la « liberté » ne serait donc riend'autre que notre ignorance des causes véritables qui nous déterminent.

C ar l'homme est d'abordesclave : soumis aux erreurs des sens et aux illusions de la passion, il s'agite de tous côtés, voyantquelquefois le meilleur, faisant souvent le pire. • Mais comment convertir en liberté la servitude originelle de l'homme ? Par la connaissance,répond Spinoza.

Pour accéder à la liberté, il me faut comprendre que tout ce qui m'arrive étaitnécessaire, et coïncider par mon intelligence avec cette nécessité inéluctable.

Si le malheur mefrappe, quand j'aurai compris que l'enchaînement des causes et des effets rendait ce malheurinévitable, je serai apaisé ; je cesserai d'envisager mes souffrances sous l'angle borné de monindividualité, pour les considérer du point de vue de la totalité, du point de vue de la liaison detoutes choses. Les hommes cherchent le bonheur, et presque tous sont malheureux.

Emportés par leurspassions tristes, ils se haïssent et se divisent.

Face à la folie des hommes, Spinoza ne blâme ni neraille, il cherche à comprendre.

Les passions doivent être étudiées froidement « comme s'il étaitquestion de lignes, de surfaces et de solides ». 1.

Les fondements de l'affectivité A.

Le conatus Chaque chose, partie de la puissance divine, s'efforce de persévérer dans son être.

Cet effort (conatus) pour s'affirmer, sedévelopper, n'exprime pas un manque, mais une puissance positive.

Rapporté à l'âme seule, il s'appelle volonté ; rapporté à l'âme et au corps, appétit.

On peut dire que l'appétit est l'essence del'homme ; tout en lui découle de cette tendance fondamentale, qui, lorsqu'elle est consciente, s'appelle désir. B.

Action et passion Nous agissons vraiment, nous sommes « actifs », lorsque nous sommes par nous-mêmes la cause de nos actes et de nossentiments.

Nous sommes au contraire « passifs » quand nos actes, nos sentiments ne s'expliquent pas par nous, mais par des causesextérieures.

Or, comme toute partie de la nature, nous subissons nécessairement l'action de causes extérieures.

Nous sommes doncnécessairement en proie aux passions : elles sont les affections du corps et les sentiments de l'âme, dont nous ne sommes pas lacause, et qui nous poussent à certains actes. C.

Joie et tristesse, les deux passions fondamentales Mais il y a passion et passion.

Toute passion n'est pas mauvaise : si les choses extérieures ont un effet positif sur moi, augmententma perfection, ma puissance, j'éprouve une joie.

Si elles restreignent ma puissance, ma capacité de penser et d'agir, j'éprouve unetristesse.

Toute joie, signe d'un perfectionnement, est bonne, toute tristesse, signe d'un amoindrissement, est mauvaise.

Le sages'efforce donc de favoriser les passions joyeuses et de chasser les passions tristes.

Toute passion dans l'âme est passion dans le corps, et toute action dans l'un est aussi action dans l'autre.

Il est donc absurde depenser que l'âme pourrait se perfectionner au détriment du corps. D.

Amour et haine Chacun est naturellement poussé à rechercher la cause de sa joie, à s'unir à elle, et à éloigner, à détruire celle de sa tristesse.

Delà naissentles passions de l'amour et de la haine : aimer quelqu'un, c'est se le représenter comme la cause de sa joie, le haïr, se le représentercomme celle de sa tristesse.

Mais nous verrons qu'entre ce que l'on se « représente comme » la cause et la cause véritable, il peut yavoir une différence : autrement dit, nos amours et nos haines peuvent être insensées.

De ces passions fondamentales se déduisenttoutes les autres.Toutes les passions naissent des relations entre le désir et l'imagination : l'envie, par exemple, naît de ce que l'on imagine le bonheurd'autrui nous frustrant du nôtre.

Idée fausse, mais conforme aux lois de l'imagination, maîtresse de l'affectivité. 2.La servitude des passions A.

Mécanisme des passionsC'est en effet l'imagination qui préside au développement des passions.

Elle procède par rapprochements, associations, ressemblancesvagues, causalités illusoires, — loin de tout rapport conforme à l'ordre réel des choses.

Subir des passions, c'est avoir l'âme passive,c'est-à-dire ignorante des causes.

Voyons à l'oeuvre la logique passionnelle.

Si j'ai vécu mon plus grand chagrin au printemps, cette saison sera cause de tristesse,sans raison qui tienne au printemps lui-même.

De même, si je subis un outrage d'un homme membre d'une communauté quelconque,je garderai une méfiance irrationnelle envers tous les membres de cette communauté, par simple généralisation.

Si une chose quim'agace a une ressemblance avec une autre que j'aime, je la haïrai et l'aimerai en même temps : c'est le flottement de l'âme, ouambivalence. B.

L'homme passionnel Entraînés par ces associations automatiques, nous sommes réduits en esclavage par nos passions.

Passifs, nous sommes séparés denotre puissance, rendus étrangers à nous-mêmes.

Les passions tristes en particulier nous amenuisent, nous détruisent.

Nous pensons, par exemple, à la mort, ce qui est contraire à toute sagesse, car la mort est une idée inadéquate, étrangère à notrenature qui n'implique qu'affirmation d'elle-même dans le conatus.

En ce sens, le sage doit vivre comme s'il n'allait jamais mourir.. »

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