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Le mot "parole" dans l'oeuvre de DESCARTES

Publié le 13/08/2010

Extrait du document

descartes

 

Règles pour la direction de l’esprit, Règle deuxième.

mais comme maintenant nous sommes déliés du serment qui nous enchaînait aux paroles du maître, et que, notre âge étant devenu assez mûr, nous avons soustrait notre main aux coups de la férule, si nous voulons sérieusement nous proposer des règles, à l’aide desquelles nous puissions parvenir au faîte de la connaissance humaine, mettons au premier rang celle que nous venons d’énoncer, et gardons-nous d’abuser de notre loisir, négligeant, comme font beaucoup de gens, les études aisées, et ne nous appliquant qu’aux choses difficiles.

  Règles pour la direction de l’esprit, Règle douzième.

Mais n’est-ce pas paraître proférer des paroles magiques, qui ont une vertu cachée et passent la portée de l’esprit humain, que de dire que le mouvement (la chose la mieux connue de chacun) est l’acte d’une puissance, en tant que puissance ?

Qui comprend ces paroles, et qui ignore ce que c’est que le mouvement ?

et dans des choses qu’ils ignorent complètement ils se flattent de voir comme à travers un nuages des vérités cachées, ils ne craignent pas de les mettre en avant, et enveloppent leurs conceptions de certaines paroles, qui leur servent à discourir longtemps et à parler de suite, mais que dans le fait ni eux ni leurs auditeurs ne comprennent.

Nous disons, en huitième lieu, que l’on ne peut déduire que les choses des paroles, la cause de l’effet, l’effet de la cause, le même du même, ou bien les parties ou même le tout des parties.

  DISCOURS DE LA METHODE, Cinquième partie.

dont le premier est que jamais elles ne pourraient user de paroles ni d’autres signes en les composant, comme nous faisons pour déclarer aux autres nos pensées :

car on peut bien concevoir qu’une machine soit tellement faite qu’elle profère des paroles, et même qu’elle en profère quelques-unes à propos des actions corporelles qui causeront quelque changement en ses organes, comme, si on la touche en quelque endroit, qu’elle demande ce qu’on lui veut dire ;

Car c’est une chose bien remarquable qu’il n’y a point d’hommes si hébétés et si stupides, sans en excepter même les insensés, qu’ils ne soient capables d’arranger ensemble diverses paroles, et d’en composer un discours par lequel ils fassent entendre leurs pensées ;

car on voit que les pies et les perroquets peuvent proférer des paroles ainsi que nous, et toutefois ne peuvent parler ainsi que nous, c’est-à-dire en témoignant qu’ils pensent ce qu’ils disent ;

Et on ne doit pas confondre les paroles avec les mouvements naturels, qui témoignent les passions, et peuvent être imités par des machines aussi bien que par les animaux ;

  LA DIOPTRIQUE, DISCOURS TROISIEME, DE L’OEIL.

ainsi que les mouvements des lèvres et de la langue, qui servent à prononcer les paroles, se nomment volontaires, à cause qu’ils suivent de la volonté qu’on a de parler, nonobstant qu’on ignore souvent quels ils doivent être pour servir à la prononciation de chaque lettre.

  LA DIOPTRIQUE, DISCOURS QUATRIEME, DES SENS EN GENERAL.

comme, par exemple, les signes et les paroles, qui ne ressemblent en aucune façon aux choses qu’elles signifient.

  L’HOMME.

Ainsi que vous pouvez avoir vu, dans les grottes et les fontaines qui sont aux jardins de nos Rois, que la seule force dont l’eau se meut, en sortant de sa source, est suffisante pour y mouvoir diverses machines, et même pour les y faire jouer de quelques instruments, ou prononcer quelques paroles, selon la diverse disposition des tuyaux qui la conduisent.

  LE MONDE OU TRAITÉ DE LA LUMIERE, CHAPITRE PREMIER, De la différence qui est entre nos sentiments et les choses qui les produisent.

Vous savez bien que les paroles, n’ayant aucune ressemblance avec les choses qu’elles signifient, ne laissent pas de nous les faire concevoir, et souvent même sans que nous prenions garde au son des mots, ni à leurs syllabes ;

Mais vous direz, peut-être, que nos oreilles ne nous font véritablement sentir que le son des paroles, ni nos yeux que la contenance de celui qui rit ou qui pleure, et que c’est notre esprit qui, ayant retenu ce que signifient ces paroles et cette contenance, nous le représente en même temps.

Pensez-vous, lors même que nous ne prenons pas garde à la signification des paroles, et que nous oyons seulement leur son, que l’idée de ce son qui se forme en notre pensée soit quelque chose de semblable à l’objet qui en est la cause ?

  MEDITATIONS METAPHYSIQUES, Méditation Seconde.

Car encore que sans parler je considère tout cela en moi-même, les paroles toutefois m’arrêtent, et je suis presque déçu par les termes du langage ordinaire ;

  MEDITATIONS METAPHYSIQUES, Méditation Troisième.

et au contraire toutes les fois que je me tourne vers les choses que je pense concevoir fort clairement, je suis tellement persuadé par elles, que de moi-même je me laisse emporter à ces paroles :

  MEDITATIONS METAPHYSIQUES, REPONSES DE L’AUTEUR AUX PREMIERES OBJECTIONS.

