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L'éducation peut-elle dénaturer l'homme ?

Publié le 04/03/2004

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b) Mais en ce sens l'homme n'a pas de nature : sa nature est d'être libre, de ne pas obéir à une nature. « S'il est impossible de trouver en chaque homme une essence universelle qui serait la nature humaine, il existe pourtant une universalité humaine de condition. Ce n'est pas par hasard que les personnes d'aujourd'hui parlent plus volontiers de la condition de l'homme que de sa nature. Par condition, ils entendent avec plus ou moins de clarté l'ensemble des limites a priori qui esquissent sa situation fondamentale dans l'univers. Les situations historiques varient ; l'homme peut naître esclave dans une société païenne ou seigneur féodal ou prolétaire. Ce qui ne varie pas, c'est la nécessité pour lui d'être dans le monde, d'y être au travail, d'y être au milieu des autres et d'y être mortel. Les limites ne sont ni objectives ni subjectives, ou plutôt elles ont une face objective et une face subjective. Objectives parce qu'elles se rencontrent partout, et sont partout reconnaissables, elles sont subjectives parce qu'elles sont vécues et ne sont rien si l'homme ne les vit, c'est-à-dire ne se détermine librement dans son existence par rapport à elles. « SARTREc) Le rôle de l'éducation est alors de donner à l'homme la nature qu'il désire pour respecter sa liberté fondamentale : de lui permettre de se développer comme il le souhaite. Ici l'éducation ne peut être une dénaturation mais processus de perfectionnement.

  • I) L'éducation peut dénaturer l'homme.
a) L'homme n'est pas méchant naturellement (Rousseau). b) L'adulte a perdu l'innocence de l'enfance. c) Une bonne nature peut être corrompue.

  • II) L'éducation ne peut pas dénaturer l'homme.
a) L'homme a besoin d'être éduqué (Kant). b) On ne peut pas parler de nature humaine. c) L'éducation corrige la nature vixieuse de l'homme.
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« L'examen de ces textes politiques conduit à enrichir la vision du passé de l'humanité propre à Rousseau .

En effet, on s'en tient souvent au pan négatif de cette vision, résumée par la formule : l'homme naît bon ; la société ledéprave.

Mais Rousseau , en dépit de cette affirmation, et contrairement à l'opinion commune, présente comme éminemment positif le processus de socialisation qui conduit de l'homme des premiers âges à l'homme civilisé. L'homme qui, dans l'état de nature, n'obéissait qu'à l'instinct, acquiert, au contact de ses semblables, tout cequi le distingue de l'animal : le sens du devenir, l'amour de la vertu, la raison.

Contrairement à ses prédécesseurs, ilne situe pas la sociabilité à l'origine de la société, mais à son terme.

La raison, qui n'existait qu'à l'état virtuel dansle coeur de l'homme primitif, ne devient une composante de l'être humain que lorsque celui-ci se met à fréquenterses semblables.

L'homme ne s'extirpe de l'animalité pour accéder véritablement à l'humanité qu'au contrat des autreshommes.

Rousseau exprime cette idée à plusieurs reprises & en particulier au début du « Contrat social » : « CE PASSAGE DE L 'ÉTAT DE NATURE À L 'ÉTAT CIVIL PRODUIT DANS L 'HOMME UN CHANGEMENT TRÈS REMARQUABLE , EN SUBSTITUANT DANS SA CONDUITE LA JUSTICE À L 'INSTINCT , ET DONNANT À SES ACTIONS LA MORALITÉ QUI LEUR MANQUAIT AUPARAVANT .

C' EST ALORS SEULEMENT QUE , LA VOIX DU DEVOIR SUCCÉDANT À L 'IMPULSION PHYSIQUE ET LE DROIT À L 'APPÉTIT , L'HOMME , QUI JUSQUE -LÀ N'AVAIT REGARDÉ QUE LUI -MÊME , SE VOIT FORCÉ D 'AGIR SUR D 'AUTRES PRINCIPES , ET DE CONSULTER SA RAISON AVANT D 'ÉCOUTER SES PENCHANTS . QUOIQU 'IL SE PRIVE DANS CET ÉTAT DE PLUSIEURS AVANTAGES QU 'IL TIENT DE LA NATURE , IL EN REGAGNE DE SI GRANDS , SES FACULTÉS S'EXERCENT ET SE DÉVELOPPENT , SES IDÉES S 'ÉTENDENT , SES SENTIMENTS S 'ENNOBLISSENT , SON ÂME TOUT ENTIÈRE S 'ÉLÈVE À TEL POINT , QUE SI LES ABUS DE CETTE NOUVELLE CONDITION NE LE DÉGRADAIENT SOUVENT AU -DESSOUS DE CELLE DONT IL EST SORTI , IL DEVRAIT BÉNIR SANS CESSE L 'INSTANT HEUREUX QUI L 'EN ARRACHA POUR JAMAIS , ET QUI , D'UN ANIMAL STUPIDE ET BORNÉ , FIT UN ÊTRE INTELLIGENT ET UN HOMME .» Pour Rousseau , si l'on considère l'histoire de l'humanité, l'homme n'est pas né homme ; il l'est devenu.

