Kant: Nature et Raison
Publié le 10/01/2004
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Le problème posé par le texte est celui du statut de la moralité en l'homme : est-ce une donnée naturelle, ou une acquisition de la culture ? La réponse de KANT est à la fois simple et difficile : la moralité apparaît seulement avec le développement culturel de l'humanité, mais la qualité morale proprement dite ne se ramène pas à une propriété d'essence culturelle. La vertu fait appel à des ressources spécifiques en l'homme : la raison pratique, c'est-à-dire la raison dans son rôle de formulation des concepts moraux, que sont "le devoir et la loi".
« empêchent sa raison morale de s'exprimer pleinement, l'obligeant à mener un véritable combat - vertueux - contreles tendances au mal, et aux actions vicieuses. 3 - KANT ajoute une remarque sur l'origine des vices : si le vice prend racine dans la constitution anthropologique del'espèce humaine, c'est néanmoins la sortie de l'état de nature qui produit le développement des vices en l'homme. KANT retrouve ici très fortement une analyse déjà élaborée par ROUSSEAU dans le Discours sur l'origine et lesfondements de l'inégalité entre les hommes. II - A "L'homme par nature n'est pas du tout un être moral". La moralité est un caractère de la raison qui n'est pas de l'ordre de la nature, c'est-à-dire du déterminisme et de lasensibilité, mais qui n'est pas non plus, comme le précise la suite du texte, de l'ordre de la culture, qui est elle-mêmesoumise à des déterminismes propres, notamment économiques. II - B "Il possède des penchants et des instincts qui le poussent d'un côté bien que la raison le pousse du côté opposé." Cette phrase décrit la lutte qui se mène en l'homme entre sa raison, qui formule la loi fondamentale et universelle del'action morale, et les intérêts particuliers, d'origine sensible, voire sensuelle, qui poussent l'homme à rechercher àtout prix, et même au prix du respect moral d'autrui, la satisfaction de désirs ou de buts individuels. II - C "L'état de culture fait violence à la nature". Inspiré ici par ROUSSEAU, KANT désigne par cette formule le déséquilibre introduit en l'homme par l'abandon de sescritères et repères naturels, remplacés par ceux plus complexes de la société et des relations humaines multiplesqu'elle induit. Le progrès pour l'homme sera, non de retourner à l'état de nature, mais d'instaurer le règne de la raison. II - D "innocent", dans le contexte, ne signifie pas : non coupable d'une faute qui a été commise, mais : non susceptibled'être jugé vertueux ou vicieux, parce que n'ayant pas mis en oeuvre les ressources propres de sa raison pratique. III - ÊTRE MORAL, EST-CE CONTRARIER OU SUIVRE SA NATURE ? Une première impression, qu'il faudra peut-être dépasser, donne une image répressive de la pensée moralekantienne. Etre moral, ce serait de s'opposer à tout ce qui en nous relève de la nature, c'est-à-dire des désirs sensibles.La satisfaction des désirs serait une faute. La position de KANT est en réalité une autre : ce ne sont pas les désirs naturels qui sont mauvais, mais leurinterférence aveugle et arbitraire avec des fins et des projets humains qui devraient, pour être menés à bien, êtreposés et poursuivis pour eux-mêmes. On peut percevoir encore, dans cette position mesurée, quelques relents de répression des corps désirants. On peut soutenir, alors, que la moralité consiste surtout, et au contraire, à laisser s'exprimer sa nature individuelle.Cela n'est pas faux mais il faut alors ajouter deux conditions : 1 - L'individu doit alors connaître et d'abord découvrir quelle est sa propre nature individuelle, ce qui peut amener àune longue et difficile quête de soi, visant l'authenticité comme but. 2 - Le simple fait d'exprimer authentiquement sa propre nature est sans doute une condition nécessaire, mais nonsuffisante de l'action morale complète : encore faut-il que cette expression soit en accord avec les contraintesformelles énoncées par KANT, à savoir le respect de l'humanité en moi-même et en autrui. On voit alors que l'authenticité n'a de sens qu'à travers une démarche - qui peut paraître contradictoire - deformation et de transformation de soi ; démarche qu'on peut appeler éducation.. »
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