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Un individu est-il un monstre en dehors de la société ?

Publié le 13/03/2005

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individu
Autrement dit, l'homme est un monstre avant son entrée dans la société, puisque celle-ci impose des bornes à l'exercice de la violence et de la barbarie. L'état civil est l'entrée dans la culture, laissant derrière lui l'état de nature et les monstruosités qui lui était associées.               II - Aristote : l'homme est un animal politique            L'idée d'un état de nature renvoie l'homme à sa monstruosité au sens précis de la barbarie de ses actes et de sa conduite. Or, il est possible de comprendre la monstruosité en un autre sens. Faisons appel pour cela à Aristote. Dans Les politiques, celui-ci nous dit que « l'homme est naturellement un animal politique ». Cela sous-entend que l'homme, naturellement disposé, vit toujours déjà dans une cité (polis), au sein des autres hommes. Ainsi, celui qui vit reclus, loin des hommes, est-il un monstre puisqu'il n'est pas dans la norme humaine courante. En effet, le monstre reste par définition le type de l'anomalie, ou de l'anormal, au sens de ce qui s'écarte de la règle communément admise.  Aristote le précise, il n'y a que l'être dégradé ou l'être surhumain qui puissent vivre seuls dans la nature.

En mettant d’emblée l’accent sur l’individu (et non l’homme) et son rapport à la société, le sujet nous invite à une réflexion sur l’humanité de l’homme. En d’autres termes, la société fournit-elle la possibilité pour l’individu d’advenir à son humanité ? La notion de monstre nous permet en effet de questionner à différent niveau cet accès à l’humanité, puisque le monstrueux est à la fois le barbare, au sens de l’inhumain, et le hors-norme (l’anomalie ou l’anormal) au sens de ce qui déroge à l’humanité bien comprise. Ainsi, la réflexion se doit de porter à la fois sur l’homme en son état asocial (ce que nous ferons avec Hobbes et sa théorie de l’état de nature) et sur la société, en ce qu’elle pousse l’individu à s’humaniser. Il s’agira alors de déterminer en quoi cette humanisation est rendue possible par la société.

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« C'est au second chapitre du premier livre de la « Politique » que l'on retrouve en substance la formule d'Aristote.

On traduit souvent mal en disant : l'homme est un « animal social », se méprenant sur le sens du mot « politique », qui désigne l'appartenance de l'individu à la « polis », la cité, qui est une forme spécifique de la vie politique, particulière au monde grec. En disant de l'homme qu'il est l'animal politique au suprême degré, et en justifiant sa position,Aristote, à la fois se fait l'écho de la tradition grecque, reprend la conception classique de la« cité » et se démarque des thèses de son maître Platon . Aristote veut montrer que la cité, la « polis », est le lieu spécifiquement humain, celui où seul peut s'accomplir la véritable nature de l'homme : la « polis » permet non seulement de vivre mais de « bien vivre ».

Il affirme de même que la cité est une réalité naturelle antérieure à l'individu : thèse extrêmement surprenante pour un moderne, et que Hobbes & Rousseau voudront réfuter, puisqu'elle signifie que l'individu n'a pas d'existence autonome et indépendante, mais appartientnaturellement à une communauté politique qui lui est « supérieure ».

Enfin Aristote tente de différencier les rapports d'autorité qui se font jour dans la famille, le village, l'Etat, et enfin la citéproprement dite.La cité est la communauté politique au suprême degré et comme elle est spécifiquement humaine,« L'homme est animal politique au suprême degré ».

En effet la communauté originaire est la famille : c'est l'association minimale qui permet la simple survie, la reproduction « biologique » de l'individu et de l'espèce.

Composée du père, de la mère, des enfants et des esclaves, elle répond àdes impératifs vitaux minimaux, à une sphère « économique » comme disent les Grecs.

« D'autre part, la première communauté formée en vue de la satisfaction de besoins qui ne sont paspurement quotidiens est le village. » Il faut comprendre que famille et village sont régis par le besoin, par la nécessité naturelle de la vie, et ne sont pas propres à l'humanité.Le cas de la « polis » est différent.

« Ainsi, formée au début pour satisfaire les besoins vitaux, elle existe pour permettre de bien vivre.

» Dans la « polis » se réalise tout autre chose que la simple satisfaction des besoins : sa fonction initiale (satisfaire les besoins vitaux) découvre autre chose de beaucoup plus important : non plus le vivre mais le bien vivre.

Non plus la simple vie biologique mais l'accès à la vie proprement humaine, quidépasse la sphère économique pour atteindre la sphère morale.« Car c'est le caractère propre de l'homme par rapport aux autres animaux d'être le seul à avoir le sentiment du bien et du mal, du juste et del'injuste, et des autres notions morales, et c'est la communauté de ces sentiments qui engendre famille et cité. » Seule la cité, la « polis », transcende les simples nécessités vitales et animales et permet à l'homme d'accéder à sa pleine humanité.

