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Eugenie Grandet --Tu es folle!

Publié le 12/04/2014

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Eugenie Grandet --Tu es folle! Mais elle se plut a justifier la folie de sa fille en la partageant. Eugenie appela Nanon. --Quoi que vous voulez encore, mademoiselle? --Nanon, tu auras bien de la creme pour midi. --Ah! pour midi, oui, repondit la vieille servante. --He! bien, donne-lui du cafe bien fort, j'ai entendu dire a monsieur des Grassins que le cafe se faisait bien fort a Paris. Mets-en beaucoup. --Et ou voulez-vous que j'en prenne? --Achetes-en. --Et si monsieur me rencontre? --Il est a ses pres. --Je cours. Mais monsieur Fessard m'a deja demande si les trois Mages etaient chez nous, en me donnant de la bougie. Toute la ville va savoir nos deportements. --Si ton pere s'apercoit de quelque chose, dit madame Grandet, il est capable de nous battre. --Eh! bien, il nous battra, nous recevrons ses coups a genoux. Madame Grandet leva les yeux au ciel, pour toute reponse. Nanon prit sa coiffe et sortit. Eugenie donna du linge blanc, elle alla chercher quelques-unes des grappes de raisin qu'elle s'etait amusee a etendre sur des cordes dans le grenier; elle marcha legerement le long du corridor pour ne point eveiller son cousin, et ne put s'empecher d'ecouter a sa porte la respiration qui s'echappait en temps egaux de ses levres. --Le malheur veille pendant qu'il dort, se dit-elle. Elle prit les plus vertes feuilles de la vigne, arrangea son raisin aussi coquettement que l'aurait pu dresser un vieux chef d'office, et l'apporta triomphalement sur la table. Elle fit main basse, dans la cuisine, sur les poires comptees par son pere, et les disposa en pyramide parmi des feuilles. Elle allait, venait, trottait, sautait. Elle aurait bien voulu mettre a sac toute la maison de son pere; mais il avait les clefs de tout. Nanon revint avec deux oeufs frais. En voyant les oeufs, Eugenie eut l'envie de lui sauter au cou. --Le fermier de la Lande en avait dans son panier, je les lui ai demandes, et il me les a donnes pour m'etre agreable, le mignon. Apres deux heures de soins, pendant lesquelles Eugenie quitta vingt fois son ouvrage pour aller voir bouillir le cafe, pour aller ecouter le bruit que faisait son cousin en se levant, elle reussit a preparer un dejeuner tres simple, peu couteux, mais qui derogeait terriblement aux habitudes inveterees de la maison. Le dejeuner de midi s'y faisait debout. Chacun prenait un peu de pain, un fruit ou du beurre, et un verre de vin. En voyant la table placee aupres du feu, l'un des fauteuils mis devant le couvert de son cousin, en voyant les deux assiettees de fruits, le coquetier, la bouteille de vin blanc, le pain, et le sucre amoncele dans une soucoupe, Eugenie trembla de tous ses membres en songeant seulement alors aux regards que lui lancerait son pere, s'il venait a entrer en ce moment. Aussi regardait-elle souvent la pendule, afin de calculer si son cousin pourrait dejeuner avant le retour du bonhomme. Eugenie Grandet 35 Eugenie Grandet --Sois tranquille, Eugenie, si ton pere vient, je prendrai tout sur moi, dit madame Grandet. Eugenie ne put retenir une larme. --Oh! ma bonne mere, s'ecria-t-elle, je ne t'ai pas assez aimee! Charles, apres avoir fait mille tours dans sa chambre en chanteronnant, descendit enfin. Heureusement, il n'etait encore que onze heures. Le parisien! il avait mis autant de coquetterie a sa toilette que s'il se fut trouve au chateau de la noble dame qui voyageait en Ecosse. Il entra de cet air affable et riant qui sied si bien a la jeunesse, et qui causa une joie triste a Eugenie. Il avait pris en plaisanterie le desastre de ses chateaux en Anjou, et aborda sa tante fort gaiement. --Avez-vous bien passe la nuit, ma chere tante? Et vous, ma cousine? --Bien, monsieur, mais vous? dit madame Grandet. --Moi, parfaitement. --Vous devez avoir faim, mon cousin, dit Eugenie; mettez-vous a table. --Mais je ne dejeune jamais avant midi, le moment ou je me leve. Cependant, j'ai si mal vecu en route, que je me laisserai faire. D'ailleurs ... Il tira la plus delicieuse montre plate que Breguet ait faite. Tiens, mais il est onze heures, j'ai ete matinal. --Matinal?... dit madame Grandet. --Oui, mais je voulais ranger mes affaires. Eh! bien, je mangerais volontiers quelque chose, un rien, une volaille, un perdreau. --Sainte Vierge! cria Nanon en entendant ces paroles. --Un perdreau, se disait Eugenie qui aurai voulu payer un perdreau de tout son pecule. --Venez vous asseoir, lui dit sa tante. Le dandy se laissa aller sur le fauteuil comme une jolie femme qui se pose sur son divan. Eugenie et sa mere prirent des chaises et se mirent pres de lui devant le feu. --Vous vivez toujours ici? leur dit Charles en trouvant la salle encore plus laide au jour qu'elle ne l'etait aux lumieres. --Toujours, repondit Eugenie en le regardant, excepte pendant les vendanges. Nous allons alors aider Nanon, et logeons tous a l'abbaye de Noyers. --Vous ne vous promenez jamais? --Quelquefois le dimanche apres vepres, quand il fait beau, dit madame Grandet, nous allons sur le pont, ou voir les foins quand on les fauche. --Avez-vous un theatre? Eugenie Grandet 36

