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La dame de Monsoreau v.

Publié le 11/04/2014

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La dame de Monsoreau v.1 Mais, au milieu de tous les succes de guerre, d'ambition et de galanterie, Bussy etait demeure ce que peut etre une ame inaccessible a toute faiblesse humaine, et celui-la qui n'avait jamais connu la peur n'avait jamais non plus, jusqu'a l'epoque ou nous sommes arrives du moins, connu l'amour. Ce coeur d'empereur qui battait dans sa poitrine de gentilhomme, comme il disait lui-meme, etait vierge et pur, pareil au diamant que la main du lapidaire n'a pas encore touche et qui sort de la mine ou il a muri sous le regard du soleil. Aussi n'y avait-il point dans ce coeur place pour les details de pensee qui eussent fait de Bussy un empereur veritable. Il se croyait digne d'une couronne et valait mieux que la couronne qui lui servait de point de comparaison. Henri III lui avait fait offrir son amitie, et Bussy l'avait refusee, disant que les amis des rois sont leurs valets, et quelquefois pis encore; que par consequent semblable condition ne lui convenait pas. Henri III avait devore en silence cet affront, aggrave par le choix qu'avait fait Bussy du duc Francois pour son maitre. Il est vrai que le duc Francois etait le maitre de Bussy comme le bestiaire est le maitre du lion. Il le sert et le nourrit, de peur que le lion ne le mange. Tel etait ce Bussy que Francois poussait a soutenir ses querelles particulieres. Bussy le voyait bien, mais le role lui convenait. Il s'etait fait une theorie a la maniere de la devise des Rohan, qui disaient: "Roi ne puis, prince ne daigne, Rohan je suis." Bussy se disait:--Je ne puis etre roi de France, mais M. le duc d'Anjou peut et veut l'etre, je serai roi de M. le duc d'Anjou. Et, de fait, il l'etait. Quand les gens de Saint-Luc virent entrer au logis ce Bussy redoutable, ils coururent prevenir M. de Brissac. --M. de Saint-Luc est-il au logis? demanda Bussy, passant la tete aux rideaux de la portiere. --Non, monsieur, fit le concierge. --Ou le trouverai-je? --Je ne sais, monsieur, repondit le digne serviteur. On est meme fort inquiet a l'hotel. M. de Saint-Luc n'est pas rentre depuis hier. --Bah! fit Bussy tout emerveille. --C'est comme j'ai l'honneur de vous le dire. --Mais madame de Saint-Luc? --Oh! madame de Saint-Luc, c'est autre chose. --Elle est a l'hotel? --Oui. --Prevenez donc madame de Saint-Luc que je serais charme si j'obtenais d'elle la permission de lui presenter mes respects. Cinq minutes apres, le messager revint dire que madame de Saint-Luc recevrait avec grand plaisir M. de Bussy. CHAPITRE IV. COMMENT MADEMOISELLE DE BRISSAC, AUTREMENT DIT MADAME DE SAINT-LUC, 31 La dame de Monsoreau v.1 Bussy descendit de ses coussins de velours et monta le grand escalier; Jeanne de Cosse etait venue au-devant du jeune homme jusqu'au milieu de la salle d'honneur. Elle etait fort pale, et ses cheveux, noirs comme l'aile du corbeau, donnaient a cette paleur le ton de l'ivoire jauni; ses yeux etaient rouges d'une douloureuse insomnie, et l'on eut suivi sur sa joue le sillon argente d'une larme recente. Bussy, que cette paleur avait d'abord fait sourire et qui preparait un compliment de circonstance a ces yeux battus, s'arreta dans son improvisation a ces symptomes de veritable douleur. --Soyez le bienvenu, monsieur de Bussy, dit la jeune femme, malgre toute la crainte que votre presence me fait eprouver. --Que voulez-vous dire, madame? demanda Bussy, et comment ma personne peut-elle vous annoncer un malheur? --Ah! il y a eu rencontre cette nuit, entre vous et M. de Saint-Luc, cette nuit, n'est-ce pas? avouez-le. --Entre moi et M. de Saint-Luc? repeta Bussy etonne. --Oui, il m'a eloignee pour vous parler. Vous etes au duc d'Anjou, il est au roi. Vous avez eu querelle. Ne me cachez rien, monsieur de Bussy, je vous en supplie. Vous devez comprendre mon inquietude. Il est parti avec le roi, c'est vrai; mais on se retrouve, on se rejoint. Confessez-moi la verite. Qu'est-il arrive a M. de Saint-Luc? --Madame, dit Bussy, voila, en verite, qui est merveilleux. Je m'attendais a ce que vous me demandassiez des nouvelles de ma blessure, et c'est moi que l'on interroge. --M. de Saint-Luc vous a blesse, il s'est battu! s'ecria Jeanne. Ah! vous voyez bien.... --Mai non, madame, il ne s'est pas battu le moins du monde, avec moi du moins, ce cher Saint-Luc, et, Dieu merci! ce n'est point de sa main que je suis blesse. Il y a meme plus, c'est qu'il a fait tout ce qu'il a pu pour que je ne le fusse pas. Mais, d'ailleurs, lui-meme a du vous dire que nous etions maintenant comme Damon et Pythias! --Lui! comment me l'aurait-il dit, puisque je ne l'ai pas revu? --Vous ne l'avez pas revu? Ce que me disait votre concierge etait donc vrai? --Que vous disait-il? --Que M. de Saint-Luc n'etait pas rentre depuis hier onze heures. Depuis hier onze heures, vous n'avez pas revu votre mari? --Helas! non. --Mais ou peut-il etre? --Je vous le demande. --Oh! pardieu, contez-moi donc cela, madame, dit Bussy, qui se doutait de ce qui etait arrive, c'est fort drole. La pauvre femme regarda Bussy avec le plus grand etonnement. CHAPITRE IV. COMMENT MADEMOISELLE DE BRISSAC, AUTREMENT DIT MADAME DE SAINT-LUC, 32