Elle naît de la mise en commun de ce qui est spécifiquement humain : la raison et les sentiments moraux.

Ainsi les modernes ont-ils tort de parler « d'animal social » : ce qu'Aristote désigne est moins l'appartenance à une communauté quelconque, ou encore régie par des intérêts « économiques », que l'accès à une sphère autre, seulement politique, et qui permet à l'homme de s'épanouir en tant qu'homme, de viser le bonheur, d'entretenir avec lesautres hommes des liens libres, libérés de tout enjeu vital.Plus étranges peuvent paraître les deux autres thèses, liées, d'Aristote, affirmant que la cité est une réalité naturelle, et surtout, qu'elle estantérieure par nature à l'individu.

Cela signifie que l'homme n'est pas autosuffisant : il n'est qu'une partie d'un tout : la cité, comme la mai est partiedu corps.

Pas plus que la main n'existe réellement sans le corps, l'individu humain n'existe sans la cité.

C'est d'elle qu'il reçoit son humanité, sondéveloppement, son statut moral.« Mais l'homme qui est dans l'incapacité d'être membre d'une communauté, ou qui n'en éprouve nullement le besoin, parce qu'il se suffit à lui-même, ne fait en rien partie de la cité et par conséquent est ou une brute, ou un dieu » Ne pas appartenir à la « polis », lei d'humanité, c'est être soit infra-humain, soit supra-humain.L'exposé d'Aristote reprend la conception classique de la cité au sens grec.

La cité n'est pas un Etat (forme barbare pour les Grecs), elle n'est pasliée à un territoire (comme aujourd'hui où la citoyenneté se définit d'abord par référence au sol, à la « patrie »).

La cité est une communauté d'hommes, vivant sous les mêmes mois et adorant les mêmes dieux.

L'idéal grec est celui d'un groupe d'hommes pouvant tous se connaîtrepersonnellement.

L'idéal politique est donc celui d'une communauté d'hommes libres (non asservis par le travail et les nécessités vitales, disposantde loisirs) et unis par la « philia ». Quand les contemporains parlent « d'animal social », ou quand Marx déclare que l'homme est « animal politique », ce ‘est pas au même sens que les Grecs.

La polis n'est pas une communauté économique, au contraire : elle naît quand on peut s'affranchir de la contrainte économique etdisposer de loisirs.

Ainsi les esclaves ne sont-ils pas citoyens, ainsi le statut des artisans est-il difficile (Aristote dit qu'ils sont en « esclavage limité »).

Le travail est ressenti comme une nécessité (vitale, économique) et la « polis » est un lieu de liberté. Enfin Aristote polémique avec Platon. Pour ce dernier, les liens d'autorité sont les mêmes pour le chef de famille, le chef politique, le maître d'esclaves.

Ces types de gouvernement ne différent que par le nombre d'individus sur lesquels ils s'exercent.

Or, Aristote restitue des différences,selon que l'autorité s'exerce sur un être déficient, comme est censé l'être l'esclave, des êtres libres mais inférieurs comme le seraient la femme etl'enfant, ou encore entre égaux, ce qui est le cas proprement politique.Le pouvoir politique s'exerce donc au sein d'hommes libres et égaux.

Par suite, il n'a aucune mesure avec le pouvoir paternel.

Dans unecommunauté politique, nul ne peut se prévaloir d'une supériorité de nature pour gouverner : ainsi chaque individu sera-t-il alternativementgouvernant et gouverné.

L'idéal de la « polis » exige que chacun puisse, en tant qu'homme libre, égal aux autres, prétendre au pouvoir pour un laps de temps déterminé.Les modernes renieront, en un sens, l'enseignement d'Aristote, en faisant de l'individu souverain un être autonome,indépendant, capable de décider pour lui-même de ses actions.

Toute la tradition politique dont notre monde estissu rejettera l'idée que : « La cité est antérieure à chacun de nous pris individuellement. » III – Vivre ensemble et vivre mieux : les vertus de la société Ainsi, la vie hors de la société fait de l'individu un monstre, puisqu'elle fait appel à la force contre le droit etsurtout parce qu'elle ne permet pas à l'individu d'être un homme à part entière.

L'écart que constitue la barbarie etla monstruosité comme anomalies sont donc des écarts vis-à-vis de l'humanité elle-même.

Or, qu'est-ce qui fondel'humanité elle-même au sein de la société ? L'homme, nous dit Aristote, est le seul parmi les animaux qui soit doté d'un langage ( logos ).

Les animaux. »

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