Or j’ai écrit quelque part, que l’idée est la chose même conçue, ou pensée, en tant qu’elle est objectivement dans l’entendement, lesquelles paroles il feint d’entendre tout autrement que je ne les ai dites, afin de me donner occasion de les expliquer plus clairement.

Et lorsque ce savant théologien dit qu’il y a de l’équivoque en ces paroles, un pur rien, il semble avoir voulu m’avertir de celle que je viens tout maintenant de remarquer, de peur que je n’y prisse pas garde.

par lesquelles paroles il admet entièrement tout ce que j’ai avancé.

Car, encore bien que ceux qui, ne s’attachant qu’à la propre et étroite signification d’efficient, pensent qu’il est impossible qu’une chose soit la cause efficiente de soi-même, et ne remarquent ici aucun autre genre de cause, qui ait rapport et analogie avec la cause efficiente, encore, dis-je, que ceux-là n’aient pas de coutume d’entendre autre chose, lorsqu’ils disent que quelque chose est par soi, sinon qu’elle n’a point de cause, si toutefois ils veulent plutôt s’arrêter à la chose qu’aux paroles, ils reconnaîtront facilement que la signification négative du mot par soi ne procède que de la seule imperfection de l’esprit humain, et qu’elle n’a aucun fondement dans les choses ;

  MEDITATIONS METAPHYSIQUES, REPONSES DE L’AUTEUR AUX SECONDES OBJECTIONS.

Mais j’ai déjà fait voir dans ma seconde Méditation que je m’en étais assez souvenu, vu que j’y ai mis ces paroles :

mais pardonnez-moi si je réponds que je n’ai pas encore donné lieu à cette question, n’ayant commencé à en traiter que dans la sixième Méditation, par ces paroles :

D’où il est évident que je n’ai point parlé en ce lieu-là du mensonge qui s’exprime par des paroles, mais seulement de la malice interne et formelle qui se rencontre dans la tromperie, quoique néanmoins ces paroles que vous apportez du prophète :

et ceux aussi qui liront mes Méditations n’auront pas sujet de croire que je n’aie point connu cette lumière surnaturelle, puisque, dans la quatrième, où j’ai soigneusement recherché la cause de l’erreur ou fausseté, j’ai dit, en paroles expresses, qu’elle dispose l’intérieur de notre pensée à vouloir, et que néanmoins elle ne diminue point la liberté.

Or, que cette seule contemplation de la vérité soit le seul but de mes Méditations, outre que cela se reconnaît assez clairement par elles-mêmes, je l’ai de plus déclaré en paroles expresses sur la fin de la première, en disant que je ne pouvais pour lors user de trop de défiance, d’autant que je ne m’appliquais pas alors aux choses qui regardent l’usage de la vie, mais seulement à la recherche de la vérité.

  MEDITATIONS METAPHYSIQUES, REPONSES DE L’AUTEUR AUX SECONDES OBJECTIONS, RAISONS QUI PROUVENT L’EXISTENCE DE DIEU, ET LA DISTINCTION QUI EST ENTRE L’ESPRIT ET LE CORPS DE L’HOMME, DISPOSÉES D’UNE FAÇON GÉOMÉTRIQUE, Définitions.

De sorte que je ne puis rien exprimer par des paroles, lorsque j’entends ce que je dis, que de cela même il ne soit certain que j’ai en moi l’idée de la chose qui est signifiée par mes paroles.

  MEDITATIONS METAPHYSIQUES, TROISIÈMES OBJECTIONS, OBJECTION SECONDE, REPONSE.

Mais ne nous arrêtons pas davantage aux paroles, venons à la chose dont il est question.

Mais je tâcherai ici d’expliquer en peu de paroles toute le sujet dont [il] est question.

  MEDITATIONS METAPHYSIQUES, TROISIÈMES OBJECTIONS, OBJECTION IVème, REPONSE.

Car s’il admet que quelque chose est signifiée par les paroles, pourquoi ne veut-il pas que nos discours et raisonnements soient plutôt de la chose qui est signifiée, que des paroles seules ?

  MEDITATIONS METAPHYSIQUES, TROISIÈMES OBJECTIONS, OBJECTION Vème, REPONSE.

Et je pense avoir assez expliqué l’idée de Dieu, pour ceux qui veulent concevoir le sens que je donne à mes paroles ;

  MEDITATIONS METAPHYSIQUES, TROISIÈMES OBJECTIONS, OBJECTION SIXIEME.

De plus l’affirmation et la négation ne se font point sans parole et sans noms ;

  MEDITATIONS METAPHYSIQUES, TROISIÈMES OBJECTIONS, OBJECTION XVe.

C’est la commune opinion que les médecins ne pèchent point, qui déçoivent les malades pour leur propre santé, ni les pères qui trompent leurs enfants pour leur propre bien, et que le mal de la tromperie ne consiste pas dans la fausseté des paroles, mais dans la malice de celui qui trompe.

  MEDITATIONS METAPHYSIQUES, REPONSES DE L’AUTEUR AUX QUATRIEMES OBJECTIONS, REPONSES A LA PREMIERE PARTIE.

Que si, après cela, nous voulions dépouiller cette même substance de tous ces attributs qui nous la font connaître, nous détruirions toute la connaissance que nous en avons, et ainsi nous pourrions bien à la vérité dire quelque chose de la substance, mais tout ce que nous en dirions ne consisterait qu’en paroles, desquelles nous ne concevrions pas clairement et distinctement la signification.

