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Les laboureurs (Extrait de Jocelyn) - Lamartine

Publié le 14/06/2011

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lamartine

Nous ne donnons qu'un fragment de cet épisode célèbre, oie Lamartine égale les plus grands poètes de l'antiquité. La description est ferme, précise, parce que Lamartine peint ce qu'il connaît, ce qu'il a observé tant de fois dans la campagne; et de chaque partie du tableau, il fait jaillir la poésie lyrique et symbolique. On surprend ici la genèse de la vraie poésie : une scène que tout le monde a pu voir, et dont le poète seul sait tirer le sens caché et mystérieux.

Laissant souffler ses boeufs, le jeune homme s'appuie Debout au tronc d'un chêne, et de sa main essuie La sueur du sentier sur son front mâle et doux; La femme et les enfants tout petits, à genoux Devant les boeufs privés baissant leur corne à terre, Leur cassent des rejets de frêne et de fougère Et jettent devant eux en verdoyants monceaux Lés feuilles que leurs mains émondent des rameaux. Ils ruminent en paix pendant que l'ombre obscure, Sous le soleil montant, se replie à mesure, Et, laissant de la glèbe attiédir la froideur, Vient mourir et border les pieds du laboureur. Il rattache le joug, sous la forte courroie, Aux cornes qu'en pesant sa main robuste ploie ; Les enfants vont cueillir des rameaux découpés, Des gouttes de rosée encore tout trempés, Au joug avec la feuille en verts festons les nouent, Que sur leurs fronts voilés les fiers taureaux secouent, Pour que leur flanc qui bat et leur poitrail poudreux Portent sous le soleil un peu d'ombre avec eux; Au joug de bois poli le timon s'équilibre, Sous l'essieu gémissant le soc se dresse et vibre, L'homme saisit le manche, et sous le coin tranchant Pour ouvrir le sillon le guide au bout du champ. O travail, sainte loi du monde, Ton mystère va s'accomplir; Pour rendre la glèbe féconde, De sueur il faut l'amollir! L'homme, enfant et fruit de la terre, Ouvre les flancs de cette mère Où germent les fruits et les fleurs; Comme l'enfant mord la mamelle Pour que le lait monte et ruisselle Du sein de sa nourrice en pleurs! La terre, qui se fend sous le soc qu'elle aiguise, En tronçons palpitants s'amoncelle et se brise, Et, tout en s'entr'ouvrant, fume comme une chair Qui se fend et palpite et fume sous le fer. En deux monceaux poudreux les ailes la renversent. Ses racines à nu, ses herbes se dispersent; Ses reptiles, ses vers par le soc déterrés, Se tordent sur son sein en tronçons torturés; L'homme les foule aux pieds, et, secouant le manche, Enfonce plus avant le glaive qui les tranche; La femme parle aux boeufs du geste et de la voix; Le timon plonge et tremble, et déchire ses doigts; Les animaux, courbés sur leur jarret qui plie, Pèsent de tout leur front sur le joug qui les lie ; Comme un coeur généreux leurs flancs battent d'ardeur. Ils font bondir le sol jusqu'en sa profondeur. L'homme presse le pas, la femme suit à peine; Tous au bout du sillon arrivent hors d'haleine, Ils s'arrêtent; le boeuf rumine, et les enfants Chassent avec la main les mouches de leurs flancs. Il est ouvert, il fume encore Sur le sol, ce profond dessein! O terre! tu vis tout éclore Du premier sillon de ton sein; Il fut un Éden sans culture; Mais il semble que la nature, Cherchant à l'homme un aiguillon, Ait enfoui pour lui sous terre Sa destinée et son mystère Cachés dans son premier sillon! Oh! le premier jour où la plaine, S'entr'ouvrant sous sa forte main, But la sainte sueur humaine Et reçut en dépôt le grain; Pour voir la noble créature Aider Dieu, servir la nature, Le ciel ouvert roula son pli, Les fibres du sol palpitèrent, Et les anges surpris chantèrent Le second prodige accompli! Et les hommes ravis lièrent 75 Au timon les boeufs accouplés, Et les coteaux multiplièrent Les grands peuples comme les blés, Et les villes, ruches trop pleines, Débordèrent au sein des plaines. Et les vaisseaux, grands alcyons Comme à leurs nids les hirondelles, Portèrent sur leurs larges ailes Leur nourriture aux nations!

