Devoir de Philosophie

LES FEMMES ET LE SECRET : LE TEXTE DE RABELAIS.

Publié le 07/07/2011

Extrait du document

rabelais

Les deux récits qui suivent ont, au contraire, une matière différente, mais le même point de vue. On étudiera, en conséquence, les ressemblances et les différences. J'ai ouï conter que le Pape Jean XXII, passant un jour par Fontevrault, fut requis par l'abbesse et mères discrètes  leur concéder un induit  moyennant lequel se pussent confesser les unes ès  autres. « — Il n'y a rien, répondit le Pape, que volontiers ne vous octroie, mais j'y vois un inconvénient : c'est que la confession doit être tenue secrète ; vous autres, femmes, à peine la cèleriez. — Très bien, dirent-elles, et plus que ne font les hommes. « Au jour propre , le Père Saint leur bailla une boîte en garde dedans laquelle il avait fait mettre une petite linotte, les priant doucement qu'elles la serrassent en quelque lieu sûr et secret, leur promettant en foi de Pape octroyer ce que portait leur requête si elles la gardaient secrète ; ce néanmoins, leur faisant défense rigoureuse qu'elles n'eussent à l'ouvrir en façon quelconque, sus  peine de censure ecclésiastique et d'excommunication éternelle. La défense ne fut sitôt faite qu'elles grillaient en leur entendement d'ardeur de voir qu'était dedans et leur tardait que le Pape ne fût jà hors la porte pour y vaquer. Le Père Saint, avoir  donné sa bénédiction sus  elles, se retira en son logis. Il n'était encore trois pas hors de l'abbaye quand les bonnes dames, toutes à la foule, accoururent pour voir la boîte défendue et voir qu'était dedans. Au lendemain, le Pape les visita, en intention, ce leur semblait, de leur dépêcher l'induit. Mais, avant d'entrer en propos, commanda qu'on lui apportât la boîte. Elle lui fut apportée, mais l'oisillet n'y était plus. Adonc, leur remontra que chose trop  plus difficile leur serait recéler les confessions, vu que n'avaient si peu de temps tenu en secret la boîte tant recommandée.

RABELAIS, Liv. III, chap. XXXIII.

Liens utiles