  MEDITATIONS METAPHYSIQUES, REPONSES DE L’AUTEUR AUX QUATRIEMES OBJECTIONS, REPONSE A L’AUTRE PARTIE, DE DIEU.

et en mettant devant ces paroles :

lesquelles paroles témoignent assez que j’ai pensé que quelque chose existait, qui n’a pas besoin de cause efficiente.

Là où ces paroles, la cause de soi-même, ne peuvent en façon quelconque être entendues de la cause efficiente, mais seulement que cette puissance inépuisable qui est en Dieu est la cause ou la raison pour laquelle il n’a pas besoin de cause.

et certes par ce moyen on peut conclure l’existence de Dieu, quoiqu’on n’explique pas en termes formels et précis, comment on doit entendre ces paroles :

Par lesquelles paroles il est sans doute qu’il ne ferait pas la même chose qu’Archimède, mais qu’au contraire il se ferait un obstacle à soi-même et empêcherait les autres de bien comprendre sa démonstration.

  MEDITATIONS METAPHYSIQUES, REPONSES DE L’AUTEUR AUX QUATRIEMES OBJECTIONS, REPONSE A L’AUTRE PARTIE, REPONSE AUX CHOSES QUI PEUVENT ARRETER LES THEOLOGIENS.

Et il n’y a aussi personne qui croie la conversion du pain au Corps de Christ, qui ne pense que ce Corps de Christ est précisément contenu sous la même superficie sous qui le pain serait contenu s’il était présent, quoique néanmoins il ne soit pas là comme proprement dans un lieu, “   mais sacramentellement, et de cette manière d’exister, laquelle, quoique nous ne puissions qu’à peine exprimer par paroles, après néanmoins que notre esprit est éclairé des lumières de la foi, nous pouvons concevoir comme possible à un Dieu, et laquelle nous sommes obligés de croire très fermement.

dans lesquelles paroles s’il n’y a point de contradiction, certainement dans le concept il en paraît beaucoup.

Au reste, on ne peut pas supposer que les accidents soient réels, sans qu’au miracle de la transsubstantiation, lequel seul peut être inféré des paroles de la consécration, on n’en ajoute sans nécessité un nouveau et incompréhensible, par lequel ces accidents réels existent tellement sans la substance du pain, que cependant ils ne soient pas eux-mêmes faits des substances, ce qui ne répugne pas seulement à la raison humaine, mais même à l’axiome des théologiens, qui disent que les paroles de la consécration n’opèrent rien que ce qu’elles signifient, et qui ne veulent pas attribuer à miracle les choses qui peuvent être expliquées par raison naturelle.

  MEDITATIONS METAPHYSIQUES, RÉPONSES AUX CINQUIEMES OBJECTIONS, DES CHOSES QUI ONT ÉTÉ OBJECTÉES CONTRE LA PREMIERE MÉDITATION.

mais vous voudriez que je m’en fusse acquitté “   simplement et en peu de paroles “  , c’est-à-dire, en un mot, “   négligemment et sans tant de précautions “  ;

  MEDITATIONS METAPHYSIQUES, RÉPONSES AUX CINQUIEMES OBJECTIONS, DES CHOSES QUI ONT ÉTÉ OBJECTÉES CONTRE LA SECONDE MÉDITATION.

, afin que vous ajoutiez immédiatement après ces paroles :

 “   Certes je pense avoir fort bonne raison de conjecturer de vos paroles mêmes que l’appareil dont je me suis servi n’a pas encore été assez grand, puisque je n’ai pu faire encore que vous comprissiez bien ma pensée ;

Mais je satisferai seulement en peu de paroles à celles qui me sembleront pouvoir arrêter des personnes un peu entendues.

Et pour ceux qui ne s’attachent pas tant à la force des raisons qu’à la multitude des paroles, je ne fais pas tant de cas de leur approbation que je veuille perdre le temps en discours inutiles pour l’acquérir.

Je ne m’arrête pas non plus à réfuter les lieux où vous me faites parler impertinemment, parce qu’il me suffit d’avoir une fois averti le lecteur que vous ne gardez pas toute la fidélité qui est due au rapport des paroles d’autrui.

  MEDITATIONS METAPHYSIQUES, RÉPONSES AUX CINQUIEMES OBJECTIONS, DES CHOSES QUI ONT ÉTÉ OBJECTÉES CONTRE LA TROISIEME MÉDITATION.

et l’on pourrait aussi dire que vous n’avez pas fait ces objections, parce que vous les avez composées de paroles que vous n’avez pas inventées, mais que vous avez empruntées d’autrui.

Mais certes ni la forme d’une chimère ne consiste pas dans les parties d’une chèvre ou d’un lion, ni celle de vos objections dans chacune des paroles dont vous vous êtes servi, mais seulement dans la composition et l’arrangement de ces choses.

Mais avec combien peu de fidélité rapportez-vous mes paroles lorsque vous feignez que j’ai dit que “   je conçois cette ressemblance que j’ai avec Dieu en ce que je connais que je suis une chose incomplète et dépendante “  , vu qu’au contraire je n’ai dit cela que pour montrer la différence qui est entre Dieu et nous, de peur qu’on ne crût que je voulusse égaler les hommes à Dieu, et la créature au Créateur.