(Jocelyn, IXe Époque. — Hachette et Cie, éditeurs.)

QUESTIONS D'EXAMEN

I. — L'ensemble. — Fragment d'un admirable épisode du poème de Jocelyn. — Quels sont les personnages qui figurent dans la scène de labour? Chacun d'eux est-il désigné par son nom ? (Non; — l'homme, la femme, les enfants); Le travail des laboureurs n'a-t-il pas ici une valeur symbolique? Ne représente-t-il pas tout le travail humain fait en famille? Montrez que, dans cette pièce, Lamartine se montre poète descriptif (à préciser); A-t-il le souci de la couleur? (Nous dit-il, par exemple, que les laboureurs sont blonds ou bruns, que la terre est rouge, brune ou grise ? ...); Mais, s'il n'est pas coloriste, ne marque-t-il pas avec une grande netteté les mouvements et les attitudes? Un dessinateur et un graveur ne trouveraient-ils pas dans la pièce toutes les indications dont ils pourraient avoir besoin pour représenter la scène de labour que décrit Lamartine? L'auteur, dans l'épisode des Laboureurs, est-il uniquement poète descriptif? (tour à tour poète descriptif et poète lyrique; remarquer l'alternance des tableaux et des odes).

II. — L'analyse du morceau. — Montrez que la division du morceau est en quelque sorte tout indiquée; Donnez un titre à chacune des parties : a) Le repos des bœufs avant le labour (premier tableau) ; b) L'ode au travail; — le poète salue le saint mystère qui va s'accomplir ; c) Le labour : ouverture du premier sillon (second tableau); d) L'ode au premier sillon; — le poète chante la grandeur de la civilisation humaine, à laquelle donne naissance le premier sillon; 3° Qu'est-ce qu'une ode (étymologie du mot); A quel moment du jour commence le travail du labour? (particularités qui l'indiquent); Pourquoi des rameaux sont-ils placés sur le front des boeufs? Quel aspect présente la terre quand elle a été soulevée par la charrue? Que fait la femme? Que font les enfants? Montrez que les derniers vers du second tableau rendent bien la sensation de l'effort.

III. — Le style ; — les expressions. — Quels sont les vers qui vous paraissent les plus beaux dans cette pièce? Montrez la précision des termes (Le laboureur debout au tronc d'un chêne.... La femme et les enfants, à genoux devant les boeufs baissant leur corne à terre, et qui leur cassent des rejets de frêne et de fougère...); Relevez quelques images, et faites-en ressortir la justesse (La terre qui, tout en s'entr'ouvrant, fume comme une chair... Les villes, ruches trop pleines.... --les vaisseaux, grands alcyons...); Montrez que Lamartine sait approprier le mouvement des vers aux mouvements des personnages :

L'homme presse le pas, la femme suit à peine ; Tous au bout du sillon arrivent hors d'haleine.

Quel est le sens de ces expressions : les boeufs privés, - les boeufs accouplés? IV. — La grammaire.— Indiquez la composition des mots attiédir, — déborder; Quels sont les mots de la même famille que poitrail, aiguillon? Distinguez les propositions contenues dans les deux premiers vers du second tableau : La terre, qui se fend...; nature de chacune d'elles; Nature et fonction de chacun des pronoms que présentent ces deux vers.

