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«Il voulait encore me parler de Dieu ... » - L'Etranger de CAMUS

Publié le 20/11/2012

Extrait du document

dieu

Par un nouvel effet de miroir, la seconde partie du

roman s'achève comme elle avait commencé. Premier

représentant de la Justice, le juge d'instruction avait tenté

de convertir Meursault, brandissant un crucifix devant ses

yeux et l'appelant au repentir. Au lieu d'instruire l'affaire

comme il aurait dû le faire, 1 'homme prêchait dans l' intention

de ramener la brebis perdue sur les chemins du

Seigneur. Derrière le masque du juge se cachait un prêtre.

Symétriquement, l'aumônier qui se rend dans la cellule de

Meursault est un juge qui se dissimule derrière le masque

d'un prêtre. Son amour proclamé des misérables, sa fraternité

encombrante, sa sollicitude mielleuse apparaissent

à Meursault comme l'expression d'une même volonté de

condamner tout ce qu'a été son existence. Au nom de la

certitude qu'il croit détenir, le prêtre prétend connaître

mieux que Meursault le sens de sa vie et de son être.

dieu

« 162 1 Etude de L'Etranger insulté et je lui ai dit de ne pas prier.

Je l'avais pris par le collet de sa soutane.

Je déversais sur lui tout le fond de mon cœur avec des bondissements mêlés de joie et de colère.

Il avait l'air si certain, n'est-ce pas? Pourtant, aucune de ses certi­ tudes ne valait un cheveu de femme.

Il n'était même pas sûr d'être en vie puisqu'il vivait comme un mort.

Moi, j'avais l'air d'avoir les mains vides.

Mais j'étais sûr de moi, sûr de tout, plus sûr que lui, sûr de ma vie et de cette mort qui allait venir.

Oui, je n'avais que cela.

Mais du moins, je tenais cette vérité autant qu'elle me tenait.

J'avais eu raison, j'avais encore raison, j'avais toujours raison.

j'avais vécu de telle façon et j'aurais pu vivre de telle autre.

j'avais fait ceci et je n'avais pas fait cela.

Je n'avais pas fait telle chose alors que j'avais fait cette autre.

Et après? C'était comme si j'avais attendu pendant tout le temps cette minute et cette petite aube où je serais justifié.

Rien, rien n'avait d'importance et je savais bien pourquoi.

Lui aussi savait pourquoi.

Du fond de mon avenir, pendant toute cette vie absurde que j'avais menée, un souffle obscur remontait vers moi à travers des années qui n'étaient pas encore venues et ce souffle égalisait sur son pas­ sage tout ce qu'on me proposait alors dans les années pas plus réelles que je vivais.

Que m'importaient la mort des autres, l'amour d'une mère, que m'importaient son Dieu, les vies qu'on choisit, les destins qu'on élit, puisqu'un seul destin devait m'élire moi-même et avec moi des milliards de privilé­ giés qui, comme lui, se disaient mes frères.

Comprenait-il donc? Tout le monde était privilégié.

Il n'y avait que des pri­ vilégiés.

Les autres aussi, on les condamnerait un jour.

Lui aussi, on le condamnerait.

Qu'importait si, accusé de meurtre, il était exécuté pour n'avoir pas pleuré à l'enterre­ ment de sa mère? Le chien de Sa/amano valait autant que sa femme.

La petite femme automatique était aussi coupable que la Parisienne que Masson avait épousée ou que Marie qui avait envie que je l'épouse.

Qu'importait que Raymond fût mon copain autant que Céleste qui valait mieux que lui? Qu'importait que Marie donnât aujourd'hui sa bouche à un nouveau Meursault? Comprenait-il donc, ce condamné, et. »

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