  MEDITATIONS METAPHYSIQUES, RÉPONSES AUX CINQUIEMES OBJECTIONS, DES CHOSES QUI ONT ÉTÉ OBJECTÉES CONTRE LA QUATRIEME MÉDITATION.

Voulez-vous que je vous dise en peu de paroles, “   à quoi la volonté se peut étendre qui passe les bornes de l’entendement ?

Et néanmoins il est aisé de juger par vos propres paroles que vous l’avez quelquefois éprouvée :

  MEDITATIONS METAPHYSIQUES, RÉPONSES AUX CINQUIEMES OBJECTIONS, DES CHOSES QUI ONT ÉTÉ OBJECTÉES CONTRE LA CINQUIEME MEDITATION.

D’autant qu’après avoir ici rapporté quelques-unes de mes paroles vous ajoutez que c’est tout ce que j’ai dit touchant la question proposée, je suis obligé d’avertir le lecteur que vous n’avez pas assez pris garde à la suite et liaison de ce que j’ai écrit ;

  MEDITATIONS METAPHYSIQUES, RÉPONSES AUX CINQUIEMES OBJECTIONS, DES CHOSES QUI ONT ÉTÉ OBJECTÉES CONTRE LA SIXIEME MÉDITATION.

car qu’y a-t-il à répondre à tant de paroles dites et avancées sans aucun raisonnable fondement, sinon que de les nier tout simplement ?

C’est, dites-vous, parce que j’ai dit que “   j’ai un corps auquel je suis conjoint “  , et aussi qu’il est “   certain que moi, c’est-à-dire mon âme, est distincte de mon corps “  , où je confesse que je ne vois pas pourquoi ces paroles ne pourraient pas aussi bien être rapportées au corps subtil et imperceptible qu’à celui qui est plus grossier et palpable ;

d’où le lecteur peut apprendre qu’on ne doit pas juger de la force de vos raisons par la prolixité de vos paroles.

  LES PRINCIPES DE LA PHILOSOPHIE, LETTRE DE L’AUTEUR A CELUI QUI A TRADUIT LE LIVRE, LAQUELLE PEUT SERVIR ICI DE PREFACE.

Après cela, il doit aussi étudier la logique, non pas celle de l’école, car elle n’est, à proprement parler, qu’une dialectique qui enseigne les moyens de faire entendre à autrui les choses qu’on sait, ou même aussi de dire sans jugement plusieurs paroles touchant celles qu’on ne sait pas, et ainsi elle corrompt le bon sens plutôt qu’elle ne l’augmente ;

  LES PRINCIPES DE LA PHILOSOPHIE, PREMIERE PARTIE, Art. 74.

Au reste, parce que nous attachons nos conceptions à certaines paroles afin de les exprimer de bouche, et que nous nous souvenons plutôt des paroles que des choses, à peine saurions-nous concevoir aucune chose si distinctement que nous séparions entièrement ce que nous concevons d’avec les paroles qui avaient été choisies pour l’exprimer.

Ainsi la plupart des hommes donnent leur attention aux paroles plutôt qu’aux choses ;

  LES PRINCIPES DE LA PHILOSOPHIE, SECONDE PARTIE, Art. 9.

Car lorsqu’ils distinguent la substance corporelle ou matérielle d’avec l’extension et la grandeur, ou ils n’entendent rien par le mot de substance corporelle, ou ils forment seulement en leur esprit une idée confuse de la substance immatérielle, qu’ils attribuent faussement à la substance corporelle, et laissent à l’extension la véritable idée de cette substance corporelle, laquelle extension ils nomment un accident, mais si improprement qu’il est aisé de connaître que leurs paroles n’ont point de rapport avec leurs pensées.

  LES PRINCIPES DE LA PHILOSOPHIE, QUATRIEME PARTIE, Art. 197.

Car, premièrement, nous voyons que les paroles, soit proférées de la voix, soit écrites sur du papier, lui font concevoir toutes les choses qu’elles signifient, et lui donnent ensuite diverses passions.

Quelqu’un répondra peut-être que l’écriture et les paroles ne représentent immédiatement à l’âme que la figure des lettres et leurs sons, en suite de quoi, elle qui entend la signification de ces paroles excite en soi-même les imaginations et passions qui s’y rapportent.

  LES PRINCIPES DE LA PHILOSOPHIE, QUATRIEME PARTIE, Art. 205.

Et si quelqu’un, pour deviner un chiffre écrit avec les lettres ordinaires, s’avise de lire un B partout où il y aura un A, et de lire un C partout où il y aura un B et ainsi de substituer en la place de chaque lettre celle qui la suit en l’ordre de l’alphabet, et que, le lisant en cette façon, il y trouve des paroles qui aient du sens, il ne doutera point que ce ne soit le vrai sens de ce chiffre qu’il aura ainsi trouvé, bien qu’il se pourrait faire que celui qui l’a écrit y en ait mis un autre tout différent, en donnant une autre signification à chaque lettre :

  LES PASSIONS DE L’AME, LETTRE Ire A MONSIEUR DESCARTES.

outre que faisant réflexion sur les paroles que j’ai lues en une préface qui fut jointe il y a deux ans à la version française de vos Principes, où après avoir parlé succinctement des parties de la philosophie qui doivent être trouvées, avant qu’on puisse recueillir ses principaux fruits, et avoir dit que vous ne vous défiez pas tant de vos forces que vous n’osassiez entreprendre les expliquer toutes, si vous aviez la commodité de faire les expériences qui sont requises pour appuyer et justifier vos raisonnements, Vous ajoutez qu’il faudrait à cela de grandes dépenses, auxquelles un particulier comme vous ne saurait suffire, s’il n’était aidé par le public ;

Et pour ce qu’il se rendrait ridicule s’il usait d’hyperboles en telle occasion, ses paroles sont prises en leur vrai sens ;

  LES PASSIONS DE L’AME, PREMIERE PARTIE, ARTICLE 44.

