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La dame de Monsoreau v.

Publié le 11/04/2014

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La dame de Monsoreau v.1 Alors mademoiselle de Brissac, devenue madame de Saint-Luc, avait remercie humblement le roi. Mais Henri avait tourne le dos sans repondre a ses remerciments. --Qu'a donc le roi contre vous, monsieur de Saint-Luc? avait alors demande la jeune femme a son mari. --Belle amie, repondit Saint-Luc, je vous raconterai cela plus tard, quand cette grande colere sera dissipee. --Et se dissipera-t-elle? demanda Jeanne. --Il le faudra bien, repondit le jeune homme. Mademoiselle de Brissac n'etait point encore assez madame de Saint-Luc pour insister; elle renfonca sa curiosite au fond de son coeur, se promettant de trouver, pour dicter ses conditions, un moment ou Saint-Luc serait bien oblige de les accepter. On attendait donc Henri III a l'hotel de Montmorency au moment ou s'ouvre l'histoire que nous allons raconter a nos lecteurs. Or il etait onze heures deja, et le roi n'etait pas encore arrive. Saint-Luc avait convie a ce bal tout ce que le roi et tout ce que lui-meme comptait d'amis; il avait compris dans les invitations les princes et les favoris des princes, particulierement ceux de notre ancienne connaissance, le duc d'Alencon, devenu duc d'Anjou a l'avenement de Henri III au trone; mais M. le duc d'Anjou, qui ne s'etait pas trouve au festin du Louvre, semblait ne pas devoir se trouver davantage a la fete de l'hotel Montmorency. Quant au roi et a la reine de Navarre, ils s'etaient, comme nous l'avons dit dans un ouvrage precedent, sauves dans le Bearn, et faisaient de l'opposition ouverte en guerroyant a la tete des huguenots. M. le duc d'Anjou, selon son habitude, faisait aussi de l'opposition, mais de l'opposition sourde et tenebreuse, dans laquelle il avait toujours soin de se tenir en arriere, tout en poussant en avant ceux de ses amis que n'avait point gueris l'exemple de la Mole et de Coconnas, dont nos lecteurs, sans doute, n'ont point encore oublie la terrible mort. Il va sans dire que ses gentilshommes et ceux du roi vivaient dans une mauvaise intelligence qui amenait au moins deux ou trois fois par mois des rencontres, dans lesquelles il etait bien rare que quelqu'un des combattants ne demeurat point mort sur la place, ou tout au moins grievement blesse. Quant a Catherine, elle etait arrivee au comble de ses voeux. Son fils bien-aime etait parvenu a ce trone qu'elle ambitionnait tant pour lui, ou plutot pour elle; et elle regnait sous son nom, tout en ayant l'air de se detacher des choses de ce monde et de n'avoir plus souci que de son salut. Saint-Luc, tout inquiet de ne voir arriver aucune personne royale, cherchait a rassurer son beau-pere, fort emu de cette menacante absence. Convaincu, comme tout le monde, de l'amitie que le roi Henri portait a Saint-Luc, il avait cru s'allier a une faveur, et voila que sa fille, au contraire, epousait quelque chose comme une disgrace. Saint-Luc se donnait mille peines pour lui inspirer une securite que lui-meme n'avait pas, et ses amis Maugiron, Schomberg et Quelus, vetus de leurs plus magnifiques costumes, tout roides dans leurs pourpoints splendides, et dont les fraises enormes semblaient des plats supportant leur tete, ajoutaient encore a ses transes par leurs ironiques lamentations. --Eh! mon Dieu! mon pauvre ami, disait Jacques de Levis, comte de Quelus, je crois, en verite, que pour cette fois tu es perdu. Le roi t'en veut de ce que tu t'es moque de ses avis, et M. d'Anjou t'en veut de ce que tu t'es moque de son nez.[*] CHAPITRE PREMIER. LES NOCES DE SAINT-LUC. 3 La dame de Monsoreau v.1 [*] La petite verole avait tellement maltraite M. le duc d'Anjou, qu'il semblait avoir deux nez. --Mais non, repondit Saint-Luc, tu te trompes, Quelus, le roi ne vient pas parce qu'il a ete faire un pelerinage aux Minimes du bois de Vincennes, et le duc d'Anjou est absent parce qu'il est amoureux de quelque femme que j'aurai oublie d'inviter. --Allons donc, dit Maugiron, as-tu vu la mine que faisait le roi a diner? Est-ce la la physionomie paterne d'un homme qui va prendre le bourdon pour faire un pelerinage? Et quant au duc d'Anjou, son absence personnelle, motivee par la cause que tu dis, empecherait-elle ses Angevins de venir? En vois-tu un seul ici? Regarde, eclipse totale, pas meme ce tranche-montagne de Bussy. --Heu! messieurs, disait le duc de Brissac en secouant la tete d'une facon desesperee, ceci me fait tout l'effet d'une disgrace complete. En quoi donc, mon Dieu! notre maison, toujours si devouee a la monarchie, a-t-elle pu deplaire a Sa Majeste? Et le vieux courtisan levait avec douleur ses deux bras au ciel. Les jeunes gens regardaient Saint-Luc avec de grands eclats de rire, qui, bien loin de rassurer le marechal, le desesperaient. La jeune mariee, pensive et recueillie, se demandait, comme son pere, en quoi Saint-Luc avait pu deplaire au roi. Saint-Luc le savait, lui, et, par suite de cette science, etait le moins tranquille de tous. Tout a coup, a l'une des deux portes par lesquelles on entrait dans la salle, on annonca le roi. --Ah! s'ecria le marechal radieux, maintenant je ne crains plus rien, et, si j'entendais annoncer le duc d'Anjou, ma satisfaction serait complete. --Et moi, murmura Saint-Luc, j'ai encore plus peur du roi present que du roi absent, car il ne vient que pour me jouer quelque mauvais tour, comme c'est aussi pour me jouer quelque mauvais tour que le duc d'Anjou ne vient pas. Mais, malgre cette triste reflexion, il ne s'en precipita pas moins au-devant du roi, qui avait enfin quitte son sombre costume marron, et qui s'avancait tout resplendissant de satin, de plumes et de pierreries. Mais, au moment ou apparaissait a l'une des portes le roi Henri III, un autre roi Henri III, exactement pareil au premier, vetu, chausse, coiffe, fraise et goudronne de meme, apparaissait par la porte en face. De sorte que les courtisans, un instant emportes vers le premier, s'arreterent comme le flot a la pile de l'arche, et refluerent en tourbillonnant du premier au second roi. Henri III remarqua le mouvement, et, ne voyant devant lui que des bouches ouvertes, des yeux effares et des corps pirouettant sur une jambe: --Ca, messieurs, qu'y a-t-il donc? demanda-t-il. Un long eclat de rire lui repondit. CHAPITRE PREMIER. LES NOCES DE SAINT-LUC. 4