« —Sois tranquille, Eugenie, si ton pere vient, je prendrai tout sur moi, dit madame Grandet. Eugenie ne put retenir une larme. —Oh! ma bonne mere, s'ecria-t-elle, je ne t'ai pas assez aimee! Charles, apres avoir fait mille tours dans sa chambre en chanteronnant, descendit enfin.

Heureusement, il n'etait encore que onze heures.

Le parisien! il avait mis autant de coquetterie a sa toilette que s'il se fut trouve au chateau de la noble dame qui voyageait en Ecosse.

Il entra de cet air affable et riant qui sied si bien a la jeunesse, et qui causa une joie triste a Eugenie.

Il avait pris en plaisanterie le desastre de ses chateaux en Anjou, et aborda sa tante fort gaiement. —Avez-vous bien passe la nuit, ma chere tante? Et vous, ma cousine? —Bien, monsieur, mais vous? dit madame Grandet. —Moi, parfaitement. —Vous devez avoir faim, mon cousin, dit Eugenie; mettez-vous a table. —Mais je ne dejeune jamais avant midi, le moment ou je me leve.

Cependant, j'ai si mal vecu en route, que je me laisserai faire.

D'ailleurs ...

Il tira la plus delicieuse montre plate que Breguet ait faite.

Tiens, mais il est onze heures, j'ai ete matinal. —Matinal?...

dit madame Grandet. —Oui, mais je voulais ranger mes affaires.

Eh! bien, je mangerais volontiers quelque chose, un rien, une volaille, un perdreau. —Sainte Vierge! cria Nanon en entendant ces paroles. —Un perdreau, se disait Eugenie qui aurai voulu payer un perdreau de tout son pecule. —Venez vous asseoir, lui dit sa tante. Le dandy se laissa aller sur le fauteuil comme une jolie femme qui se pose sur son divan.

Eugenie et sa mere prirent des chaises et se mirent pres de lui devant le feu. —Vous vivez toujours ici? leur dit Charles en trouvant la salle encore plus laide au jour qu'elle ne l'etait aux lumieres. —Toujours, repondit Eugenie en le regardant, excepte pendant les vendanges.

Nous allons alors aider Nanon, et logeons tous a l'abbaye de Noyers. —Vous ne vous promenez jamais? —Quelquefois le dimanche apres vepres, quand il fait beau, dit madame Grandet, nous allons sur le pont, ou voir les foins quand on les fauche. —Avez-vous un theatre? Eugenie Grandet Eugenie Grandet 36. »

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