Et lorsqu’en parlant nous ne pensons qu’au sens de ce que nous voulons dire, cela fait que nous remuons la langue et les lèvres beaucoup plus promptement et beaucoup mieux que si nous pensions à les remuer en toutes les façons qui sont requises pour proférer les mêmes paroles.

D’autant que l’habitude que nous avons acquise en apprenant à parler a fait que nous avons joint l’action de l’âme, qui, par l’entremise de la glande, peut mouvoir la langue et les lèvres, avec la signification des paroles qui suivent de ces mouvements plutôt qu’avec les mouvements mêmes.

  LES PASSIONS DE L’AME, PREMIERE PARTIE, ARTICLE 50.

Et il est utile ici de savoir que, comme il a déjà été dit ci-dessus, encore que chaque mouvement de la glande semble avoir été joint par la nature à chacune de nos pensées dès le commencement de notre vie, on les peut toutefois joindre à d’autres par habitude, ainsi que l’expérience fait voir aux paroles qui excitent des mouvements en la glande, lesquels, selon l’institution de la nature, ne représentent à l’âme que leur son lorsqu’elles sont proférées de la voix, ou la figure de leurs lettres lorsqu’elles sont écrites, et qui, néanmoins, par l’habitude qu’on a acquise en pensant à ce qu’elles signifient lorsqu’on a ouï leur son ou bien qu’on a vu leurs lettres, ont coutume de faire concevoir cette signification plutôt que la figure de leurs lettres ou bien le son de leurs syllabes.

  LES PASSIONS DE L’AME, TROISIEME PARTIE, ARTICLE 200.

Dont la raison est que lorsqu’on ne veut ou qu’on ne peut se venger autrement que de mine et de paroles, on emploie toute sa chaleur et toute sa force dès le commencement qu’on est ému, ce qui est cause qu’on devient rouge ;

  Correspondance, année 1629, A Monsieur FERRIER, D’Amsterdam 18 juin 1629 ( ?).

car il arrive mille rencontres en travaillant qui ne se peuvent prévoir sur le papier, et qui se corrigent souvent d’une parole lorsqu’on est présent ;

  Correspondance, année 1629, AU R. P. MERSENNE, 20 octobre 1629 (Les éditions contemporaines datent cette lettre de septembre 1629.).

Je crois bien que d’abord on pourra juger que c’est de parole seulement que je la nie, afin d’éviter la censure, à cause que je retiens le système de Copernic ;

  Correspondance, année 1629, Au R. P. MERSENNE, 20 novembre 1629.

car de dire qu’il expliquera les pensées des anciens par les mots desquels ils se sont servis, en prenant chaque mot pour la vraie définition de la chose, c’est proprement dire qu’il expliquera les pensées des anciens en prenant leurs paroles en autre sens qu’ils ne les ont jamais prises, ce qui répugne ;

  Correspondance, année 1630, AU R. P. MERSENNE , 20 mai 1630. (Les éditions contemporaines datent cette lettre du 6 mai 1630.).

Et si les hommes entendaient bien le sens de leurs paroles, ils ne pourraient jamais dire sans blasphème que la vérité de quelque chose précède la connaissance que Dieu en a, car en Dieu ce n’est qu’un de vouloir et de connaître ;

  Correspondance, année 1630, A Monsieur *** (ISAAC BEECKMAN), 17 octobre 163O.

Un ennemi s’abstiendrait de dire aucune parole aigre et fâcheuse, s’il croyait que celui à qui il en veut en dût profiter ;

  Correspondance, année 1633, AU R. P. MERSENNE, 28 novembre 1633.

Je n’ai jamais eu l’humeur portée à faire des livres, et si je ne m’étais engagé de promesse envers vous et quelques autres de mes amis, afin que le désir de vous tenir parole m’obligeât d’autant plus à étudier, je n’en fusse jamais venu à bout ;

  Correspondance, année 1637, A Monsieur PLEMPIUS, 27 novembre 1637. (Les éditions contemporaines datent cette lettre du 3 octobre 1637.).

Je sais bien que le nombre de ceux qui pourront entendre ma géométrie sera fort petit, car, ayant omis toutes les choses que je jugeais n’être pas inconnues des autres, et ayant tâché de comprendre, ou du moins de toucher, plusieurs choses en peu de paroles (voire même toutes celles qui pourront jamais être trouvées en cette science), elle ne demande pas seulement des lecteurs très savants dans toutes les choses qui jusqu’ici ont été connues dans la géométrie et dans l’algèbre, mais aussi des personnes très laborieuses, très ingénieuses et très attentives.