« [*] La petite verole avait tellement maltraite M.

le duc d'Anjou, qu'il semblait avoir deux nez. —Mais non, repondit Saint-Luc, tu te trompes, Quelus, le roi ne vient pas parce qu'il a ete faire un pelerinage aux Minimes du bois de Vincennes, et le duc d'Anjou est absent parce qu'il est amoureux de quelque femme que j'aurai oublie d'inviter. —Allons donc, dit Maugiron, as-tu vu la mine que faisait le roi a diner? Est-ce la la physionomie paterne d'un homme qui va prendre le bourdon pour faire un pelerinage? Et quant au duc d'Anjou, son absence personnelle, motivee par la cause que tu dis, empecherait-elle ses Angevins de venir? En vois-tu un seul ici? Regarde, eclipse totale, pas meme ce tranche-montagne de Bussy. —Heu! messieurs, disait le duc de Brissac en secouant la tete d'une facon desesperee, ceci me fait tout l'effet d'une disgrace complete.

En quoi donc, mon Dieu! notre maison, toujours si devouee a la monarchie, a-t-elle pu deplaire a Sa Majeste? Et le vieux courtisan levait avec douleur ses deux bras au ciel. Les jeunes gens regardaient Saint-Luc avec de grands eclats de rire, qui, bien loin de rassurer le marechal, le desesperaient. La jeune mariee, pensive et recueillie, se demandait, comme son pere, en quoi Saint-Luc avait pu deplaire au roi. Saint-Luc le savait, lui, et, par suite de cette science, etait le moins tranquille de tous. Tout a coup, a l'une des deux portes par lesquelles on entrait dans la salle, on annonca le roi. —Ah! s'ecria le marechal radieux, maintenant je ne crains plus rien, et, si j'entendais annoncer le duc d'Anjou, ma satisfaction serait complete. —Et moi, murmura Saint-Luc, j'ai encore plus peur du roi present que du roi absent, car il ne vient que pour me jouer quelque mauvais tour, comme c'est aussi pour me jouer quelque mauvais tour que le duc d'Anjou ne vient pas. Mais, malgre cette triste reflexion, il ne s'en precipita pas moins au-devant du roi, qui avait enfin quitte son sombre costume marron, et qui s'avancait tout resplendissant de satin, de plumes et de pierreries. Mais, au moment ou apparaissait a l'une des portes le roi Henri III, un autre roi Henri III, exactement pareil au premier, vetu, chausse, coiffe, fraise et goudronne de meme, apparaissait par la porte en face.

De sorte que les courtisans, un instant emportes vers le premier, s'arreterent comme le flot a la pile de l'arche, et refluerent en tourbillonnant du premier au second roi. Henri III remarqua le mouvement, et, ne voyant devant lui que des bouches ouvertes, des yeux effares et des corps pirouettant sur une jambe: —Ca, messieurs, qu'y a-t-il donc? demanda-t-il. Un long eclat de rire lui repondit.

La dame de Monsoreau v.1 CHAPITRE PREMIER.

LES NOCES DE SAINT-LUC.

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