Devoir de Philosophie

Que reproche-t-on à celui qu'on traite d'inconscient ?

Publié le 27/02/2005

Extrait du document

Ainsi, sont déclarés inconscients par la justice, les personnes qui au moment de leur acte, n'avaient pas la faculté de discerner ce qu'elles faisaient et de se rendre compte de la réalité de leurs actes. Cela rejoint le sens donné à inconscient quand des personnes sont évanouies. Le monde extérieur n'est plus présent pour eux. Dès lors, traiter quelqu'un d'inconscient, c'est lui reprocher de ne pas se servir de sa raison et ne pas réfléchir.   L'obligation du travail de la conscience par elle-même Ce qui se fait jour alors à travers le reproche d'inconscience, c'est bien l'obligation qu'à chacun d'être responsable et de prendre connaissance autant de lui-même que du monde extérieur. Pour Sartre, l'homme ne peut donc pas faire ce qu'il veut sans réfléchir, parce qu'il est responsable de tout devant tous L'inconscience, comme manque de connaissance de la réalité ou de soi-même, suppose une prise de conscience de l'individu. Dans un premier temps, en se rendant compte de son ignorance, l'individu s'engage alors dans un processus de connaissance qui a pour but de prendre connaissance de tous les événements en présence dans une situation. Ainsi, pour reprendre notre exemple, pour ne pas être inconscient des dangers qu'entraîne une situation donnée, il faut au préalable réfléchir sur les conséquences de nos actions. L'inconscience se résorberait donc dans un processus de pensée, de réflexion et de connaissance. La chasse à l'inconscience serait donc le domaine privilégié de la philosophie.

Il existe deux sens à donner au terme inconscient : l’un inventé par Freud comme instance psychique et l’autre employé comme adjectif qui désigne tout ce qui n’est pas conscient. C’est de la seconde acceptation qu’il est question ici. Il s’agit de savoir de quoi n’a pas conscience celui qui n’a pas conscience. Ce terme dans le langage courant ne renvoie-t-il pas à une ignorance, à un manque ? Mais ce manque n’est-il pas blâmable uniquement quand il est possible à combler ? Ne reproche-t-on pas en effet aux individus inconscients de ne pas faire d’efforts ? N’est-ce pas ici l’obligation pour tous de réfléchir sur soi et sur le monde qui se fait jour ?

« Dans la trente et unième des « Nouvelles conférences d'introduction à la psychanalyse » (1932), intitulé « La décomposition de la personnalité psychique », Freud décrit le but du traitement psychanalytique par cette formule : « Là où « çà » était, « je » dois devenir », où le « ça » représente l'inconscient.

Il est remarquable que la traduction de la phrase allemande ait prêté à controverses. Pour comprendre l'enjeu de cette phrase, il faut garder à l'esprit que la psychanalyse, avant d'être une discipline, voire une science, est avant tout une thérapie, une façon de guérir despatients. Dans notre texte, Freud affirme « C'est que l'être humain tombe malade en raison du conflit entre les revendications de la vie pulsionnelle et la résistance qui s'élève en lui contreelles ».

La maladie provient d'un conflit entre les normes « éthiques, esthétiques et sociales » et des désirs qui « semblent remonter d'un véritable enfer ». Or ces désirs censurés ne sont pas plus conscients que la censure elle-même.Le malade subit donc un combat interne dont il n'a ni la maîtrise, ni laconnaissance : « La psychanalyse entreprend d'élucider ces cas morbides inquiétants, elle organise de longues et minutieuses recherches, elle se forgedes notions de secours et des constructions scientifiques et, finalement peutdire au moi : « il n'y a rien d'étranger qui se soit introduit en toi, c'est unepart de ta propre vie psychique qui s'est soustraite à ta conscience et à lamaîtrise de ton vouloir. » En quoi consiste alors le traitement ? A traduire l'inconscient en conscient : « On ne prête pas assez attention dans cette affaire à un point essentiel, à savoir que le conflit pathogène des névrosés n'est pas comparable à une lutte normale que des tendances psychiques se livrentsur le même terrain […] Il y a lutte entre des forces dont quelques-unes ont atteint la phase du […] conscient, tandis que les autres n'ont pasdépassé la limite de l'inconscient.

C'est pourquoi le conflit ne peut aboutir que lorsque les deux se retrouvent sur le même terrain.

Et je crois que laseule tâche de la thérapeutique consiste à rendre cette rencontre possible. » (« Introduction à la psychanalyse »). Le but de la cure est donc de faire que le patient, au lieu de subir un conflit dont il n'a pas la maîtrise, puisse prendre conscience de celui- ci.

Un conflit qui existe mais n'est pas posé ne peut être résolu.

Seule la claire conscience des désirs qui agitent le patient, et des choix qu'il doitfaire entre ses désirs et ses normes, peut amener à la guérison.

Supprimer le refoulement conduit à remplacer une censure dont je n'ai pasconscience, par un jugement et un choix conscient : « En amenant l'inconscient dans la conscience, nous supprimons les refoulements […] nous transformons le conflit pathogène en un conflit normal, qui, d'une manière ou d'une autre, finira bien par être résolu. » Autrement dit, la cure n'a d'autre but que de remplacer chez le patient le ça, l'inconscient, par la conscience.

De favoriser le jugement et le choix et d'éliminer un conflit vécu mais ni connu ni maîtrisé.

Le psychanalyste n'a donc pas à trancher le conflit à la place de son patient, ni àtransformer celui-ci.

A l'inverse, il doit permettre à ce dernier sa propre reprise en main.

Là où le patient était un individu scindé, déchiré entreconscience et inconscient , la cure devrait favoriser une réunification du sujet. « Vous vous étiez fait de la guérison du nerveux une autre idée, vous vous étiez figuré, qu'après s'être soumis au travail pénible d'une psychanalyse, il deviendrait un autre homme ; et voilà que je viens vous dire que sa guérison consiste en ce qu'il a un peu plus de conscient et unpeu moins d'inconscient qu'auparavant ! Or, vous sous-estimez certainement l'importance d'un changement intérieur de cet ordre. » Le but du traitement analytique tel que le décrit Freud est de rendre au sujet, déchiré par un conflit dont il n'a pas conscience, la maîtrise de soi. Loin que la psychanalyse soit une apologie de l'inconscient, elle s'assigne comme but la promotion du sujet, de la conscience, et la réduction duça, de l'inconscient.

Ni confesseur, ni gourou, le psychanalyste, sachant que tout être humain est d'abord et avant tout un être scindé, déchiré,« décomposé » pour reprendre le mot de Freud , s'efforce de favoriser la recomposition du sujet et l'avènement de la maîtrise de la conscience. Ainsi, nous ne reprochons pas à quelqu'un les mécanismes inconscients présents dans beaucoup d'actions et depensées parce qu'ils sont inévitables et sont la règle de l'esprit humain.

Ce qui vaut le reproche est bien le manquede réflexion, parce que chacun se doit de réfléchir à ses actes, à ses dires.

Mais aussi parce que nous avons tous lapossibilité de prendre conscience de la réalité et d'améliorer notre connaissance.

Et c'est cette possibilité qui fondela responsabilité de chacun à se défaire de son ignorance.

Comme le dit Kant, quand nous pouvons quelque chose,nous le devons.. »

↓↓↓ APERÇU DU DOCUMENT ↓↓↓

Liens utiles