Voyage au bout de la nuit À bord, parmi les galériens je me mis à rechercher obinson et à plusieurs reprises pendant la nuit, en plein silence, je l'appelai à haute voix.
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« tout, raide àfaire peur. On enadonc rigolé comme descornichons. Çafait drôle forcément, uneville bâtie enraideur. Maisonn’en pouvait rigolernous,duspectacle qu’àpartir ducou, àcause du froid quivenait dularge pendant cetemps-là àtravers unegrosse brume griseetrose, etrapide etpiquante à l’assaut denos pantalons etdes crevasses decette muraille, lesrues delaville, oùles nuages s’engouffraient aussiàla Voyage aubout delanuit charge duvent. Notre galère tenaitsonmince sillonjusteauras des jetées, làoù venait finiruneeaucaca, toute barbotante d’unekyrielle depetits bachots etremorqueurs avidesetcornards. Pour unmiteux, iln’est jamais biencommode de débarquer nullepartmais pour ungalérien c’estencore bienpire, surtout quelesgens d’Amérique n’aimentpasdutout les galériens quiviennent d’Europe. «C’est tousdes anarchistes »qu’ils disent. Ilsne veulent recevoir chezeuxensomme quelescurieux quileur apportent dupognon, parce que tous lesargents d’Europe, c’estdesfilsàDollar. J’aurais peut-être puessayer commed’autres l’avaient déjàréussi, de traverser leport àla nage etpuis unefoisauquai deme mettre àcrier :« Vive Dollar !Vive Dollar !» C’est untruc. Yabien desgens quisont débarqués decette façon-là etqui après çaont faitdes fortunes. C’estpassûr, ça se raconte seulement. Ilen arrive danslesrêves desbien pires encore. Moi,j’avais uneautre combinaison entête en même tempsquelafièvre. À bord delagalère ayantappris àbien compter les puces (passeulement àles attraper, maisàen faire desadditions, etdes soustractions, ensomme desstatistiques), métier délicat quin’al’air derien, mais quiconstitue beletbien unetechnique, jevoulais m’enservir. LesAméricains on peut endire cequ’on voudra, maisenfait detechnique, c’estdesconnaisseurs. Ilsaimeraient mamanière de compter lespuces jusqu’à lafolie, j’enétais certain d’avance. Çane devait pasrater selon moi. J’allais leuroffrir messervices quandtoutd’un coup ondonna l’ordre ànotre galère d’aller passer unequarantaine dans une anse d’àcôté, àl’abri, àportée devoix d’un petit village réservé, aufond d’une baietranquille, àdeux milles à l’est deNew York. Et nous demeurâmes touslàen observation pendant des semaines etdes semaines, sibien quenous yprîmes deshabitudes. Ainsichaque soiraprès lasoupe sedétachait de notre bordpourallerauvillage l’équipe delaprovision d’eau.Ilfallait quej’enfasse partie pourarriver àmes fins. Les copains savaient bienoùjecherchais àen venir mais euxçales tentait pasl’aventure. «Ilest fou, qu’ils disaient, maisilest pas dangereux. »Sur l’Infanta Combitta on bouffait pasmal, onles triquait unpeu lescopains, maispastrop, eten somme çapouvait aller.C’était duboulot moyen. Et puis sublime avantage, onles renvoyait jamaisde Voyage aubout delanuit la galère etmême queleRoi leur avait promis pourquand ilsauraient soixanteetdeux ansd’âge uneespèce depetite retraite. Cetteperspective lesrendait heureux, çaleur donnait dequoi rêver etledimanche poursesentir libres, au surplus, ilsjouaient àvoter. Pendant lessemaines qu’onnousimposa la quarantaine, ilsrugissaient tousensemble dansl’entrepont, ilss’y battaient ets’y pénétraient aussitouràtour. Etpuis enfin cequi lesempêchait des’échapper avecmoi,c’est surtout qu’ilsnevoulaient rienentendre nisavoir decette Amérique dontj’étais moiféru. Chacun sesmonstres, euxc’était l’Amérique leurbête noire. Ilscherchèrent mêmeà m’en dégoûter toutàfait. J’avais beauleurdirequejeconnaissais desgens dans cepays-là, mapetite Lolaentre autres, qui devait êtrebien riche àprésent, etpuis sans doute leRobinson quidevait s’yêtre faitune situation danslesaffaires, ils ne voulaient pasendémordre deleur aversion pourlesÉtats-Unis, deleur dégoût, deleur haine : « Tu cesseras jamaisd’êtretapé»qu’ils medisaient. Unjour j’aifait comme sij’allais aveceuxaurobinet duvillage et puis jeleur aidit que jene rentrerais pasàla galère. Salut! C’était desbons garsaufond, bientravailleurs etils m’ont bienrépété encore qu’ilsnem’approuvaient pasdutout, mais ils me souhaitèrent quandmême dubon courage etde labonne chance etbien duplaisir avecmais àleur façon. « Va !qu’ils m’ont dit.Va!Mais onteprévient encore:T’as pasdes bons goûts pourunpouilleux !C’est tafièvre quite rend dingo !T’en reviendras deton Amérique etdans unétat pirequenous !C’est tesgoûts quiteperdront !Tu veux apprendre ?T’en saisdéjà bien troppour tacondition !» J’avais beauleurrépondre quej’avais desamis dans l’endroit etqui m’attendaient. Jebafouillais. — Des amis ?qu’ils faisaient commeçaeux, desamis ?mais ilsse foutent biendetagueule tesamis !Il ya longtemps qu’ils t’ontoublié tesamis !... — Mais, jeveux voirdesAméricains moi!que j’avais beau insister. Etmême qu’ilsontdes femmes commeilyen apas ailleurs !... — Mais rentre doncavecnous ehbille !qu’ils me répondaient. C’estpaslapeine d’yaller qu’on tedit !Tu vas terendre malade pirequet’es!On vaterenseigner toutde »
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