Il en va de même en ce qui concerne la destinée individuelle : on ne naît pas homme ; on le devient.

Le pédagogue pourqui le petit d'homme n'est pas un petit homme rejoint ici le penseur politique.

Que l'on se penche sur l'histoire del'humanité ou sur celle d'un enfant devenant adulte, il ne faut pas supposer au départ ce qui ne se trouve qu'àl'arrivée, mais procéder à une étude génétique (le terme est de Rousseau ), comprendre comment on est passé du stade initial au stade ultime. Dans ses discours, Rousseau reconstitue la genèse de l'humanité.

Dans « Emile », il s'attache à la genèse de son âme.

Conscient de l'originalité de sa méthode, il s'en explique dans sa « Lettre à Christophe de Beaumont », archevêque de Paris (1763), à la suite de la condamnation d' « Emile » par l'Eglise : « Vous supposez ainsi que ceux qui traitent de ces questions, que l'homme apporte avec lui sa raison toute formée, et qu'il ne s'agit que de lamettre en oeuvre.

Or, cela n'est pas vrai ; car l'une des acquisitions de l'homme, et même des plus lentes, est laraison.

L'homme qui, privé du secours de ses semblables et sans cesse occupé de pourvoir à ses besoins, est réduiten toute chose à la seule marche de ses propres idées, fait un progrès bien lent de ce côté-là : il vieillit et meurtavant d'être sorti de l'enfance de la raison.

» Ce qui se rapporte ici à l'individu vaut aussi pour l'humanité tout entière, car, d'une certaine façon, cettehistoire de l'humanité recommence avec l'histoire de chaque être.

Un passage de l' « Emile » le montre bien : « O Emile ! où est l'homme de bien qui ne doit rien à son pays ? Quel qu'il soit, il lui doit ce qu'il y a de plus précieux pourl'homme, la moralité de ses actions et l'amour de la vertu.

Né dans le fond d'un bois, il eût vécu plus heureux et pluslibre : mais n'ayant rien à combattre pour suivre ses penchants, il eût été bon sans mérite, il n'eût point étévertueux, et maintenant, il sait l'être malgré ses passions.

La seule apparence de l'ordre le porte à le connaître, àl'aimer.

Le bien public, qui ne sert que de prétexte aux autres, est pour lui seul un motif réel.

Il apprend à secombattre, à se vaincre, à sacrifier son intérêt commun.

Il n'est pas vrai qu'il ne tire aucun profit des lois ; elles luidonnent le courage d'être juste, même parmi les méchants.

Il n'est pas vrai qu'elles ne l'ont pas rendu libre, elles luiont appris à régner sur lui .» Pour Rousseau , l'homme ne s'est donc humanisé qu'en se socialisant.

Durkheim le soulignait : « Il y a longtemps que Rousseau l'a démontré : si l'on retire de l'homme tout ce qui lui vient de la société, il ne reste qu'un être réduit à la sensation, et plus ou moins indistinct de l'animal. » Notre lecteur est peut-être porté à se demander en quoi ces considérations sur l'origine de l'humanité peuventaider à comprendre la réalité politique. Tout d'abord, remarquons que ces considérations se rapportent aussi à des réalités très proches, puisque ce quivaut pour l'humanité s'applique aussi à la formation des individus.

L'histoire de l'humanité est à refaireperpétuellement en chacun de nous.

Mais Rousseau marque une date essentielle dans l'histoire de la pensée politique – « une révolution dans la spéculation politique », dit l'un de ses commentateurs – en montrant et en démontrant que l'homme est d'abord et surtout une histoire.

Il est donc vain de l'expliquer ou le régenter en voulantne retenir que ce qu'il a de commun avec l'animal : « Ainsi les combats de coqs ne forment point une induction pour l'espèce humaine. » c) Le rôle de l'éducation est donc de dénaturer l'homme, pour l'éloigner de ce milieu qui le maintiendrait dansl'animalité.

Mais cette « dénaturation » est positive.. »

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