Rédaction. — Décrivez une scène de labour.

lamartine

« Mais il semble que la nature,Cherchant à l'homme un aiguillon,Ait enfoui pour lui sous terreSa destinée et son mystèreCachés dans son premier sillon!Oh! le premier jour où la plaine,S'entr'ouvrant sous sa forte main,But la sainte sueur humaineEt reçut en dépôt le grain;Pour voir la noble créatureAider Dieu, servir la nature,Le ciel ouvert roula son pli,Les fibres du sol palpitèrent,Et les anges surpris chantèrentLe second prodige accompli!Et les hommes ravis lièrent 75Au timon les boeufs accouplés,Et les coteaux multiplièrentLes grands peuples comme les blés,Et les villes, ruches trop pleines,Débordèrent au sein des plaines.Et les vaisseaux, grands alcyonsComme à leurs nids les hirondelles,Portèrent sur leurs larges ailesLeur nourriture aux nations! (Jocelyn, IXe Époque.

— Hachette et Cie, éditeurs.) QUESTIONS D'EXAMEN I.

— L'ensemble.

— Fragment d'un admirable épisode du poème de Jocelyn.

— Quels sont les personnages quifigurent dans la scène de labour? Chacun d'eux est-il désigné par son nom ? (Non; — l'homme, la femme, lesenfants); Le travail des laboureurs n'a-t-il pas ici une valeur symbolique? Ne représente-t-il pas tout le travailhumain fait en famille? Montrez que, dans cette pièce, Lamartine se montre poète descriptif (à préciser); A-t-il lesouci de la couleur? (Nous dit-il, par exemple, que les laboureurs sont blonds ou bruns, que la terre est rouge, bruneou grise ? ...); Mais, s'il n'est pas coloriste, ne marque-t-il pas avec une grande netteté les mouvements et lesattitudes? Un dessinateur et un graveur ne trouveraient-ils pas dans la pièce toutes les indications dont ilspourraient avoir besoin pour représenter la scène de labour que décrit Lamartine? L'auteur, dans l'épisode desLaboureurs, est-il uniquement poète descriptif? (tour à tour poète descriptif et poète lyrique; remarquer l'alternancedes tableaux et des odes). II.

— L'analyse du morceau.

— Montrez que la division du morceau est en quelque sorte tout indiquée; Donnez untitre à chacune des parties : a) Le repos des bœufs avant le labour (premier tableau) ; b) L'ode au travail; — lepoète salue le saint mystère qui va s'accomplir ; c) Le labour : ouverture du premier sillon (second tableau); d)L'ode au premier sillon; — le poète chante la grandeur de la civilisation humaine, à laquelle donne naissance lepremier sillon; 3° Qu'est-ce qu'une ode (étymologie du mot); A quel moment du jour commence le travail du labour?(particularités qui l'indiquent); Pourquoi des rameaux sont-ils placés sur le front des boeufs? Quel aspect présente laterre quand elle a été soulevée par la charrue? Que fait la femme? Que font les enfants? Montrez que les derniersvers du second tableau rendent bien la sensation de l'effort. III.

— Le style ; — les expressions.

— Quels sont les vers qui vous paraissent les plus beaux dans cette pièce?Montrez la précision des termes (Le laboureur debout au tronc d'un chêne....

La femme et les enfants, à genouxdevant les boeufs baissant leur corne à terre, et qui leur cassent des rejets de frêne et de fougère...); Relevezquelques images, et faites-en ressortir la justesse (La terre qui, tout en s'entr'ouvrant, fume comme une chair...

Lesvilles, ruches trop pleines....

--les vaisseaux, grands alcyons...); Montrez que Lamartine sait approprier lemouvement des vers aux mouvements des personnages : L'homme presse le pas, la femme suit à peine ;Tous au bout du sillon arrivent hors d'haleine. Quel est le sens de ces expressions : les boeufs privés, - les boeufs accouplés?IV.

— La grammaire.— Indiquez la composition des mots attiédir, — déborder; Quels sont les mots de la même famille. »

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