  Correspondance, année 1638, REPONSE DE Monsieur DESCARTES, 12 janvier 1638 (Les éditions contemporaines datent cette lettre de mars, avril ou mai 1638).

et à qui l’expérience aurait appris qu’il n’y a, pour les reconnaître, que les deux moyens que j’ai expliqués en la page 57 de ma Méthode dont l’un est que jamais, si ce n’est par hasard, ces automates ne répondent, ni de paroles, ni même par signes, à propos de ce dont on les interroge ;

  Correspondance, année 1638, RÉPONSE DE Monsieur DESCARTES A Monsieur MORIN, 13 juillet 1638.

car je ne prétends nullement mériter les honnêtes paroles dont vous y usez, et je n’aurais néanmoins pas de grâce à les réfuter.

  Correspondance, année 1638, Au R. P. MERSENNE, 15 février 1638. (Les éditions contemporaines datent cette lettre du 25 janvier 1638).

Au reste, je crains bien qu’il n’y ait encore guère personne qui ait entièrement pris le sens des choses que j’ai écrites, ce que je ne juge pas néanmoins être arrivé à cause de l’obscurité de mes paroles, mais plutôt à cause que paraissant assez faciles, on ne s’arrête pas à considérer tout ce qu’elles contiennent.

  Correspondance, année 1638, A MONSIEUR ***, 25 Août 1638.

et parce que toutes les muses de France auront part à la faveur que vous m’avez faite, d’intercéder pour elles envers celles de Leyde, touchant les livres arabes que Monsieur Hardy désire voir, je leur veux laisser le soin des paroles pour vous en rendre grâces, et me contenter de ressentir en effet que c’est moi qui vous en ai l’obligation.

  Correspondance, année 1640, AU P. MERSENNE, 1er avril 1640.

mais si elle vous doit être envoyée plus loin, il n’y a pas d’apparence de la charger tant, et le puis mettre ici, en peu de paroles, tout ce que j’ai à lui faire savoir, ce qui sera, s’il vous plaît, pour lorsque vous lui écrirez.

  Correspondance, année 1640, A Monsieur REGIUS, 22 mai 1640. (Les éditions contemporaines datent cette lettre du 24 mai.).

Dans la première ligne de vos thèses, j’ôterais ces paroles, de la chaleur vivifiante, etc.

Et à la fin, au lieu de ces paroles, Dans la droite conformation, etc.

Il me paraît même qu’il faudrait effacer ces paroles, vel callido vel ignorante ;

  Correspondance, année 1640, Au R. P. MERSENNE, 28 octobre 1640.

Monsieur de Zuytlichem m’a envoyé quatre Traités que vous lui avez fait copier, l’un, des cercles qui se font dans l’eau, où je vois que l’auteur a fort bon style et qu’il tâche de philosopher à la bonne mode, mais les fondements lui manquent, et il emploie beaucoup de paroles, pour une chose dont la vérité se pourrait expliquer en peu de mots.

  Correspondance, année 1640, Au R. P. MERSENNE, 6 décembre 1640. (Les éditions contemporaines datent cette lettre de décembre 1640, sans indiquer un jour précis.).

Car il me semble nécessaire qu’ils sachent en quel sens j’ai pris leurs paroles, et si vous trouvez bon d’avouer au Père B.

  Correspondance, année 1641, Au R. P. MERSENNE , 8 janvier 1641 (Les éditions contemporaines datent cette lettre du 31 décembre 1640.).

, je ne vois guère de moyen de la rendre plus claire, sans y ajouter beaucoup de paroles, qui n’auraient pas si bonne grâce en une chose dont je n’ai touché qu’un mot en passant.

  Correspondance, année 1641, Au R. P. MERSENNE, 28 février 1641. (Les éditions contemporaines datent cette lettre du 28 janvier 1641.).

m’avait dit, avant que de me les envoyer, qu’ils ne contenaient rien de fort exquis, et que j’avais d’autres occupations, je les ai laissé reposer, après avoir lu deux ou trois heures dans le premier, sans y rien trouver que des paroles.

  Correspondance, année 1641, Au R. P. MERSENNE, 1er juillet 1641.

mais de quelque manière qu’on le conçoive, on en a l’idée, puisque nous ne saurions rien exprimer par nos paroles, lorsque nous entendons ce que nous disons, que de cela même il ne soit certain que nous avons en nous l’idée de la chose qui est signifiée par nos paroles.

  Correspondance, année 1641, AU R. P. MERSENNE, Mon Révérend Père,.

car les paroles étant de l’invention des hommes, on peut toujours se servir d’une ou de plusieurs pour expliquer une même chose ;

  Correspondance, année 1642, A Monsieur REGIUS, 6 février 1642. (Les éditions contemporaines datent cette lettre de janvier 1642.).

je suis tout à fait de son avis que vous devez vous abstenir durant un certain temps des disputes publiques, et vous donner bien de garde d’aigrir personne contre vous par des paroles trop dures.

je la mettrai partie en français, partie en latin, selon que les termes se présenteront plus facilement à mon esprit, de peur que si j’écrivais seulement en latin vous ne voulussiez point changer mes paroles, et que mon style négligé ne fît méconnaître le vôtre.

  Correspondance, année 1643, A MADAME ELISABETH PRINCESSE PALATINE, 15 MAI 1643. (Les éditions contemporaines retiennent comme date le 21 mai 1643).

Je témoignerais ne pas assez connaître l’incomparable esprit de votre altesse, si j’employais davantage de paroles à m’expliquer, et je serais trop présomptueux, si j’osais penser que ma réponse la doive entièrement satisfaire ;

  Correspondance, année 1644, A UN R. P. JÉSUITE, 15 MAI 1644 (Les éditions contemporaines retiennent comme date le 2 mai 1644).

