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Biographie de Céline

Publié le 23/01/2020

Extrait du document

Avant d’aborder les difficultés de l’œuvre elle-même, nous avons à éviter quelques pièges. Le premier que nous rencontrons sur notre chemin vers les romans de Louis-Ferdinand Céline, c’est Louis-Ferdinand-Auguste Destouches. On trouvera en Annexe 1 l’essentiel de sa biographie. Or nous risquons d’être abusés non seulement parce que tous les romans de Céline sont à la première personne, mais surtout parce que les faits n’y sont jamais inventés : toutes les fictions y sont calquées sur les événements de la vie du Dr Destouches. Ainsi sont nées des légendes qu’ensuite Céline, peut-être aidé par son éditeur Denoël, a malignement accréditées. Il a fallu attendre la mort de l’écrivain pour apprendre qu’il n’avait jamais été trépané, ou que son père avait été, comme on dit, un parfait galant homme et non l’énergumène qui se déchaîne dans Mort à crédit. Notons en passant qu’il est beau, en plein XXe siècle, de tromper les biographes les plus scrupuleux et de faire fleurir à côté de soi un Louis Destouches aussi fabuleux que Thésée ou qu’Aga-memnon. .

Mais cette intrication du réel et de l’imaginaire va plus loin encore. Dans le cas de Céline les rapports de l’homme avec l’écrivain et son œuvre sont assez inhabituels. Un homme qui écrivait, au temps de Céline, tendait à dévoiler aux yeux d’autrui une part de la réalité. Mais, ce faisant, il se plaçait à un point de vue privilégié par rapport au monde, puisqu’il prétendait justement montrer à ses futurs lecteurs ce qui leur avait échappé. Il n’était plus comme tout un chacun, il n’était plus l’homme qu’il avait été avant d’écrire, car c’était aussi à ses propres yeux qu’il avait dévoilé la réalité. Aujourd’hui, il est vrai, les écrivains ne conçoivent plus l’écriture de la même manière — et il serait trop long de dire pourquoi et comment —, mais le résultat demeure. Celui qui écrit sent surgir en lui, à côté de l’homme qu’il était, un être nouveau, l’écrivain. Céline n’a jamais pu accepter ce dédoublement de soi. Louis Destouches, en commençant son roman, a dû croire assez naïvement qu’il allait dire ce qu’il avait à dire. Comme il s’apercevait qu’au fil des pages il devenait un autre, il lui a semblé sans doute qu’il était infidèle à lui-même et, par-delà, à ceux au nom de qui il voulait parler; il a dû craindre qu’il ne lui fût dès lors impossible de délivrer son «message». Au moins est-ce ainsi que j’explique la mauvaise foi de Céline homme de Lettres. Il a toujours proclamé qu’écrire est une sorte d’épiphénomène sans importance, et que son métier était la médecine; après la Seconde Guerre mondiale, il répétera qu’il n’écrit que pour gagner de l’argent puisqu’il ne peut plus exercer son métier, faute de clientèle. Tout cela semble prouver que Céline refusait de se considérer comme un écrivain.

Cependant, par une démarche contraire, Céline, à partir du moment où sa première œuvre a été publiée, a cherché désespérément à mettre en accord sa vie avec ses écrits. Autrefois Jean-Jacques Rousseau avait eu la même impossible exigence. Tandis que, dans les œuvres de Céline, Ferdinand Bardamu glisse vers Ferdinand, puis vers Céline et enfin vers le Dr Destouches, comme si le romancier essayait de se récupérer1, le personnage de Ferdinand Bardamu ronge lentement son créateur. Les curieux qui étaient allés à Médan en 1933 pour voir le monstre que ne pouvait manquer d’être l’auteur du Voyage au bout de la nuit avaient été déçus, car ils avaient trouvé un grand garçon habillé comme tout le monde, et même élégamment ; d’ailleurs nous savons maintenant que l’appartement qu’il habitait rue Lepic était bourgeoisement tenu, sans désordre ni bohème. Vingt ans plus tard Céline

« avait échappé.

Il n'était plus comme tout un chacun, il n'était plus l'homme qu'il avait été avant d'écrire, car c'était aussi à ses propres yeux qu'il avait dévoilé la réalité.

Aujourd'hui, il est vrai, les écrivains ne conçoivent plus l'écriture de la même manière - et ii serait trop long de dire pourquoi et com­ ment -, mais le résultat demeure.

Celui qui écrit sent surgir en lui, à côté de l'homme qu'il était, un être nouveau, !'écrivain.

Céline n'a jamais pu accepter ce dédoublement de soi.

Louis Destouches, en commençant son roman, a dû croire assez naïvement qu'il allait dire ce qu'il avait à dire.

Comme il s'apercevait qu'au fil des pages il devenait un autre, il lui a semblé sans doute qu'il était infidèle à lui-même et, par-delà, à ceux au nom de qui il voulait parler; il a dû craindre qu'il ne lui fût dès lors impossible de délivrer son «message».

Au moins est-ce ainsi que j'explique la mauvaise foi de Céline homme de Lettres.

Il a toujours proclamé qu'écrire est une sorte d'épiphénomène sans importance, et que son métier était la médecine; après la Seconde Guerre mondiale, il répétera qu'il n'écrit que pour gagner de l'argent puisqu'il ne peut plus exercer son métier, faute de clientèle.

Tout cela semble prouver que Céline refusait de se considérer comme un écrivain.

Cependant, par une démarche contraire, Céline, à partir du moment où sa première œuvre a été publiée, a cherché désespérément à mettre en accord sa vie avec ses écrits.

Autrefois Jean-Jacques Rousseau avait eu la même impossible exigence.

Tandis que, dans les œuvres de Céline, Ferdinand Bardamu glisse vers Ferdinand, puis vers Céline et enfin vers le Dr Destouches, comme si le romancier essayait de se récupérer 1, le personnage de Ferdinand Bardamu ronge lentement son créateur.

Les curieux qui étaient allés à Médan en 1933 pour voir le monstre que ne pouvait manquer d'être l'auteur du Voyage au bout de la nuit avaient été déçus, car ils avaient trouvé un grand garçon habillé comme tout le monde, et même élégamment; d'ailleurs nous savons maintenant que l'appartement qu'il habitait rue Lepic était bourgeoisement tenu, sans désordre ni bohème.

Vingt ans plus tard Céline 1.

Ph.

Ahneras, L'onomastique caricaturale de Louis-Ferdinand Céline, m Revue internationale d'onomastique, juil!.

1971, p.

161-179.

-7-. »

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