« Bussy descendit de ses coussins de velours et monta le grand escalier; Jeanne de Cosse etait venue au-devant du jeune homme jusqu'au milieu de la salle d'honneur.

Elle etait fort pale, et ses cheveux, noirs comme l'aile du corbeau, donnaient a cette paleur le ton de l'ivoire jauni; ses yeux etaient rouges d'une douloureuse insomnie, et l'on eut suivi sur sa joue le sillon argente d'une larme recente.

Bussy, que cette paleur avait d'abord fait sourire et qui preparait un compliment de circonstance a ces yeux battus, s'arreta dans son improvisation a ces symptomes de veritable douleur. —Soyez le bienvenu, monsieur de Bussy, dit la jeune femme, malgre toute la crainte que votre presence me fait eprouver. —Que voulez-vous dire, madame? demanda Bussy, et comment ma personne peut-elle vous annoncer un malheur? —Ah! il y a eu rencontre cette nuit, entre vous et M.

de Saint-Luc, cette nuit, n'est-ce pas? avouez-le. —Entre moi et M.

de Saint-Luc? repeta Bussy etonne. —Oui, il m'a eloignee pour vous parler.

Vous etes au duc d'Anjou, il est au roi.

Vous avez eu querelle.

Ne me cachez rien, monsieur de Bussy, je vous en supplie.

Vous devez comprendre mon inquietude.

Il est parti avec le roi, c'est vrai; mais on se retrouve, on se rejoint.

Confessez-moi la verite.

Qu'est-il arrive a M.

de Saint-Luc? —Madame, dit Bussy, voila, en verite, qui est merveilleux.

Je m'attendais a ce que vous me demandassiez des nouvelles de ma blessure, et c'est moi que l'on interroge. —M.

de Saint-Luc vous a blesse, il s'est battu! s'ecria Jeanne.

Ah! vous voyez bien.... —Mai non, madame, il ne s'est pas battu le moins du monde, avec moi du moins, ce cher Saint-Luc, et, Dieu merci! ce n'est point de sa main que je suis blesse.

Il y a meme plus, c'est qu'il a fait tout ce qu'il a pu pour que je ne le fusse pas.

Mais, d'ailleurs, lui-meme a du vous dire que nous etions maintenant comme Damon et Pythias! —Lui! comment me l'aurait-il dit, puisque je ne l'ai pas revu? —Vous ne l'avez pas revu? Ce que me disait votre concierge etait donc vrai? —Que vous disait-il? —Que M.

de Saint-Luc n'etait pas rentre depuis hier onze heures.

Depuis hier onze heures, vous n'avez pas revu votre mari? —Helas! non. —Mais ou peut-il etre? —Je vous le demande. —Oh! pardieu, contez-moi donc cela, madame, dit Bussy, qui se doutait de ce qui etait arrive, c'est fort drole. La pauvre femme regarda Bussy avec le plus grand etonnement.

La dame de Monsoreau v.1 CHAPITRE IV.

COMMENT MADEMOISELLE DE BRISSAC, AUTREMENT DIT MADAME DE SAINT-LUC, AVAIT PASSE SA NUIT DE NOCES.

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