Il y a deux mois que les Principes de ma Philosophie eussent dû être achevés d’imprimer, si le libraire m’eût tenu parole ;

  Correspondance, année 1646, A MADAME ÉLISABETH, PRINCESSE PALATINE, etc, 15 septembre 1646.

qu’on ne tienne sa parole qu’aussi longtemps qu’elle sera utile ;

Pour ce qui regarde les alliés, un prince leur doit tenir exactement sa parole, même lorsque cela lui est préjudiciable ;

  Correspondance, année 1646, A UN SEIGNEUR. (NEWCASTLE), 23 novembre 1646.

Enfin il n’y a aucune de nos actions extérieures, qui puisse assurer ceux qui les examinent, que notre corps n’est pas seulement une machine qui se remue de soi-même, mais qu’il y a aussi en lui une âme qui a des pensées, excepté les paroles, ou autres signes faits à propos des sujets qui se présentent, sans se rapporter à aucune passion.

Je dis les paroles ou autres signes, parce que les muets se servent de signes en même façon que nous de la voix ;

et j’ajoute que ces paroles ou signes ne se doivent rapporter à aucune passion, pour exclure non seulement les cris de joie ou de tristesse, et semblables, mais aussi tout ce qui peut être enseigné par artifice aux animaux ;

car si on apprend à une pie à dire bonjour à sa maîtresse, lorsqu’elle la voit arriver, ce ne peut être qu’en faisant que la prolation de cette parole devienne le mouvement de quelqu’une de ses passions ;

Or il est, ce me semble, fort remarquable que la parole, étant ainsi définie, ne convient qu’à l’homme seul.

  Correspondance, année 1647, REMARQUES SUR LE TITRE, REMARQUES SUR CHAQUE ARTICLE.

Par lesquelles paroles il est aisé à connaître que c’est moi de qui il entend parler ;

Dans lesquelles paroles il y a un manifeste paralogisme :

Si d’ailleurs il avait dit qu’il n’est pas possible à la raison humaine de trouver jamais aucune preuve par laquelle on puisse démontrer que l’esprit humain soit l’un plutôt que l’autre, certes son arrogance serait blâmable, mais du moins il n’y aurait point de contradiction en ses paroles.

Et comme ceux-là abusent des paroles de la Sainte Écriture qui, par quelques mauvaises explications qu’ils leur donnent, croient en pouvoir déduire ces dernières, de même aussi ceux-là dérogent à son autorité qui entreprennent de démontrer les premières par des arguments tirés de la seule philosophie ;

dans lesquelles paroles je trouve encore deux contradictions :

Je ne comprends point ce qu’il veut dire dans le sixième article par ces paroles :

et ainsi, s’il ne le dit de paroles, il assure néanmoins en effet que l’esprit n’est rien autre chose qu’un mode du corps ;

Si elle se fait par l’ouïe, elle ne peut représenter que des sons et des paroles ;

Et certes c’est une chose si véritable que la vue ne représente de soi rien autre chose à l’esprit que des peintures, ni l’ouïe que des sons et des paroles, que personne ne le révoque en doute.

Si bien que tout ce que nous concevons de plus que ces paroles et ces peintures, comme les choses signifiées par ces signes, doit nécessairement nous être représenté par des idées, qui ne viennent point d’ailleurs que de la faculté que nous avons de penser, et qui par conséquent sont naturellement en elle, c’est-à-dire sont toujours en nous en puissance ;

où je ne puis que je n’admire la grande confiance ou présomption de cet homme de croire qu’il puisse avec tant de facilité, et en si peu de paroles, renverser tout ce que j’ai composé après une longue et sérieuse méditation, et que je n’ai pu expliquer que dans un livre entier.

Cependant l’auteur de ce placard, pour réfuter cette preuve, que plusieurs grands personnages éminents par-dessus les autres en esprit et en science, après l’avoir diligemment examinée, tiennent aussi bien que moi pour une très certaine et très évidente démonstration, emploie ce peu de paroles :

Enfin, après tous ces articles, il a ajouté ces paroles qu’il a tirées d’un de mes écrits :

ou que le sommeil ne se pourrait distinguer de la veille, et autres choses semblables qui m’ont quelquefois été objectées par des calomniateurs ignorants, mais que j’ai rejeté toutes ces choses en paroles très expresses, et que je les ai même réfutées par des arguments très puissants et j’ose même dire plus puissants qu’aucun autre ait jamais fait avant moi.

Telles que sont ces paroles de l’Ecclésiastique, chapitre second :

  Correspondance, année 1648, A MONSIEUR ***, 1er avril 1648. (Les éditions contemporaines datent cette lettre de mars ou avril 1648.).

Il n’appartient qu’à ceux qui ont envie d’être ingrats de se servir de cette monnaie, afin de payer avec des paroles les véritables bienfaits qu’ils ont reçus.

  Correspondance, année 1648, REPONSE DE Monsieur DESCARTES, 16 juillet 1648.

Puisque le concile de Trente n’a pas voulu expliquer de quelle façon le corps de Jésus-Christ est en l’Eucharistie, et qu’il a dit qu’il y est d’une façon d’exister qu’à peine pouvons-nous exprimer par des paroles, je craindrais d’être accusé de témérité si j’osais déterminer quelque chose là-dessus, et j’aimerais mieux en dire mes conjectures de vive voix que par écrit.

  Correspondance, année 1649, REPONSE DE Monsieur DESCARTES A Monsieur MORUS, 5 février 1649.

car la parole est l’unique signe et la seule marque assurée de la pensée cachée et renfermée dans le corps ;

or tous les hommes les plus stupides et les plus insensés, ceux mêmes qui sont privés des organes de la langue et de la parole, se servent de signes, au lieu que les bêtes ne font rien de semblable, ce que l’on peut prendre pour la véritable différence entre l’homme et la bête.

  Correspondance, année 1649, A Monsieur CHANUT, 31 mars 1649.

J’ai tant de créance à vos paroles, et vous me l’avez représentée avec des m_urs et un esprit que j’admire et estime si fort, qu’encore qu’elle ne serait point en la haute fortune où elle est, et n’aurait qu’une naissance commune, si seulement j’osais espérer que mon voyage lui fût utile ?

  Correspondance, année 1649, A Monsieur CLERSELIER, 15 avril 1649. (Les éditions contemporaines datent cette lettre du 23 avril 1649.).

le peu de loisir que j’ai eu, l’écrivant, ne me permet pas de penser aux paroles, et j’ai seulement désir de vous assurer que je suis, etc.

 

descartes

« LE MONDE OU TRAITÉ DE LA LUMIERE, CHAPITRE PREMIER, De la différence qui est entre nos sentiments et les choses qui les produisent. Vous savez bien que les paroles, n'ayant aucune ressemblance avec les choses qu'elles signifient, ne laissent pas de nous les faireconcevoir, et souvent même sans que nous prenions garde au son des mots, ni à leurs syllabes ; Mais vous direz, peut-être, que nos oreilles ne nous font véritablement sentir que le son des paroles, ni nos yeux que lacontenance de celui qui rit ou qui pleure, et que c'est notre esprit qui, ayant retenu ce que signifient ces paroles et cettecontenance, nous le représente en même temps. Pensez-vous, lors même que nous ne prenons pas garde à la signification des paroles, et que nous oyons seulement leur son, quel'idée de ce son qui se forme en notre pensée soit quelque chose de semblable à l'objet qui en est la cause ? MEDITATIONS METAPHYSIQUES, Méditation Seconde. Car encore que sans parler je considère tout cela en moi-même, les paroles toutefois m'arrêtent, et je suis presque déçu par lestermes du langage ordinaire ; MEDITATIONS METAPHYSIQUES, Méditation Troisième. et au contraire toutes les fois que je me tourne vers les choses que je pense concevoir fort clairement, je suis tellement persuadépar elles, que de moi-même je me laisse emporter à ces paroles : MEDITATIONS METAPHYSIQUES, REPONSES DE L'AUTEUR AUX PREMIERES OBJECTIONS. Or j'ai écrit quelque part, que l'idée est la chose même conçue, ou pensée, en tant qu'elle est objectivement dans l'entendement,lesquelles paroles il feint d'entendre tout autrement que je ne les ai dites, afin de me donner occasion de les expliquer plusclairement. Et lorsque ce savant théologien dit qu'il y a de l'équivoque en ces paroles, un pur rien, il semble avoir voulu m'avertir de celle queje viens tout maintenant de remarquer, de peur que je n'y prisse pas garde. par lesquelles paroles il admet entièrement tout ce que j'ai avancé. Car, encore bien que ceux qui, ne s'attachant qu'à la propre et étroite signification d'efficient, pensent qu'il est impossible qu'unechose soit la cause efficiente de soi-même, et ne remarquent ici aucun autre genre de cause, qui ait rapport et analogie avec lacause efficiente, encore, dis-je, que ceux-là n'aient pas de coutume d'entendre autre chose, lorsqu'ils disent que quelque choseest par soi, sinon qu'elle n'a point de cause, si toutefois ils veulent plutôt s'arrêter à la chose qu'aux paroles, ils reconnaîtrontfacilement que la signification négative du mot par soi ne procède que de la seule imperfection de l'esprit humain, et qu'elle n'aaucun fondement dans les choses ; MEDITATIONS METAPHYSIQUES, REPONSES DE L'AUTEUR AUX SECONDES OBJECTIONS. Mais j'ai déjà fait voir dans ma seconde Méditation que je m'en étais assez souvenu, vu que j'y ai mis ces paroles : mais pardonnez-moi si je réponds que je n'ai pas encore donné lieu à cette question, n'ayant commencé à en traiter que dans lasixième Méditation, par ces paroles : D'où il est évident que je n'ai point parlé en ce lieu-là du mensonge qui s'exprime par des paroles, mais seulement de la maliceinterne et formelle qui se rencontre dans la tromperie, quoique néanmoins ces paroles que vous apportez du prophète : et ceux aussi qui liront mes Méditations n'auront pas sujet de croire que je n'aie point connu cette lumière surnaturelle, puisque,dans la quatrième, où j'ai soigneusement recherché la cause de l'erreur ou fausseté, j'ai dit, en paroles expresses, qu'elle disposel'intérieur de notre pensée à vouloir, et que néanmoins elle ne diminue point la liberté. Or, que cette seule contemplation de la vérité soit le seul but de mes Méditations, outre que cela se reconnaît assez clairement. »

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